Clavicule
par Ubuto Kro (02/07/2020)
Juin 2020... Le monde est chamboulé. Une pandémie, un confinement et toute une partie de la culture à l'arrêt. En à peine trois mois, le covid-19 a tout rasé. Pas de festival, plus de concerts et aucune séance de rattrapage dans les cafés-concerts... Dans ce contexte, comment sortir un album ? L'incontournable release party est-elle seulement envisageable ? Pas de live, des entrées restreintes... mais une sévère envie de partager un boulot engagé depuis plusieurs mois. C'est dans cet état d'esprit que les Rennais de Clavicule préparent le lancement de Garage Is Dead, sorti chez Beast Records. Initialement annoncée pour mars, la soirée de lancement est finalement calée au vendredi 12 juin 2020 au Mondo Bizarro. Certes, les conditions ne sont pas encore réunies pour jouer face à un public... mais concert, il y aura !
Quelques jours avant l'événement, les quatre musiciens ont enregistré un live sur la scène du Mondo Bizarro : une salle vide, une seule prise, des caméras... Ouais, pas simple de se motiver en huis clos, mais ils ont su apporter une belle dynamique à cette session hors norme. Et il aurait été dommage de ne pas marquer le coup ! L'album est bon, très bon. Une rythmique puissante, une voix maîtrisée, des guitares subtiles à l'accent Californien... Il y a beaucoup à dire sur la qualité des compositions et sur cet enregistrement qui les met sacrément en valeur. Dimitri Dupire, leur producteur, a fait un excellent travail en studio : il a su capter chaque instrument tout en gardant l'énergie du groupe. Les détails s'entendent sans aseptiser l'ensemble. Le son est net et brut à la fois : deux termes presque antagonistes qui donnent une touche intemporelle à Garage Is Dead. Intemporel... L'artwork l'est tout autant. Un graphisme signé Arrache-toi un Œil qui a imaginé une pieuvre géante, tenant une clavicule... et qui semble sortir tout droit d'un film de SF des années 50 ou même d'un mur fraîchement graffé en 2020.
Bref, Clavicule, c'est à découvrir sur cd, vinyl, cassette et aussi sur internet, à travers leurs live sessions. Mais à quand les concerts ? Pourra-t-on réinvestir les salles en septembre 2020 ? Le Punk / Garage que distillent Ian, Marius, Alexis et Kamil n'attend qu'à être libéré. Alors, côté spectateurs, prenons notre mal en patience et pour tous ces groupes qui vivent leur créativité sur scène, soyons présents quand sonnera à nouveau l'appel du live.
Garage Is Dead, un nom d'album symbolique en cette période sans live ?
Ian : il y a une part de vérité. On arrive après une grosse vague de Garage en 2010. En ce moment, on est dans une période moins prolifique dans ce domaine.
Marius : il y a un peu de provoc' dans ce titre aussi.
Ian et Alexis : oui, clairement.
Comment garder l'énergie des morceaux en studio ? De l'enregistrement en mastering, la réflexion se fait-elle à toutes les étapes ?
Marius : pour nous, le travail s'est surtout fait sur les prises.
Kamil : oui, on a tout enregistré en live pour garder l'énergie.
Alexis : on a enregistré sur un temps très court, sur trois jours et demi. Le producteur, Dimitri, a tout de suite su comment poser les micros. Il savait où il allait. C'était très confortable pour nous.
Marius : niveau chant, j'étais avec eux pour l'enregistrement instru. Je suis aussi guitariste et il fallait que je sois là pour qu'on garde l'énergie du live. Après cette étape, on a repris tout le chant à part.
En vous écoutant, on a l'impression que vous avez tous des influences différentes. Des différences que vous assumez et qui donnent une identité forte à votre musique. Vous êtes d'accord avec ça ?
Ian : oui et non. Alexis écoute des groupes très différents mais avec Marius et Kamil, on a beaucoup d'influences communes.
Kamil : et c'est bien. Le jeu d'Alexis, à la batterie, donne un côté plus vénère aux morceaux.
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Alexis : mon jeu n'est pas Garage, il est plutôt typé Hardcore / Metal.
Les guitares ont une approche très Rock et Surf Music. Est-ce que vous vous sentez proches de groupes ou de musiciens comme Dick Dale ou The Flying Padovanis ?
Marius : pas spécialement mais c'est vrai qu'il y a de ça.
Kamil : ça vient aussi de nos instruments. Marius a une Mustang et moi, une Jazzmaster. Ce sont les guitares, par excellence, de la musique Surf.
Dans certains morceaux, la batterie est très en avant sans pour autant étouffer les autres instruments. Comment avez-vous travaillez ça ? La basse a-t-elle un véritable rôle d'intermédiaire entre les guitares, la batterie et le chant ?
Alexis : au niveau compo, on essaie d'avoir une grosse assise rythmique. Et pour l'album, on doit cet équilibre à Dimitri.
Marius : dans le mix, Dimitri a eu tendance à placer les guitares à l'extrémité.
Kamil : oui, il nous a tous accordé une place. Chaque instrument s'entend très bien.
Ian : le son de ma basse joue aussi. C'est une Rickenbacker. Elle a un son très marqué avec du grain.
Le chant a un petit air d'Alex Turner des Arctic Monkeys, non ?
Alexis, Kamil et Ian : ouais, y'a un peu de ça. C'est vrai.
Marius : c'est pas voulu mais ouais, d'accord.
Un mot sur les textes ?
Marius : le texte n'est pas forcément la priorité. On voulait tous un chant en Anglais pour la musicalité. On compose d'abord la musique et je pose la partie chant en yaourt. Pour les textes, je dirai que ce sont plutôt des billets d'humeur. Après, on participe tous.
Ian : quand quelqu'un commence à composer, il va au bout du morceau au niveau du texte et de la composition.
Comment se prépare une sortie d'album dans le contexte actuel ? On est au mois de juin et sans possibilité de faire de concert, on peut dire que la musique n'est pas encore déconfinée.
Marius : c'est pas simple.
Ian : l'album devait sortir le 17 avril 2020. Le concert devait avoir lieu au 1988 avec deux autres groupes de Garage, Flying Bones (duo Rennais) et Le Mamoot (groupe de Brest).
Alexis : le Covid a eu raison de cette sortie.
Ian : on devait faire le Binic Festival. On espère vraiment que ça soit reporté en 2021.
Et Beast Records, c'est une belle aventure ?
Alexis : j'en connais deux qui étaient très fiers.
Marius, Kamil et Ian : non, tous les quatre.
Kamil : the label to be.
Qu'est-ce qu'on vous souhaite pour la suite ?
Tous : refaire des concerts !
Alexis : de gagner le cœur de quelques metalleux.