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La Sélection #10 : Meshuggah commenté par Michel Nienhuis (Dodecahedron, Our Oceans, Exivious) (2019, par mail)
Comment ça, mais nous avons déjà eu une Sélection sur Meshuggah ?? Et c'était il n'y a pas si longtemps. Oui, mais il ne faut pas oublier que nous parlons ici d'un des groupes les plus novateurs de la scène Metal depuis bientôt 30 ans et qu'un deuxième avis n'est jamais de trop. De plus, l'influence des suédois est telle qu'elle va même trouver des ramifications dans le black metal froid et complexe de Dodecahedron, qui sont allés jusqu'à écrire un morceau basé sur une des chansons de Chaosphere pour célébrer les 20 ans de l'album en 2018. Michel Nienhuis, principal compositeur du groupe, vous a sélectionné le meilleur pour découvrir ce groupe fascinant.
Le meilleur album pour découvrir Meshuggah : Destroy Erase Improve (1995)
Bien que Destroy Erase Improve soit un album relativement ancien, il incarne parfaitement le fait que Meshuggah était très en avance sur son temps dans ce qu’ils faisaient à plusieurs niveaux. Tout d’abord, avec leur approche de la mélodie et de l’harmonie: pas tout à fait traditionnelle ou diatonique, mais une oasis de parties de guitare complémentaires qui pourraient être influencées à la fois par la musique classique contemporaine et par un jazz / fusion. Deuxièmement, le style de guitaresoliste présenté par Fredrik Thordendal. Une fois, j'ai fait écouter une chanson de Meshuggah à un de mes professeurs de musique et il a immédiatement reconnu la similitude avec le style style de jeu solo d’Allan Holdsworth, que je ne connaissais pas à l’époque. Si vous écoutez ces deux musiciens, vous entendrez clairement qu'il y a un lien musical. Troisièmement: une ouverture à l’expérimentation avec les rythmes, la mesure et à toutes les choses que vous pouvez faire avec cela. Sur cet album, ils sont sur le point d’établir leur signature rythmique caractéristique : des motifs se déplaçant sur un temps en 4/4, mais tellement accentués qu’ils suggèrent une mesure différente du 4/4. Cette approche a inspiré de nombreux musiciens et environ 10 ans plus tard, lorsque tout le monde a rattrapé leur travail de pionnier, un nouveau genre est apparu.Je pense que cet album leur a permis de percer, car je me souviens qu'ils ont pu faire une tournée avec Machine Head et toucher une foule de metalleux.
Ton album préféré du groupe : Chaosphere (1998)
À l'âge de 17 ans environ, je jouais de la guitare et chantais dans mon premier groupe. Nous essayions des trucs avec les rythmes, mais nous essayions aussi de trouver un son assez agressif. J'en voulais au monde entier et j'ai ressenti le besoin de l'exprimer par la musique - corruption du pouvoir, le divertissement avant le contenu, le consumérisme aveugle, etc... il y avait donc beaucoup de place pour l'agression. Un jour, je suis entré dans le magasin de disques de ma ville natale et j’ai entendu le premier titre de Chaosphere, Concatenation. C'était incompréhensible et hallucinant. Cet album et Concatenation particulièrement sont pour moi l’incarnation d'un expression extrême. Je n'avais jamais rien entendu d'aussi extrême, dangereux et sans compromis sur tant d'aspects. Bien sûr, ça pourrait être plus rapide, plus absurde, mais cet album, et cette chanson, est une combinaison sublime de précision terrifiante, de son extrême et de complexité apparemment incompréhensible, qui donne une image chaotique. Il m'a fallu un certain temps pour ne serait-ce que commencer à comprendre ce qui se passait. En novembre 2018, cet album a eu vingt ans et je le considère toujours comme l'expérience musicale la plus importante de ma vie. J'étais déjà un adolescent en colère, mais cet album a ouvert toutes les portes possibles à toute dimension d'agression et d'extrême que je trouverais en moi, et cette porte n'est toujours pas fermée.
L'album pour approfondir le groupe : Nothing (2002)
J'allais d'abord répondre à cette question en choisissant Obzen, car je pense que cet album est une représentation plus versatile de ce que Meshuggah fait ce siècle. Cependant, Nothing est plus représentatif du changement vers leur son actuel, qui n'a pas bougé depuis environ 15 ans. J'ai eu un peu mal à l'écouter le premier mois, parce que c'était beaucoup plus lent et moins harmonique que ce qu'ils avaient fait avant, ce qui a fait que je l'ai trouvé monotone au début. On pourrait soutenir que c'est le cas, mais on ne peut pas non plus nier le fait que la dernière partie de leur héritage repose sur cette nouvelle approche du groove. Ne laissez pas tomber cet album trop tôt, donnez du temps à vos oreilles, faites des recherches et vous découvrirez que les décisions qu'ils ont prises sur cet album ont engendré une nouvelle tendance dans la communauté metal (encore), prouvant qu'ils innovaient encore dans la scène Metal mondiale. Anecdote amusante: ils se sont excusés (en plaisantant) pour la tendance djent.
Leur album le plus sous-estimé : Contradictions Collapse (1991) et Catch 33 (2005)
Contradictions Collapse est sorti en 1991 et comme je ne les ai connu qu'en1998, ce n’est peut-être pas la réalité, mais j'ai le sentiment que Contradictions Collapse n’a jamais eu l'attention qu’il méritait. Il est sorti sur Nuclear Blast, une maison de disque crédible au sein de l'industrie. Ecoutez donc leur façon rafraîchissante d'utiliser des harmonies et des mélodies à la Metallica, une inspiration évidente de l'époque.
Après Nothing (2002), Catch 33 est arrivé (2005). C'était un album qui a été mal vu par les gens dans mon entourage. "Encore plus ennuyeux que Nothing, il y a juste une chanson cool, Meshuggah ont vraiment perdu leur magie, la batterie est programmée", etc. La vitesse croissante de la consommation de médias et des réseaux sociaux / Internet en général ont commencé à diminuer la capacité de concentration des gens, je crois, et ces réponses semblaient aller dans ce sens. Les attentes basées sur leur matériel précédent n’étaient pas non plus en faveur de cet album - qui est en fait une longue composition mais coupée en 13 parties (peut-être à cause de ce qui vient d'être mentionné ?). Prenez le temps de l'écouter. Chaudement recommandé tout en faisant quelque chose qui ne demande pas d'activité cérébrale, comme faire la vaisselle.
Un bon album récent de Meshuggah : Koloss (2012)
Koloss a pas mal de caractéristiques qui le rendent remarquable pour moi. Le producteur Daniel Bergstrand y revient après sa grande réussite à la production sur Destroy Erase Improve et y fait à nouveau un excellent travail. I Am Colossus a un "solo" de guitare qui ressemble à la chute d’un bâtiment ou d’une statue colossal. Swarm comprend un "solo" de guitare qui sonne vraiment comme un essaim d’insectes. Break These Bones Whose Sinews Gave It Motion utilise une attaque de guitare particulière qui ne suit pas le mouvement normal en aller/retour basé sur la division en double croche d'un rythme en 4/4, mais a des accents en « retour » marqués là où ils l'estiment nécessaire, ce qui crée une sorte de nouveau style d'attaque et de son. Même si leur son de base est plus ou moins le même depuis Nothing, ils continuent d'inventer des choses.
Pour aller plus loin : None (1994)
None est la première manifestation de leur son 90s, le son qui a conduit à leurs premiers succès avec Destroy Erase Improve. À mon avis, c’est la première version de Meshuggah où la voix fonctionne vraiment et où leur groove (devenu depuis leur principale caractéristique) s'est révélé pour la première fois. Une de mes chansons préférées de Meshuggah est dessus: Gods Of Rapture.
Les précédents volets de "La Sélection" :
Episode #11 : Pink Floyd commenté par The Young Gods Episode #10 : Meshuggah commenté par Dodecahedron Episode #9 : Bathory commenté par Dan Terminus Episode #8 : Meshuggah commenté par Laurent David (M&t@l) Episode #7 : Prince commenté par Steven Wilson (Porcupine Tree, Blackfield) Episode #6 : Dream Theater commenté par Miguel Espinosa (Persefone) Episode #5 : John Coltrane commenté par Christian Vander (Magma) Episode #4 : The Melvins commenté par Atsuo et Takeshi (Boris) Episode #3 : The Cure commenté par Neige (Alcest) Episode #2 : Ministry commenté par Fabien W. Furter (Wheelfall) Episode #1 : Ulver commenté par Aymeric Thomas (Pryapisme)
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