Oathbreaker + WIFE Petit Bain (20/11/2016)

La sortie de leur troisième album marque l'entrée dans la cour des grands pour Oathbreaker. Après plusieurs passages remarqués en ouverture d'Amenra ou en remplacement d'une annulation au Hellfest 2015, c'était chose méritée de les retrouver en tête d'affiche d'une tournée européenne. Avec le projet electro de James Kelly (Altar of Plagues) en première partie, cette soirée somme toute éclectique promettait d'être intéressante.

WIFE

Dans le metal, il y a parfois des reconversions qui font hausser les sourcils. Un peu comme Nuclear Holocausto l'avait fait avec Beherit dans les années 90, James Kelly est passé du plus sombre des black metal à la musique électronique, qui comprend elle aussi sa part d'obscurité, d'ailleurs. A l'écoute, on devine que WIFE a été inspiré par les grands noms du genre, le plus facile à épingler étant (NDLR : par paresse ? Les deux étant Irlandais.) Aphex Twin. Cette influence se ressent d'ailleurs moins au niveau des rythmes que dans la recherche de textures sonores bien particulières et travaillées, qu'on pouvait notamment entendre sur les deux premiers Selected Ambiant Works et Richard D. James.

Le travail de WIFE se fait remarquer par des compositions à la structure protéiforme, à la fois dans leur dynamique et les changements de rythme.  Les beats, sans être révolutionnaires, passent vraiment bien sur scène. Une bonne partie du public semble peu concerné, gageons qu'ils auraient préféré quelque chose de plus métallique. Pourtant cette première partie électronique a le mérite d'être comme un bol d'air frais avant la furie du set d'Oathbreaker. Parfois, Kelly ajoute sa voix sur les beats, avec de multiples effets qui lui donnent un aspect à la fois robotique et éthéré. Le résultat est plutôt probant, en tout cas.  Bien sûr, il sera toujours difficile pour les fans d'Altar of Plagues de digérer leur séparation, mais il reste encourageant de voir James Kelly continuer sur de bons rails.

Oathbreaker

Si Rheia en a séduit certains, il n'en a pas moins divisé, parce qu'il marquait une nette rupture avec le passé du groupe ancré dans le crust/hardcore. Ce changement se manifeste aussi dans le personnel, avec Gilles Demolder rejoignant Lennart Bossu à la guitare et un musicien de session prenant la quatre cordes pour le live. Par ailleurs, le batteur d'origine Ivo Debrabandere a cédé sa place à Wim Sepproc de Wiegedood.  Leur changement de style est encore plus palpable sur scène, et cela dès "10:56", l'introduction de l'album, avec un joli a cappella de Caro. La chanteuse s'y révèle à l'aise et surtout juste, ce qui restait une grosse interrogation en ce qui concerne la scène, puisqu'elle se contentait jusqu'à présent de hurler dans Oathbreaker. L'enchaînement sur "Second Son of R." fonctionne bien, comme sur album, mais un son assez approximatif vient d'ores et déjà grever le concert. Une fois encore, l'ingé-son a mis les fréquences basses trop en avant, faisant que la grosse caisse et la basse gobent les guitares sur les parties extrêmes. En tendant l'oreille, on perçoit tout de même les riffs tantôt atmosphériques et mélodiques à la Deafheaven qui sont, il faut le dire, très bien joués. Caro est toujours aussi habitée sur scène, et sa manie de chanter avec son épaisse chevelure sur le visage donne toujours cette impression d'être face à un spectre tout droit tiré de The Ring.

Evidemment, avec deux guitares, Oathbreaker a plus d'armes en main pour partir en guerre, et c'est exactement ce qu'ils font sur  "Needles in Your Skin". Mais ils savent aussi faire des pauses avec le doublon "Where I Live / Where I Leave" qui laisse entendre la formation dans un registre sensible à fleur de peau, à la guitare et au chant clair plaintif. Pour reproduire ses expérimentations vocales sur scène, Caro n'a pas fait appel aux samples, un choix à saluer tant il est monnaie courante de nos jours. Elle emploie donc ce qui semble être un TC Helicon pour créer ses harmonies aiguës inhumaines, dans la droite lignée de Paul Masvidal de Cynic. On peut l'entendre sur "Where I Live" et "Immortals", cette dernière étant d'ailleurs une des grandes réussites du nouvel album. C'est aussi sur le pont calme de cette chanson qu'il est clairement audible que la batterie est toujours surmixée à la fin du concert. Après une quarantaine de minutes de set, le groupe se retire déjà et revient avec une seule chanson en rappel, qui va relever le compteur à cinquante minutes : l'implacable et groovy "Glimpse of the Unseen" qui prend une ampleur énorme avec deux guitares. Voilà une conclusion qui met tout le monde d'accord.

C'était donc une bonne performance d'Oathbreaker, mais il serait maintenant temps que Caro parvienne à chanter plus longtemps, surtout si le groupe tourne en tête d'affiche. Les chanteurs de black metal y arrivent bien, il n'y a pas de raison qu'elle ne le fasse pas. A moins qu'ils ne souhaitent plus jouer les anciens morceaux sur scène, ce qui pourrait se comprendre. Dans les deux cas, le résultat reste un peu ingrat pour les fans.

Neredude (Décembre 2016)



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