Katatonia, Solstafir, Som

par OonaInked (14/02/2023)

Ce n’est pas à Paris mais exceptionnellement à Lyon que nous nous trouvons en cette fraîche soirée d’hiver. Nous patientons devant le mythique Ninkasi Kao pour accueillir deux colosses de la scène nordique, tout aussi exceptionnels et mythiques. Katatonia, Solstafir et Som écument les salles européennes depuis maintenant deux semaines et c’est ce soir la première date française.

Som, le groupe d’ouverture, est une formation quelque peu paradoxale : très jeune mais cumulant parmi ses adhérents plusieurs décennies d’expérience, aussi bien méconnus - presque de niche - que "supergroupe". En effet, on retrouve dans le quatuor (Dunkan Rich manque à l’appel ce soir) des membres d’autres noms de la scène Post et Shoegaze tels que Caspian (nominé aux Grammy Awards), ou Junius, pour ne citer que ceux-là. Ce dernier avait d’ailleurs déjà tourné avec Katatonia et Alcest en 2012. C’est donc sous la bannière de Som que les musiciens chevronnés officient, pour leur première fois sur le territoire gaulois. Ils débarquent très discrètement pendant que The Universe Personified par Black Science perdure en fond… C’est l’occasion de découvrir leur premier album, The Shape Of Everything (2022) : concis, planant, beaucoup de delay, les nappes instrumentales sont comme une douce allusion, pour ne pas dire énorme clin d’œil, à Transcendence (2016) de Devin TownsendThe Manchester Orchestra, ou encore Vola, autres Nordiques émérites ayant aussi partagé l’affiche avec Katatonia. Mais, à la différence de Asger Mygind, Will Benoit aura un chant presque Deftonesques. En dépit du peu d’interaction avec nous à l’exclusion du bonjour-merci-au revoir non-optionnel, le passage fut court mais efficace, le public était certes statistique mais fort réceptif ; cohérent avec le genre "chaussure-regarder". Les nord-américains de Som constituent une mise en bouche satisfaisante qui auront su chauffer la salle juste ce qu’il faut. Ils ont été bien accueillis, mais vous vous en doutez, la suite se fait attendre avec impatience.

Le quatuor islandais n’avait pas le temps de nous manquer qu’ils sont déjà de retour. Après un Motocultor 2019 intense, Solstafir n’aura eu que le Hellfest 2022 comme occasion de défendre sa dernière parution, Endless Twilight Of Codependent Love (2020). Etonnamment, leur set ne sera pas centré autour de celle-ci, nous n’aurons droit qu’à un seul titre, ce qui n’est pas plus mal : ça évitera d’étirer les interludes instrumentaux interminables, plus soporifiques, qui se prêtent moins à une représentation live. Ils préféreront mettre l’accent sur les biens meilleurs Köld (2009) et Svatir Sandar (2012), mais laisseront malheureusement Berdreyminn (2017) à la trappe. Pour autant, on retrouve la signature unique de ce groupe qu’est Solstafir : le chant plaintif, agressif, presque crié, la froideur contemplative de leur musique, le style flirtant allègrement avec le Post-Rock, leur quintessence est parfaitement retranscrite. C’est même meilleur qu’en studio et ce pour deux raisons : la réverbération apporte de la grandeur donc permet au groupe de remplir davantage l’espace sonore et au-delà des blagues et de la tchatche naturelle d’Aðalbjörn Tryggvason, son jeu de scène est tout simplement immanquable. Quand le grand et svelte viking pose sa somptueuse guitare en bois sculpté pour s’agenouiller devant toi au bord de l’estrade, te fait du "front contre front" tout en gueulant dans son micro, que ce soit par le rire, la surprise ou l’admiration, c’est difficile de rester de marbre ! 

Les techniciens s’affairent à démonter entièrement le plateau, un peu confus sur ce qui va où, comment et quand, surtout les bannières latérales. Un régisseur peine à décoincer le backdrop, mais il y parvient et redescend sous les applaudissements généraux. Tout est en place, nous pouvons accueillir le clou du spectacle. A l’instar de leurs collègues, les suédois n’ont pas pu honorer comme il se doit City Burials, lui aussi sorti en pleine pandémie. Après six longues années, Katatonia revient sans Anders Nyström (Guitare). Son absence pour motif familial était annoncée la veille de la tournée, affirmant cependant que celle-ci ne serait pas impactée. La suppléance est assurée avec brio par l’émérite Nico Elgstrand, guitariste de feu Entombed A.D. et Entombed tout court. Ce dernier rencontre quelques difficultés avec son pedalboard en début de set, sur les deux titres d’ouverture de Sky Void Of Stars, mais elles seront heureusement vite réglées. En 2016, la bande à Renske avait allègrement déterré des souvenirs des années 90, comme Saw You Down ou encore For My Demons. Cette année, nous avons un panache, un best-of si l'on veut, de la deuxième moitié de leur carrière ; des tubes en veux tu en voilà piochés dans du neuf, du plus ancien pour les plus connaisseurs, notamment dans The Great Cold Distance (2006) avec l’inévitable trio Deliberation, July, et My Twin. Le point d’orgue sera le rappel, avec Evidence (Viva Emptiness, 2003). J’écoute cette piste pour la première fois en live, et je découvre l’étendue de la tessiture de Roger Öjersson (Guitare), versatile, puissante, au grain parfaitement maîtrisé, tel un Vortex (Borknagar, ex-Dimmu Borgir) moins barbu et moins peinturluré.

En conclusion, cette programmation était bien moins hétérogène que prévue. De très belles découvertes, un voyage auditif dans les plaines venteuses d’Islande… Bref, malgré des balances pas toujours parfaites (le fameux delay devenant brouhaha, la présence de Jonas couverte par la batterie…), ce fut une fabuleuse expérience. Un tiercé gagnant. A l’heure où vous lisez ces quelques lignes, la date toulousaine sera probablement passée, je vous donne donc rendez-vous le 19 février au Trianon. Dépêchez-vous de prendre les dernières places ici !

Vous aimez ce genre de contenu ? Soutenez-nous !

Faites un don et soutenez-nous, cela nous aidera à produire plus de contenu comme celui ci.

Pour ajouter un commentaire vous devez vous connecter ou créer un compte.

Vous pourriez aimer

South of Heaven festival (08/06/2025, Maastricht)

Live report du South of Heaven festival en Hollande.

Amenra, Verset Zero

le 14/05/25 Rennes (Antipode)

Chat Pile, Agriculture

le 28/04/25 Paris (Trabendo)

ten56., Dream State, DALI, Solitaris

La Rayonne, Villeurbanne (2025-04-29)