Ne Obliviscaris, Persefone, The Omnific Petit Bain, Paris

Dimanche 21 mai, 17h15 ; la file d’attente s’allonge à vue d’œil devant cette salle flottante, tandis que les crissements des passerelles métalliques rythment les allées et venues du staff et des roadies. Quelques patreons chanceux échangent sur le soundcheck de Persefone auquel ils ont pu assister.

Après un petit loupé de l’intro, les hostilités (gentillettes, cependant) sont lancées par The Omnific, trio australien composé d’un batteur et deux bassistes ; surprenant quand on ne sait pas à quoi s’attendre. Leur djent instrumental s’impose comme une évidence au vu de leurs virtuosités respectives. Matthew Fackrell et Toby Peterson se partagent aussi bien les parties lead que les parties rythmiques, et si leur jeu n’est pas sans rappeler celui de Steve Tréguier (The Dali Thundering Concept), ils n’ont rien à lui envier !

Le batteur, quant à lui, est tout ce qu’on peut imaginer d’un australien : le starter pack “mulet peroxydé”, chemise à fleur de surfeur, associés à un bagou blagueur, une pointe de nonchalance mais non dénuée de sympathie. C’est d’ailleurs lui qui prendra les initiatives pour parler au public. « Sing along if you know the words » provoque plusieurs esclaffades.

Le groupe se concentrera sur leur plus récent opus, Escapades (2021), un peu répétitif à mon goût mais qui constitue une très bonne mise en bouche, et je pense une bonne découverte pour beaucoup.

 

Pendant l’entracte, la salle se remplit, et ça se dispute les meilleures places. Manifestement, on ne bouscule pas que pour la tête d’affiche ! C’est maintenant au tour des Andorrans (oui oui, ça se dit comme ça) de Persefone, et leur Death Progressif beaucoup plus raccord avec les collègues (et manager) de Ne Obliviscaris. Ils n’ont pas eu le temps de nous manquer depuis leur dernier passage en octobre 2022 avec Obscura. Petit point sur le line-up : à l’instar de la tournée précédente, le chanteur growl est absent et la suppléance est assurée par Danny Rodriguez Flys (Eternal Storm). Toni Mestre (basse), absent lui aussi, n’est pas remplacé par choix. “On peut remplacer un bassiste, on ne peut pas remplacer un Toni Mestre”, comme ils disent. Qu’à cela ne tienne, les samples seront amplement suffisants... Et puis, entre les cinq musiciens, la batterie, le clavier, ça fait un peu plus de place sur une scène déjà restreinte par le set-up du dernier acte. Chacun se “fist-bump”, ils sont prêts, nous aussi.


Flying Sea Dragons, Mind as Universe, The Great Reality, les trois pistes tirées de Spiritual Migration (2013) sont plus efficaces les unes que les autres pour lancer des pogos sans ménagement d’entrée de jeu.

Le dernier effort en date n’est toujours pas honoré. Garderait-on le meilleur pour la fin ? Oui, il fallait juste demander ! Mais avant, prenons le temps d’apprécier les samples de Paul Masvidal (Cynic) sur l’excellent Living Waves (Aathma, 2017) Ce n’est qu’au 6ème morceau qu’on peut enfin entendre l’ouverture de Metanoia (2022) avec Katabasis. Personnellement, je n’aurais pas été contre un sample d’Einar Solberg (Leprous) sur le titre éponyme. La fosse obéit à Danny au doigt et au doigt : il suggère un circle pit, ils obtempèrent instantanément. Filipe Baldaia (le guitariste moustachu) prendra même le risque de descendre dans le pit pour la fin de Merkabah.

Persefone clôturera avec l’inévitable, le grandiose The Majestic of Gaia. La légende veut que Carlos Lozano (le guitariste chauve), à défaut d’avoir les tablatures adéquates, ait dû réapprendre son propre solo avec une cover YouTube !

 

Le deuxième entracte nous fait profiter de Chokehold, du dernier Sleep Token sorti deux jours plus tôt. Voyant notre hype et chanter à tue-tête, quelqu’un viendra même nous solliciter pour avoir des informations.

 

L’excitation est à son comble, les sifflements fusent ; les die-hard fans de Ne Obliviscaris ne tiennent plus. Après une ouverture pour Ihsahn en 2018, ils traversent à nouveau le globe, cette fois en position de force. Xenoyr (chant guttural) ayant dû se retirer in extremis de la tournée, c’est James Dorton (Black Crown Initiate, et depuis peu The Faceless) qui le remplace au pied levé, et ce avec brio. A mon humble avis, ils n’auraient pas pû faire un meilleur choix, tant son timbre est similaire.

Pour présenter Equus (Exul, 2023) Tim Charles (violon, chant) se servira de Google Traduction, running gag qui perdurera tout le set. On remarque sur Misericorde I et II que James reste en retrait - peut-être une forme d’humilité - et n’occupe la scène que si nécessaire, veillant à ne pas gêner ses camarades par sa stature imposante. Le public profite d’un moment de répit avec Forget Not (Portal of I, 2012), incontournable balade riche en émotions qui renoue sur la deuxième moitié du morceau avec le standard énervé qu’on leur connaît. Les téléphones sont rangés à la demande du frontman pour plus d’intimité (vous vous en doutez, il y en a toujours un ou deux plus subversifs qui tiennent à filmer l’instant, ils seront vite repérés et désapprouvés par Tim).

A l’issue du titre, le violoniste relève que le groupe est composé d'autant de membres australien que français, et présente Benjamin Baret, dans les rangs depuis déjà 15 ans, et Kévin Paradis (Benighted) reprenant le flambeau et les baguettes après le départ récent de Daniel Presland. Benjamin se sert de cette pause pour caser quelques mots en français, et quitte à saluer les français du line up, « applaudissez ma mère qui est venue de Bordeaux pour me voir ! MA-MAN, MA-MAN ! ». Ses collègues assistent à la scène avec amusement mais incompréhension. “On comprend rien mais ça a l’air drôle !”, ce à quoi James répond “That’s a secret between him and everyone else”.

Un dernier titre d’Exul pour la route, le semblant de départ précédant le rappel, et l’ultime, l’épique And Plague Flowers the Kaleidoscope se charge de nous achever à en ébranler la structure du bateau.

 

Les occasions sont rares de voir une affiche démontrant un aussi bon équilibre entre cohérence et différences. Il ne se fait aucun doute que les Australiens de Ne Obliviscaris savent s’entourer d’artistes talentueux, tant en support qu’en remplacement, et délivrer un show en conséquence. Si vous êtes amateurs de Death, de Progressif, de violon (ou, à défaut, que vous n’avez rien contre les crin-crins), c’est un groupe à voir sur scène au moins une fois.

OonaInked (Juin 2023)

Merci à Garmonbozia !

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Commentaires

davbassLe Vendredi 02 juin 2023 à 04H19

Persefone est absolument génial