Festival des Artefacts
par Damien Pontus (15/05/2007)
Après quelques années de mélange des genres, les Artefacts de Strasbourg sont revenus en cette année 2007 à des journées thématiques. Exit les journées où l'on passait du reggae au metal et du punk à l'electro, le festival est revenu à une formule " un jour, un style ". Certains regretteront l'ancienne formule, d'autres se réjouiront de celle-ci... Nous ne disserterons pas ici de ce point-là.
Donc après une journée franco-française et une journée reggae, la dernière journée du festival était consacrée aux musiques extrêmes au sens large.
C'est Lofofora qui se charge d'accueillir les festivaliers sur la grande scène. Le groupe, qui pensait jouer devant 28 personnes dans une sorte de " pique-nique dominical ", se retrouve finalement devant un parterre déjà bien garni. Lofo assure un set classique, sans grande surprise, excepté la reprise francisée du Anarchy In The UK des Pistols et de deux nouveaux morceaux prometteurs. La setlist est plutôt (trop ? ... oui je sais je suis un puriste...) axée sur les derniers albums du groupe et se terminera par le nouvel hymne du groupe que je reprends à mon compte : Buvez Du Cul !
Delain, la nouvelle formation de l'ex-claviériste de Within Temptation, enchaîne ensuite sur l'autre scène. Et sans grande surprise, cela ressemble à du ... Within Temptation ! Le groupe est bien en place, la chanteuse Charlotte Wessels chante particulièrement bien (notamment sur le très bon Sleepwalkers Dream ) mais l'ombre de Within Temptation plane continuellement sur la prestation et dénote un manque de personnalité certain.
C'est sur la grande scène transformée en bateau que les troubadours médiévaux d'In Extremo, vêtus de leurs habits traditionnels, se produiront en ce milieu d'après midi. Pour situer la musique d'In Extremo aux néophytes, disons qu'il s'agit d'un metal plutôt ordinaire, chanté en allemand et accompagné de différents instruments traditionnels tels que de la harpe, de la cornemuse, ... Autant être franc avec vous, ce n'est définitivement pas ma tasse de thé (trop folklorique, trop festif, trop rigolo pour moi...) et je préférerai aller visiter les stands de merchandising où je croiserai Mike Clark de Suicidal Tendencies en train de plaisanter avec les gaziers de Lagwagon.
17H30. Retour sur la petite scène pour le concert de Black Bomb A. Les Français vont conquérir Strasbourg avec beaucoup de classe et un concert énergique et rageur. Il faut dire que la dynamique vocale installée entre Poun au chant clair/aigu et Arno au chant grave est parfaitement huilée et fonctionne à merveille. Soit dit au passage, Arno possède une voix de bûcheron comme il en existe peu et j'adore toujours autant l'entendre annoncer le titre d'un morceau en hurlant. Le setlist balaie toute la discographie du groupe de Born To Die à Police Stopped Da Way en passant par Everlast ou Look At The Pain pour se terminer sur la reprise de Midnight Oil, Beds Are Burning. Le premier moment marquant de la journée.
Arborant un magnifique drapeau illustré des deux cranes créteux et du slogan '25 years of Anarchy and chaos', The Exploited fêtait donc ici son quart de siècle d'activisme. Wattie, le mythique chanteur des anglais à la magnifique crête rouge, est lui toujours resté le même à travers les années : toujours aussi speed, toujours les mêmes grimaces. Le son de la grande scène est mauvais depuis le début de la journée et Exploited en fera aussi les frais, peut-être même plus que les autres en raison de la linéarité de sa musique. Avec des titres comme Fightback, Chaos Is My Life ou Barmy Army, le groupe assure cependant son set comme à son habitude.
A quelques mètres de là, une autre génération de punks s'apprête à jouer : ceux-ci ont moins de crêtes et sont moins 'punk à chien' mais ils mettent plus en avant le skateboard et le fun : Lagwagon. Exemple de cette bonne humeur générale : avant de commencer son set, le groupe est assis au milieu de la scène et sirotent un cocktail tout en plaisantant en attendant l'heure précise du début du concert, le dernier de leur tournée européenne. Le groupe délivrera d'ailleurs un excellent concert de punk-rock mélodique, frais et fun et bourré jusqu'à la gueule de tubes (Alien 8, Sleep, Messengers, May 16th, etc.). Joey Cape a beau balancer vannes sur vannes entre les morceaux, il n'en reste pas moins un excellent chanteur. Deuxième très bon trip de la journée.
Pas le temps de souffler, c'est au pas de course qu'il faut rejoindre la grande scène pour ne pas rater le You Can't Bring Me Down, introduisant le show de Suicidal Tendencies. Et quel show ! LA claque de la journée. D'autant plus que le son est enfin à la hauteur : puissant et précis. Ce soir, le groupe est non seulement déchaîné (ça c'est plutôt habituel avec Suicidal) mais également enjoué (ça c'est moins fréquent) : on voit les musiciens plaisanter entre eux, sourire, ils invitent le guitariste d'Exploited (manifestement fan de Suicidal) à le rejoindre sur Cyco Visions. Même les speech de Mike Muir entre les morceaux passent comme une lettre à la Poste. Le groupe promet de revenir en France pour promouvoir son nouveau disque à sortir et propose donc une setlist best of absolument énorme : I Saw Your Mommy, War Inside My Head, Freedumb, Send Me Your Money, Institutionnalized, How Will I Laugh Tommorow, Join The Army ou encore Pledge Your Allegiance sur lequel le groupe fera, comme le veut la tradition, monter une cinquantaine de personnes sur scène. Après les soucis physiques de Mike Muir, c'est un vrai kiffe de voir de nouveau en forme ce groupe mythique ; on reconnaît d'ailleurs souvent un groupe culte au nombre de musiciens qui regardent sa prestation sur le coté de la scène ou dans la salle (je me retrouverai d'ailleurs au milieu du concert à coté de Joey Cape de Lagwagon). Le meilleur concert de Suicidal Tendencies que j'ai vu. Still Cyco after all these years!!
Petite pause restauration puis fin du concert de Punish Yourself. Si le metal indus/techno des Français apparait vite assez fade, leur aspect visuel est lui plus marquant. Les zikos sont peinturlurés, la performeuse qui les accompagne joue avec une scie-sauteuse sur son bustier en acier, se déshabille, balance de la mousse sur le public, montre ses seins, se rhabille, etc. Un show très ... visuel.
Le visuel sera aussi très important pendant la tête d'affiche, Within Temptation. La scène est parfaitement aménagée, le son est nikel, Sharon Den Adel est magnifique dans sa grande robe blanche et chante bien (malgré son tic de constamment levé son bras droit pour battre le rythme), les projections sont soignées (notamment celle de Keith Caputo de Life of Agony sur le duo What Have You Done). Bref, tout cela est bien beau mais sonne un peu trop propre et manque de spontanéité. Le groupe et son management sentent parfaitement l'engouement que soulève actuellement Within Temptation mais ce n'est pas une raison pour tout calculer à la virgule près. Le groupe quittera néanmoins la scène après Ice Queen sous l'ovation du public.
Au même moment, les Allemands de Beatsteaks, véritables star chez eux, clôturent la petite scène avec un concert très varié : on passe du reggae au punk old school en passant par le hardcore mélodique, les deux chanteurs se passent le micro, les trois guitaristes alternent, ... En un mot : on ne s'ennuie pas une seconde, ce qui n'était pas gagné d'avance après une journée entière de festival.
Je terminerais par saluer la sécurité irréprochable du festival (tout comme Reuno de Lofofora l'a fait en ironisant " vous êtes pas censés être méchant d'ordinaire "). Comme quoi il est possible d'être efficace sans être une brute : parce que les slammers et les pogoteurs ont aussi des sentiments...
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