Bars en Trans 2018
par Ubuto Kro (26/01/2019)
Rennes, ville Rock... Une réputation toujours valable aujourd'hui ? Après trente ans, il est peut-être temps de se reposer la question (oui, encore une fois)... et le meilleur moment pour le faire n'est-il pendant les TransMusicales ? Pour obtenir un début de réponse, il faut s'éloigner des grosses salles et pousser les portes des cafés concerts. Là-bas, un autre paysage musical s'ouvre : une diversité qui donne au spectateur la possibilité de se forger sa propre opinion. Sur les petites scènes, on ose davantage... moins d'enjeu financier et pas besoin de coller à une tendance. Un terrain de jeu libre qui favorise la découverte des groupes, au plus près. Alors, où est-ce qu'on va ce soir ?
Jeudi 6 décembre 2018
Déjà 16 ans que le Mondo Bizarro est ouvert et le moins qu'on puisse dire, c'est que Bruno - le taulier - sait soigner sa prog. Ce soir, c'est lui qui est au commande et ça se voit : The Flying Padovanis est annoncé en tête d'affiche, un groupe qui existe depuis 1981 et qui défend un son instru Rock. Les membres d'origines - Henry Padovani (The Police, Kim Wilde, Wayne County&the Electric Chairs...), Paul Slack (Uk Subs...) et Chris Musto (Kim Wilde, Nico, Joe Strummer, Glen Matlock, Johnny Thunders...) -toujours présents aujourd'hui, sont les dignes représentants d'une musique qui ne vieillit pas. Ça sent le concert mémorable, non ? 21h30 : il fait nuit, la pluie ne cesse de tomber... et les gens franchissent la porte du 264 avenue général Patton. Il y a du boulot au bar et la salle de concert se remplit. Des passionnés de tout âge qui attendent de voir Henry Padovani : le guitariste originel de The Police. Dans un peu plus d'une heure, il sera sur scène et les veinards présents ce soir savent déjà qu'ils n'oublieront pas ce moment. La première partie est assurée par Wolfoni, un trio rennais Rockabilly. Contrebasse, guitare, batterie... Une petit vent de Memphis souffle sur la scène du Mondo. Le style est là ! Le look, la mise en scène et la musique témoignent d'une culture américaine des années 50-60. Un petit voyage dans le temps fort agréable, porté par des enchaînements mesurés. La technique est inspirée des grands noms de l'époque mais elle ne bascule jamais dans le cliché. Wolfoni sait transmettre sa passion tout en proposant une approche originale du swing Rock'n'roll. Les gens sont séduits et ils en redemandent. Après un rappel, ils laissent la place à The Flying Padovanis.
Il est 22h30, le groupe monte sur scène. Les fans de la première heure remarquent tout de suite que Chris Musto est absent. Opéré il y a quelques jours, le batteur emblématique du groupe n'a pas pu faire le déplacement. C'est Thomas qui le remplace, un jeune musicien qui compte seulement trois jours de préparation mais qui ne lâchera rien de tout le show. Dès le début, ça démarre très fort ! Regards complices, sourires francs… Paul et Henry se connaissent bien et ça fait toute la différence. Une alchimie évidente au service d'un jeu subtile et fouillé. Oui, tout sonne juste. La technique est indéniable mais elle n'est qu'un outil au service d'une véritable recherche artistique. N'est-ce pas là, le vrai talent ? Un son limpide, facile à l'oreille, mais affiné par des années de pratique. Chaque note dégage une intention particulière. Un instinct sûr qui fascine autant qu'il transporte. Les musiciens s'éclatent : yeux fermés, visages sereins... ils se laissent aller. Oui, c'est de l'instrumental mais l'énergie n'est pas en reste : on est clairement dans un concert Rock. Les morceaux Murder ou Jack The Ripper ont une ligne sombre qui laisse toute la place à l'imaginaire. La réinterprétation du classique Caravan dans une version très Rock est un véritable coup de maître. Entre deux compos, Henry s'amuse à lancer quelques vannes à ses complices : une attitude bienveillante qui permet d'entrevoir l'intimité d'un groupe quasi-mythique. The Flying Padovanis, c'est à voir et à revoir sur scène : les amoureux de la musique ne peuvent pas passer à côté. Messieurs, merci pour ce show digne des plus grands !
Vendredi 7 décembre 2018
Entrée libre ce soir au Mondo ! Cette fois, c'est Arsenal Productions qui signe la prog. Un plateau varié qui promet une soirée riche en découvertes mais pas que... Il y a du beau monde ce soir : des musiciens confirmés qu'on voit trop rarement sur nos scènes rennaises.
Tabouret, guitare électro-acoustique, micro... L'ambiance est posée. Ce soir, le Mondo prend des allures de club privé. Le public est à l'aise, presque chez lui... Certaines personnes commencent même à s'asseoir dans la fosse : du jamais vu dans l'antre des aficionados du Punk / Rock / Metal. Il est 20h30 et la salle se remplit pour Daran : des connaisseurs, des fidèles... qui le suivent depuis des années. Quelques curieux jettent un œil sur la setlist posée sur la scène. Ils débattent du choix des titres mais... ils sont loin d'imaginer que le musicien ne pourra pas l'honorer. Daran fait son entrée seul. Il s'assied, laisse planer le silence puis explique qu'il devait venir accompagné ce soir : le dernier album était prévu pour être joué en groupe mais, faute de subvention, ses comparses n'ont pas pu le suivre. Il est là avec sa guitare et son micro, s'apprêtant à jouer l'essentiel de son répertoire en acoustique. Avec beaucoup de sincérité, il avoue ne pas être à l'aise mais que si il l'était, il changerait de métier. Une approche simple, une scène dépouillée, un éclairage minimaliste... on est loin des grosses productions et c'est là que se révèle toute l'habileté du musicien. Le temps se suspend : chaque mot, chaque variante à la guitare implique le spectateur. Daran offre un jeu tout en transparence. Les riffs, la voix, l'émotion... Il offre une interprétation saisissante, portant une poésie du quotidien âpre et pleine de vérité. Après trois chansons, quelqu'un crie « c'est magique ! » Et oui, ça l'est. Une telle proximité entre une artiste et son public, c'est rare.
Batterie, guitares, contrebasse, violon... The Very Small Orchestra monte sur scène. Un groupe qui n'a de « Very Small » que le nom : ils arrivent en nombre et le niveau est très haut. Il faut dire que les musiciens sont loin d'être des débutants : Vincent Bosler (The Hyènes...), Denis Barthe (Noir Désir, The Hyènes, Mountain Men...), Kiki Graciet (Niko Etxart, Calvin Russell...)... Oui, ils en ont foulé des salles de concerts et il faut avouer que dès le début, ça claque. La technique est impeccable : belle, maîtrisée... et l'impro n'est jamais loin. Les six musiciens mènent le spectateur en terrain inconnu : tantôt Folk, Rock ou Blues, la musique se veut libre, audacieuse et inventive. Un cocktail rafraîchissant qui fait du bien en ces temps de tourmente. Quel mélange ! Précises et puissantes, la voix et la batterie sonnent résolument Rock. L'harmonica, la guitare et la contrebasse nous mènent vers la Nouvelle-Orléans... L'accordéon et le violon donnent un goût du voyage. Oui, un air de liberté qui imprègne aussi les textes. Les mots sont aiguisés, habiles, cyniques... Une vision subtile et honnête du monde dans lequel nous vivons. Dépaysement garanti ! The Very Small Orchestra, c'est une expérience qui se vit sur scène. Alors, à quand la prochaine date ?
Gaume conclut la soirée. Pas simple de passer après Daran et The Very Small Orchestra mais les quatre nantais assurent la transition avec brio. Le jeu est moins affirmé que leurs aînés mais la créativité est évidente. Des riffs Rock, presque sombres et une voix qui dégage une vraie identité. La couleur de leur musique à des influences anglo-saxonnes, proches de The Arctic Monkeys ou de Nada Surf. Un esprit Rock qu'ils sauront transmettre tout au long du show. Dès la première partie du concert, le public est acquis à leur musique. Le pari est gagné !
Les Bars en Trans au Mondo Bizarro, c'est terminé. Dès demain, c'est la programmation Off qui prend le relais et c'est pas mal non plus : c'est l'équipe du Superbowl of Hardcore qui investit la scène. Bref, le Mondo ne connaît jamais le repos... Alors, on revient quand ? Et oui, il est là le vrai choix : ne pas se fier uniquement aux têtes d'affiches des grosses salles, bouger de son canapé, aller voir de bons musiciens sur scène, s'ouvrir à de nouveaux horizons... c'est ça, l'esprit Rock. Pendant ces deux jours, les groupes n'ont cessé de le répéter « vous avez de la chance d'avoir un tel endroit à Rennes ». Oui, le Mondo est une très belle scène et Bruno sait offrir une prog aux petits oignons. Mais d'autres caf'con' se défoncent aussi tout au long de l'année... Le Ty Anna Tavarn, le Bar'Hic... et le Marquis de Sade qui pour l’anecdote, a invité ce 8 décembre le groupe Marquis De Sade à jouer sur sa petite scène. Si c'est pas Rock ça !
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