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Motocultor 2023 - Jour 4 Carhaix, 2023

Le début de cette quatrième journée qui commence à tirer dans les pattes, se fait avec les japonais de Church Of Misery qu'on avait pas revus dans le coin depuis un moment et force est de constater que c’est toujours autant le même kiff d’autant plus lorsque le groupe bénéficie d’un son bien épais, bien rond et chaud et précis comme c’est le cas en ce début d’après-midi. L’heure est parfaite pour apprécier leur Stoner / Doom avec le soleil de Carhaix qui commence à taper derrière la nuque. Le nouveau line-up semble aussi avoir redynamisé le groupe sur scène. Les mimiques de Kazuhiro Aseada sont captivantes tout comme il est particulièrement en voix, le nouveau guitariste Fumiya Hattori apporte plus d’épaisseur aux compositions  et il est toujours aussi cool et satisfaisant de voir Tatsu Mikami, seul membre d’origine du projet, porter sa basse plus bas que terre (plus bas que Fieldy de Korn, c’est dire). Church Of Misery est donc en très grand forme après presque trente ans de carrière - leur dernier album, Born Under A Mad Sign, qui vient de de sortir le prouve - et cela fait plaisir à voir et à entendre !

On continue sur scène journée Doom dans sa version la plus lente, la plus morose aussi avec le duo Bell Witch et son Funeral Doom Metal plombant. Le duo impressionne même avant d’avoir joué la moindre note avec cette basse six cordes (?!) qui semble venir d’une autre planète et cette batterie cerclée de nombreux toms et d’un gong de colosse ! Lorsque les deux musiciens se mettent à jouer à l’unisson on est frappé par la profondeur considérable de leur son et par son étonnante clarté. Une lente marche funèbre se déroule sous nos yeux et on se retrouve happés, comme prisonniers de leur musique pourtant très loin d’être accessible. Ce qui se déploie de la musique de Bell Witch est assez incroyable et c’est à la fin de leur set que l’on se rend compte qui s’est écoulé quarante minutes pour nous alors qu’on avait l’impression qu’ils venaient à peine de commencer. Ils ont joué des parties de leur dernier album, Future's Shadow Part 1: The Clandestine Gate, composé d’une seule même piste (en amputant le début et la fin), mais honnêtement on aurait bien pris l’intégralité du disque (1h20) tellement ça nous a semblé court.



L’attente entre la fin des balances et le début du set de Landmvrks est comblée par un bref interlude avec la reprise de Maniac par Carpenter Brut, avant goût de la soirée à venir. Mettons… C’est pas comme si on se la coltinait à chaque festival, Hellfest, Motocultor, Macumba, depuis six ans ! Les marseillais ouvrent avec deux titres tirés de Lost In Waves (2021), leur dernier - et très solide - effort en date, pour enchaîner sans tergiverser avec Blistering : des slams de l’entrée du chapiteau jusqu’à la scène, parfois par dizaines, de quoi rendre la sécurité débordée. Pour couronner le tout, nous aurons Arthur Alternatif sautant des planches directement dans le pit… Sur un croco gonflable, eh ouais. Vous pouvez retrouver cet extrait en intro de son vlog.

Le quintet canadien d'Archspire débarque sur la Supositor Stage sur un audio précisant que le set du groupe est annulé ; à la place, vous aurez "cinq vieux losers alcooliques et dégarnis". Hilarité générale. En même temps, on sait ce qui nous attend quand on va voir Archspire : on vient pour le Tech Death, on reste pour la beauferie. Entre les présentations de chacun des membres avec des informations un poil trop personnelles - du statut marital pour l’un, jusqu’au refus de pratiquer la sodomie avec sa moitié pour l’autre - et, plus tard, une pseudo-lentille de contact perdue pour la "retrouver" et montrer son cul en se baissant… Nous aurons droit à la fameuse et tant attendue partie de Twister, éternel running gag de la bande à Oli Peters : "Right foot, yellow… left hand, blue… Oh no, it landed on the WALL OF DEATH, MOTHERFUCKERS !". Simple, efficace.

On revient sur du Doom un peu plus tranquille avec Messa qui n’a eu de cesse de nous éblouir de concerts en concerts tout comme les italien.ne.s ont vu leur réputation grandir de façon assez folle ces dernières années, ce qui est totalement mérité. Et encore plus quand on voit ce magnifique set qu’ils nous ont servi. Comme souvent, leur son est sec, précis, chaleureux, la voix de Sara impeccable et vecteur d’émotion. On les voit et on se dit : “qu’elle classe” ! Quelle meilleure manière de représenter un Doom élégant, coloré de diverses nuances de noir et en tout point, assez unique. Leur concert est quasi-exclusivement axé autour du dernier album, Close (2022) avec les meilleurs titres que sont Dark Horse, Pilgrim ou encore Suspended ou encore Rubedo en parfaite conclusion de set. Que dire sinon qu’une fois de plus c’était superbe, touchant et beau et qu’il faut aller les voir à chaque fois qu’ils viennent près de chez vous.



Alors que ça commence à tirer sévère physiquement après quatre jours, que les odeurs de pisse chaude émanent des quatre coins du site (merci les orgas pour le manque de chiottes), rien de tel que de se réfugier sous la Massey chérie pour tenter de prendre un maximum de plaisir devant Cave In, groupe que personnellement j’attendais le plus de voir. Comme d’habitude le son est fantastique, et les Bostoniens ont l’air de s’éclater, jouant évidemment pas mal de titres de leur dernière masterclass Heavy Pendulum, mais aussi, ô joie, Jupiter tiré de l’album du même nom, comme Innuendo And Out The Other. Deux belles surprises qui enjaillent forcément les plus vieux fans du groupe. Mais l’enchaînement Careless Offering et Blinded By Ablaze, avec un Stephen Brodsky incroyable, fut vraiment le clou d’un spectacle bien trop court, et frustrant du fait des conditions physiques du moment. On tâchera de voir la bête en salle à l’occasion. D’ailleurs Cave In se produisait deux jours après le Motocultor au Ferrailleur à Nantes, mais mon corps m’a dit "nein", mon corps est un gros bâtard fragile.

En dépit de plusieurs reports de dates et conflits d’agenda personnel, c’est non sans contentement que j’arrive enfin à voir de quoi Soen est capable en live. En un mot ? Net. Impeccable. En plusieurs ? Le set de la bande à Ekelöf fut d’une propreté sans faille. Pas besoin de pyrotechnie à foison, de décoration kitch à la Behemoth, un backdrop sobre fait très bien l’affaire. Les titres s’enchaînent avec peu de de temps morts, c’est fluide, ça pioche dans presque tous les opus à leur actif - Tellurian (2014) manque à l’appel et je pense qu’ils ne voulaient pas spoiler de trop Memorial (2023), pas encore sorti à l’heure du festival. Hâte de revoir les suédois dans un contexte plus intimiste lors de leur prochaine tournée !



Converge en festival, surtout en plein air, c’est pas toujours la folie escomptée, son Hardcore / Metal unique, écorché vif, étant plus à l’aise en salle, on s’attendait pas forcément à une dinguerie. Mais cette fois la correction fut quasi-parfaite, malgré des souvenirs un peu brumeux, le ressenti était à la hauteur avec surtout un son énorme, qui permettait d’entendre distinctement chaque instrument. C’était aussi l’occasion de revoir Nate Newton à la basse, qui jouait avec les copains de Cave In juste avant, toujours au top, comme Kurt Ballou imperturbable, exécutant les riffs pétés du casque de Concubine, Axe To Fall ou Cutter avec nonchalance et précision. Ben Koller et son sourire légendaire continue à mettre en PLS la plupart des batteurs du genre, voire au-delà, et même Jacob Bannon affiche une voix plus puissante et maîtrisée qu’à l’accoutumée. Sans doute le concert de festival le plus abouti du groupe que ma personne fatiguée ait pu voir.

Il est temps de se terminer en beauté avec le Mort Metal de Dying Fetus, valeur sûre de brutalisation et de groove tractopelle. Je m'étais déjà fait rouler dessus en 2016 à ce même Motocultor, et rebelote, à la différence près que cette fois je me trouve bien moins frais physiquement. Autant dire que j’ai rien compris à ce qui m’arrivait, j’ai pris quelques coups, suis tombé, on m’a relevé, me suis éloigné pour distinguer mollement les morceaux Grotesque Impalement ou From Womb To Waste, puis j’ai fini par lâcher l’affaire et reposer mon être meurtri, limite souffreteux après quatre jours très (trop ?) intenses.

Changement de scène, changement d’ambiance : les tractopelles sont remplacés par les carrousels et les chevaux à bascule d’Avatar pour un thème circassien haut en couleur. Je ne les avais pas revus depuis leur passage à feu la Flèche d’Or en novembre 2014. C'était un concert mémorable d’ailleurs, c’est à partir de ce moment qu’on a pu constater un réel step-up dans leur musique. Bref, il est temps de se mettre à jour ! On commence en douceur avec Chimp Mosh Pit et Dance Devil Dance du dernier album éponyme, suivi de Bloody Angel et Puppet Show (Hail The Apocalypse, 2014). Rapidement, une vraie prestation scénique se met en place : Johannes Eckerström (chant) ramène un trombone, puis sur Colossus, le groupe entier se place au bord des planches, en ligne - même le batteur, qui jouera sur un mini-kit sans siège ! Le frontman aura son moment seul pour interpréter avec brio une version piano de Tower, piano qui paraît ridiculement petit face à son 1m93. Après quelques blagues pour annoncer le rappel et un échange chaleureux avec la fosse, Avatar nous quitte sur un de leur titre phare, évidemment, Hail The Apocalypse. Certains partent se coucher avec un sourire de Joker aux lèvres, mais la journée n’est pas finie, les plus motivés resteront shaker leurs booties en compagnie des charpentiers.



Cela fait plusieurs fois que je vois Eyehategod en concert, exclusivement en festival pour le coup et que ce soit en petite configuration comme au Rock In Bourlon ou dans un Desertfest bien plus grand, la sensation de se faire casser la gueule est là même. Mike Williams a l’air complètement possédé ce soir, comme s’il avait subitement des résurgences de tout ce qu’il a consommé par le passé (à moins qu’il ait rechuté ?) et saluons Brian Patton nouvel arrivé en second guitariste live et qui vient épauler d’une fort belle manière toute la lourdeur et l’agressivité du jeu de Jimmy Bower, indétrônable depuis les débuts du groupe. Dans tous les cas ça déroule et si l’ouverture sur Take As Needed For Pain est plombante et un peu trompeuse, le reste du set sera plutôt axé sur les morceaux bagarre de la formation de Nouvelle-Orléans, comprenez par là les titres rapides aux dimensions plus Hardcore / Stoner que véritablement Doom / Sludge. Mentionnons Sisterfucker (Part I), Methamphetamine ou encore Medicine Noose. Et quel plaisir qu'ils jouent New Orleans Is The New Vietnam tellement cette piste est accrocheuse et décrocherait la nuque de n'importe qui. Eyehategod en live c’était encore une fois super cool et il en sera sans doute de même la prochaine fois qu’on recroise leur route.

Quitte à perdre quelques neurones restants, autant aller voir Carpenter Brut qui semble cristalliser toutes les dernières ressources d’énergie (enfin surtout d’alcool ou autre) des festivalier.e.s avec ce qu’il faut de ballon de plage, de capotes gonflées et de gens qui déambulent dans tous les sens. Bref c’est assez beauf, finalement très dans l’esprit fin de festival Metal et Franck Hueso ne peut pas s’empêcher de hausser les bras toutes les trente secondes, tel un David Guetta de la Synthwave, en attendant les réactions de la foule. En terme d’ambiance c’est un peu la foire et ce n’est pas du tout notre came, surtout si l’on compare à un autre grand de la scène Synthwave française, Perturbator, à la musique plus obscure, plus variée et plus mesurée dans l’attitude en live. Le set, baigné d’une lumière rouge sombre, manque tout de même de précision, la faute à des basses et un kick trop présent qui masquent en partie les notes de synthé. Ceci étant, l'enchaînement des tubes est cool Roller Mobster, Disco Zombi Italia, Turbo Killer et bien évidemment l'incontournable reprise Maniac de Michael Sembello et finalement c’est le genre de conclusion au festival que les gens souhaitent et dans l’ensemble, ils ont eu ce qu’ils souhaitaient.



De notre on préféra finir dans les étoiles avec le très beau set planant du groupe de Heavy Psyché / Stoner Elder qui nous réserve une setlist étonnamment bariolée à travers quatre morceaux issus de leurs quatre derniers albums et ne faisant pas la mainmise (ce qui est d’autant plus cool) sur des titres très longs comme le fabuleux Lore ou Merged In Dreams - Ne Plus Ultra qui totalisent à eux deux une demi-heure de musique, de riffs Stoner très efficaces, de belles mélodies et d’un côté très solaire. Les arpèges qu’égraine le guitariste Nicholas DiSalvo (écoutez absolument son projet solo Delving) vont dans ce sens et il ya chez Elder cette manière de habiller doser entre les riffs grassouillets qu’on adore, de subtiles arrangements délicats qui pourraient venir du Post-Rock et cet esprit jam / psychédélique qui nous envoie dans la stratosphère. Concernant la setlist on trouve également le tube Sanctuary qui ne peut presque pas être évité et le très chouette Halcyon pour conclure cette heure passée en orbite. On ressort de cette heure de concert d’Elder avec le sourire, un concert vraiment parfait en terme d’émotion et de bon feeling pour finir cette quatorzième édition du Motocultor.


Nous aurions pu conclure sur ce magnifique dernier concert, malgré tout, plusieurs ombres planent sur le site de Kerampuilh. Nous l’évoquions en introduction sur la première journée il y a encore des problèmes d’organisation qui ternissent l’expérience du festival. S’il y a du mieux pour accéder à de la nourriture et au bar avec rarement plus de quelques minutes d’attente, sur d’autres points c’est encore pas ça. L’attente pour entrer sur le site notamment le premier jour est anormale, on ne peut pas demander à des personnes qui ont payé plus de 160€ leur festival de poireauter parfois pendant deux heures pour profiter des concerts. Le prix des stands de nourriture est également très cher, tout comme le bar dont les commentaires ne manquent pas de souligner la qualité discutable de la 8.6, tout comme son haut prix et les softs sont à des tarifs défiant toute envie de boire autre chose (6€ les 50cl) et le manque de points d’eau. Ça manque cruellement de toilettes et d’espace ou les positionner si bien que certains endroits ressembleront à de véritables pissotières avec les odeurs que cela comporte. Le manque de bénévoles (à l’entrée par exemple) et encore plus grave de sécurité se fait ressentir. C’est très problématique sur le site d’une part, il manque des patrouilles pour vérifier si les gens vont bien, pour éviter les débordements et les mauvais comportements et c’est encore pire pour les campings laissés sans surveillance où l’on imagine sans trop mal tout ce qui peut se passer en termes d’agressions avec un public fortement alcoolisé.



Et on en vient à un point très grave, c’est le nombre important de témoignages de femmes qui ont été victimes de violences sexistes et sexuelles, relayées par le compte instagram Balance Ta Scène. On ne compte pas les insultes, remarques beaufs, le nombre d’homme qui se sentent totalement libre de montrer leurs pénis, d’emmerder les festivalières, de verser des drogues dans les verres à leur insu et bien pire encore. On ne peut pas tenir la responsabilité du Motocultor sur le fait qu’il y ai des agresseurs sur leur festival, mais le fait qu’ils prennent les VSS avec si peu de considération et le si peu de moyen mis en œuvre pour lutter contre ça (encore une fois le manque de sécurité, de patrouilles de préventions, de stands / safe place) est de leur responsabilité. Le Motocultor garde cette imagerie un peu beauf / alcool / fête, de même que proposer de la 8.6 en bière ou un énorme stand de poppers à l’espace merchandising, ne participe pas vraiment à faire changer cela ni à proposer un lieu de fête safe pour toutes et tous. 

Mentionnons de même que le festival ne semble pas avoir de problème avec le fait d’inviter un stand de Black Metal problématique comme Antiq Records, que les gens qui portent des t-shirts et patchs de NSBM semblent aussi libres de circuler en toute décontraction dans le festival et que faire jouer un groupe comme Boisson Divine avec ses accointances avec l’extrême droite est tout à fait OK. Mais à ce niveau-là, on n’est plus à une surprise près. Le Motocultor s’est fendu d’un communiqué plutôt tiède sur tous ces reproches fait à l’organisation et semble se dédouaner de ses responsabilités. On finira sur le fait qu’on apprécie que des groupes comme Worst Doubt ou Birds In Row prennent position sur la parole des victimes, mais on aimerait que ça soit aussi de même pour le Motocultor et qu’ils prennent conscience de tout cela et de toutes les critiques qui lui sont adressées depuis plusieurs éditions pour la suite.

Top 3 :
Pentacle : Converge, Messa, Cave In
Anne-Laure : Messa, Cave In, Bell Witch
Oona : Soen, Archspire, Elder
Tang : Converge, Cave In, Dying Fetus


Metalorgie Team (Septembre 2023)

Toutes les photos du jour 4 par Anne-Laure Deylaud sont à voir par ici.

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