|
Dianne van Giersbergen par email, 2023
Pour célébrer la sortie de son tout premier single solo, Dianne van Giersbergen (Ex Libris, ex-Xandria) a accordé une interview écrite à Metalorgie. On a pu discuter de la création de son futur album Soulward Bound, de son parcours ces cinq dernières années mais aussi de l’industrie metal. (Version originale en dessous, English version below)
Bonjour Dianne ! L’actualité qui t’entoure est braquée sur le début de ta carrière solo. Le 13 septembre 2022, précisément cinq ans après avoir pris la lourde décision de quitter Xandria, tu as annoncé ton grand retour sur la scène metal. Comme on peut le comprendre à travers les paroles de ton premier single, After the Storm, durant les cinq années qui suivirent cette décision, tu as été comme prise au cœur d’une tempête. As-tu la sensation d’avoir surmonté les obstacles qui se trouvaient devant toi à ce moment-là, peut-être grâce à ta musique que tu as utilisé comme une thérapie pour t’aider à avancer ?
C’est une question profonde ! Mais tu as vu juste. Lorsque j’ai eu l’idée de créer un album solo, je voulais que ce soit pour raconter quelque chose de significatif. Avec Ex Libris, mon (autre) groupe, on crée de la musique autour de personnages historiques, et bien que ces histoires soient toutes pleines de sens, je sentais que le seul récit digne de mon tout premier album serait celui sur ma propre aventure. J’ai choisi de démarrer cette histoire au moment où j’ai quitté Xandria. Regarder une dernière fois en arrière, analyser tout ce qui a pu se passer, et utiliser cette douleur pour composer mon premier morceau. Alors oui, c’est absolument thérapeutique ! Mais pas seulement à cause de ça. Avec la sortie d’After the Storm, j'ai pu transformer une chose négative de ma vie en une chose positive, ce qui est aussi un moyen de tourner la page.
Le premier single, After the Storm, est sorti le 14 février dernier. C’était alors la première fois depuis 2019 et le dernier album d’Ex Libris que tes fans ont pu t’entendre sortir le grand jeu une nouvelle fois. J’imagine bien que les retours ont été élogieux puisqu’on ne savait pas vraiment ce qu’il allait advenir de ta carrière musicale. Tu as dû ressentir énormément de pression. Mais malgré cela, tu as su bien t'entourer : Joost van den Broek t’as aidé à produire ce single et tu as fait appel à des musiciens talentueux. Est-ce qu’ils t’ont tous aidée dans le processus de composition ou tout était déjà clair dans ta tête, tu savais précisément où tu voulais aller ?
Dire que je n’ai pas ressenti de pression serait un mensonge ! Revenir dans le metal symphonique, après une longue absence, ce n’est pas quelque chose qu’on peut faire sans un plan précis en tête. Ou sans s’entourer d’une bonne équipe. Le premier single devait être impactant, un point c’est tout. Mais tout débute à partir du moment où tu crées la musique que tu aimes, qui est authentique et qui te vas comme un gant. Je n’adhère pas à l’idée de composer quelque chose « pour le public ». Si tu n’y mets pas toute ton âme, alors pourquoi (et comment !) les autres pourraient s’y intéresser ? Connecter avec ? Être entouré de gens de confiance, qui font ressortir le meilleur en toi, c’est primordial. Et c’est ce que j’ai trouvé en la personne de Joost van den Broek que j’ai rencontré lors de la production de l’album Sacrificium avec Xandria. Je me suis toujours sentie à l’aise depuis en travaillant avec lui. C’était évident que j’allais lui demander de m’aider pour co-écrire, orchestrer et produire mon premier single. Je voulais aussi travailler avec des musiciens que je considère comme de très bons amis. Des gens qui m’ont aidée lorsque j’ai quitté Xandria et dont j’étais certaine qu’ils m’aideraient dans ma carrière solo. Je suis très heureuse d’avoir Isaac (Epica), Johan (Blind Guardian) et Koen (Van Den Berg) à mes côtés pour After the Storm ! (Je serais accompagnée par d’autres musiciens pour la suite !)
En écoutant l’un des derniers épisodes de ton podcast Are we Better Friends Yet, tu indiques avoir peur de la sortie imminente du premier clip, notamment parce qu’il s’agit de la première fois que tu fais quelque chose seule pour toi-même. Maintenant que cette vidéo est sortie, comment te sens-tu ?
Je ne suis plus effrayée et c’est surtout grâce à la communauté metal (symphonique) qui non seulement m’a accueillie à bras ouverts mais m’a aussi littéralement couverte de milliers de messages pour me dire qu’ils avaient attendu mon retour depuis tout ce temps. Au final, il n’y avait pas de quoi avoir peur, mais je crois que l’on doit toujours rester humble et douter de soi-même en fait partie. Ça fait de nous des êtres meilleurs et de meilleurs artistes.
Concernant l’album dans son intégralité, tu as décidé de le sortir d’une manière peu ordinaire. Si j’ai bien compris, durant les cinq prochaines années, tu sortiras deux singles par an et l’album sera complet dans cinq. Tout d’abord, pourquoi avoir fait ce choix ? Il est évident que ça va prendre un certain temps avant que tes fans puissent écouter l’œuvre dans son intégralité. Mais je dois tout de même reconnaître que ça crée un suspense assez intense !
Il y a trois raisons qui m’ont poussée à faire ce choix. La première c’est que l’histoire que je vais raconter à travers mes chansons s’est déroulée sur cinq ans et ce ne serait pas lui rendre justice de déblatérer les différents thèmes d’un coup, ce qui se passerait si tout sortait en même temps. Ensuite, j’ai toujours trouvé ça dommage que les premières moitiés d’album soient les plus écoutées, alors que les musiciens se donnent tout autant de mal sur les autres morceaux. En sortant chaque chanson en un single, je vais bien évidemment créer du suspense mais aussi avoir l’occasion de parler plus en détail des paroles et de la composition à chaque fois. Mais il y a aussi une raison pratique, ce qui m’amène au dernier point. En plus de ma carrière solo, je suis aussi chanteuse lead d’Ex Libris, le groupe de metal symphonique progressif que j’ai monté en 2004, bien avant de rejoindre Xandria. Avec Ex Libris, on prévoit des nouvelles sorties dans l’année en cours et j’ai besoin d’y accorder toute mon attention. Et puis j’ai aussi lancé un podcast avec Marcela Bovio (MayaN). Enfin, et surtout, je dois aussi m’occuper de ma marque de bijoux : Precious Metal Jewelry (www.preciousmetaljewelry.com), avec laquelle je crée des parures à base de cordes de basses/guitares et cymbales que l’on me donne. Je reçois des dons de groupes célèbres et émergent du genre et, grâce à cette méthode de recyclage, les matériaux ont une seconde chance de briller et les bijoux alors fabriqués racontent une nouvelle histoire !
Est-ce que tous les singles sont déjà composés et enregistrés ou bien c’est un voyage que tu vas faire pas à pas ?
Pas à pas ! Je vais répéter ce cycle d’écriture, de préproduction, d’enregistrement, de mixage et de mastering, de promotion et de sortie pour chacun des singles. Pour être honnête, c’est beaucoup plus de travail que de le faire en une fois mais c’est assez fun à faire !
Pour terminer, j’aimerai parler de l’industrie du metal symphonique. Je me suis rendue compte que depuis quelques années, le genre a vraiment changé. Le côté lyrique tend à être relayé au second plan par la plupart des groupes évoluant dans ce style. Aux vues de ton parcours musical, étant donné que tu utilises grandement tes techniques opératiques – ce que tu as fait dans Xandria, que tu fais dans Ex Libris et que tu feras sans nul doute dans ta carrière solo – quel est ton point de vue sur cette question ? Penses-tu que le metal symphonique – comme on l’imagine aux débuts de groupes comme Nightwish ou Epica – tend à disparaître aux profits de sons plus pop/rock, heavy ? Personnellement, j’en suis venue à la conclusion que, comparé à il y a une vingtaine d’années, un public plus large, mais aussi nouveau et plus jeune, écoute du metal symphonique et les labels veulent garder la main sur ces nouveaux auditeurs qui pourraient être plus proches d'un son pop-rock que d’un son opératique. Je me demande vraiment comment cette évolution est arrivée et je suis curieuse d’avoir ton opinion !
Je ne peux pas parler pour les labels mais voici mon avis en tant que chanteuse : effectivement, j’ai aussi remarqué que les chanteurs choisissent beaucoup plus souvent les techniques pop que les techniques classiques/opératiques. En tant que chanteuse de formation classique, je dois ajouter que la majorité de ces vocalistes n'ont pas fait d'études complètes sur le chant classique et ne peuvent donc faire que quelques « trucs », ce qui pourrait les amener, de manière compréhensible, à ne pas vouloir répéter cela encore et encore. Autre chose, les techniques vocales actuellement en vogue sont issues de la pop avec des méthodes comme le belting et l’overdrive. Mais quelle qu’en soit la cause, le changement est notable. La raison pour laquelle je suis tombée amoureuse du genre est le mélange entre le chant classique/opératique et la musique métal complétée par des arrangements orchestraux. Et même si certaines des chansons issues de ce « nouveau son » sont très bien écrites et interprétées, elles ne m’emballent pas autant que celles du « vieux son ». C'est exactement la raison pour laquelle je créé toutes les chansons de Soulward Bound dans ce mélange de genre. D’autres s’éloignent de ce son, mais pas moi ! C’est ce que j’aime, ce pour quoi j’ai été formée et ce que je continuerais à créer.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
English version
Hi Dianne! The actuality surrounding you right now is entirely about the debut of your solo career. Last September, precisely on the 13th, you announced your return to the metal scene after the big decision you took of leaving Xandria, five years ago. As we can understand with the lyrics of your first single is that during the five years after this decision, you were like really caught up in a storm. Do you feel like you have overcome it, especially thanks to your music that you might see as a therapy?
That's a deep question! But I think you're spot on. When I came up with the idea to create a solo album, I knew that it had to be about something meaningful. With my (other) band Ex Libris we write music about historical characters, and although those are very meaningful stories to tell, I knew that the only story fitting for my debut solo album was the one about my own journey. I've chosen to start that journey at the point where I left Xandria. To glance back one more time at all that happened and use that heartbreak as fuel for my first song. So yes, it's absolutely therapeutic! And not only that, with the release of After the Storm I get to turn a negative thing into a positive thing, which is indeed the way to closure.
The first single, After the Storm, was released on February, 14th. It was then the first time since 2019 with Ex Libris that fans got to see you hit your A-game once again. I imagine that the feedbacks you received must have been quite prestigious since we didn’t know what would become of your musical career apart from Ex Libris. I assume you might have felt a lot of pressure with this release. But you were quite well surrounded with people like Joost van den Broek that helped you produced this single or other really talented musicians. Did they all helped you with the process of composition or was everything already settled in your mind and you already knew what riffs of guitars you wanted to have for example?
Well, saying that I didn't feel the pressure would be an absolute lie! Stepping back in to the symphonic metal genre, after being absent for so long, isn't something you can do without a well-thought-out plan. Or without surrounding yourself with the right team. The first single just has to make an impact, no question about it. But with that said, I do believe that it all starts with creating music that you yourself absolutely love, that is genuine and fits you like a glove. I do not believe in creating something 'for the audience'. If your soul isn't in it, then why (and how!) should others connect to it? Finding people to work with whom you trust and who bring out the best in you is also evident. I found that in producer Joost van den Broek when I met him during the production of Xandria's Sacrificium album, and have felt comfortable working with him ever since. It was a no-brainer to ask him if he wanted to team up with me to co-write, orchestrate and produce my first solo album After the Storm. I also wanted to include musicians that I regard as good friends. People who have supported me when I left Xandria and of whom I had no doubt that they would be supporting me in my solo carreer. I'm really happy to have Isaac, Johan and Koen on my first single! (The other singles will feature other musicians!)
I listened to one of your podcast episodes, Are we Better Friends Yet with your long-time friend Marcela Bovio and in the episode “Challenge Accepted” that you recorded at the beginning of the year, you said that you were really scared about the release of the After the Storm video because it is the first time you are doing something on your own for yourself. Is this scary feeling still here?
I am not scared anymore and that's because the (symphonic) metal community has not only embraced my comeback but also confirmed (through literally thousands of messages) that they were waiting for me all along. So in retrospect there was nothing to be afraid of, though I do believe that one should always remain humble and self-doubt is a big part of that. It makes you a better human and an even better artist.
So, regarding the album in itself, you have decided to release it in a most original way. If I understand right, in the upcoming five years, you will release two singles per year and then, the album will be complete in five years. First things first: why did you choose to release it that way? Because obviously, it will take quite an amount of time before your fans are able to hear the entire album. However I must say that it builds up a pretty intense suspens!
There are three reasons why I choose to release my album this way: the first is that the journey that I will be telling you about through my lyrics took my 5 years to complete, and it wouldn't do it justice to blow over the topics, which would happen if they all would be released at the same time. Another reason is that I have always felt it a shame that the first half of the album is the part people listen to the most, while musicians also pour their heart and soul into the other songs. By releasing every song a single, I will indeed build the suspense, but also have the option to share much more details of the song and lyric. But of course there is also a practical side to it. Next to my solo album I am also still frontwoman to Ex Libris, the progressive symphonic metal band that I founded in 2004, so well before I joined Xandria. Ex Libris is also planning on releasing more music in the upcoming year and also needs my attention. Then I indeed also have a podcast together with Marcela Bovio and last but certainly not least there is also my own jewelry brand/business: Precious Metal Jewerly (www.preciousmetaljewelry.com), for which I create jewelry out of donated (bass) guitar strings and cymbals. I have famous and upcoming bands from the genre donating to me and by this way of upcycling the materials get a second chance to shine and the jewelry creations tell a story!
Now, I wonder, are all the singles already written and recorded or is it a journey you will make step by step?
Step by step! I will repeat the cycle of writing, pre-production, recording, mix, master, promotion&release for all singles. To be honest, it’s much more work than doing it all at once, but it’s great fun!
Finally, I would like to finish this interview with a general note regarding all the symphonic metal industry. I’ve realized that symphonic metal has really changed since a few years. The lyrical aspect of it tends to be put on a second plan by most of the bands playing this genre. Regarding your background and that you do use this authentic operatic voice of yours – you did with Xandria, still do with Ex Libris and will do with your solo career as we have seen on the latest video – did you have the same point of view about this question? Do you maybe feel or have the impression that symphonic metal – as we imagine at the very beginning of bands like Nightwish or Epica – tends to fade away and is slowly replaced by more pop-rock/heavy stuff? I have come to the conclusion that compared to twenty years ago, a bigger audience – but also new and younger – listens to symphonic metal and that labels want to keep a hand on these new listeners that might be closer to a pop-rock vibe than to an operatic one. I just wonder how this evolution came up. I am curious to have your point of view!
I can't look at it from a label's point of view. But here is my opinion as a singer: I have indeed also noticed that singers choose pop vocal techniques over classical/operatic vocal techniques far more often nowadays. As a classically trained singer, I do have to add that the majority of these singers didn't do a full study on classical vocals and can therefore only do a few 'tricks', which might lead to them, understandably, not being interested in repeating that over and over again. Another thing might also be that multiple vocal technique methods that are currently trending, are mainly focussed on pop techniques such as belting and overdrive. But whatever the reason, the change is very notable. The reason I fell in love with the genre was the cross-over between classical/operatic vocals and metal music completed with orchestral arrangements. And although some of the songs from the 'new sound' within symphonic metal are very well written and performed, they simply do not win me over the way that the 'old sound' did. Which is the exact reason why I am creating all songs from "Soulward Bound" in the cross-over between classical/operatic vocals and symphonic metal music. Others might move away from that sound, but I won't! It's what I love, what I vocally trained for and what I will continue to create.
Commentaires
Pas de commentaire pour le moment
|
|