Helmet
par Chorizo (29/11/2014)
Initialement programmée le 5 octobre, mais reportée, la date parisienne de Helmet pour les vingt ans de Betty a finalement eu lieu le 10 novembre à La Flèche d'Or. Putain, vingt ans déjà ? Je ne fais pas partie de ses enfants, ayant découvert Helmet sur le tard, mais la longévité - et l'efficacité somme toute tenace - dont fait preuve la bande de Page Hamilton jusqu'au récent Seeing Eye Dog force le respect. Helmet reste un des rares dinosaures de la scène lourde des années 90 à encore surnager et à rester fidèle aux convictions qui les animaient alors. Une bonne raison pour les suivre sur cette tournée commémorative à leur plus fameux album.
Sans surprise, le set de Helmet est coupé en deux. Dans un premier temps, c'est Betty, dans son intégralité et dans l'ordre, qui est joué. Puis, après une bière bien méritée, un panachage de titres piochés dans le reste de la discographie. Fair enough : un peu comme si le groupe assurait sa propre première partie et le service après-vente.
On prend, et c'est relativement tôt pour un parisien que le quatuor arrive sur scène pour y allumer ses guitares. On sait ce que l'on est en droit d'attendre de lui, et le groupe ne nous fera pas mentir. "Milquetoast", "Wilma's Rainbow" ou "I Know" possèdent cette immédiateté du riff, alliée à un feeling plus subtil issu du jazz, peut-être, ou du blues, plus certainement. Gros son, bruit incessant, et branlement de tête en cadence, Betty n'a rien perdu de sa fraîcheur et reste toujours d'actualité. La leçon de papa à ses rejetons, trop nombreux encore. On a, à peu près, tous glosé sur cet album durant la dernière décennie et Helmet prouve, avec ses petites rythmiques mid-tempo, qu'ils en ont encore sous la semelle.
Les quarante minutes passent crème, musicalement parlant. C'est à peu près à ce moment-là que Page Hamilton décroche ses premiers mots, pour remercier chaudement le public d'être venu aussi nombreux ce soir là, surtout après que le concert ait été reporté un lundi soir, et dédier la chanson suivante à la mémoire de son défunt paternel. Moment émotion en totale opposition avec sa seconde prise de parole pendant le rappel, qui s'apparentait plus à ce moment gênant tant redouté où ton oncle essaie de faire des blagues en fin de repas. Passons.
Si elle ne fait pas salle comble, La Flèche d'Or est cependant très bien garnie, belle récompense pour un groupe encore trop rare. Malgré tout, mais c'est peut-être dû à l'automne qui s'insinue sous la parka, l'ambiance reste froide. Ça dodeline de la tête et ça sirote des bières (chères) mais l'enthousiasme est loin d'être démonstratif. Étrange sensation que d'avoir à ses côtés un public sage, presque en mode quarantenaire finalement, quand on imagine le défouloir que devait être un concert de Helmet en 1994. Les enfants ont bien grandi. Cette remarque tient aussi sans doute à la communication minimale ou maladroite du groupe entre les morceaux, qui ne donne nullement l'impression de se retrouver avec de vieux potes avec lesquelles on ferait les quatre-cents coups toutes la nuit.
Cela n'empêche pas Hamilton de lancer en fanfare les hostilités de la seconde partie, avec "Role Model" et "Birth Defect". Du Aftertaste et du Meantime au menu, ça ne se refuse pas. Et peu importe, finalement, qu'un album soit meilleur qu'un autre, les compositions d'Helmet renvoient à l'unisson une impression d'homogénéité que des mauvaises langues pourront faire passer pour un manque d'inspiration et d'originalité flagrant. On retiendra ici le tranchant des riffs syncopés, et l'implication du groupe à fond derrière son leader. Lequel fondra en larmes avant le dernier rappel, après une éprouvante tournée et la sensation du devoir accompli. Moment émouvant où les quatre musiciens se retrouvent dans les bras les uns des autres.
Entre ces réussites, et l'incontournable "Just Another Victim" (co-écrit avec House of Pain pour le film Judgment Night - ce genre de film des années 90 aussitôt sorti, aussitôt oublié - mais que quand tu revoies le casting vingt ans plus tard, tu te dis que, quand même, Emilio Estevez et Cuba Gooding Jr...), entre ces réussites, donc, Helmet égrène aussi des morceaux plus mollassons issus de Seeing Eye Dog, qui souffrent de la comparaison avec leur prédécesseurs.
A 22h15, Helmet ne nous ayant pas habitués à des morceaux épiques de plus de dix minutes, tout est plié. On en ressort satisfaits, à la coule, mais avec un goût de frustration dans la bouche. Une sorte de concert à ranger dans la catégorie "bien, mais pas top", où un zeste de folie aurait suffit à enlever le show et à faire de cette date autre chose que quelque chose de déjà vu et entendu.
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