Hypno5e Péniche Igelrock, Douai, mars 2016

Nous avons profité de la venue d’Hypno5e, le 16 mars dernier à Douai pour rencontrer le groupe afin de leur poser quelques questions. C’est dans leur van que s’est déroulée l’entrevue, un lieu atypique pour un groupe qui l’est tout autant. Il fallait bien être deux pour mener à bien cette mission aussi passionnante que drôle. Au programme : le dernier album sous toutes les coutures, la vie du groupe et les projets futur.

Salut les gars, comment se sont passées les premières dates de la tournée ? 

Emmanuel : Pour le moment c’est nickel. On a débuté le tour il y a 5 semaines environs, les premières dates se sont faites en Allemagne avec Textures, puis on a enchainé sur la France. Nous avons fait deux  concerts avec Psykup, ensuite en tête d’affiche, ça passe vraiment bien, le public répond présent. 

Gredin : Carrément, c’est merveilleux. 

J'ai entendu dire que le troisième album a eu quelques difficultés à sortir, vous pouvez nous en dire plus ?

Emmanuel : La sortie a été repoussée au moins 3 fois à cause de soucis de production que nous avons eu avec la société qui mixait l’album. Nous avions un peu de moyen, donc pour une fois, nous avons voulu bosser avec des gens extérieurs au groupe, histoire d’avoir un regard autre que le notre sur la musique. D’habitude on se charge de tout. Un producteur a pas mal insisté pour travailler avec nous, on l’a rencontré, on a fait les prises batteries chez lui, le mixage devait suivre et ça c’est mal passé. J’ai quitté le studio deux jours avant même, je ne tenais plus (tout cela se passe au États-Unis - ndlr). Les autres sont restés, surtout que nous devions faire des arrangements pendant une semaine, mais pour moi c’était au dessus de mes forces. 

Gredin : J’ai l’impression qu’il se foutait bien de ce qu’on voulait en faite. Non ? 

Emmanuel : Ouais c’est ça. Pour lui c’était inconcevable qu’un groupe vienne au complet pour les prises batterie. 

Théo : Sa façon de travailler est totalement contraire à la notre. 

Emmanuel : Pour nous un morceau en cours de mixage peut encore évoluer selon les arrangements, pas pour lui. Chez Hypno5e, le titre est réellement fini quand il part au mastering, pas avant. Le mixage fait partie de la conception de l’album en gros. Du coup on a pas eu de nouvelle du mix pendant 4 mois, ça a repoussé les premières dates de notre tournée, puis est venue la signature avec Pelagic Records qui a repoussé encore la sortie, histoire que tout soit bien en place. 

Pour finir avec ce studio, on a appris que le producteur voulait tout sous-traiter par un autre studio en plus ! C’est des potes de passage à Los Angeles qui nous ont prévenu, du genre « au fait vous êtes au courant que ». Euh … non ! On lui a dit récupère les pistes, on va faire autrement, on a tout réenregistré, mixé etc. Voilà comment perdre du temps et de l’argent. Il n’y a que les prises batterie que nous avons gardé, elles sont bonnes, vraiment, mais ça nous a fait perdre le fil de l’album cette histoire. L’air de rien l’album a été composé il y a deux ans, on l’a presque redécouvert complètement, il a fallu qu’on se ré-imprègne de son contenu. 

À l'inverse de la majorité des groupes français, la notoriété d'Hypno5e ne cesse de croitre à l’étranger. Avec notamment des tournées organisées aux États-Unis, en Australie et vos participations à l'Euroblast en Allemagne en 2013, 2014, 2015 et cette année encore. Comment expliquer cet intérêt hors de nos frontières ? Cela vient uniquement de la qualité de votre musique ?

Emmanuel : Depuis le départ nous avons beaucoup privilégié la scène. Hypno5e, avant cet album n’avait pas de label, on a donc fait le travail nous mêmes, y compris l’organisation des tournées à l’étranger. C’est une manière intéressante de faire connaître son groupe, de provoquer le destin. Dans notre entourage proche nous avons des personnes de l’Euroblast, ça nous permet aussi de bien se développer hors de la France, être sur Pelagic Records ouvre aussi des opportunités que nous n’avions pas avant. Puis on adore tourner, on va partout où l’on peut, le but est de jouer, jouer, jouer. 

Gredin : On aime autant la musique que les voyages, alors si on peut se servir de la musique pour voyager, c’est super. 

Vous êtes des touristes un peu ? (Rires)

Emmanuel : (rires) ouais c’est tout à fait ça ! C’est vrai que parfois on fait un peu touristes. 

Gredin : Les autres groupes tournent en avion au États-Unis et en Australie, pas nous, on fait ça en camping car ! (Rires). On visite ! 

Emmanuel : Bon quand on se tape 1500 bornes entre deux dates en camping car on regrette un peu (rires). Mais au final c’est cool, en day-off on se ballade. 

Du coup pour vous 200 kilomètres en deux dates c’est peanuts ? 

Gredin : Ouais c’est un petit détour (rires) 

Emmanuel : Clairement, avec le nombre de tournées qu’on a fait à l’étranger c’est rien ! On en a fait des équivalent de Marseille / Lille, Lyon / Bordeaux à la pelle. 


Je trouve le nouvel album, Shores of the Abstract Line, incroyablement triste. Bon d'accord Hypno5e n'a jamais été Mr Bungle, mais qu'est-ce qui vous met dans cet état ?


Emmanuel : Cet état a toujours fait partie de ce que je peux composer ou de ce que le groupe met en place. Il y a une espèce de mélancolie qui fait partie de l’esthétique qu’on a voulu développer. Pour Shores of the Abstract Line, il y a effectivement quelque chose de noir qui en ressort, mais ce n’est pas pour autant une mélancolie figée. De la manière dont moi je l’entends, il y a quelque chose d’assez lumineux dans son final, il y a un certain lyrisme qui a pour but d’exacerber les choses, les sentiments. En quelque sorte c’est plomber l’auditeur pour mieux lui permettre de décoller. 

Gredin : Moi je trouve qu’il est composé de passages très positifs. Par exemple, Sea Made of Crosses

Théo : Ah, il y a un accord majeur dedans ! (Éclat de rire général)

Gredin : Ça reste très ouvert, comme disait Emmanuel, c’est une mélancolie qui ramène à un temps heureux. Après, c’est la subjectivité de chacun qui fera le ressenti final. 

Emmanuel : Dans cet album, il y a la marque de quelque chose qui a été, et ne sera plus. On évoque des moments traversés qu’on ne pourra plus jamais revivre de la même manière, mais ce n’est pas pour autant un regard tourné vers le passé. Bon ok, quand t’écoutes la fin de l’album, ce n’est pas forcément joyeux sur l’instant, mais ce n’est pas figé, je le vois personnellement comme une chose constructive. 

Quel est le concept de Shores Of The Abstract Line ? Le terme "Shores" revient sur tous les titres d’ailleurs, j'imagine que c'est important non ?

Emmanuel : C’est venu comme ça. À la base on n’a pas voulu le faire exprès. C’est à partir du titre Sea Made of Crosses justement, qu’il m’est apparu logique de créer une sorte de cartographie. Chaque titre en est un espace, c’est une cartographie imaginaire, dont les rives sont une étape d’un personnage fictif qui se remémore des souvenirs particuliers. Sauf pour Tio où l’espace est fermé puisque la rive est intérieure. Cet espace si tu veux, moi je l’imagine bien, forcément. J’ai été très marqué par un voyage en Bolivie, qui m’a hautement influencé sur la composition du reste, j’ai pas mal d’images en tête, et je les associe aux morceaux.  

Théo : Le concept est arrivé pendant l’écriture, pas avant. C’est Emmanuel qui nous a appris le titre de l’album, une fois les chansons composées. Comme c’est lui qui compose essentiellement, on l’a suivi sans problème. 

Gredin : Au final ça colle tout à fait, on s’y retrouve bien. 

Emmanuel : Quand on entre en studio, rien n’est vraiment prédéfini. Les morceaux n’ont pas été composés dans le but d’un réel concept, c’est plutôt leur agencement qui a permis ça. Cela rejoint également le fait que l’album est un parcours unique, ça nous tient à cœur qu’un album se lise de A à Z, on peut éventuellement le diviser, mais il y a un liant, tout doit être lié du début à la fin du film, euh, de l’album pardon. (Ce lapsus on ne peut plus révélateur, ndlr). 

T’as un peu répondu à la question suivante, je voulais vous demander qui compose. 

Emmanuel : En gros j’amène la matière et on retravaille ça ensemble, on se concerte et on crée les structures. Pas mal de choses se font également sur l’instant, rien n’est prémédité, une idée vient, même tardivement, en plein enregistrement et on développe.  

Théo : Des morceaux comme Blind Man's Eye par exemple, sont arrivés tardivement dans le processus de création. Il est arrivé comme ça en une pièce, contrairement à d’autres où l’on brode. 

Niveau technique cet album est hallucinant, est-ce que vous adaptez vos compos pour le live, comme font beaucoup de groupes qui jouent avec des samples ?

Emmanuel : On essaie de jouer l’album tel qu’il est. Il est joué à l’identique, il y a très peu, voire pas de place pour l’improvisation. 

Théo : Sur l’aspect technique, on n’est pas au maximum de nos capacités par contre. Avec l’enchainement des concerts, on ajoute quelques touches quasi imperceptibles, des petites subtilités, qui ne dénaturent pas le titre. Si par exemple on pouvait réenregistrer l’album, on les incorporerait. Mais il faut savoir s’adapter techniquement pour ne pas jouer au dessus de nos moyens et ne pas pouvoir restituer sur scène le contenu du disque. 

Emmanuel : On adapte au mieux la composition studio pour que ce soit retranscrit sur scène. On a une idée de comment ce sera joué, on a conscience qu’il faudra le restituer sur scène. La question se pose plus sur les parties calmes, parfois on ne joue pas devant un public qui est spécialement venu pour nous, du coup là on peut se permettre de les modifier, de les raccourcir. Mais on essaye vraiment de toucher aux compostions le moins possible. 

Seconde question technique qui pique ma curiosité : est-ce que vous jouez au « clic » ? Avec une bande son ? Qui lance les samples ? Le batteur ?

Gredin : Le batteur oui, il joue au clic. 

Théo : Du début à la fin du concert, je joue au clic. On lance un « play » au début de chaque morceau ou ensemble de morceaux, puisque certains se jouent sans aucune transition, ou alors très courte. Les samples sont calés sur le clic pour une bonne fluidité. 

On vous situe (nous les premiers) entre Gojira et Psykup, est-ce que c'est voulu, ce qui est assez largue, vous remarquerez. C’est une coïncidence ou des influences parmi tant d'autres ?

Théo : On est nous-mêmes, les influences on ne les renie pas cependant. J’aime beaucoup Gojira, mais je dirais que des influences on en a 1 milliard si on réfléchit bien. 

Gredin : Nos premièrs concerts nous les avons fait avec eux (Gojira et Psykup). De manière générale nos influences sont très larges comme le dit Théo. 

Emmanuel : Parfois je lis des articles et je me demande le rapport entre nous et certains groupes cités en influences. Cynic par exemple, je cherche, mais je ne vois pas le rapport. 

Gredin : Complètement, Cynic et Meshuggah on ne voit vraiment pas le rapport ! 

Emmanuel : Ouais, ça revient régulièrement et franchement je ne vois pas. Je n’écoute pas en plus.

Gredin : Ce matin Théo a mis du Meshuggah et je me disais que ça n’a rien à voir avec nous. 

Emmanuel : Les influences ne sont pas claires, même pour nous. De base je ne les écoute pas plus que ça, on les a entendu et vu en live, mais directement ce n’est pas eux que je citerais. Le point commun c’est peut-être une vision large du Metal, de ne pas être cloisonné à ce seul style, d’être curieux, là oui, je vois un rapport, mais pas sur le fond de la musique. 

Théo : Peut-être que de loin, un riff ou deux peuvent s’apparenter, mais de loin alors. Cynic ? Peut-être sur certains chœurs ? Cynic l’assume beaucoup, ils ont des voix enregistrées qui passent en arrière plan. Mais nous, on utilise pas de vocodeur ! (Éclat de rire général). Après on fait du Metal, et le Metal est très codifié. Tous les groupes ont des similitudes entre eux, au final tu es sur une quantité de débits rythmiques et tonalités limités. Du coup, cela donne des ressemblances qui sont factuelles, tel riff ressemble à tel riff d’un autre groupe, mais on ne se pose pas la question honnêtement. Nous on veut juste kiffer en jouant comme on le sent. Gojira, Psykup et les autres font surement la même chose, ils veulent juste se faire plaisir en envoyant le bois, c’est tout. 

D’ailleurs il paraît que seul un d’entre vous écoute du Metal, c’est vrai ? 

Théo : Qui est cette personne ? (Rire général)

Emmanuel : Pour ma part, j’écoute très peu de Metal chez moi. C’est pas que je n’aime pas, en live j’aime beaucoup, mais pas chez moi. Les choses qui m’inspirent musicalement ne viennent pas du Metal en tout cas. 

Gredin : Je suis très Disco et variété française, je suis un gros fan d’ABBA et Boney M ! (Nouvel éclat de rire général). 

Théo : À la base j’ai fait le conservatoire de Jazz. Durant mes années d’école de musique j’en ai beaucoup joué ainsi que du Swing et des musiques cubaines. Ce qui m’a poussé vers le Metal c’est de pouvoir jouer en groupe. Je rencontrais essentiellement des personnes qui voulaient en faire. Mes grosses influences viennent ailleurs que du Metal. 

Il y a un lien entre les batteurs de Jazz et de Metal, tu ne trouves pas Théo ? 

Théo : Effectivement, il y en a un. Ce sont des styles à la batterie presque sans fin, tu peux toujours trouver des innovations et bosser ta technique durant des heures tous les jours sans être satisfait de ce que tu fais. Dans d’autres genres comme la Pop ou le Rock, tu fais un peu vite le tour même si, à bien jouer ça reste complexe, faire un back-beat super solide c’est compliqué, il faut une approche du tempo excellente. Mais oui, les batteurs de Jazz et de Metal ont beaucoup de points communs. C’est des musiques d’initiés. 

Emmanuel : Le fait qu’on soit venu au Metal est une question qui ne s’est pas vraiment posée. On y est arrivé parce que le style possède un éventail super large, on peut tout à fait aller de l’extrême violence à son extrême contraire. Ces différents degrés d’intensités sont très intéressants, ils créent un espace de création vaste où en une mesure tout change.

Gredin : C’est sinusoïdal le Metal. Avant d’être classé Metal Cinématographique, nous étions classés Metal sinusoïdal (gros éclat de rire général). 

Emmanuel : C’est vrai ! Je l’avais oublié ! Sur les premiers flyers on avait écrit « Metal sinusoïdal ». (Rires). 

Gredin : On était jeunes ! (Rires).

Les samples sont précis et arrivent toujours à des moments clés des compos, comment vous les choisissez ? Est-ce que ça vient après l’écriture des structures ou vous construisez parfois une compo autour d'un sample ?

Gredin : Ils viennent pendant. Nous avons une banque de samples qu’on réunit tout au long de l’année et on se dit « Tiens, celui-là il convient bien ». Ou alors on bloque sur un passage, on choisit un sample et tout se débloque. C’est en quelque sorte un instrument à part entière. 

Emmanuel : Ils viennent surtout de lectures et / ou de films que nous avons vus. Ils sont enregistrés et on les garde. Ça nous fait une belle bibliothèque qui est utilisée en studio par la suite. Lorsqu’on développe une structure, une atmosphère, avec pourquoi pas un changement de langue, on va piocher dedans. Il arrive parfois que nous allions chercher autre part, mais c’est rare. 

Est-ce qu'il y a une histoire sur vos différents albums ? J'ai l'impression qu'on suit plus ou moins un personnage fictif tout au long de vos albums, je me trompe ?

Emmanuel : Tout à fait, il y a une sorte d’errance d’un personnage, un monologue intérieur qui est mis en musique. On pourrait presque croire qu’il s’agit du même personnage depuis le premier album, et on suit différentes étapes de son parcours. Sans s’être posé la question de manière directe, c’est un peu ça. 

Niveau scénographie est-ce qu'il y a des choses qui vous font envie ?

Emmanuel : Énormément de choses … Sur Acid Mist Tomorrow on a fini par mettre la vidéo de côté parce que tout n’était pas réuni pour que ce soit bien fait. 

Gredin : De plus on avait été un peu dégoutés sur la tournée du premier album où nous avions créé des passages vidéo vraiment au millimètre avec la musique et ne pas pouvoir l’utiliser à chaque fois ça a été frustrant. 

Emmanuel : Du coup sur la tournée d’Acid Mist on a plus misé sur les lumières et les bruits de fond. Faire les choses à moitié c’est chiant. Mais on y revient, on met en place actuellement une petite scénographie maison, modulable, qui s’adapte bien à l’endroit où l’on joue. Elle évoluera probablement en cours de tournée d’ailleurs. 

Théo : C’est parfois conflictuel mais avec le temps on va améliorer ça. Parfois la vidéo ne se voit pas bien, on va adapter. Tout ça relève de problèmes techniques et logistiques, ça prend du temps. 

Emmanuel : L’idée ce n’est pas non plus que la vidéo prenne le pas sur la musique ou les lumières et le jeu scénique. Tout droit être en harmonie, la vidéo n’est d’ailleurs pas présente tout le temps. 


Sur le dernier album, on a l'impression que vous êtes allés piocher dans la littérature et le cinéma nord/sud américain ? Est-ce que c'est une évolution, une façon de mieux toucher ces pays ou c'est une volonté purement artistique ?


Gredin : Ça vient essentiellement de nos lectures et visionnage du moment. 

Emmanuel : Il n’y a aucune volonté de toucher un public en particulier, c’est même la dernière chose à laquelle on pense. Avoir une cible quand on compose ne serait pas intelligent, ça prouverait un manque de créativité aussi. Nous avons utilisé pas mal de textes espagnols sur Shores of the Abstract Line parce que ça correspondait à mes références du moment. On a intégré moins de films cette fois-ci, un ou deux peut-être, on s’est imprégné de plus d’auteurs et de poètes. Ça se prête probablement au rythme et débit de paroles dont on avait besoin, tout s’est fait naturellement. 

Au-delà du côté cinématographique, il y a quelque chose dans votre musique qui rappelle le voyage, je ne saurai pas expliquer, est-ce que c'est débile ou c'est quelque chose qui vous parle ? Le mélange de cultures langues / samples de films, les ambiances ou tout simplement parce que j'ai l'impression que je peux me perdre à contempler un paysage avec votre musique dans les oreilles...

Emmanuel : Si en même temps qu’on écoute la musique on peut se projeter dans des espaces, c’est formidable… 

Gredin : On est une agence de voyage spirituelle ! (Rires). 

Emmanuel : Effectivement, c’est très intéressant de s’intégrer à ce parcours fictif. C’est chargé de paysages que j’ai pu voir et découvrir. 

Gredin : Moi-même j’ai découvert cet aspect de notre musique. J’ai beaucoup écouté Acid Mist et Shores of the Abstract Line quand ils étaient en cours de mixage, que ce soit en avion, train ou voiture, et oui ça colle parfaitement à l’esprit voyage. 

Aujourd'hui on voit de plus en plus de groupe concevoir des bandes originales de film et les interpréter lors de ciné-concerts. Pourtant avec votre univers cinématographique et littéraire vous êtes plus éligibles et même légitimes à réaliser quelque chose de similaire. Est-ce un projet qui vous intéresserez et si oui pour quel genre de film ?

Emmanuel : Oh bah oui à fond ! On avait dans l’idée de réaliser quelque chose autour du court-métrage : La Coquille et le Clergyman, d'après le scénario d'Antonin Artaud. Puis on n’a jamais vraiment pris le temps de le faire. On en parle souvent, mais on ne sait pas autour de quoi ce sera. C’est dans un coin de nos têtes et on espère le réaliser bientôt. Mais, on ne peut pas en dire plus. 

Gredin : Des projets on n’en a plein, de là à les finaliser, on n’en est pas encore là. 

Au sujet du crowdfunding, le votre a super bien marché, est-ce que c'est la seule façon de financer un album de nos jours ?

Emmanuel : Alors je ne sais pas si c’est la seule, mais c’est une bonne manière. D’ailleurs je pense que dans l’avenir nous y ferons appel de nouveau. C’est un peu comme une souscription à un projet, une forme de soutien, c’est un échange entre les fans et le groupe. Ça permet de garder une certaine forme d’indépendance ce genre de financement, ça évite pas mal de contraintes. 

Gredin : Moi-même en tant que fan, j’ai participé à de nombreuses reprises à cette méthode, pour les dernier Synopsis et Corbeaux par exemple. 

Emmanuel : Cette campagne de crowdfunding est aussi un peu un lien avec le public. Nous avons été surpris et touchés à la fois de voir autant de gens y participer.

Gredin : Quand tu passes uniquement par un label, tu ne vois que des chiffres j’ai l’impression. Alors que là, on constate l’engouement du public. On a un rapport direct avec eux, on communique sur l’avancement etc. 

Théo : La pression est très différente aussi, on rend des « comptes » au public et pas à un producteur ou un boss de label qui a des directives artistiques. Cette pression est plus saine à gérer, dans l’instant où tu bosses sur ce projet, tu te motives pour ton public, qui attend un produit fini, qui ne dira pas « à non ça c’est pas bien, là le riff est pas top ». Ce serait bien qu’à l’avenir le financement participatif prenne plus d’ampleur et se développe sous d’autres formes. Sans se reposer dessus totalement, ça nous a enlevé une belle épine du pied.  

Est-ce que vous pouvez nous parler de la chanson "Tio", je la trouve assez surprenante, un OVNI dans cet album OVNI, qu'est-ce que ça raconte ? 

Emmanuel : Ce titre remonte à longtemps, bien avant la conception de l’album. Je l’ai composé et structuré d’une traite, sans penser forcément à la destiner à Hypno5e, c’est un morceau qui est venu comme ça. Il me tenait beaucoup à cœur, nous avons donc regardé comment il pouvait s’intégrer au reste de l’album et on a vu qu’il s’installait bien en position centrale, il donnait de l’âme et une résonance aux autres morceaux qui, à leur tour, le rendaient encore plus fort. Tio est une espèce de divinité bolivienne, un gardien des souterrains, le patron des mineurs auquel les travailleurs font des offrandes avant de descendre dans le fond. Dans le contexte de Shores of the Abstract Line, le personnage fictif s’adresse directement à lui, en lui déclarant toute sa mélancolie, comme s’il pouvait s’en décharger. Cette chanson exprime un peu le rapport que j’ai avec la Bolivie, et des choses que j’y ai vécues. Toute la mélancolie de l’album s’inspire de mes années passées là-bas, Tio est un peu le noyau de Shores of the Abstract Line

Emmanuel, est-ce que tu peux nous parler de ton projet de long métrage El Alba ?

Emmanuel : Il touche à sa fin, le montage est terminé, il part en étalonnage. Le mixage est aussi quasiment fini, d’autres démarches sont en court, si tout va bien, d’ici la fin de l’année je pourrais le présenter. Mais c’est compliqué tu sais, le circuit est différent de celui de la musique, mais pas plus facile. En tout cas il est terminé, il a été fait avec une équipe d’amis qui m’a suivi plusieurs mois en Bolivie. Il y a quelques acteurs pros et d’autres non, des personnes locales qui jouent leur propre rôle. Cela a été une expérience forte, certains samples espagnols utilisés dans l’album sont tirés de El Alba. J’espère prochainement pouvoir donner des nouvelles au public qui a participé à son financement. 

Un dernier mot pour les lecteurs de Metalorgie et sa rédaction qui fêtes ses quinze ans cette année ? Une anecdote en particulier sur le site ou ses membres ?

Hypno5e : On remercie les lecteurs pour leur intérêt et leur soutien ! On espère vous croiser sur les routes ! 

Gredin : On souhaite remercier Metalorgie qui nous suit depuis le départ. 

Emmanuel : L’un des premiers forum de discussion sur Hypno5e était sur Metalorgie il me semble. À chaque sortie d’album vous avez parlé de nous, chroniqué et nous avons même été « Album du Moment » ! (Rires). 

Gredin : Du coup, bah je suis régulièrement l’activité de Metalorgie ! Je sens une espèce de connexion entre nous ! (Rires). 

Thèo : Ouais un grand merci, j’aime beaucoup ce qui se passe sur les webzines et je consulte fréquemment Metalorgie.

Shades of God (Mars 2016)

Remerciements : Klonopshère et Hypno5e.

Questions : Nonohate et LeLag. Menée par LeLag et (un peu) Shades of God. Retranscription : Shades of God.  

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Commentaires

rhapsody76Le Dimanche 08 mai 2016 à 09H19

super groupe vu au Tetris du Havre vendredi 6 mai.Malheureusement peu de monde mais un super concert intense et techniquement impressionnant !! j'ai hâte de les revoir!!!!