Opeth, Voïvod
par Neredude (02/01/2023)
Après un passage en demi-teinte à
l'Olympia en 2019 (NDR : quoiqu'historique pour nos dealers de Metal préférés Garmonbozia) du fait de problèmes de son,
Opeth se devait de revenir à Paris pour laver cet affront. Heureux
hasard, leur management leur a soufflé à l'oreille l'idée d'une
mini-tournée pour les trente ans du groupe avec une setlist
(presque) votée par les fans. Deux ans de pandémie plus tard, nous
retrouvons enfin Opeth pour ce concert by-request, en compagnie des
cultissimes Voïvod.
Comme le faisait remarquer notre
confrère Zoltar (New Noise), le public actuel d'Opeth est assez
différent de celui de nos Québecois fans d'aliens. Et c'est sans
surprises un accueil relativement stoïque mais poli qui est réservé
à Voivod ce soir. Eh oui, ce groupe unique creuse la même veine
progressive qu'Opeth, avec un certain nombre d'influences communes
comme Celtic Frost ou King Crimson (cf : le bridge de Planet
Eaters), mais pas du même côté de la montagne. C'est en tout cas
un réel plaisir de voir Voïvod jouer dans une des meilleures salles
de Paris. Le son est au poil et le groupe affûté comme un
rasoir-laser. On a même droit à une rareté de The Outer Limits avec Fix My Heart, un album moins connu mais adulé par les
fanatiques de Voivod. Dan Mongrain (ex Gorguts, Martyr) est toujours aussi impérial à la
guitare, reprenant le répertoire du regretté Piggy tout en y
injectant sa propre personnalité, comme on peut l'entendre sur un
solo improvisé sur leur superbe reprise d'Astronomy Domine. Que dire
si ce n'est qu'à bientôt quarante ans de carrière, Voivod reste un
ovni musical dans le monde du Metal et qu'on aurait volontiers pris
du rab dans de telles conditions. Il y a en tout cas fort à parier
que le quatuor reviendra pour défendre son dernier album en tête
d'affiche. Et on y sera.
Commençons par préciser un point :
ce concert "by request" n'était qu'un vote partiel,
car les fans n'avaient le choix qu'entre trois ou quatre titres par
album, là où un certain Devin Townsend laissait une liberté de
vote plus prononcée pour son propre concert by request. Les
résultats des votes nous ont montré que le public a tendance à
voter pour les titres les plus populaires et donc, fatalement, les
plus joués par le groupe, ce qui est un peu décevant étant donné
la très faible probabilité qu'Opeth renouvelle cet exercice. Cette
parenthèse d'éternel râleur étant fermée, le concert commence
donc sur Ghost Of Perdition, classique parmi les classiques, après
un sample des Aphrodite's Child (Mike avait posté un long
et poignant hommage à Vangelis à l'annonce de son décès). On
remarque de suite que le son est un peu étouffé, ne permettant pas
de ressentir la lourdeur des riffs. Mais il est également clair que
Mike est très en voix ce soir. De nombreuses personnes avaient
remarqué, à raison, que son growl avait perdu en superbe depuis
quelques années, mais ce soir, c'est 666/20. Difficile de ne pas
être un peu déçu devant cette réception respectueuse mais sans
réel entrain du public. Où sont passés l'ambiance de fête, les
trente (deux) ans du groupe, tout ça ? Nous sommes à un
concert orienté prog, mais même un pit de Dream Theater a plus
d'ambiance ! L'audience est même encore plus timide sur les
titres récents, certes moins classiques, mais joués avec maestria
et avec un son qui s'est nettement amélioré entretemps.
Difficile
de faire la fine bouche quand la formation entame Under The
Weeping Moon, une vraie rareté sur scène, magnifiée par
une contribution de Joakim Svalberg (Claviers) à l'orgue Hammond. Le
son manque à nouveau de précision sur Windowpane ce
qui est surprenant compte-tenu du registre calme et dépouillé du
morceau. Et même s'il est indéniable que l'Opeth version 2022 est
constitué de meilleurs musiciens que le line-up historique, ce
dernier avait malgré tout un toucher unique que le groupe actuel
n'arrive pas à retrouver, en bien ou en mal. Par contre, il faut
noter que le titre est chanté dans sa tonalité d'origine, ce qui
montre une fois de plus que Mike est en très bonne forme vocale sur
cette tournée. On enchaîne sur Harvest avec peu
d'enthousiasme. Oui, c'est un chouette morceau, mais sur la première
date de la tournée, le groupe avait joué Blackwater Park qui est certes moins rare mais... on n'est pas à une contradiction
près !
Place au plat de résistance : Black
Rose Immortal, un morceau culte pour les fans de Morningrise.
Le titre est très bien joué par le groupe, ce qui a dû ravir les
fans du disque mais de notre côté, les passages en son clair nous
font irrémédiablement penser à du Folk Metal de bas étage... et
pour le reste, c'est un morceau où les tics de composition de Mike
Akerfeldt sont particulièrement apparents : comme il le dit lui
même, Morningrise est constitué d'une pile de riffs collés entre
eux, sans transition ni logique. Soyons clairs, une bonne part des
morceaux d'Opeth sont construits ainsi mais ici, c'est vraiment
flagrant. Le long morceau est en tout cas l'occasion d'entendre à
quel point Waltteri Väyrynen (Batterie, ex Paradise Lost) est un bon choix pour Opeth.
On le sent tout de même plus à l'aise sur le répertoire extrême
du groupe, mais il s'en sort très bien sur les morceaux récents et
les passages calmes.
Sur l'excellent Burden, on se
rappelle que Watershed est le dernier grand disque d'Opeth, avec
toujours plus de contributions intéressantes de Joakim Svalberg.
Bref, sur une soirée aussi longue, le bilan reste positif (on a versé une petite larme sur The Moor, quand même !), mais un
poil mitigé malgré tout : le son n'a pas toujours été au
rendez-vous, alors que la Salle Pleyel est une salle réputée pour son
acoustique. Mike avait l'air un peu résigné d'être là, faisant
comprendre qu'ils avaient "beaucoup répété pour les fans" et l'on notait ses habituels échanges humoristiques avec le public mais
qui, encore une fois, paraissaient un peu forcés. Si on a donc passé
un bon moment avec Opeth et Voïvod, ce n'est pas un concert qui
restera parmi les plus marquants de la formation
suédoise, à notre humble avis.
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