Ulf Theodor Schwadorf de Empyrium et The Vision Bleak (Opéra National du Rhin, 2017)

Lorsque l'attaché de presse du festival Metal Oper'Art nous a proposé une interview d'Empyrium, il nous était difficile de refuser, tant cette formation est aujourd'hui devenue une référence en matière de black metal "atmosphérique". Ceci est d'autant plus vrai que les interviews d'Ulf Theodor Schwadorf sont rares, l'occasion était donc idéale ! Malgré des questions improvisées sur le vif, nous avons réussi à avoir une discussion intéressante, notamment sur sa méthode de composition.



Quel est ton ressenti sur le fait de jouer dans un opéra ?


C'est excellent pour nous. Avec Empyrium, nous avons cette idée de ne jouer qu'à des endroits sortant de l'ordinaire. Nous l'avons déjà fait des églises, dans des théâtres, de vieux cinémas, ce genre de choses. Ceci étant dit, je pense que l'opéra est vraiment au dessus de tout ce que l'on a pu faire auparavant.

Même la grotte dans laquelle vous aviez joué pour la première édition du Prophecy fest ?

Pour moi, c'est la même chose, je mets l'opéra au même niveau que la grotte. Ce sont deux endroits qui sont vraiment parfaits pour notre musique, qui est très solennelle et... Introvertie. Pour moi, ça va bien ensemble.


Est-ce que tu penses que le fait de programmer du metal dans un opéra est quelque chose d'important, comme un manifeste en quelque sorte ?

Je ne pense pas que ça soit "important", mais je vois où tu veux en venir. Pour moi, ce qui est de la bonne musique est de la bonne musique, je ne fais pas de distinction entre de l'opéra, du rock, du néoclassique ou de la new wave. Ce qui compte pour moi, c'est la qualité. Je ne pense pas, par exemple, que la musique classique a plus de "valeur" que le rock, c'est ce qui a à l'intérieur qui est important, l'esprit de la musique.

Comment est-ce que s'écrit une chanson d'Empyrium ? Tu le fais tout seul ou en jammant ?

Ca a beaucoup changé par rapport à mes débuts. Au début, j'écrivais tout la musique, c'était plus ou moins un projet solo. Et de nos jours, je travaille de manière rapprochée avec notre chanteur Thomas. Le truc, c'est que j'ai un studio d'enregistrement, donc c'est très pratique. On se retrouve là-bas pour une semaine, et en général, on arrive à écrire une ou deux chansons pendant ce laps de temps. Tu vois, c'est très spontané. On enregistre pendant qu'on compose, c'est vraiment bien.



Comme tu l'as dit toi-même, la musique d'Empyrium est solennelle, épique et pleine de dynamique. Et je pense qu'elle pourrait bien se marier avec un film ou un jeu vidéo. Est-ce que ce type de projet t'intéresserait ?

Absolument. C'est quelque chose que j'ai envie de faire depuis longtemps. Il y a un type anglais qui m'a contacté il y a peu pour me demander de composer de la musique pour un court métrage. Tous les groupes dans lesquels je suis impliqué ont une dimension cinématique, que ce soit Empyrium ou The Vision Bleak. L'idée est toujours d'implanter un paysage ou une image dans l'esprit de l'auditeur. C'est ce que j'essaye de faire dans tous mes projets, en fait.

Peindre des images avec des notes ?

C'est exactement ça !

Sur votre dernier album, il y a très peu de growl, encore que par le passé. Penses-tu que ça va se confirmer dans la suite d'Empyrium ?

C'est difficile à dire, ce n'est pas quelque chose de plannifié. Ca doit aller avec la chanson. Si ça correspond à l'ambiance du morceau, on en mettra. Il n'y a pas de restriction ! Nous ne composons pas avec une idée précise en tête au départ, du genre "ça devra être une chanson rock." Nous ne faisons que suivre notre instinct, et ce qui arrive, arrive. Mais concernant les growls, il se trouve que j'ai cet autre projet que j'ai relancé cette année qui s'appelle Sun of The Sleepless. Pour le coup, l'idée est de faire du black metal old school avec pas mal chant de ce type avec ce groupe.



Oui, j'ai hâte d'entendre ça au Prophecy Fest. Du coup, tu as ce premier album de Sun of The Sleepless qui sort cette année.  Il a été écrit sur une longue période ?

Je l'ai composé sur une période très courte ! [rires] J'ai fait deux sessions de trois semaines dans mon studio, pendant lesquelles j'ai composé et enregistré l'album. Et je suis vraiment très satisfait du résultat. Je joue tout sur cet album : batterie, guitare, clavier, chant... C'est quelque chose qui te met beaucoup la pression, mais d'un autre côté, c'est un défi intéressant. J'ai fait le mix et le mastering, j'ai aussi fait les photos moi-même ! [rires] C'est vraiment un projet solo dans le sens strict du terme, c'est vraiment rafraîchissant. J'adore travailler avec Thomas pour Empyrium et avec Tobias pour The Vision Bleak, mais ça fait du bien de faire quelque chose tout seul aussi !

Tu as donc une manière très spontanée d'écrire. Difficile de faire mûrir les compositions dans ce contexte. Tu aimes travailler comme ça ?

Oui, c'est quelque chose que je préfère actuellement. J'ai suivi la même approche avec The Unknown de The Vision Bleak, qui a aussi été écrit en peu de temps. Et de fait, nous faisons la même chose avec Empyrium. Après une semaine de composition, il y a toujours du matériel terminé. Evidemment, on pourrait dire que prendre plus de temps permettrait d'affiner la composition... Mais je pense que tu peux aussi en arriver à suranalyser les choses. Tu te mets à retravailler certaines parties qui n'auraient pas besoin de l'être, et ce processus peut être sans fin. Je crois vraiment en la magie du moment. Et je pense qu'en enregistrant pendant tu composes, tu peux vraiment te concentrer sur ce qui est sort de toi spontanément. Ca te permet aussi d'y apporter quelque chose d'unique dans l'interprétation.

Quels sont les albums qui t'ont le plus influencés en tant que musicien, à ton avis ?

Within The Realm of a Dying Sun de Dead Can Dance. C'est un album de chevet pour moi. Il y a aussi Bergtatt et Kveldssanger d'Ulver. J'adore les vieux Burzum, particulièrement Det Som Engang Var et Hvis Lyset Tar Os. En résumé, je suis très influencé par la scène black metal norvégienne du débuts des années 90 et des groupes néoclassiques comme Dead Can Dance.

Est-ce que tu écoutes des groupes récents ?

Absolument. Par exemple, j'aime beaucoup ce que fait notre bassiste Fursy avec les Discrets. Alcest est aussi un groupe vraiment excellent. Si on prend l'affiche du festival, j'ai écouté ce que fait Igorrr, je ne connaissais pas. C'est un peu bizarre pour un vieil homme comme moi ! [Rires] Mais j'ai énormément de respect pour son talent artistique.

As-tu un mot pour tes fans ?

Ce n'est jamais facile à formuler. Je suis vraiment reconnaissant envers les personnes qui me suivent depuis... Oh merde, je fais vraiment ça depuis 1994 ? C'est vraiment super de voir qu'il y a toujours des personnes intéressées. Avoir l'opportunité de jouer dans des endroits comme ici, et même être payé pour le faire... Ca ne pourrait pas être mieux à mon avis. [Rires]

Neredude (Juin 2017)

Photos : Arnaud Dionisio / © 2017 Deviantart
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.

Partager :
Kindle
A voir sur Metalorgie

Laisser un commentaire

Pour déposer un commentaire vous devez être connecté. Vous pouvez vous connecter ou créer un compte.

Commentaires

Pas de commentaire pour le moment