Kevin Paradis Gohelle Fest 2016

Quand on a en face de soi un musicien aussi actif que Kevin Paradis, on ne résiste pas à l’envie de lui poser des questions sur l’actualité des différents groupes avec lesquels il joue. Mais, on peut également prendre le temps de parler instrument, technique et influences. C’est ce que nous avons fait pendant le Gohelle Fest


Salut Kevin, merci d’accorder cette interview à Metalorgie. Prêt pour mettre le feu avec Svart Crown ce soir ? 

Salut Shades, oui prêt, en arrivant ici on a découvert une super salle, les conditions semblent bonnes pour donner un gros concert, j’ai hâte d’être sur scène. 

Dis-moi, tu ne devais pas être au Gohelle Fest l’an dernier avec Benighted ? (Rires)

(Rires). Si, effectivement. Je devais jouer avec Benighted mais je me suis cassé le bras, enfin le coude pour être précis. C’était juste avant de partir en tournée avec Svart Crown, nous étions en ouverture de Marduk en plus. Malgré tout j’ai pu quand même partir avec eux, à peine le plâtre enlevé j’ai tout de suite repris la batterie, avec une certaine appréhension d’ailleurs. Mon bras ne réagissait plus vraiment ! Il était totalement paralysé, je ne pouvais rien porter. Mais c’est revenu assez rapidement, j’ai dû m’accrocher un peu, mais ça a été. 

T’es un mec super actif, la semaine dernière tu étais à Lille avec Mithridatic, ce soir avec Svart Crown, sans compter que tu joues également pour Agressor et d’autres. Elle te vient d’où toute cette énergie ? Et toutes ces propositions par ailleurs ? 

En termes d’énergie, je ne sais pas trop. Tout ce que je peux te dire c’est que moins j’en fais, plus je suis fatigué et plus j’en fais mieux ça va ! Tu sais quand ça se passe bien, c’est motivant, t’as toujours envie d’en faire plus. J’ai besoin de me sentir actif et efficace, c’est très important pour moi d’être occupé. En ce qui concerne les propositions, je n’ai pas de réponses précises à te donner. J’ai mis quelques vidéos sur YouTube qui pourtant marchent moyennement, mais au final on me contacte donc je n’ai pas à plaindre (rires). Il y a aussi le bouche à oreille qui fonctionne bien. Si j’ai été amené à travailler avec Melechesh c’est parce qu’un mec de Metallian, que je ne connaissais pas plus que ça m’a proposé à Ashmedi qui se retrouvait sans batteur pour une date à Lyon. Ça a été une belle opportunité de jouer pour un groupe de l’envergure de Melechesh et ensuite de partir en tournée avec eux. Donc tu vois c’est parfois le hasard qui offre des opportunités. 

J’aimerais revenir avec toi sur la prestation de Mithridatic au Kaotoxin Fest. Le concert a été incroyable, à la fin on sentait les musiciens assez émus même, tu confirmes ? 

C’est vrai, oui. Tu sais avec Mithridatic, notre relation est assez particulière, c’est certainement le groupe où je suis le plus investi musicalement, dans le processus créatif. Puis je m’entends très bien avec les membres, ces raisons je commence d’ailleurs à les saisir. Même quand on est en répétition il y a quelque chose qui se produit que n’arrive pas avec les autres groupes pour lesquels je joue. Ce concert au Kaotoxin Fest était particulier, nous avions une heure de set, nous avons pu jouer l’intégralité de notre album, Miserable Miracle, ainsi que deux titres supplémentaires. Quelque part c’était aussi un défit, jouer une heure de Death Metal dense peut vite devenir étouffant pour le public et on ne voulait pas l’être, nous avons fait en sorte de varier le set au mieux. On était arrivé la veille, nous avons pu passer du temps ensemble, ça nous a fait du bien. On est toujours super heureux de jouer même si on doit faire énormément de route parfois, il y a vraiment un truc qui se passe entre nous qui est difficile à expliquer, nous le ressentons tous et c’est ce qui fait que Mithridatic a l’âme d’un groupe, c’est plus qu’une somme d’individualités. 

En mars Svart Crown sort un nouvel album, une tournée au Etats-Unis est déjà prévue, vous allez également tourner en Europe ? C’est dans vos plans ? 

Oui tout à fait. Au Etats-Unis nous allons ouvrir pour Marduk et Incantation, puis, dès qu’on rentre on part pour des dates en France avec Benighted. Concernant l’Europe, c’est en projet, mais rien n’est défini pour le moment. Nous avons envie de défendre ce futur album au mieux, les visas étant valables un an, pourquoi pas ne pas repartir au Etats-Unis un peu plus tard, quand on est un artiste européen on a envie de tourner le plus possible sur le continent américain. On va commencer comme ça et ensuite les choses vont évoluer d’ici notre retour, je ne me fais pas de soucis. 

Outre Svart Crown, t’as des projets pour 2017 avec certains de tes autres groupes ? 

En 2017 il y aura peut-être la composition d’un nouvel album d’Agressor, je sais qu’Alex bosse dur et j’espère qu’on pourra mettre ça en place. Avec Mithridatic nous allons également travailler sur l’écriture d’un successeur à Miserable Miracle. J’ai également travaillé avec un groupe qui est situé dans la région d’Angoulême, j’ai hâte d’entendre le résultat parce que ce qui a été fait pour le moment a été très dur musicalement. Techniquement c’était un réel défi, j’ai enregistré les parties il y a deux ans, il me tarde d’entendre le rendu final. De manière générale 2017 tournera autour de ces projets. 

Nous avons pas mal de batteurs qui nous suivent sur Metalorgie, et si on parlait matos ? Tu joues sur quoi ? Tu es endorsé par certaines marques ? 

Oui, je suis endorsé par Trick Drum USA pour la double-pédale et les triggers depuis maintenant trois ans. C’est du matériel super solide, j’ai beaucoup voyagé avec et je n’ai jusqu'à aujourd’hui eu aucuns soucis. Plus récemment je suis endorsé par les cymbales Sabian, les batteries Pearl, les peaux Evans et les baguettes Promark. C’est des produits que j’utilise depuis longtemps et j’en suis très satisfait, autant par leur durée de vie que par le son que j’en obtiens. Concerant Sabian, ça faisait un moment que j’avais en tête de changer de marque, puis j’ai pu essayer le set complet de George Kollias de Nile quand j’étais en tournée avec Melechesh, et là je me suis dis que c’est ce qu’il me fallait. Le son des chinoises est bien sale, les crashs ne sont pas trop bruyantes, elles n’envahissent pas l’espace sonore, c’est vraiment cet essai qui m’a décidé. Je suis très heureux d’avoir signé un contrat avec eux, j’espère que ce n’est que le début d’une longue collaboration.  

Comment t’es venue l’idée de t’attaquer au record du monde de coup de double-pédale ? 

Pour le premier album de Mithridatic j’ai eu à beaucoup travailler l’endurance, notamment parce que j’ai été influencé par le jeu de Jamie Saint Merat d’Ulcerate. Ça collait vraiment à l’esprit de la musique que l’on développait, quand j’entendais certains riffs, je me disais « non là tu ne peux pas arrêter la double-pédale, ça doit continuer », je me devais d’en rajouter une couche, la musique appelait à ça. Je n’ai pas pensé à faire ce record de suite, l’idée est venue quelques mois après la sortie de Miserable Miracle, je le suis lancé une sorte défi : essayer de faire du 260 bpm en une seule minute. En faisant un calcul vite fait j’ai vu que ça pouvait faire un record, c’est peut-être un peu ridicule mais des gens aiment regarder ce genre de chose, ça les intéressent. J’ai voulu voir si ça pouvait faire un peu de buzz, si ça n’en fait pas tant pis ce sera un peu de promo gratuite. J’y suis arrivé, Gear Gods a voulu faire la première sur cette vidéo et voilà ça s’est fait comme ça. Au départ je ne voulais pas en être réduit à ça mais, faire de la promo est devenue si compliqué que je me dis pourquoi pas ! De là est venue de la critique, forcément, « pourquoi faire un truc pareil ? » « C’est que de la technique, rien d’autre » « C’est n’importe quoi ». Mais ces personnes oublient malheureusement que dans cette industrie il faut se réduire à ça parfois pour espérer faire parler et les ramener à s’intéresser à autres choses, à l’essentiel : la musique. Tu vois, en faisant ça je ne voulais pas uniquement que les gens regardent la vidéo, mais qu’ils se disent « tiens, il sait faire ça mais il l’utilise comment dans sa musique ? ». Puis qu’ensuite ils aillent voir ou écouter les groupes avec lesquels je joue, tout simplement. Tant pis pour ceux qui ne l’ont pas compris. 

Je vais peut-être t’apprendre un truc, mais ton record on en a parlé avec Joey Jordison pendant une interview de Sinsaenum. Sa première réaction a été : qui ça ? Puis Fred Leclerq lui a dit que t’es un pote de Stéphane Buriez et là, il a été moins surpris, même un peu impressionné. Content d’avoir impressionné Joey Jordison ? 

Oui évidemment ça fait plaisir, mais tu sais ça reste un truc purement technique, ça ne signifie pas que je suis un bon batteur pour autant. Ce record c’est vraiment une histoire de technique, pour le faire j’ai utilisé la technique dite « frisé », c’est à dire en frappant un coup à droite, un coup à gauche. Si tu essaie en roulé en tapant deux fois à droite puis deux fois à gauche, tu peux encore aller plus vite. Ça me ferait plus plaisir s’il regardait ce que je fais dans Svart Crown et Mithridatic, franchement. C’est agréable mais je préférais l’impressionner par la musique que je fais plutôt que par ce record. 

Quand t’as commencé à jouer, quels ont été les batteurs qui t’ont le plus influencé ? 

Quand j’ai commencé à jouer j’écouter Queen ! Ce n’est pas vraiment le même style de jeux (rires). J’ai ensuite commencer à écouter des groupes comme Def LeppardAccept et Mr Big. Puis, petit à petit grâce des potes de lycée, j’ai découvert Iron Maiden, Lamb Of God, Fear Factory et de fil en aiguille je suis arrivé à Nile qui a été le véritable déclic. Ce n’est pas la vitesse qui m’a impressionné mais le jeu développé qui offre une multitude de possibilités que j’ai eu envie d’exploiter. J’ai beaucoup travaillé là-dessus puis, j’ai découverts Jamie Saint Merat d’Ulcerate qui a été très important pour moi. J’écoute également des trucs plus groovy comme TotoLed Zeppelin ou même Deep Purple, donc tu vois il y a beaucoup d’influences qui se mêlent. Je pourrais citer également mon prof de batterie, Michel Blanc, comme l’acteur. L’un de ses albums, Le Passage Eclair, qui est du Jazz Experimental est une vraie influence aussi. Ce que je retiens de lui et des batteurs qui venaient en Master Classe, c’est cette volonté de rechercher des sons toujours différents des batteries. Par exemple, le tuyau que j’utilise pour modifier la tonalité de la caisse claire quand je joue avec Mithridatic, c’est un truc que j’ai piqué à Gavin Harrison, lui le fait dans un solo, pas sur musique, c’est purement démonstratif. Je me suis posé la question de savoir si et comment je pouvais l’utiliser dans un morceau. Au final des influences j’en ai énormément. 

En parlant d’influences, si je te dis que ton jeu sur Miserable Miracle de Mithridatic me fait penser à celui de Pete Sandoval de Morbid Angel sur Domination, tu me prends pour profane qui ne connaît rien ou je ne suis pas loin de la vérité ? 

(Rires). Je te rassure il y a de ça puisque la musique de Mithridatic est essentiellement influencée par Morbid Angel et Mayhem. C’est drôle parce que Domination est le seul album de Morbid Angel que j’ai vraiment creusé. Au-delà de ça j’ai creusé également le style de batterie sur Ulcerate et Mayhem, mais oui il y a un coté Morbid Angel, tu remarqueras que beaucoup de personnes qui aiment le Death Old School et la transition vers le moderne que l’on peut situer à la sortie de Domination, aiment ce style carré, les choses qui tirent droits. Quand tu écoutes bien les albums de Morbid Angel, tu peux entendre que Pete Sandoval se permet parfois des choses relativement « funky » ! Trop de fans de Death l’ont soit oublié, soit pas remarqué, et moi j’essaye d’en mettre dans Mithridatic. Cela ajoute de l’impact plus que ça ne dénature la musique. 

Peut-on imaginer un jour Kevin Paradis jouer dans un groupe de Rock, de Jazz ou de Fusion ? 

Pourquoi pas, ça me plairait ! Tu me demandes ça et je viens de demander à Sabian une ride pour jouer du Jazz ! Chez moi je continue à bosser de temps en temps sur ce style, à niveau correct au niveau solo mais qui serait difficile à appliquer en groupe. Du reste si l’opportunité se présente un jour, pourquoi pas, le Death j’ai appris seul, revenir à des choses que j’ai appris dans le passé ça pourrait me plaire. Mais pour le moment mon cœur est tourné vers des ambiances Death et Black. 

Un dernier mot pour nos lecteurs ? 

Un grand merci à Metalorgie et ses lecteurs, c’est très important d’avoir des gens comme vous qui diffusent et suivent l’actualité du Metal. Continuez tous à suivre cette scène, à partager des choses et à soutenir les groupes et les médias.

Shades of God (Janvier 2017)

Crédits Photos : Metallic Photography
Remerciements : Kevin Paradis, Svart Crown, tout l'équipe du Gohelle Fest et ses bénévoles. Retrouvez Kevin Paradis sur : Facebook et sur son site officiel.

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