Arch Enemy / Wintersun / Tribulation / Jinjer

par Zbrlah (25/01/2018)

Arch Enemy sont des habitués de la Ville Rose : ce lundi, c'est la troisième fois qu'ils y jouent en à peine plus de trois ans. Et si les deux fois précédentes, la bande à Amott ouvrait pour des groupes encore plus gros qu'eux (respectivement Kreator et Nightwish), cette fois-ci l'Ennemi Juré est en tête d'affiche, qu'on se le dise ! Pour marquer le coup, ce sont bien trois groupes qui sont choisis pour ouvrir pour eux, et pas des moindres. Du coup, logiquement, pour faire loger tout ça, les portes ouvrent à 17h30 et Jinjer attaque à 18h10. Logique, mais peu pratique, compte tenu que ce 22 janvier 2018 est un lundi soir... Et pourtant, en arrivant au milieu du set des Ukrainiens, force est de constater que le Bikini est déjà vraiment rempli. Attirée en masse par cette belle affiche, la faune locale fait mentir sa réputation en laissant le "quart d'heure toulousain" au vestiaire.

Jinjer nous laissera une bonne impression, malgré le fait que nous ayons raté les trois premiers titres sur les six joués (on arrive au début de Just Another). Le combo donne dans le Metalcore à casquette, mais un lien évident peut s'établir avec la tête d'affiche : le micro est tenu par une femme, dont le gabarit XS est inversement proportionnel à la puissance de ses growls. Entre son legging fluo digne de Grum Lee et son énergie qui la pousse à occuper tout l'espace de la scène, mais surtout grâce son chant hurlé vraiment qualitatif et impressionnant, écrasant, qu'elle sait alterner avec des voix claires suffisamment bonnes (justes, mais au timbre somme toute assez classique), la chanteuse accapare l'attention de toute l’audience. Pourtant, les trois musiciens font le boulot eux aussi, proposant un jeu de scène simple basé sur du headbang et des gros riffs syncopés. Le quatuor bénéficie d'un assez bon son, mais surtout, d'un excellent jeu de lumière : on sent que malgré leur statut de toute-première-partie-que-pas-grand-monde-ne-connait, les Jinjer ont assez de bouteille pour jouer vraiment carré et pour avoir leur propre lighteux, qui coordonne les éclairages sur les mosh-parts du quatuor. Le groupe termine son court set par un Who Is Gonna Be The One ravageur dont le refrain, facile à assimiler, est repris par les premiers rangs déjà bien chauffés. Gros boulot de la part de Jinjer, donc, qui salue sur un sample de leur propre titre Beggar's Dance, tout en décalage funky. Bravo à eux ! En revanche, on ne pourra pas s'empêcher de trouver qu'il aurait été plus pertinent d'associer ce groupe à l'ancienne formation de la chanteuse d'Arch Enemy (les Canadiens de The Agonist), pour leur lien évident autour de leur son entre Metalcore et Deathcore Mélodique.

Jinjer s'arrête de jouer pile à l'heure prévue, et Tribulation commence pile à l'heure prévue. Vlan. Sur ce point, qui sera une constante toute la soirée, rien à redire, l'orga est impeccable. On aimerait tellement pouvoir en dire autant de la performance des Suédois (et certaines personnes ont sûrement adoré, on est désolé d'avance), mais Tribulation nous a fait l'effet d'un pétard mouillé.
Le combo débarque avec des frusques de carnaval, sans forcément de cohérence entre eux : si l'un des guitariste est assez ironique pour jouer de sa silhouette d'anorexique en mettant un t-shirt moulant qui représente un squelette, l'autre six-cordiste arbore un maquillage facial très Black Metal et des vêtements amples très théâtraux. Quand ils commencent à jouer, leurs compositions Blackened-Death éveillent d'abord l'intérêt, puis les sonorités se dispersent rapidement, et notre attention aussi. Il nous a semblé que les gars de Tribulation ne savent pas vraiment s'ils préfèrent jouer du Black Metal ou du Heavy'n Roll, et qu'ils essayent tant bien que mal (mais plutôt mal) de mélanger les deux. Les couplets de Strange Gateways Beckon, par exemple, avec leurs guitares en son clair plein de réverb', donnent l'impression qu'on à affaire à U2 avec du chant Death. Alors que ça ne dérange pas franchement en studio, sur scène les différentes influences sont bien plus décomposées, trop contrastantes entre elles. Au final, on sent que Tribulation a l'intention de jouer du Heavy-Death-Black-Rock-Psyché, mais on ressent finalement tantôt du Heavy, tantôt du Death, tantôt du Black, tantôt du Rock Psyché, alternativement, sans cohésion apparente, bien moins que sur album en tout cas. En attendant, pour passer le temps, on se régalera des mimiques de Jonathan Hultén à la guitare, qui avec ses manches amples et son torse nu, a une gestuelle grandiloquente et habitée. Fun à regarder, mais à consommer plutôt sur sa platine qu'à voir sur les planches.

Si Wintersun ouvre pour Arch Enemy, le groupe de Jari Mäenpää a tout de même une heure de temps de jeu prévu, de quoi satisfaire les fans. C'est sans compter les aléas du live : si l'absence de Kai Hahto derrière les fûts était prévisible (il est blessé à la main et est remplacé par Rolf Pilve de Stratovarius), celle de Jukka Koskinen ne l'était pas. C'est un technicien qui l'annonce à peine quelques instants avant le début du set des Finlandais : le bassiste est très malade, assez pour être hospitalisé. Wintersun n'en investit pas moins les lieux, et jouera avec la partie de basse samplée.
C'est Awaken From The Dark Slumber (Spring) qui ouvre le bal, pour un quart d'heure d'epicness d'entrée de jeu. Premier constat : l'abandon de sa guitare par Jari Mäenpää pour ne se consacrer qu'au chant est un choix judicieux, car le frontman gagne en présence scénique, et surtout gère mieux ses capacités vocales, qui sont vraiment impressionantes même en live. Quant à ses parties de guitare, la nouvelle recrue Asim Searah les assure avec facilité. Le son est bon, globalement assez équilibré, même si on entend peu la basse (mais au final, c'est comme sur les disques, et le bassiste n'est pas là, donc c'est relativement justifié ?).
Wintersun passera en revue tout son répertoire, et piochera deux morceaux de chacun de ses trois albums. Winter Madness et Sons Of Winter And Stars feront mouche, provoquant bien plus d'émules dans le public toulousain que le premier titre joué. Peu bavard entre les titres, le frontman enchaîne directement vers un autre extrait du dernier album, avec Loneliness (Winter). Un choix étrange, qui ralentit la setlist, mais on appréciera les prouesses vocales du chanteur, aussi habile en chant clair profond et habité qu'en screams. Battle Against Time, brûlot ultra-rapide issu de Wintersun, aide à se remettre dans le bain et à se préparer pour la tête d'affiche ; avant de conclure par le colossal Time. Rien à redire, si ce n'est qu'on rêverait d'en avoir plus.

On passera les trente minutes nécessaires au changement de plateau final à examiner le merch des groupes, que l'importante affluence dans la salle a contraint d'être séparé en deux parties (les stands de Wintersun et Tribulation sont au bar en dehors de la salle, dans le patio ; alors que ceux de Jinjer et Arch Enemy sont dans la salle en elle-même).
Puis vient l'heure fatidique où Set Flame To The Night (samplée) résonne dans un Bikini dont les lumières s'éteignent pour laisser Arch Enemy prendre possession des lieux. L'intro débouche non pas sur le titre d'ouverture de Will To Power, The Race, mais sur le single The World Is Yours. Son refrain ultra mélodique et l'énergie déployée dès le début du concert par la chanteuse mettent tout le monde d'accord : le combo a beau souffrir d'un cruel manque de renouvellement artistique, au fond, ça fait toujours aussi bien le café. D'autant plus que la sonorisation est encore une fois vraiment bonne dans son ensemble, mettant l'amateur de Death Mélo en de bonnes conditions pour se délecter des riffs incisifs de Michael Amott et de son nouvel accolyte Jeff Loomis (ex Nevermore). On notera malgré tout que le son de basse se résume à un buzz sursaturé, mais discret, de sorte que le son global n'en souffre pas.
La setlist s'articule autour des deux derniers albums, c'est à dire ceux sur lesquels officie la vocaliste tenante du titre. En parlant d'elle, Alyssa White-Gluz nous lance des "chantez !" un peu trop souvent sur les refrains des trois premiers titres (The World Is Yours, Ravenous, Stolen Life). Certes, son accent est charmant quand elle nous demande ça en français, mais ça nous flinguerait pas un peu notre plaisir, tous ces refrains instrumentaux ? La frontwoman se justifiera après ces trois titres en s'adressant à la foule, expliquant qu'elle a une grippe horrible et qu'elle n'a pas pu parler de la journée, ni de la veille, et qu'elle a même songé à annuler le concert. Et c'est vrai que sa voix "normale", sa voix parlée, est assez fébrile. Par contre, lorsqu'elle se remet à mugir pour entamer The Race, son rôle la transcende et la revoilà à sauter partout, à headbanguer, et surtout, à donner du growl comme jaja. Si elle ne nous avait pas parlé de son état de santé, il nous aurait été impossible de se rendre compte qu'elle était malade. Chapeau bas pour cet effort !
Malade ou pas, le groupe ne donne aucun réppit à sa chanteuse, et le concert repart de plus belle avec les titres les plus rentre-dedans et/ou les plus mélodiques de War Eternal et de Will To Power : War Eternal, You Will Know My Name, The Eagle Flies Alone, As The Pages Burn... Une vingtaine de titres seront interprétés, pour une heure et demi d'efficacité totale. Seuls deux passages permettent à Alyssa White-Gluz de reprendre son souffle : la semi-ballade Reason To Believe, et un solo de guitare instrumental en fin de set. Au milieu des titres récents se glissent néanmoins quelques succès passés, incontournables hits qu'Arch Enemy ne peut pas ne pas jouer : en plus de Ravenous déjà évoqué, Nemesis et We Will Rise joués en fin de concert finissent de tout défoncer, l'ambiance est au sommet, et le Bikini met du temps à se vider après la fin de la prestation du quintet. Des habitués du coin, comme on le disait, mais après tout, il semble que Toulouse en redemande...

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