Daran + Guilhem Valayé Paris - Petit Bain - 10/04/18

Cela fait maintenant près de 25 ans que j’attends de voir Daran en concert. Au milieu des années 90, le succès fulgurant de Dormir dehors avait propulsé le compositeur-interprète sur le devant d’une scène qu’il semblait pourtant vouloir déjà fuir. Retombé dans un certain anonymat au début des années 2000, malgré des collaborations avec de grands noms de la chanson française, Daran a cependant continué, souvent à contre-courant, à façonner une discographie sincère et inspirée. Racontant avec une fausse naïveté les moments les plus banals de notre quotidien et célébrant l’humanité et la valeur des incompris et des exclus, il continue aujourd’hui, même installé au Canada, à faire le bonheur de ses fans fidèles. Ceux-ci sont nombreux, ce mardi soir, à avoir embarqué dans la salle qui flotte au pied de la grande bibliothèque parisienne.

Dans une veine similaire à celle de DaranGuilhem Valayé ouvre la soirée. C’est en me renseignant sur lui après le concert que j’apprendrai que celui-ci est un ancien candidat de l’émission The Voice. Seul à la guitare, il nous propose une demi-heure de belle facture, intime, lors de laquelle il parvient à captiver le public de Petit Bain grâce à une belle présence et des morceaux marqués par une « poésie ordinaire » parfaitement dans le ton de ce qui nous attend ensuite.

Arrivent ensuite l’homme du jour et ses musiciens. Exilé au Québec depuis le début de la décennie, il semble toutefois particulièrement apprécier ses retours en France et c’est avec un plaisir communicatif que le groupe attaque l’intégralité d’Endorphine, le dernier album de Daran. Entre chronique sociale, satire et utopie, ces morceaux nous plongent dans un réalisme à la fois inconfortable et rassurant. Les choses vont mal, mais nous ne sommes pas seuls pour y faire face. Daran ne veut cependant pas se faire donneur de leçons, et les textes de Pierre-Yves Lebert auscultent aussi bien la froideur et la cruauté de notre société que la douceur de nos rêves.

Le son est parfait, le groupe en place, Daran chante avec une justesse et un engagement bluffants… L’Endorphine finit par prendre le contrôle de notre système nerveux et, quand la salle tangue en raison des remous du fleuve, l'impression d'être ailleurs n'en est que plus forte. La beauté de Dur à cuire et d’Elle dit, la hargne de Pauvre ça rime à rien, la douleur d’Halima… Les titres s’enchaînent avec grâce et intensité et les 50 minutes de l’album, qui semblent passer en un clignement de paupière, sont conclues par le superbe Ici (« Pourtant on se prend souvent à rêver, qu’on pourrait peut-être un jour trouver, dans ce tas de merde à nos pieds, de quoi redémarrer ») et l’entraînant Je repars.

La deuxième partie du concert est consacrée aux « vieilleries » et fait un détour par Huit barré (Trous noirs, En bas de chez moi, l’incontournable Dormir dehors), Déménagé et Le monde perdu. Le rappel, où Daran et son guitariste viennent nous proposer l’émouvante version acoustique d’Une sorte d’église, met un point final à une soirée envoutante. Une nouvelle preuve du talent d’un artiste précieux, dont on attend déjà avec impatience le prochain retour au bercail.


Setlist
Dur à cuire
Elle dit
Pauvre ça rime à rien
Halima
Tout tout seul
Horizon
Une plage sans chien
Ici
Je repars
--------------
Déménagé
Trous noirs
Léger
L’Exil
Dormir dehors
En bas de chez moi
---------------
Rappel
Une sorte d’église

Chris (Mai 2018)

Un grand merci à Frédéric Petit pour les photos.

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Commentaires

autourdebrunoLe Lundi 14 mai 2018 à 21H29

Super, merci pour ton live report, ça fait plaisir de lire des gens qui aiment Daran, j'ai l'impression d’être parfois un alien.