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Steve Righ? et Kitty (Mindless Self Indulgence) Le Trabendo, Paris, le 7 décembre 2013
C’est un Steve Righ? qui vient à peine de terminer sa sieste et qui est encore à moitié endormi qui m’accueille dans les loges. Je lui laisse le temps de se caler dans un coin du canapé et de se recouvrir d'un plaid avant de l'assaillir de mes questions.
En 2012, c’était la première fois que vous jouiez à Paris…
Oh non, on était venu jouer ici il y a plus longtemps que ça ! Je ne me souviens plus quelle année par contre.
Ah bon, j’ai raté ça et en plus j’ai raté votre passage en 2012 au Bataclan ! En tout cas sur votre site internet, il n’y a aucune trace d’un concert en France avant 2012…
Et bien, il y a quelqu’un qui va se faire virer (rires). Je t’assure, on est venu il y a longtemps, et l’an dernier j’étais malade, c’est pas plus mal que tu ne sois pas venu, j’arrêtais pas de gerber !
Aie, mais à part ça, ça s’était bien passé ?
Oui, être de passage à Paris, forcément ça le fait ! Les fans avaient l’air de me détester, je ne sais pas pour qu’elle raison (rires), c’était marrant. Avoir cette chance d’aller dans des endroits tellement riches en terme de culture, de gastronomie… Et en plus tu viens pour jouer ta musique devant tes fans, ça déchire ! Surtout en Europe, il n’y a pas de KFC à tous les coins de rue, enfin si maintenant ça commence mais bon, mais ça reste très dépaysant pour nous.
Vous trouvez quand même le temps de profiter des endroits où vous passez ?
Ça dépend. L’an dernier à Paris, on a eu le temps de rien faire, mais la fois d’avant, je suis allé au Louvres et à la Tour Eiffel car on avait un jour de repos ici ! Sinon généralement, on voit juste des parkings, des parkings, des parkings...
Quand vous êtes lancés dans Mindless Self Indulgence, vous avez en quelque sorte créé un énorme mélange de genres très différents : vous n’arriviez pas à choisir lequel vous vouliez jouer ?
En fait, c’est qu’on se disait à chaque fois “ah ça serait mieux si on mettait un peu plus de ça, mais aussi un peu plus de ça…” ça n’arrêtait pas ! Et oui, on n’avait pas envie d’être seulement des punks, ou seulement des métalleux. On n’avait pas envie de s’enfermer dans des règles inhérentes à un style. On voulait jouer ce qu’on aime, et on aime beaucoup de choses différentes qu’on met toutes ensemble, ça nous amuse, et au final ça sonne également plutôt bien. Dans ce cas, c’est soit tout bon, soit tout mauvais. On a été chanceux sur ce coup (rires).
Le contraire du crabcore qui penche plutôt du côté mauvais et malchanceux !
Mais carrément (rires).
Vous mettez à peu près cinq ans pour sortir un nouvel album, c’est votre rythme de croisière ?
Ça dépend ! Il y a beaucoup de paramètres qui rentrent en compte, et notamment au niveau personnel de chacun, avec pas mal de changements récemment : presque tout le monde a eu des enfants, c’est une belle façon de s’occuper. Mais au bout d’un moment tu te rends compte que tu as un job qui consiste à faire de la musique, et il faut donc faire un nouvel album. On est très content avec ce nouveau disque, surtout de la façon dont il a été financé, en crowdfunding. On est été très libres, personne pour nous dire « ne faite pas ci, ne dites pas ça, ce n’est pas un bon sujet pour une chanson », ces personnes là ont des idées bien arrêtées et ne cherchent qu’à servir leurs propres intérêts. Nous connaissons nos fans, nous avons fait quelque chose qui nous plait et qui, je pense, doit leur plaire.
Vous n’avez donc pas donné de concerts en 2010 et 2011 pour ces raisons, faire un break et profiter de vos familles ?
Carrément. On voulait être sûr d’être heureux de faire ce qu’on fait !
On peut revenir sur cette campagne Kickstarter, ça a été un carton !
On voyait ça comme le meilleur moyen pour tout le monde d’obtenir satisfaction, pour nous, et pour les fans. Si tu voulais dépenser qu’un seul dollar, tu obtenais l’album en format digital. Qui te vend son album pour un seul malheureux dollar aujourd’hui ? À côté de ça, on n’avait pas de maison de disque pour nous casser les pieds. On a aussi mis des affaires à nous en « vente », une de mes guitares custom est partie chez quelqu’un en Arizona. Il y avait des « lots » chers et donc le pack de base à un dollar. Chacun pouvait s’y retrouver suivant ses moyens et ses envies. Si un de mes groupes favoris faisait un truc pareil, j’y participerai pour sûr, dix fois même ! D’une certaine façon, c’était un peu la teuf, sur le mode gagnant-gagnant pour tout le monde. Mais iIl y a eu quelques personnes qui n’ont pas très bien compris, elles ont seulement regardé le nombre de donateurs et le montant total d’argent levé, et ont dit qu’elles trouvaient que ça faisait trop pour faire un disque ! Pourtant on a tout dépensé sur l’album, et quand bien même, s’il y avait eu un reste, on l’aurait partagé entre nous ! Et puis, divisé entre nous quatre, le montant total n’est pas si important que ça. Il y a juste des langues de pute qui ne peuvent pas s’empêcher de la ramener sur tout, tout le temps. Je pense que notre démarche était généreuse et cool. Si quelqu’un me propose d’avoir son album pour un dollar, forcément je l’achèterai plutôt que de le pirater, pour le principe. Et mon opinion sur le piratage n’arrête pas d’évoluer au fil du temps. Avant de me préoccuper vraiment de la question, j’ai pu télécharger illégalement des tas de trucs, merde je ne devrais pas parler de ça. Mais bon un dollar putain, c’est rien ! Et tu viens t’en plaindre, sérieux ! (rires)
Vous aimez donner des noms super longs à vos albums, est-ce que c’est dans le but de donner une description de leur contenu, pour que les personnes aient un indice sur ce qu’elles sont sur le point d’écouter ?
Tu oublies l’album If !
Oui je sais, et Tight aussi ! Tu es en train de pourrir ma question...
(Rires) C’est différent pour chaque album, le premier ont l’a appelé Tight, sans raison particulière. Pour le second, Frankenstein Girls Will Seem Extrangely Sexy, c’est Jamie Hewlett, l’artiste qui a fait la pochette et qui s’occupe aussi de Gorillaz, qui a trouvé le nom : il avait mis une légende sur son dessin avec la mention « voici ce que je pense de l’artwork » et il avait écrit ça. Quand on l’a vu, on s’est dit « voila le nom de l’album ! ». Pour le dernier How I Learn To Stop Giving A Shit And Love Mindless Self Indulgence, c’est un album avec une thèmatique sur Stanley Kubrick, le début du titre fait référence au titre d’un film, et il y a plein de références à sa filmographie tout au long, on s’est beaucoup amusé avec ça. À cette période là, on bloquait sur le fabuleux Stanley Kubrick (rires).
On ressent de plus en plus un côté dance/club dans votre musique, mais on dirait que ça a déplu à certain de vos fans des débuts. Comment percevez-vous cette évolution ?
Et bien, il faut toujours avancer, essayer des choses nouvelles pour ne pas refaire le même album à chaque fois. Tu ne peux jamais plaire à tout le monde, à moins d’être très chanceux ! J’ai pas vraiment d’opinion sur cette évolution, sauf qu’il y a toujours quelque chose de bon dans le changement, à moins d’avoir trouvé la formule magique et de pouvoir reproduire à chaque fois la même chose ,et surtout que ça marche.
Comme ACDC ?
Totalement ! Mais je ne suis pas sûr que ça soit vraiment cool d’écrire et réécrire Stiff Upper Lip encore et toujours (rires)
Faut-il comprendre l’artwork de How I Learn To Stop Giving A Shit And Love Mindless Self Indulgence comme si l’univers était déjà condamné, mort et prêt à être enterré ?
C’est assez énigmatique, je ne saurais pas te dire le vrai sens profond de la pochette, mais oui je pense qu'on peut l’interpréter de cette façon ! (NDLR : Kitty rentre dans la pièce à ce moment)
Kitty : Bonjour, qu’est ce qui se passe ?
Steve : On était en train de parler de la signification de la pochette de l’album. Mais je sais pas trop comment lui expliquer.
Kitty : Ça fait partie du jeu !
Steve : Oui, ça fait partie du jeu. Que veut dire ce cercueil sur la pochette… bah que c’est un cercueil !
Kitty : on s’envoit aussi des messages codés entre nous quand on est sur scène.
Steve : On n’arrête pas ! (rires)
Votre chanson It Gets Worse est votre réponse à la crise internationale actuelle ?
Steve : C’est très personnel, c’est la chanson la plus honnête qu’on ait écrite depuis un long moment. On n’est plus des enfants maintenant, et ce n’est plus la peine de rester dans cette hypocrisie naïve. Là Jimmy est au contraire très direct avec cette chanson dans laquelle il adresse un message aux jeunes : à moins d’avoir plein de thunes et/ou d’être super canon, la vie ne va pas s’améliorer, bien au contraire. Tu as des problèmes maintenant ? C’est rien, ça sera pire l’an prochain ! J’admire vraiment Jimmy sur ce coup pour son honnêteté, et en même temps je le déteste pour sa cruauté (rires).
Kitty : Je pourrais rajouter que c’est facile de dire à un enfant que les choses vont s’arranger, quand t’es ado et que tu trouves que tu as une vie de merde, ça te rassure d’entendre ça !
Steve : Tu leur dis « oui, ça va s’arranger ! », puis tu passes ton chemin…
Kitty : Mais tu auras quand même à traverser toute cette merde, toutes les années de lycée, à subir la violence et les harcèlements inhérents à cette période ! Donc parfois oui, tu peux avoir envie de ne plus leur mentir et de leur dire « ça va empirer ».
Steve : C’est un message à double sens plutôt cool en fait, pour leur faire comprendre "en fait, tu ferais bien d’en profiter tant que tu peux, ce n’est pas si mal finalement, et surtout ça va pas s’arranger !" (rires)
Quelle serait ta recette pour une chanson parfaite ?
Steve : ça dépend du type de chanson ! Mais bon, il faut une bonne structure, pas de passages bizarres ou tordus, et je déteste les personnes qui jamment inutilement pour rallonger la durée d’une chansons. (NDLR : Kitty s’en va). Je pense que même les plus belles chansons jamais composées ne sont pas sans défauts.
Vos chansons sont plutôt courtes d’ailleurs !
Oui, il y a souvent des groupes qui font de belles chansons et d’un coup il y a un passage pourri au milieu, on se demande pourquoi ils ont mis ça là ! Nous évitons de faire ça (rires). Au pire si on a une idée de merde, on la retire de la chanson, on la met de côté et on la recycle pour plus tard… Ou on la jette ! Donc au final, je ne pense pas qu’il y ait vraiment de recette, en tout cas pour moi.
Tu écoutes quoi toi comme musique ?
Kitty écoute énormément de K-pop, moi j’écoute du classic-rock et tout un tas de vieux trucs avec lesquels Jimmy n’est pas très familier. Lui écoute beaucoup d’électro, forcément. Ça explique pourquoi on fait une musique qui se situe à la croisée de tant de styles.
Jimmy parle tout le temps de sexe dans les paroles de ses chansons…
… Et dans ses conversations de tous les jours également ! (rires)
Pourras-tu lui dire qu'en France on a un proverbe "ce sont ceux qui en parle le plus qui en font le moins".
(Rires) Je ne pense pas que ça soit vrai dans son cas ! Mais là je ne peux pas parler au nom de Jimmy sur ce thème, même s’il a une sacrée grande gueule. Pour moi par contre, c’est vrai, j’en parle beaucoup, mais je ne fais rien, mais alors rien du tout ! Sauf pour faire des bébés… Bon ok, je déconne.
Avec l’univers que vous vous êtes créé, Mindless Self Indulgence est un groupe dont on pourrait attendre plus sur l’aspect visuel, mais vous ne faites pas beaucoup de clips vidéos, et niveau scénique, vous vous contentez du minimum, pourquoi ?
Très bonne question ! Je serais de ton côté sur ce sujet, mais je ne saurais pas quoi te répondre. Il y a le côté économique qui rentre en jeu, il faut un budget pour ça. Pour l’instant, tous les clips qu’on a pu faire, je ne les aime pas, pour plein de raisons, mais je pense qu’on devrait se pencher sur la question prochainement, car là on a de l’argent pour le faire !
As-tu déjà entendu parler du groupe Punish Yourself ? ils sont français.
Non !
C’est un groupe d’électro/punk/Indus, ils font leurs concerts à moitié nu, le corps recouvert de peintures flurorescentes, avec des lasers et un performer sur scène, même si la musique n’a pas trop à voir avec Mindless Self Indulgence, ça reste proche dans l’esprit, je pense que tu devrais aimer.
Ok, j'essaierai d'écouter ce qu'ils font. On joue sur scène avec des lumières blanches depuis des années. J’adorerai ça des rayons lasers et tout. Mais par contre, je ne suis pas sûr que ce soit un cadeau de me voir à moitié nu sur scène ! (rires)
Qu’est qu’on peut attendre de votre album de remix de la chanson Fuck Machine ?
Qu’il va déchirer ! (rires) Nan mais il y aura des remix vraiment cool dedans, des trucs bien marrants !
Il y aura un remix de vos potes de Combichrist ?
Oui, après je ne me souviens plus de tous les noms ni tous les détails, l’artwork sera bien sympa aussi ! Un truc qui pourrait donner des idées aux personnes qui se font des tatouages débiles façon branding.
Des chances de vous revoir Jimmy et toi dans un side project comme The Left Rights ?
Actuellement, on est à une dizaine de chansons pour The Left Rights depuis la fin de la campagne Kickstarter, on est en plein milieu là, et avec la tournée ce n’est pas simple à gérer. Je ne sais pas comment on va se débrouiller avec ça, si on va poster les chansons une par une dès qu’elles seront finalisées, ou en faire une compilation un peu plus tard. J’ai réécouté la deuxième chanson il n’y a pas longtemps, je sais ce qu’il y a dedans et pourtant elle me fait encore rire, c’est assez absurde ! Il y a un flow très particulier et plein de références cachées dedans et de "private jokes" qui ne seront sûrement comprise que par nous ou nos proches.
Des nouvelles pour votre label Uppity Cracker Records ?
Je ne suis au courant de rien !
C’est plutôt Jimmy qui s’en occupe ?
On ne peut pas vraiment dire que quelqu’un s’en occupe… On a lancé ce truc il y a bien longtemps, et c’était dans le but d’avoir le contrôle sur notre processus artistique.
Dernière question, est-ce que tu connais d’autres mots en français à part "à la mode" ?
Ah, oui on était en Angleterre, et on nous a dit quelques mots en français là-bas, "ticket", "billet", "fromage" c’est le mot le plus important, "sortie". Mais "à la mode" reste mon favori !
Merci à Steve Righ? pour sa disponibilité et sa bonne humeur ! Merci à Ninon et Live Nation pour avoir organisé cette interview. Merci au Trabendo pour l'accueil.
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