Mastodon (feat. Scott Kelly), Red Fang, Russian Circles à Paris

par Neredude (17/12/2017)

Cinq ans ! Il aura fallu attendre plus de cinq longues années pour revoir Mastodon en tête d'affiche à Paris. Ce soir, l'Elysée Montmartre est blindée, et Scott Kelly est de la partie pour un set spécial avec le quatuor d'Atlanta. Tous les éléments étaient donc présents pour passer une bonne soirée !


Russian Circles

Leur dernier album est loin d'avoir fait l'unanimité, mais la perspective de voir Russian Circles sur scène est toujours réjouissante. Seul problème : malgré un bon son (bien meilleur qu'à la Berezina sonore que fût leur dernier passage au Trabendo) et un trio bien en forme, la setlist de quatre morceaux [sic] comporte deux titres de Guidance, et ces derniers coupent complètement le rythme du concert avec leur construction décousue et pas tout à fait efficace. En fait, sur les nouveaux morceaux, Mike Sullivan a plus un travail de texture sonore que de véritable riffeur, et ça se ressent dans le rendu des compositions, qui est moins puissant. On a alors l'impression que les riffs sont joués uniquement par la basse et la batterie, un ressenti vraiment étrange. L'idée est intéressante en théorie, mais ne réussit pas vraiment dans la pratique. 



Pourtant, nous avons bien affaire à un power trio dans le sens classique du terme, et le combo de Chicago arrive à déployer une ampleur impressionnante quand Mike daigne sortir ses (g)riffs. Son utilisation des loopers est vraiment bien pensée pour pallier l'absence d'un deuxième guitariste. Le dernier morceau "Deficit" permet donc à Russian Circles de se rattraper et terminer sur une bonne note, en plus de prouver que le groupe a encore largement la puissance de feu pour faire secouer les têtes. Copie à revoir.




Red Fang

Personne ne se fait d'illusions : si ce concert a affiché complet aussi vite, c'est en grande partie à cause de Red Fang, qui ne démord pas avec le succès en France depuis de longues années. Ils ont joué sur Mainstage au Hellfest, ont ouvert pour les Foo Fighters à Bercy (plutôt mourir que d'appeler cette salle par son nouveau nom/marque), rien ne semble arrêter leur ascension. Et cinq ans après une première partie de Mastodon au Bataclan, il était ainsi temps pour eux de remettre le couvert. Il est à la mode dans le milieu stoner/doom de se moquer d'un groupe dès qu'il a du succès. Ces critiques sont parfois justifiées mais il arrive aussi qu'elles soient exagérées.



Il aurait été définitivement plus tendance de préférer le concert de Russian Circles, mais force est de constaster que Red Fang fait un carton plein, et ce, d'entrée de jeu. Ils ont la bonne idée, quoiqu'un peu de risquée, d'entamer leur set avec leur plus grand tube après "Prehistoric Dog" : "Hank is Dead". D'emblée, l'Elysée Montmartre est conquise, avec des riffs qui, certes, n'inventent rien au genre, mais qui restent diablement efficaces, tout comme les lignes de chant d'Aaron Beam, qui a la voix juste ce soir, même si on ne l'entend que très peu au début du set.



Red Fang marque un deuxième point grâce à leur son : puissant et équilibré, laissant entendre distinctement les deux guitares et la batterie, tout en laissant aux fréquences basses assez de pêche pour nous faire vibrer les os comme se doit de le faire tout bon concert de stoner/doom. La formation ne prend ce soir aucun risque, et doit sans doute jouer peu ou prou le même set depuis des mois, voire des années... Et ça s'entend, rien n'est laissé au hasard, Red Fang est aujourd'hui une machine bien huilée.



Au diable donc les titres poussifs de Whales and Leeches, pour ne laisser place qu'aux meilleurs, comme l'endiablé "Blood Like Cream". Les cinquante minutes du set passent très vite, dans une ambiance bon enfant et atteint son climax avec "Prehistoric Dog", qui est décidément toujours aussi efficace sur scène. Joué par des musiciens contents d'être là et avec maîtrise, ce set de Red Fang aura chauffé le public à blanc pour Mastodon.


Mastodon

Encore une fois, le nouvel album de Mastodon a causé une polémique, la même qui fait rage parmi les fans depuis la sortie de The Hunter en 2011. Depuis cette date, le groupe a pour ainsi dire abandonné son orientation extrême et très technique pour se concentrer sur des compositions épurées, avec plus de chant clair. Cependant, cette nouvelle ère de Mastodon s'est également accompagnée d'une nette amélioration de leurs performances live, que ce soit au niveau de l'exécution (surtout pour le chant) et le son. Les deux camps de fans se retrouvent donc généralement sur les concerts, et admettent que le quatuor n'a jamais été aussi bon sur scène qu'aujourd'hui.



Ce fait est confirmé dès les premières secondes du set avec "The Last Baron", pièce épique qui vient clôturer l'un des chefs d'oeuvre de Mastodon : Crack The Skye. Le choix de jouer ce titre en ouverture est très surprenant, tant il a une ambiance qui siérait à une fin de concert, mais soit. Le combo joue suffisament rarement "The Last Baron" pour que personne ne s'en plaigne, quoiqu'une certaine partie du public semble ne pas connaître cette chanson. Tant pis pour eux.



Pour le reste du set, nous aurons droit à une majorité de titres d'Emperor of Sand comme les tubes "Ancient Kingdom" ou "Streambreather", entrecoupés de classiques comme "Mother Puncher", et étonnamment deux autres titres de Crack The Skye que sont "Oblivion" et "Divinations", qui révèlent une fois de plus un travail d'orfèvre sur ces compositions. Globalement, bien qu'à la limite de la justesse sur certains passages, les trois vocalistes du groupe s'en sortent avec les honneurs, particulièrement Brann Dailor avec ses lignes de voix aiguës tout en maltraitant sa batterie avec toujours autant de maestria.

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Le son est plutôt bon, quoiqu'un peu imprécis quand Mastodon joue ses morceaux les plus denses comme "Megalodon". La scénographie est assez ambitieuse, avec pas moins de 7 grandes colonnes-écrans pour afficher les visuels du combo. Deux bémols néanmoins : il aurait sans doute été plus intéressant de se contenter de travailler avec des couleurs et le jeu de lumières plutôt que d'y ajouter également des artworks, le dessin perdant de l'impact en étant séparé sur les colonnes. De plus, on constate avec effroi que les visuels sont pixelisés, sans doute à cause d'une résolution insuffisante pour ces écrans. A quoi bon projeter des dessins travaillés si c'est pour voir un tas de pixel dégueulasse à l'écran ? Ce n'est vraiment pas digne de la stature d'un groupe comme Mastodon, d'autant plus que beaucoup de groupes parviennent à avoir des scénographies très élaborées en concert avec moins de moyens. Dommage !



Ne nous mentons pas, ce qui rendait ce concert exceptionnel était la participation de Scott Kelly au set de Mastodon. Ami du groupe depuis leurs débuts, il a été invité sur une chanson de chacun de leurs albums depuis Leviathan. Et l'idée sur cette tournée étaient de les jouer en fin de set pour un final dantesque, et effectivement, ce fût digne de Dante. Scott est bien en voix ce soir, et l'entendre beugler ses parties sur "Aqua Dementia" ou "Crystal Skull" est jouissif. Mais le climax est atteint sur "Crack The Skye", morceau qui sonne comme la bande-son de l'apocalypse, un au revoir déchirant de Brann Dailor à sa soeur (qui s'est tragiquement suicidée à l'âge de 14 ans). La chanson de clôture est sans surprises "Diamond in the Witch House", morceau qui, de l'aveu du combo, sonne très Neurosis. Scott Kelly en profite pour empoigner sa guitare et ajouter son grain de sel neurosismique aux riffs forgés par Brent Hinds et Bill Kelliher. Peut-être bien que le concert aurait pu être encore meilleur avec plus de titres de The HunterBlood Mountain ou Remission, mais ça reste probablement le meilleur set que  Mastodon ait jamais donné sur le vieux continent. Un grand moment de metal.

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