Brutus
par Skaldmax (29/07/2024)

English version below
Quelques heures avant leur retour sur scène au Hellfest (cette fois sur la Valley), nous avons eu la chance de rencontrer les belges de Brutus. En ascension constante depuis Burst sorti en 2017, le groupe séduit les foules avec son mélange très personnel de Post-Rock/Post-Hardcore accrocheur et immédiat. Stefanie (batterie, chant) a dû préserver sa voix pour le concert, mais nous avons eu la chance de nous entretenir avec Peter (basse) et Stijn (guitare) pour évoquer le dernier album, les tournées et les inspirations de Brutus.
Salut Brutus. Comment ça va ?
Peter : Très bien, merci !
C'est votre deuxième fois au Hellfest. Quels souvenirs gardez-vous de votre premier concert ici ?
Stijn : La première fois que nous avons joué ici, c'était une énorme surprise pour nous parce que nous avons fait les balances alors que le festival n'était pas encore ouvert. Puis nous sommes montés sur scène, et c’était bondé. Ils ont dû fermer la Warzone, c'était une grosse surprise pour nous et c'était un très beau concert.
Peter : En tournée les années suivantes, les gens (surtout en France mais aussi dans toute l'Europe) nous parlaient de ce concert au Hellfest. Tout le monde était là pour nous voir et les gens sont venus ensuite à d'autres concerts en Europe, donc ça a été un show très spécial pour nous.
Vous avez sorti Unison Life en 2022. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce troisième album ? Avez-vous travaillé de la même manière que pour les précédents ?
Stijn : Je pense que nous avons pris beaucoup plus de temps cette fois. Le premier album que tu fais en tant que groupe, tu as le temps de le faire. Le deuxième, nous l'avons écrit en tournant, en jouant des concerts. Donc oui, c'était chaotique, pour le dire franchement. Avec le troisième album, notamment à cause du COVID, nous avions beaucoup de temps comme tout le monde. Nous l’avons dédié à ce nouvel album, et ça a été vraiment appréciable.
Je trouve que c'était votre album le plus fort émotionnellement jusqu'à présent. Est-ce quelque chose que vous ressentez aussi ?
Peter : Oui, je pense. Tout était plus profond : la musique, les paroles. Peut-être aussi parce que nous avons vieilli. Nous avons voulu nous investir encore plus dans les morceaux, et je pense que ça se ressent.
À propos des paroles, j'ai remarqué que vous avez écrit plusieurs morceaux qui traitent de la distance, comme sur Distance ou Miles Away. Pourquoi est-ce un thème spécial pour le groupe ?
Peter : Stefanie écrit la plupart des paroles, c'est difficile de parler à sa place, mais je pense que la connexion avec les gens est très importante pour elle. Si nos titres parlent de distance, c'est la plupart du temps à propos de ce lien.
Est-ce lié aux tournées ou en général ?
Peter : Peut-être, oui. L'album Nest parle aussi de l'éloignement de chez soi, de quitter son nid et de faire son propre nid en tournée. Donc, une chanson comme Distance sur Nest aborde ce genre de thématique.
C'était une question pour Stefanie, mais je pense que vous pouvez répondre. Je trouve que sa voix est un peu plus brute sur cet album, surtout sur des chansons comme Liar, Dust ou What Have We Done. Est-ce que c'était prévu ou est-ce une évolution naturelle de sa voix ?
Stijn : Je pense que c'est une évolution naturelle. Au fil des années, elle est devenue—je l'aimais en tant que chanteuse dès le début. Elle avait une belle voix à l'époque, mais je pense qu'elle a appris à se connaître. Elle travaille très dur pour être une bonne vocaliste. Maintenant, elle sait mieux utiliser son chant, et c'est pour ça qu’elle a plus de possibilités.
Peter : Nous l'avons vue changer, trouver sa voix, et parfois en écrivant des chansons et en répétition, elle fait des choses qu'elle n'a jamais faites auparavant. Parfois, ça marche, parfois non, mais elle ne se considère comme chanteuse que depuis cet album. A l’époque du premier album, elle se voyait juste comme une batteuse qui chante. Maintenant, elle est confiante en tant que chanteuse du groupe. Je peux aussi le ressentir sur scène. C'est différent aujourd’hui d'il y a cinq ans. Elle était un peu plus cachée derrière la batterie, et maintenant à certains moments, quand je regarde sur ma gauche, je me dis, waouh, elle est vraiment la frontwoman de son groupe.
Stijn : Parfois, pendant une chanson, elle fait quelque chose qu'elle ne fait pas normalement. Elle fait des choses différentes sur scène, selon ce qu'elle ressent ce jour-là. Parfois, elle fait quelque chose, et nous nous regardons l'un l'autre en se disant « Qu'est-ce que c'était ? ». Dans le bon sens, bien sûr. Ca lui vient naturellement, c’est honnête, c’est pur.
Etre batteuse et chanteuse en live, ce n’est pas forcément évident. Réorganisez-vous parfois la scène pour placer la batterie ailleurs, ou est-elle à l'arrière ?
Stijn : Non, pas à l'arrière. Elle est sur le côté. Nous avons commencé à faire ça parce que nous aimons jouer en cercle pour pouvoir se regarder. C'est très important pour Stefanie aussi. Vue comment elle est assise, elle peut nous voir et s'adresser au public. Ce serait étrange pour nous de jouer dans une autre configuration.
Peter : Nous avons essayé une fois pour le fun en répétition, mais nous avons changé pour revenir avec la disposition habituelle.
Peter, c’est toi qui t’occupes des pochettes pour le groupe. Est-ce que ce sont des peintures, de l'art numérique ? Comment les réalises-tu ?
Peter : C'est numérique, fait avec Photoshop. Et nous choisissons la pochette après que toutes les chansons soient écrites, pas pendant le processus d'écriture. Écrire l'album, c'est se projeter, chercher le thème général. Une fois que nous avons cela, nous composons avec une ligne directrice, et l’artwork vient après.
Étais-tu artiste avant le groupe, ou crées-tu spécialement pour les albums ?
Peter : Je suis graphiste, mais je ne suis pas un artiste. J'ai toutes les compétences techniques, mais le processus créatif, comme pour cet album, était collectif. Je fais des choses, je les propose, nous en discutons et je retourne travailler dessus. Nous utilisons mes compétences de graphiste dans le groupe, pareil pour les produits dérivés, pareil pour les réseaux sociaux. Je sais comment faire des choses sur l'ordinateur, mais je ne me considère pas comme l’artiste derrière ces pochettes. Ca arrive par tâtonnements. Aucun de nous ne dirait, « j'ai écrit cette chanson ». Nous faisons toujours tout ensemble.
En parlant de ça, vous avez fait un clip pour Liar. Il était assez inspiré par la fantasy et la science-fiction. Vous avez aimé tourner ce clip ? Êtes-vous dans la vidéo ?
Peter : Non, c'est un secret.
Stijn : Je jouais une des dunes.
Peter : Non, Stefanie et Maximilian, qui a tourné le clip, sont amis. C’est un très bon directeur de la photographie, et ils sont allés au Maroc pour filmer. C'était l'idée de Stefanie.
Ils sont partis au Maroc ? Les décors sont magnifiques, ça donne une ambiance à la Dune justement.
Peter : Beaucoup de vieux films ont été tournés là-bas. Maximilian connaît tout là-dessus. Stefanie a élaboré le scénario, en a parlé avec lui, et il a dit « Faisons-ça au Maroc ». Mais ça coûtait beaucoup d'argent, donc nous n’y sommes pas allés pour alléger les coûts. Nous en sommes toujours très fiers et heureux, ils ont fait un excellent travail. Les autres personnages dans la vidéo sont des acteurs locaux, et le copain de Stefanie est allé avec eux, donc il joue l'un des personnages.
Prévoyez-vous de faire plus de clips dans cet esprit ?
Peter : Nous verrons. Nous aimons aussi beaucoup la vidéo de Victoria. Elle a été tournée en Belgique, chez nous, à Gand. Ca dépend de la chanson et de l'ambiance. Pour Liar, c'était ça, mais pour Victoria, il fallait que ce soit plus nostalgique. C'était différent.
Vous avez joué aux États-Unis l'année dernière et vous allez faire une autre tournée en Amérique du Nord cette année. Est-ce différent pour vous de jouer là-bas ?
Stijn : Concernant les concerts, pas vraiment. On s’amuse toujours lors des concerts, et on fait toujours de notre mieux. Le public change d'un pays à l'autre, mais pas tant que ça. Ce qui est cool pour nous, étant européens, c'est de rouler en van à travers les États-Unis avec des amis. Les paysages, les gens que tu rencontres, les salles, la nourriture, c'est comme un film. C'est super de mélanger les concerts et le tourisme.
Peter : En Europe, nous avons déjà été partout deux ou trois fois, mais les États-Unis c’est tellement grand et beau. Lors de la dernière tournée, ça m'a frappé à quel point le pays est grand et beau. Les villes sont ce qu’elles sont, elles diffèrent des villes européennes, mais en dehors, la nature est magnifique.
Peter, j'ai remarqué que tu portes un t-shirt Spectral Wound. Le Black Metal t'inspire pour composer ?
Peter : J'adore en écouter, surtout pour les mélodies. Nous avons joué avec Spectral Wound en France, et ils étaient vraiment excellents. Je ne connaissais pas le groupe, mais je les ai écoutés. Ce n'est pas mon genre préféré, mais certains groupes font quelque chose de différent, comme eux.
Toi Stijn, tu aimes le Black Metal ?
Stijn : Oui, complètement. Je pense que dans notre musique, le tremolo picking et ce genre de choses viennent de là, mais aussi du Post-Rock. On aime toutes ces choses là.
Vous allez travailler sur de nouveaux titres après la tournée ? C’est l’objectif de 2025 ?
Peter : Oui, c'est plus clair pour nous de se concentrer sur les concerts puis les tournées. L'année prochaine on compose.
On arrive à la fin de l’interview. Un dernier mot ?
Stijn : Merci aux gens qui écoutent notre musique, qui viennent à nos concerts, ça signifie beaucoup pour nous. Et merci pour ton temps et pour cette interview.
Peter : Merci beaucoup.
Merci à vous.