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Junior Rodriguez And The Evil Things le 11/03/16, Bar'hic (Rennes)

Junior Rodriguez est un musicien talentueux et multi-tâche. Quand il n'enregistre pas des disques de Black Metal (Arkhon InfaustusSektemtumDoctor Livingstone), il est chanteur dans Darkness Dynamite, a été batteur dans Inhatred, Sickbag et Sublime Cadaveric Decomposition, puis désormais guitariste et chanteur dans son nouveau projet de Rock Psychédélique, Junior Rodriguez And The Evil Things. Le groupe était de passage à Rennes en ce courant mars 2016 pour un concert au Bar'hic. L'occasion pour nous de taper la discussion avec le musicien autour d'un blind test allant de Mayhem à Eagles Of Death Metal, histoire de revenir à ses anciens projets, son parcours, ses influences...



Grave - Liberation

JR : C’est Loudblast ?

Joff (sourire) : Négatif, mais c’est certainement une influence pour LoudblastTu as joué sur un album auquel le chanteur a participé.

JR (indécis) : C’était il y a longtemps ?

Oui ça fait un petit moment, il y avait aussi Julien d’Hangman’s Chair et Adrien de Cowards.

JR : Ah yes Bullworth ! Mais du coup là ce qu’on écoute c’est…

Grave !

JR : Oui exact, Ola (chanteur de Grave) avait chanté sur un morceau, ça date pas d’hier ce truc ! Ca va bien faire dix ans maintenant ! C’était notre projet Death Metal avec un ami très proche, Peter. Il était roadie pour Cannibal Corpse et Morbid Angel entre autres, donc il était souvent à l’étranger, et on avait des difficultés à garder un line-up stable, ça a mis le groupe entre parenthèses et l’album est un peu passé inaperçu. C’est dommage d’ailleurs c’était vraiment de bons morceaux de Death !

Comment s’est passé ta rencontre avec ces musiciens ?

JR : En fait Peter, chanteur et fondateur de Bullworth, était dans le premier groupe de mon frère Carnal Feelings. J’avais 14 ans quand j’allais les voir répéter à Montreuil, et les gars m’ont un peu pris sous leurs ailes. Il y avait aussi Fate, un groupe pionnier du Deathcore en France, qui répétait juste à côté, et c’est sur leur matos que j’ai commencé à jouer de la batterie.

C'était l’époque du collectif Kommando ?

JR : Voila, c’était avec toute cette bande, à laquelle s’est greffé Inhatred, mon premier groupe dans lequel jouaient mon frère ainsi que Cédric, l’actuel chanteur d’Hangman’s Chair. C’était vraiment une belle époque, on se cotisait tous pour sortir nos albums, on débarquait à Châtelet à 3 heures du matin pour coller des stickers partout, on distribuait des cassettes qu’on enregistrait nous-même… Il y avait une vraie effervescence à ce moment là, on devait tout faire pour évoluer, progresser et se faire connaître, c’était musique et potes 24h/24.

Tu te souviens de tes premiers concerts ?

JR : Oui carrément ! Le tout premier c’était au Gibus, avec Fate. Leur batteur Nito, qui joue maintenant dans Every Reason To… , m’avait proposé d’apprendre Infecting The Crypts de Suffocation pour le jouer avec eux sur scène à l’occasion d’un concert. J’avais 14 ans, c’était complètement fou pour moi !

Euh… Tu jouais du Suffocation à la batterie à 14 ans ?

JR : Bah fallait bien (rires) ! Tu sais j’avais l’occasion de jouer avec des potes qui étaient tous un peu mes grands frères, qui étaient d’excellents musiciens, donc quand on m’a donné ma chance, j’avais pas le droit de faire les choses à moitié. C’est d’ailleurs à cette époque que j’ai rencontré Fred, mon batteur pour The Evil Things. On traînait aussi avec les mecs de Comity, avec L'Esprit Du Clan… La première fois que j’ai rencontré Arsène le chanteur, il était venu chez moi et mon frère à Stains pour relever les compteurs d’eau avec un t-shirt Merauder, et quand il a vu les posters de Sepultura et compagnie dans notre chambre, on a forcément commencé à sympathiser… Et quelques semaines après on partageait le même local de répet' (rires !). Dans la même bande de potes, il y avait aussi Es La Guerilla qui commençait à percer sur Paris à l’époque d’ailleurs.

Avec qui tu as fait ta première tournée à l’étranger d’ailleurs !

JR : Ouais exact, en Europe de l’Est. En Pologne plus précisément ! Mehdi, le batteur du groupe qui joue aujourd’hui dans Hangman’s Chair, s’était pété le poignet juste avant la tournée, et m’a proposé de le remplacer en urgence, j’avais 17 ans à l’époque. La tournée était juste dingue… énorme souvenir. Le public était fou, on terminait dans des endroits pas possible tous les soirs, j’étais même pas majeur, le chanteur d’un des groupes avec qui on tournait s’était évadé de prison pour faire la tournée… J’ai pas tout raconté à ma mère à l’époque (rires !).

Arkhon Infaustus - Trigramatton 

JR : Immolation ?

Non, mais c’est un groupe qui aimait probablement beaucoup Immolation (sourire).

JR : J’avais pensé à Eibon… Mais non c’est pas Georges qui chante là…

Tu as enregistré un album avec le batteur… à Montpellier !

JR : Ah putain c’est Arkhon Infaustus ! J’ai fais le rapprochement avec Mutiilation quand tu m’as parlé de Montpellier haha. En effet c’est Arkhon, je me souvenais pas que ça sonnait autant Death Metal ! Oui c’est vrai j’ai produit les voix sur l’album de Sektemtum, avec Jon à la batterie. C’est devenu un très bon ami d’ailleurs, un super musicien aussi !

Ça avait surpris pas mal de monde d’ailleurs, comment tu t’es retrouvé à produire un album de Black Metal avec ces mecs là ?


JR : Et bah, grâce à l’album de Darkness Dynamite haha ! Les gars de Sektemtum avaient contacté Remyboy qui avait travaillé sur la production du dernier album de Darkness Dynamite, il leur a fait écouter, ils ont validé et m’ont appelé. Quand j’ai compris que j’allais enregistrer les voix du chanteur de Mütiilation j’étais comme un fou ! J’adore ce groupe depuis que je suis gamin.

Comme quoi, "Fuck the underground" (slogan qu’on pouvait retrouver dans des trailers ou sur des t-shirts de Darkness Dynamite), pas tant que ça en fait haha !


JR : Bah plutôt ouais ! (rires) Non mais en soi le "Fuck the underground", c’était plus histoire de se moquer de tout ce cirque autour du débat trve / intègre / commercial / vendu etc. Après avoir joué du grind et du death pendant des années, j’ai eu envie d’aller vers quelque chose de plus mélodique avec Darkness Dynamite, et là tout de suite on nous a fait chier en nous rabâchant qu’on s’était vendus et qu’on avait trahi l’underground… Alors que crois-moi, notre train de vie n’a pas changé du jour au lendemain parce qu’on a commencé à composer des refrains plus mélodiques. 
Mais du coup, c’est vrai que c’était drôle de voir l’album de Darkness Dynamite validé par Willy de Mütiilation, l’un des groupes les plus obscurs de la planète, pendant que des gars qui jouaient dans des groupes d’Emocore venaient pinailler parce que tel ou tel morceau n’était pas assez "underground" à leurs yeux.

Et comment s’est passé cet enregistrement ?

JR : Débarqué à 23h à Montpellier, j’avais du dormir 2 heures dans le TGV. J’arrive chez Willy, on pensait commencer à enregistrer le lendemain. Puis on commence à papoter, à faire connaissance, à boire un verre, deux verres, trois verres… (sourire). Pour finalement commencer à enregistrer à 4h du mat' (rires) ! Willy était plus qu'éméché quand il a commencé ses prises, je me demandais vraiment ce que ça allait donner… On était tous posé en régie, on a lancé les premières pistes… Et on a tous halluciné. J’avais jamais vu ça de ma vie. Ce mec chante pas, il s’égorge littéralement. Vraiment j’étais sur le cul, il a quasiment tout fait en one-shot, j’ai cru qu’il allait crever… Après j’ai quasiment pas dormi pendant trois jours, on enregistrait la nuit, le jour… On a fait les voix plus Hardcore avec Pat le guitariste, puis les voix claires avec Jon.

"I no more want to deal with the light" ? (Passage chanté vers la fin du morceau Aut Caesar Aut Nihil)

JR : Voila, on s’est tapé un gros délire à faire du Massive Attack, c’était pour le coup complètement improvisé, vraiment des supers souvenirs ! 

Cowards - Fork Out

JR : Je reconnais la voix, c’est Julien de Sickbag ?

Exact !

JR : Yes c’est Cowards alors, on reconnait bien les riffs d’Adrien aussi. Ça tue !

Tu peux revenir sur ton passage dans Sickbag ?

JR : Ouais carrément. C’était Julien qui m’avait proposé de les rejoindre quand ils sont arrivés sur Paris avec Diego le guitariste. Ils avaient envie de laisser de côté le délire Grind pour aller vers quelque chose de plus Down tempo, de plus glauque. Mon frère s’est greffé au projet et ça a donné les morceaux que tu retrouves sur Shade Among Shades. J’aime beaucoup cet album d’ailleurs, je me suis vraiment éclaté, on a enregistré live et tout le disque en une prise comme si c’était un vrai live, chez mon pote Francis Caste. Tu peux même entendre des bruits de canettes sur l’album (rires). C’était mortel de jouer avec eux, mais j’ai perdu des points de vie en cours de route... On avait tous des galères pas possibles à cette époque, c’était le bordel dans nos vies, en répet', dans le van, sur scène, c’était éprouvant comme période, pour tout le monde je pense. Mais tu vois au final, ça reste un de mes meilleurs souvenirs de groupe encore aujourd'hui !

Dick Rivers - Hurt (reprise de Johnny Cash / Nine Inch Nails)

JR Dick Rivers ! Je me suis retrouvé à jouer de la batterie pour lui alors que j’étais encore dans Sickbag. J’étais assistant dans un studio à Paris qui a accueilli le grand Oli Le Braon qui réalisait alors le nouvel album de Dick Rivers « Mister D » et son staff. J’étais seul dans le studio à ce moment là, et alors qu’on m’avait juste demandé de faire quelques réglages pour la batterie et le soundcheck, j’ai fini par être embauché pour faire l’album et la tournée qui a suivi, c’était complètement surréaliste ! Peu de temps après, on décollait pour Los Angeles puis le Missouri avec Oli et Louise (maintenant bassiste de Loading Data) pour lancer notre projet Suicide Pool, puis c’est ainsi que j’ai rencontré via mon ami Nosfell, Tilli, Alain Johannes et toute la clique…

Ça tombe bien parce que ça annonce bien le morceau suivant (sourire)

Eagles Of Death Metal - I Want You So Hard

JR : (au bout de quelques secondes) Eagles Of Death Metal

Tu as rencontré des musiciens de cette scène lors de ton premier voyage au États-Unis justement !

JR : Absolument, notamment Alan (Johannes, guitariste ayant joué dans Queens Of The Stone Age, Eagles Of Death Metal, Them Crooked Vultures…). Partir aux États-Unis pour finalement jouer avec ce gars a été l’une des expériences les plus importantes de ma vie. Comme je t’ai dit j’étais initialement parti pour Dick Rivers et Suicide Pool à Los Angeles, puis Nosfell nous a présentés à Alan et Tilli sa compagne, avec qui on a fini par monter un groupe avec Louise Decouflé, ma copine de l’époque, à la basse.

Après ce passage aux États-Unis, tu as beaucoup plus développé une dimension mystique dans ta musique et tes paroles d’ailleurs, que ce soit sur le dernier album de Darkness Dynamite, avec des morceaux comme White Retina ou Illuminations, ou même dans Junior Rodriguez And The Evil Things qui est très marqué par des influences Rock Psyché.

JR : C’est vrai que ça a été une expérience très marquante pour moi. Tous ces musiciens dont on vient de parler, cette scène Rock de Los Angeles, mais surtout du désert, sont d’ailleurs tous assez mystiques dans leur démarche, dans leur musique comme dans leur approche de la vie. Les paysages, l’histoire, l’âme de cette région du monde en sont imprégnés. Il faut avoir mis les pieds à Joshua Tree au moins une fois pour comprendre de quoi je parle…

Mayhem - Freezing Moon

JR : Mayhem ! Avec Attila, un album culte. Tu veux qu’on parle de Thagirion toi (rires) !

Exactement haha !

JR : C’est certainement l’album le plus extrême que j’ai enregistré à ce jour. C’est Chuck qui jouait dans Vorkreist et Satyricon qui a composé ces morceaux quand il était dans Mayhem. On se connait depuis que j’étais gamins. C'est toujours pareil, la scène Metal parisienne c’était pas énorme, tu sais, on était assez peu nombreux au final. Il a proposé à Attila de faire les voix, ainsi qu’à Ian qui chantait dans Merrimack, dont j’ai d’ailleurs fais la connaissance à un concert de Dick Rivers ! Il m’a proposé de faire la batterie pour ce nouveau projet, et quand j’ai écouté les morceaux, honnêtement j’ai pris peur tellement c’était rapide et technique. Au final on a fait ça en quelques jours chez Neb Xort d’Anorexia Nervosa, et crois-moi le résultat tue !

Bah putain on ne demande qu’à écouter !

JR : Ouais c’est dommage que ça traîne à sortir, tu sais c’est de plus en plus galère aujourd'hui pour sortir un disque… J’espère vraiment qu’on pourra faire écouter ça parce que j’adore cet album, ça devrait vraiment surprendre du monde, du pur Black Metal à l’ancienne, ultra violent, Chuck a vraiment composé un truc de malade.

Mais justement, le fait de te consacrer aujourd'hui à une musique moins brutale comme celle de The Evil Things te permet de t’épanouir aussi ?


JR : Mec, j’ai jamais été autant épanoui de ma vie ! Et puis tu sais, ça a beau être moins brutal, ça reste très intense à jouer. Et j’en ai pas fini avec le reste, ne t’en fais pas.

Avec le dernier Darkness Dynamite, on avait déjà le sentiment de retrouver une synthèse de ton parcours, c’est aussi le cas avec Junior Rodriguez And The Evil Things tu penses, même s’il s’agit davantage d’un album de genre ?

JR : Oui carrément, j’aurais toujours un amour profond pour le Metal, c’est de là que je viens, c’est cette musique qui m’a nourri pendant des années. Mais j’ai aussi toujours adoré Black Sabbath et Led Zeppelin depuis tout petit. Et j’avais envie de développer ça. Petit à petit, au fil du temps, j’ai ressenti l’envie de sauter le pas, et ça donne The Evil Things aujourd'hui.

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