Jason Lytle

par Chorizo (18/02/2013)

La question s'est posée ce soir de savoir qui, du Commandant Cousteau ou de Bill Murray avait réhabilité le bonnet rouge auprès du grand public. On aurait aimé poser la question à Aaron Espinoza et Jason Lytle, ce dernier ayant cependant opté pour une version montagnarde dudit couvre-chef. Que ne nous a-t-il manqué un journaliste de GQ pour épiloguer sur le port du bonnet et sur la nécessaire confiance en soi qu'il convient de revêtir à cette occasion! Les aléas du bonnet sont de ceux qui ne permettent pas la moindre faille si l'on tient à sa classe. Jacques-Yves l'avait compris. Lolo Ferrari, moins. 

Aaron Espinoza et son bonnet (rouge), donc. On avait passé sous silence sa courte prestation en première partie de Benjamin Gibbard, le 5 décembre dernier, toujours au Café (auto-promo éhontée à lire ici); on en dira donc un mot ici pour compenser. Rien d'exceptionnel chez ce folkeux, dont les mimiques mélodiques rappellent souvent Troy von Balthazar et dont les ambiances effacées collent à l'atmosphère apaisée de la salle. Restent alors quelques idées, un peu simples et inexploitées, qui tournent 2 minutes et puis s'en vont.

Jason Lytle et son bonnet (alpiniste), donc. La reformation de Grandaddy lors de Rock en Seine, l'été dernier, avait été un des moments forts du festival, empli d'une nostalgie toute particulière. L'aura, précieuse, parfois incompréhensible, de ce groupe de bûcherons du Montana avait alors resplendi devant une audience conquise. Rebelote au Café, quelques mois plus tard, qui affiche complet pour un Lytle arrivé avec un très bon mais trop vite oublié Dept. of Disappearance sous le bras.
Le show, confidentiel, est à l'image du bonhomme : facétieux et à la limite de l'autisme. Dans une configuration acoustique, les arrangements sont dépouillés, parfois maladroits. Il ne reste des titres du dernier album qu'un frêle filin qui reflète injustement peu son talent de composition. Cela perturbe, le public est trop sage, l'oeil mi-clos. Lytle se sent obligé de remercier, le regard fuyant. On le voit ailleurs, jouant avec ses samples comme un enfant. C'est là qu'il est le mieux et que le public l'accepte.

Pourtant, Jason Lytle promène son spleen avec style. Et on ne parle plus (seulement) du bonnet. Sa mélancolie tamisée finit par coller à la peau. Il faut l'entendre chanter "Get up and go / You can do it / Everything's gonna be alright", entre neurasthénie vocale et mort dans l'âme, pour entrevoir la fêlure, béante. Derrière sa bulle de cordes et de claviers cheaps se découvre une profonde tristesse. Ses balades, d'apparences légères, recèlent dans leurs mélodies un vague à l'âme communicatif et insidieux. C'est ce qui plane ce soir au Café, alors que résonnent les dernières notes d'un titre de Grandaddy, comme une référence lointaine, sempiternellement présente.

Un goût d'inachevé m'envahit cependant en sortant. La salle trop sage, emmitouflée dans son atmosphère paisible? Un artiste trop détaché? Un set trop court, forcément imparfait? Sans doute un peu de tout cela. Qu'importe, Lytle fait partie de ces artistes à la vie dure qui savent faire passer dans leurs morceaux plus d'émotions qu'ils n'en laissent transparaître sur scène.

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