South of Heaven festival (08/06/2025, Maastricht)
par Neredude (16/06/2025)

Dans le monde impitoyable des naissances et disparitions des festivals, il est toujours positif d’en voir fleurir de nouveaux et c’est justement le cas du South of Heaven, qui nous intéresse aujourd’hui. Ce festival se tient à Maastricht en Hollande, à la frontière de la Belgique. Proposant une affiche de très bonne facture, on a eu envie d’y jeter un œil. L’arrivée sur le site se fait alors que les tchèques de Gutalax terminent leur set, quel plaisir de commencer sur une touche de poésie et d’intellectualisme !
photos par Istvan Bruggen © 2025
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L’annonce fin 2023 de la reformation du combo hollandais était assurément une bonne nouvelle pour les fans de metal progressif, surtout alors que Textures se séparait sans sortir Phenotype, un album qui avait été annoncé. On retrouve le groupe comme lorsqu'on les a quittés en 2017, tous les musiciens affichent une forme olympique, à commencer par le chanteur Daniel de Jongh, qui assure toujours autant en voix claire qu’en chant saturé. En fait le seul vrai reproche qu’on pourrait faire au concert est le son, qui manque de précision sur les guitares. Il faut dire qu’il y avait beaucoup de vent sur le site pendant toute la première partie du festival, ce qui a dû rendre la tâche difficile pour les ingés son. Bonne surprise, le groupe joue un nouveau morceau, qui n’est pas mauvais mais pas particulièrement incroyable. Les riffs sont très sages et manquent de l’ingéniosité à laquelle Textures nous a habituée. Nous devrons attendre la sortie d’un futur album pour nous prononcer définitivement. Les classiques de leur discographie défilent : « Awake », « Singularity » et enfin « Laments of an Icarus », qui signe la fin d’un bon concert, mais qui aurait été plus mémorable avec un meilleur son.
Ce concert des Polonais est l’occasion de découvrir le remplaçant de Rafał Piotrowski au chant, en la personne de Eemeli Bodde. Vocalement, on est dans une veine assez proche de la tessiture de Rafał, avec une touche deathcore plus prononcée, ce qui fera autant d’heureux que de mécontents. Ce Finlandais a aussi une bonne présence scénique et sait comment haranguer le public pour les inciter au mosh. Instrumentalement, Decapitated reste une machine de guerre particulièrement efficace, restant fidèle à l’identité qu’on leur connaît depuis Carnival is Forever, à savoir un death metal teinté de riffs saccadés à la Meshuggah. Vogg est toujours aussi impressionnant à la guitare, assurant parfaitement autant en rythmique qu’en solo. Bonne nouvelle, le son est meilleur que pour Textures, malgré le vent qui continue de souffler sans relâche sur le site, chapeau à leur technicien son ! La setlist se concentre sur le dernier album du combo, Cancer Culture, piochant quelques-uns des tubes de leur discographie comme « Spheres of Madness », sans oublier des deep cuts comme « A Poem about an Old Prison Man » de l’excellent Organic Hallucinosis. En conclusion, on peut dire que Decapitated a assuré un très bon concert, qui nous met en jambe pour la suite des hostilités.
On a peu de choses à dire sur ce set de Sylosis, pas parce qu’il était mauvais, bien au contraire ! C’est plutôt que leur musique ne me touche pas, en dépit de la maîtrise évidente dont fait preuve la formation anglaise, autant en rythmique qu’en solo. Le son est excellent et la présence scénique est au rendez-vous. Entre deux morceaux, Josh Middleton félicite l’organisation du festival pour cette affiche qui comprend des héros de sa jeunesse comme Textures, Carcass et Meshuggah. Bref, ce n’est pas aujourd’hui qu’on deviendra fan de Sylosis mais force est de constater qu’ils en imposent sur scène et ont délivré aux festivaliers une dose de thrash mélodique mâtinée de metalcore de qualité.
Carcass est une machine bien huilée qui semble inaltérée par le temps, particulièrement le guitariste Bill Steer qui fait toujours ses pas de danse tout en riffant comme si sa vie en dépendait. Ils ont une constance, à la fois sur album et sur scène, qui inspire le respect. Il est soutenu avec qualité en rythmique et en solo par son homologue Nippy Blackford, qui a intégré le groupe en 2023. La setlist est sans moments faibles, équilibrée sur l’ensemble de leur catalogue, à l’exception de Swansong. Encore une fois, on peut noter que le son est d’excellente facture, rendant audible chaque instrument, y compris la basse vrombissante de Jeff Walker. Ce dernier est d’ailleurs en excellente forme vocale, vociférant avec détermination ses récits gores et chirurgicaux cauchemardesques. Cette heure de set passe bien vite et Jeff s’excuse au public de ne pouvoir leur interpréter quelques titres supplémentaires. C’est d’ailleurs un des seuls défauts qu’on pourrait noter sur ce festival : la durée un peu courte des concerts de tête d’affiche, la faute à l’absence d’une seconde scène sur le site du festival.
Il y a des groupes qui sont parfois mis au pilori quand, après avoir connu des jours glorieux, sont partis dans une période d’errance musicale pour une longue série d’albums. In Flames faisait partie de ceux-là depuis Come Clarity, on n’attendait plus rien d’eux depuis un moment, autant sur scène que sur album. Mais la sortie de Foregone a marqué un véritable renouveau pour le groupe et ledit renouveau peut également être ressenti pendant leur concert aujourd’hui. Le line-up actuel délivre une performance solide, notamment avec l’excellent Chris Broderick (ex Megadeth et Nevermore) à la guitare lead et Liam Wilson (Dillinger Escape Plan) à la basse. Typiquement, il est certain que les fans de DEP ont fait la grimace en apprenant que Liam intégrait les rangs de la formation suédoise. Mais visiblement, tout sourire dehors, Liam vit sa meilleure vie sur scène en jouant du death metal mélodique. Même Anders Friden s’en sort avec les honneurs au chant, alors qu’on l’a connu inégal sur scène par le passé. Le son est pour ainsi dire parfait et on peut aussi reconnaître au groupe le mérite d’avoir un claviériste sur scène, alors que nombre de formations de leur calibre se seraient contentés de samples. On aurait peut être préféré entendre plus de classiques sur cette heure de set, mais difficile de reprocher à In Flames de vouloir mettre en avant ses dernières sorties. Une excellente mise en bouche pour cette fin de festival suédoise.
Meshuggah
Meshuggah est un groupe qui a maintenant plus de 35 ans, il faut profiter de chaque possibilité de les voir car qui peut prédire combien de temps ils seront capables de continuer à jouer cette musique sur scène ? Ceci nous est rappelé par le fait que Jens Kidman fête ses 59 ans le jour de ce concert au South of Heaven. Le groupe commence avec 10 bonnes minutes de retard, ce qui fait mal sur un set d’une heure alors que le timing a l’air serré. Les Suédois entrent sur scène avec « Broken Cog » et semblent au meilleur de leur forme : la section rythmique assurée par Tomas Haake (batterie) et Dick Lovgren (basse) est implacable, pendant que Marten Hagstrom (guitare) et Fredrik Thordendal (guitare) fendent l’air avec leurs riffs cyclopéens. Jens Kidman est pareil à lui-même, bougeant son corps au rythme de la musique en lui donnant une voix tranchante et un tantinet robotique, ce qui se marie parfaitement avec l’ensemble. On est d’entrée de jeu hypnotisé par le lightshow synchronisé avec une précision chirurgicale avec la musique, ceci d’autant plus que les lasers sont de retour après quelques années d’absence aux concerts de Meshuggah. Ils arrivent toujours au moment opportun pour mettre l’accent sur le climax ou un passage calme de la musique : le résultat est une réussite totale, pour ce qui est sans conteste l’un des meilleurs lightshows de l’histoire du genre, prouvant à quel point le soin apporté sur cet aspect peut contribuer à l’immersion dans la musique d’un groupe. La setlist est axée sur les meilleurs titres des albums les plus récents de Meshuggah, on notera avec plaisir le retour des excellents « Combustion » et du deep cut « Swarm » qui sont d’une efficacité redoutable. Fredrik est particulièrement créatif ce soir en termes de soli, improvisant des leads qui n’ont rien à voir avec les versions studio mais qui se fondent admirablement dans la rythmique. En somme, le seul défaut de ce concert est sa longueur, cette petite heure est vraiment trop courte, on aurait volontiers pris du rab’, surtout quand on connaît les titres qui étaient dans la setlist complète : « Lethargica » et « Dancers to a Discordant System ». Même si on comprend les contraintes de timing d’un festival qui ne propose qu’une scène, on espère que le South of Heaven pourra trouver une solution pour potentiellement étendre les sets des têtes d’affiche. A noter que nous n’avons pas pu assister à la fin du festival qui se tenait dans une salle à quelques minutes du site du festival, avec notamment I Am Morbid au programme.
En guise de conclusion, on peut dire que c’est un coup d’essai réussi pour le South of Heaven, qui est parvenu à proposer une affiche de qualité, dans de très bonnes conditions sonores et une ambiance détendue, avec un choix appréciable en termes de boissons et de nourriture (quoiqu’un peu cher pour ce dernier point). Alors qu’une édition en 2026 est déjà prévue, vous pouvez dès maintenant l’inscrire dans votre liste des festivals à suivre.
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