Shining Par Mail

A l'occasion de la sortie de Blackjazz Live et du passage de Shining en France, Metalorgie a pu poser quelques questions à Jorgen Munkeby, chanteur, guitariste et saxophoniste du combo. On vous laisse lire le résultat.

Metalorgie : As-tu toujours joué du blackjazz ? Peux-tu nous décrire la voie musicale que tu as empruntée pour arriver à jouer ce style de musique si particulier ?
Jørgen Munkeby (chant, guitare, saxophone) : J’ai personnellement joué de tout style de musique. Tout, du classique au contemporain, de l’improvisation, du rock, du hip hop, de l’électro, du blues, du jazz, jusqu’au metal. En tant que groupe, Shining, a débuté comme un groupe de jazz acoustique des années 60, avec une batterie, un piano, une contrebasse, moi au sax, une flute et une clarinette. Notre premier album qui est sorti en 2001 était très inspiré par John Coltrane et d’autres artistes de jazz américains. Notre deuxième album, sorti en 2003, était plus contemporain avec des éléments d’Olivier Messian et Schönberg mélangé au free jazz des dernières productions de Coltrane. Mais tout demeurait alors purement acoustique. En 2005, nous avons sorti un album qui comportait des guitares rock et des synthétiseurs, les chansons étaient plus complexes, avec des instrumentations plus importantes. Cet album était plus un projet orienté studio que les deux premiers et donc plus compliqué à adapter à une configuration live. En 2007, nous avons sorti un autre album orienté studio, avec cette fois encore plus d’influences rock et metal, avec un son plus brut par-dessus. Après cela, nous n’avons jamais cessé d’incorporer de plus en plus de metal dans notre musique. Ça nous a amené à tourner avec Enslaved en 2008 et à la collaboration The Armageddon Concerto, que nous avons composé en interprété ensemble. En 2010 est sorti ce qui est désormais notre album classique, Blackjazz, qui fut encore plus « hard ». Cette fois notre son a plutôt été influencé par la musique industrielle américaine des années 90. La musique fut déshabillée de beaucoup de ses éléments qui n’étaient pas rock ou metal et l’instrumentation dépouillée pour obtenir un son bien plus agressif. Ce nouveau genre fut la base de notre extraordinaire album live et concert filmé, Live Blackjazz qui est sorti en Europe le 11 novembre et le 17 janvier aux USA. Cependant il est peut-être important de préciser que, même si le groupe a débuté en tant que groupe de jazz, tous les musiciens ont grandi avec du metal et écouté du metal bien avant d’écouter du jazz. C’est pour ça que j’ai eu le sentiment de rentrer à la maison après un long et intéressant voyage, lorsque nous avons sorti Blackjazz en 2010.

Peux-tu-nous dire à quel point c’était important pour vous de faire un dvd live ? Est-ce un manifeste du blackjazz ?
Oui, c’est sans aucun doute un manifeste du blackjazz. Ce fut en fait l’une des nombreuses options pour le titre de l’album live. C’était très important pour moi de faire ce dvd live parce que j’ai ressenti que la musique serait plus efficace avec des images. La vidéo nous aide à faire ressortir l’intense énergie qui nous est nécessaire pour jouer cette musique et cela permet aussi au spectateur de voir toute la communication qui investit la scène lors des parties d’improvisation. J’ai vraiment le sentiment que tout ça ressort dans Live Blackjazz.

Te considères-tu plus comme un musicien de jazz ou un musicien de metal ?
Je crois que je me sens plutôt musicien de jazz que de metal.

Quels artistes considères-tu comme tes principales influences ?
Il y en a beaucoup mais mes influences principales sont surement John ColtraneMichael Brecker, Death, Pantera, The Dillinger Escape Plan, Meshuggah et Olvier Messiaen.

Peux-tu nous expliquer comment tu parviens à composer des titres à ce point inspirés et complexes ?
Merci pour le compliment, je suis content que tu les trouves inspirées ! J’écris des chansons de la manière dont j’aimerais que les autres groupes le fassent. J’essaye de les rendre intéressantes pour moi. Habituellement, cela signifie qu’elles doivent être un peu complexes et avoir beaucoup d’énergie, c’est principalement ce que je recherche. D’un point de vue technique, je compose de la musique de nombreuses façons différentes. J’écris dans ma tête, je m’assois devant mon ordinateur, je joue de la guitare, du sax ou peu importe ce dont j’ai envie de jouer. Mais en général, je préfère écrire des trucs dans ma tête, sans instrument.

Fut-il difficile d’interpréter Blackjazz en live ?
Non, en réalité Blackjazz fut l’album le plus simple à jouer en concert, car tout fut répété en tant que groupe avant d’enregistrer. L’instrumentation était aussi bien plus dépouillée que sur nos précédents albums de 2005 et 2007, ce qui rendit très aisée la transition vers une configuration live.

Quel est ton meilleur souvenir de la tournée ?
Mon meilleur souvenir du la tournée européenne de novembre est probablement le sentiment général que les choses allaient mieux que jamais auparavant. Il y avait plus de monde aux concerts, nous avons vendu plus de merch, le groupe était plus soudé et en forme que jamais, aussi plus flexible, l’humeur dans le bus était meilleure. Tout était meilleur.

Vous avez remporté deux « Alarmprisen », peux-tu décrire ces récompenses et cet évènement à nos lecteurs français ?
Les « Alarmprisen » awards sont les Grammy awards norvégiens alternatifs, qui sont en fait plus importants que les Grammy awards mainstream de Norvège pour beaucoup de personnes.

Blackjazz est complexe et dense. Cela peut potentiellement déstabiliser mais beaucoup de gens semblent l’avoir apprécié. Comment expliques-tu ce phénomène ?
Je pourrais parler de cela pendant des heures, mais pour faire court je voudrais mettre en évidence le fait que le niveau global d’intensité et de dissonance dans la musique a augmenté de façon spectaculaire au cours des 400 dernières années. Quand tu penses au scandale de la première du « Sacre du Printemps » de Stravinski en 1913 à Paris et à comment cette musique apparait comme soft par rapport à ce que les kids écoutent aujourd’hui. Les gens veulent de plus en plus de puissance et d’intensité dans la musique, parce qu’ils trouvent ça intéressant et excitant. C’est surement pour ça que tant de gens aiment notre musique. Justement car elle est intense, lourde, brute et complexe tout en étant sacrément accrocheuse. Je crois aussi que ça aide d’avoir de bonnes gueules, de bien se comporter et de ne pas faire des choses stupides.

Pourquoi avez-vous décidé de reprendre cette chanson de King Crimson ?
C’est en fait notre guitariste qui a choisi cette chanson de King Crimson. A ce moment-là, je n’avais pas vraiment écouté ce groupe, mais quand nous avons commencé à jouer autour de cette chanson pour en faire notre propre version, nous avons tous trouvé que ça marchait bien. Je ne pense plus à ce titre comme si c’était une reprise. Je pense que c’est devenu notre propre chanson et parfois j’oublie que c’est quelqu’un d’autre qui l’a composée.

Pour toi, quel est le titre qui représente le mieux Shining en 2011 ?
La dernière chanson que j’ai écrite représente le mieux Shining. Je l’ai écrite juste avant noël 2011 et nous l’avons jouée deux fois en janvier 2012.

Il y a Shining suédois. As-tu déjà entendu un de leurs albums ?
J’ai écouté tous leurs albums, mais c’est leur album Halmstad dont je me rappelle le mieux. Je trouve que c’est album très cool.

Quelle est la symbolique du nom Blackjazz ? Est-ce une référence au black metal ?
C’est un mélange entre les titres d’albums Free Jazz d’Ornette Coleman et Black Metal de Venom.

Quels sont tes projets pour 2012 ?
Je compose de la nouvelle musique pour Shining. Aussi, nous tournerons où et quand nous aurons envie.

La Norvège est connue pour son black metal. Peux-tu nous donner des noms de groupes qui ne font pas de black mais que trouves incontournables ?
Je dois admettre que j’écoute rarement de la musique norvégienne, je ne peux donc pas vraiment répondre à cette question.

Qu’écoutes-tu lorsque tu es en tournée ?
Quand je suis en tournée je préfère le silence, comme le reste du groupe. Mais chez moi j’ai beaucoup écouté Brad Paisley ces derniers temps. J’adore son album This is Country Music.

Vous avez souvent joué avec Enslaved. Quelle est votre relation avec ces musiciens ? Que penses-tu de la direction plus « prog » qu’ils empruntent ?
Je parle souvent avec ces gars, surtout avec Ivar et Grutle. Ils sont fans de notre musique et je suis fan de la leur. Je trouve que leur développement vers la musique progressive ressemble à un développement très naturel et je suis très heureux qu’ils soient découverts par de plus en plus de monde. On dirait bien qu’ils vont devenir un gros groupe et ils le méritent assurément.

Jeanvaljean (Janvier 2012)

Interview réalisée par Jeanvaljean et Euka.
Merci à Jorgen pour les réponses et à Eileen pour avoir échangé les différentes informations.

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Commentaires

FreddadxLe Samedi 28 janvier 2012 à 20H39

Hâte d'entendre leurs prochains morceaux.