Swans et Anna Von Hausswolff le Trabendo, Paris, le 9 novembre 2016

Le Trabendo accueillait le 9 novembre le groupe dirigé par le charismatique et (parfois) colérique Michael Gira, les Swans ainsi que Anna Von Hausswolff. Retour sur une soirée au cours de laquelle beauté et brutalité se sont côtoyées. 



Plongée dans l'obscurité apaisante, Anna Von Hausswolff va interpréter sa musique simplement et humblement. Accompagnée de quelques musiciens pour l'occasion, celle que l'on comparera forcément à Chelsea Wolfe, offre une prestation marquée par la grâce, à fleur de peau. Le Trabendo ne s'y est pas trompé puisqu'une bonne partie du public est présente alors que les premières notes résonnent à peine. Il faut dire que la suédoise se fait depuis quelques années son trou dans la scène des musiques sombres grâce à son talent et ses œuvres, à la limite de la Pop, du Drone et de la musique Expérimentale. Le guitariste Kristof Hahn vient d'ailleurs prêter main forte au backing band pour un morceau, preuve que la place de la musicienne en tant que première partie des Swans n'est pas une simple affaire marketing mais bien un encouragement de la part des vétérans. Pourtant, à la vue des quarante minutes de spectacle maîtrisées d'une main de maître, on se demande bien si Anna Von Hausswolff en a bien besoin... Intimiste, évocatrice et triste, une première partie à vous glacer le sang avant la tempête que seront les Swans


Parlons-en justement de l'orage Swans, puisque cela fait plusieurs années que je n'ai pas vu le groupe en live et, ne me tenant pas particulièrement au courant des évolutions du line up, je suis tout d'abord surpris de voir un claviériste s'installer à la place qu'occupait jadis l’impressionnant amas de percussions et d'instruments divers manipulés par l'encore plus impressionnant Thor Harris.
Evolution donc mais pas de révolution ce soir :  les Swans vont jouer longtemps (plus de 2H30), fort et Michael Gira dirige toujours ses compères afin de faire évoluer ses compositions. Ces dernières lorgnent d'ailleurs de plus en plus vers le territoire de la No Wave de Glenn Branca et du Krautrock puisqu'elles s'étirent sur des durées impressionnantes, frôlant souvent la demi heure. Un motif simple sert comme à l’accoutumé de base à la construction de chaque morceau, se répétant inlassablement avant que l'explosion ne survienne. Rassurez-vous cependant, si les Swans semblent désormais être devenus une version plus hargneuse de Godspeed You! Black Emperor, ils n'ont pas perdu pour autant leur amour pour les rythmiques appuyées. Le groupe en a d'ailleurs profité pour rappeler à chaque personne présente dans la salle à quel point le Post Metal et Godflesh lui devaient énormément à plusieurs reprises. 
Pourtant, ce qui impressionne le plus ce soir n'est ni le volume sonore, ni la puissance dégagée par ces musiciens dépassant parfois les 60 ans d'âge mais bien la spontanéité avec laquelle chaque titre est composé. Un élément bien nécessaire d'ailleurs pour que le public comprenne ce qu'il se passe mais surtout qu'il parvienne à apprécier une telle performance compte tenu de sa durée. Le groupe a beau jouer depuis quasiment 5 minutes la même chose, chacun semble savoir exactement à quel moment tout cela va exploser et ce grâce à la maîtrise des musiciens mais aussi à la dimension physique que chaque concert des Swans comporte. 
Les artistes transpirent, Michael Gira plus que nul autre, chacun donnant de sa personne. Les regards sur les planches sont sans équivoque quant à ce qui est en train de se passer et c'est comme s'il était impossible pour eux de ne pas joindre musique et acte. Une fois encore, le maître à penser capte tous les regards, du public comme des présents sur scène, accompagnant chaque envolée bruitiste de son propre corps, lançant son pied, agitant les mains, balayant son regard pour faire comprendre à chacun la place qui doit être la sienne à ce moment précis. Plus qu'un concert, il s'agit là d'une performance totale au cours de laquelle la résistance de chacun est mise à l'épreuve par une musique répétitive, hargneuse, exigeante. Cette inscription sur la longue durée et dans la posture scénique des musiciens en dit long quant à la vision que les Swans ont de leur art. 

Raikage (Décembre 2016)

Un immense merci à Kongfuzi, My Favorite et le Trabendo. 

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