Vidi et Tomer de Subterranean Masquerade
par Jasmin Hammon et Felix Hammon (28/04/2019)
Avant le concert de Systemhouse33 (Inde), de Subterranean Masquerade (Israël) et d'Orphaned Land (Israël), samedi, 13 avril 2019, Felix et moi, nous avons la possibilité de parler avec Tomer Pink et Davidavi « Vidi » Dolev du groupe Subterranean Masquerade. Tomer est un des membres fondateurs de ce groupe de metal progressif, avant-garde, expérimental, qui réunie les musiques du Proche-Orient avec celle de l'Inde et le rock européen. Il a écrit la majorité des chansons qui se caractérisent d'une langue cinglante et imagée, et la musique est très diversifié, tout en montrant un certain concept et style unique. Existant depuis 1997, ce n'est qu'avec la tournée avec Orphaned Land en 2018 que Subterranean Masquerade devient plus connu en Europe et cette année, ils se présentent très contents sur leurs posts sur Facebook qu'ils ont de plus en plus de fans dans le monde occidental. Vidi est le nouveau chanteur depuis 2018 qui est charismatique, énergétique, et qui chante à voix claire tout en glissant sans difficulté dans la voix gutturale, puissante et grave. Sur les albums (Suspended Animation Dreams, 2005, The Great Bazaar, 2015, et Vagabond, 2017), dispos en ligne et à écouter sur YouTube, ce sont encore ses prédécesseurs Kjetil Nordhus (Green Carnation, Tristania, Nightshadows Lament) et Eliran Weizman, et autres membres ont changé – j'ai donc attendu le concert avec une joyeuse anticipation, de voir et entendre la nouvelle composition du groupe. En live, ils se présentent beaucoup plus metal qu'on l'attendrait en écoutant à leurs albums et ils arrivent à animer l'audience de chanter et danser avec eux. À la fin du concert, ils ont invité tout le monde sur la scène, un très bon moment de fête !
Mais avant, Tomer, Vidi et les autres musiciens nous ont accueillis chaleureusement et ils ont répondu avec beaucoup de sincérité à mes questions. Voilà donc notre conversation.
Jasmin : Vous vous déplacez beaucoup quand vous êtes en tournée. À quelle mesure êtes-vous des vagabonds, des nomades ?
Tomer : Actuellement, beaucoup, beaucoup !
Vidi : Hm, oui.
Mais vous semblez aimer cette vie, de ce qu'on voit sur vos posts sur Facebook ?
Vidi : Ben, je pense que principalement, ce groupe, il s'agit d'apprécier la route, beaucoupe, et pour moi, personnellement, il s'agit aussi de rechercher et d'éprouver la nostalgie. Alors, le plus loin que nous allons, le plus de pays que nous voyons et le plus de villes que nous voyons, comme musiciens, je croix que cela nous fait nous développer comme artistes. De plus, cela cela nous donne des réponses aux questions concernant l'identité, d'où nous sommes. Alors, en comparant, c'est une bonne expérience.
Alors, diriez-vous que le plus loin que vous êtes de chez vous, le plus vous savez qui vous êtes, ou comment est-ce que vous ressentez le voyage ? Si vous dites « identité » ?
Tomer : Ben, pour moi, je pense, avant tout, je voyage différemment que les autres parties du groupe. Mais pour moi, le plus que je suis éloigné de chez moi, le plus tout me manque que j'ai laissé sur place. Alors, disons que si je me réveille la première matinée dans le bus, tu vois, ma femme et mes enfants, et mon travail, mes chiens et mes chats me manquent un peu. Plus le temps passe, plus je commence à comprendre que la vie est proportionnée, tu vois. Alors, tout ce que nous faisons est formidable, mais, évidemment, il n'y a aucun lieu comme chez soi et chez soi c'est là où il y a ton cœur. Et c'est une belle perspective de savoir, d'être sur les scènes partout en Europe et de voir des milliers de fans et cette certitude agréable qu'il y a un lieu familier où on peu rentrer. Qu'il y a un « chez soi ». Notre musique parle beaucoup de l'identité, et la recherche de l'identité et de savoir qui on est. Et être en tournée en Europe pour une période aussi longue nous donne une perspective sur ce qui est important. Chacun à sa manière.
Quel est votre contexte musical, comment êtes-vous entrés en contact avec la musique dans vos vies ? Est-ce que vous avec fait des études, ou est-ce que vous aviez des idoles pendant votre enfance ?
Vidi : C'est une bonne question !
Tomer : Oui !
Vidi : Tu veux commencer ?
Tomer : Oui. Tu vois mon t-shirt ?
Oui !
Tomer : Alors, je porte mon t-shirt Nirvana que je viens d'avoir récemment. Mais mon premier souvenir de mon adolescence est d'avoir vu Nirvana aux MTV Awards, cela doit être les années 1990, de les voir casser une guitare et j'étais chez mes grand-parents, c'était la nuit de Pessa'h je pense, et j'ai pensé en ce moment, « Je veux être comme ça ! ». Et ils m'ont regardé, disant, « Tu es fou ! ». « Non, je veux être comme ça ! ». Et quelque jours après, j'ai commencé à écouter plus de musique, plus de Nirvana et Guns and Roses. Et actuellement je fais un concert devant 300 gens à Lyon où je porte mon t-shirt Nirvana. Et c'est exactement « suit tes idoles ». Parce que, pour moi, Nirvana n'est pas seulement un groupe garage génial. Pour moi, c'était aussi un moment à l'époque quand j'ai décidé de consacrer ma vie entière à la musique, à répandre la joie, de le faire à ma propre manière. Évidemment, nous ne cassons pas des guitares sur scène et nous n'allons pas gagner un prix MTV sous peu, mais au moins à petite échelle, nous pouvons réaliser des rêves ce qui est génial ! Tu vois, je suis heureux ! De pouvoir le faire.
Et toi ?
Vidi : Ben … Alors, aussi long que je me souvienne, ce qui importait, c'est la performance. Et ben .. où je suis grandi, cela ne s'est pas intégré, ce que j'ai aimé, ou ce que j'ai voulu faire et comment j'ai voulu faire les choses, cela ne s'est pas bien intégré au cercle social autour de moi. Alors, j'étais une sorte d' « outsider ». Et ben .. quand j'avais 12 ou 13 ans, j'ai écouté à beaucoup de musique avant, mais quand j'avais 12 ou 13 ans, je me souviens que j'ai commencé à écouter au metal et la ville où j'ai vécu, qui s'appelle Haifa, c'est une ville portuaire, à la Méditerranée en Israël, avec un port, et en haut, en-dessus de nous, il y a deux villes des Druzes qui ont une religion très très très intéressante. Ils croient en la réincarnation et des dogmes pareils. Et un de mes meilleurs amis était de là-haut et il aimait beaucoup le black metal. Et nous deux, tout ce que nous espérons être, c'était, toutes ces années, d'être des Vikings. Alors, on a passé le temps, assis dans la forêt et, tu vois, essayant de se connecter avec les choses, mais, finalement, quand nous étions à la maison et quand nous nous regardions dans le miroir, nous n'étions pas suffisamment grand et blond pour être des Vikings. Et cela a mis quelque chose en marche dans ma tête, comme, bon, comment puis-je m'approprier la musique occidentale, pas seulement le black metal, mais aussi le rock'n'roll, le punk. Je ne voulais pas être une sorte de réplique, ou de simulacre, ou quelque chose, tu vois. Je suis d'accord de refléter des vieilles idées, mais je veux le faire avec mes propres capacités et mon identité géographique. Alors, j'ai commencé à faire de la musique plus expérimentale pendant mon adolescence et je me suis plongé de plus en plus dans cette musique. Et oui, finalement, ce que j'essaye de comprendre est que, je pense, de groupe à groupe, de projet à projet, de concert à concert, c'est cette mélange que mous avons au Proche-Orient, cette mélange que nous avons en Israël d'où nous sommes, de qui nous sommes et que nous sommes. Alors, je me suis plongé dans hardcore et la performance d'un côté, mais je pense toujours que tous doit avoir de sens. Comme ce moment quand j'ai vu Nirvana, c'était spécial pour moi, Nirvana est un groupe formidable … Je veux voir un groupe Nirvana du Proche-Orient. C'est une des raisons pour lesquelles je fais ce que je fais.
C'est super intéressant et cela répond déjà à quelques unes de mes questions, parce que tu as déjà mentionné la mélange culturelle en Israël et votre musique se constitue de différentes influences, il y a des influences indiennes, européennes, des influences différentes de l'Orient. Et comme tu l'as déjà mentionné, il y a la question de ce qui est « metal » et de ce que tu racontes de ton enfance et ton adolescence quand tu as pensé que c'est plutôt l'image du Viking dans le metal. Ben, récemment, j'ai discuté avec un de mes étudiants, qui est indien, ce qui représente metal. Et il a dit qu'il aime le metal mais ce qu'il n'aime pas c'est que c'est une culture « blanche ». Qu'est-ce que vous en pensez ?
Tomer : Cela veut dire quoi, une « culture blanche » ?
Ben, que c'est une musique « de personnes blanches pour les audiences blanches » ?
Felix : Que l'origine de cette musique est la musique baroque et classique, plus que autre chose.
Vidi : Je comprends sa position, mais je la conteste. Je comprends ce qu'il dit, mais je ne suis pas d'accord, parce qu'avant tout, sur le plan historique, il n'est pas nécessaire d'aller très loin dans le passé pour voir que cette musique a des racines fortes dans la culture de l'Afrique du Nord.
Tomer : Tout ce qui est blues, rock'n'roll, je pense que c'est très évidemment de la culture Africaine.
Vidi : La culture africaine est présente. Le Tribalisme est présent. Je pense que cela soit un peu difficile, j'essaye de, de le dire de manière correcte, j'essaye de l'expliquer … et je parle uniquement pour moi … je pense que pour quelqu'un de l'extérieur, quelqu'un qui ne comprend pas à 100%, que cela peut paraître … que des éléments peuvent, dans certains contextes, … je cherche … le mot correct … Je commence par la fin. Nous somme en tournée avec Orphaned Land pour la deuxième fois maintenant, et les audiences sont très diversifiées, très hétérogènes, on voit des gens de tous les coins du monde, nous voyons des gens de différentes couleurs de peau, nous voyons des gens avec des styles différents, nous voyons des gens de différents âges, alors, c'est comme cela que nous existons actuellement, peut-être quelque part, ce n'est pas comme ça, mais nous, comment nous l'éprouvons actuellement, je ne dirais pas que le metal est une culture blanche, pas du tout. De plus, je ne m'identifie pas comme une personne blanche. Alors, pour moi, je ne peux pas dire que c#est une culture « blanche », que c'est seulement une culture blanche même si je fais partie de cette culture, comme consommateur que comme quelqu'un qui crée cette culture. Je pense alors, qu'il y a 20 ans, peut-être, que cette musique était un peu plus soumise à la ségrégation, pas dans un sens raciste, mais peut-être en Europe, les gens pouvaient accéder à cette musique, plus qu'à des autres endroits dans le monde et aujourd'hui avec internet et tout, c'est plus facile. Tout ceci, et à mon avis cela dépend aussi de l'identité mixte que metal est avant tout une musique folklorique. Je pense que Judas Priest, tout cela, est de la musique folklorique. Nous avons une tribu, nous écoutons à une histoire, nous réjouissent ensemble, c'est presque comme une église. Quand les gens se réunissent, et je pense que ce que nous essayons, c'est de transmettre des messages qui ne sont pas trop pessimistes. Et je pense que dès qu'on en déduit la partie obscure, nous l'utilisons comme un élément stylistique, mais ce n'est pas la chose la plus importante, le message le plus important. Tu peux créer une belle contestation, des bonnes idées, avec les gens. Ce n'est pourtant pas seulement la rébellion, mais plutôt la liberté. Et oui, je ne sais pas … je crois que je dis pas mal de choses … sans répondre … Je conteste cet avis, je ne pense pas que c'est une culture blanche, parce que nous ne venons pas … nous avons une géographie d'immigration.
Peut-être que c'est aujourd'hui, comme tu l'as mentionné, plus facile d'accéder à la musique d'autres pays. Et puis, les scènes de metal dans les autres coins du mondes sont en train de grandir, comme par exemple en Afrique du Nord, la Tunisie, ou encore par exemple en Indonésie, il y a des groupes connus, comme d'Israël...
Vidi : Tout à fait ! Ils ont des grands festivals en Indonésie ! Aussi en Mongolie, cela devient de plus en plus grand. J'ai des amis, un groupe Israélien, qui viennent de rentrer d'un festival de grindcore à Oulan-Bator où ils ont joué. Alors, c'est partout, c'est partout.
Peut-être comme tu dis, metal est plutôt un message qui réunit les gens ?
Vidi : C'est ce que nous voulons. C'est ce que je veux croire. Pas uniquement dans le metal, mais en musique en général.
Parce que votre musique n'est pas seulement du metal, il y a des ifnluences différentes. Aussi les influences Indiennes à lesquelles je voudrais bien me concentrer, comment cette influence est-elle entrée dans votre musique – parce que, d'une perspective de l'Europe centrale, le Proche-Orient, en Allemagne, on l'appelle l' « Orient » et d'un point de vue anglo-saxon, l'Inde est l'Orient et autres diraient que c'est le Japon ou l'Extrême-Orient. Alors, qu'est-ce l' « Orient » pour vous ? Est-ce qu'il existe ?
Tomer : Qu'est-ce l' « Orient » ?
Vidi : J'adore tes questions.
Tomer : Oui, ce sont des questions intéressantes. Qu'est-ce l' « Orient » pour nous... ?
Ou est-ce qu'il existe ?
Vidi : Quand nous disons « l'Orient », est-ce que nous nous référons à tout ce qui est à l'Est ? C'est ce que nous disons ?
Oui, est-ce que vous vous sentez comme si vous faites partie de l'Orient ou est-ce qu'il y a quelque chose d'autre ? Parce que vous êtes, votre musique est, souvent décrite comme Oriental metal.
Vidi : Oui, mais il faut se rendre compte du fait que, peut-être cela paraît sarcastique, mais n'oublions pas que, afin de vendre, pour les labels de disques, eux, ils ont besoins de catégoriser. Alors, quand un manager d'un label définie quelque chose comme « Oriental metal », puis, quelqu'un, qui cherche une musique différente, il sait de ce qu'on parle.
Tomer : Tu ne peux pas catégoriser tout ce qui n'est pas … tout ce qui est unique ou différent, tout en langues étrangères, comme « Oriental ». Aujourd'hui, cela peut signifier tout et rien.
Vidi : Je parle une langue sémitique, je parle l'Hébreu, je connais un peu l'Arabe à cause de mes amis arabes, mais l'Hébreu est ma langue. Mon … Je suis née en Israël intentionnellement, mes grand-parents et mes parents ne parlaient que l'Hébreu avec moi. La partie familiale de ma mère vient de la Roumanie, près de la frontière Moldavienne. La famille de mon père vient de la Pologne et si tu vois mon père, il … nous ne sommes pas du tout pareils. Et ils vivaient en Pologne près de la frontière Russe. Avant, une partie de ma famille était en Constantinople. Bien avant, c'étaient des autres lieux. Je suis née dans un pays nouveau. Tout ce que nous consommons à la télé, c'est de la télé américaine. Maintenant, avec Netflix, nous avons un peu plus de contenu Européen, mais … quand j'étais petit, je suis grandi dans une famille séculière, personne ne parlait de la religion avec moi. Mes grand-parents étaient très traditionnels, ils allaient à la synagogue et tout, mais … il est très difficile pour moi de dire que que c'est l'Orient. Ou que c'est différent, parce que je suis grandi dans une rue où les gens parlent cinq langues, avec différents accents, tu grandis dans une rue où tu as des gens parlant en Arabe et en Hébreu, qui communiquent, très bien, il faut souligner cela, là d'où je viens, et je pense que ce qui est Orientalisme, c'est quand je suis en Europe ! Parce que ceci, pour moi, c'est ce qui est différent, les rythmes, la culture, les repas, les odeurs, et j'aime être ici. Mais c'est aussi quand je ressens …
L'exotique ?
Vidi : L'exotique ! C'est ce qui est exotique pour moi. Peut-être c'est moins coloré, ce n'est pas comme dans Aladdin, avec toutes les couleurs et le desert et dadadada [chante une petite mélodie]. Ben, j'ai écouté au rock'n'roll et au metal et je voulais être différent. Mais je ne le suis pas. Je suis les deux.
C'est très intéressant ce que tu dis, et ça va vers la direction de ce que je pense, parce que les idées de l'Orient que nous avons en Europe ont gravement formées par l'époque coloniale. Surtout, ce que nous appelons le « Proche-Orient » se réfère à ce qui a été définie pendant l'ère colonial quand les empereurs Britanniques et Français étaient présent là-bas. Alors, il y a toujours ce filtre Européen, aujourd'hui on dit « filtre », une interprétation européenne de ce qui est l'Orient et c'est clair que l'image devient déformée et des parties des cultures qu'il y a sont interprétées par la perspective européenne. Alors, pour moi, c'est très intéressant ce que tu dis, que tu ne peux pas dire s'il y a une sorte de concept …
Vidi : Oui, Je ne veux pas me soumettre à un concept, moi, je veux que le concept soit formé par ce que nous sommes. Je pense que c'est le droit de chacun d'être ce qu'il veut être et à l'aura de celui-ci, les gens peuvent y donner des noms différents, mais …
Oui, vous avez déjà dit que la musique, ou le metal dans votre cas, a pour but de transmettre un message positive, comme quelque chose d'heureux et beau que rend les gens joyeux. Et dans les paroles d'une de vos chansons, Place for Fairytales, […] vous dites « a lighthouse in a time of storm » - Il s'agit de quel tempête, en fait, c'est quel phare ?
Tomer : Bon, j'ai écrit toutes les paroles pour l'album Vagabond au Nord de l'Inde. J'avais besoin d'une pause de tout en fait, et j'ai fais du backpacking, avec une guitare et je suis parti pour une période d'isolation, du yoga, un régime de nourriture indienne et pour moi, l'endroit des contes des fées, c'était ce petit village où j'ai vécu en Inde, c'est pour moi l'endroit qui semble issu d'un conte de fées, d'une histoire. Tout est, il faut que tu le voies, tout est tellement vert, et agréable, les gens semblent heureux et s'occupent l'un de l'autre même s'ils ne te connaissent pas, et tu as des bonnes conversations avec les gens et tu as des bons plats et une bonne inspiration. Alors, pour moi, ce phare dans une période de tempête, c'est l'endroit où j'étais à l'époque, c'est décrit dans les paroles. C'est dont j'avais besoin dans ma vie, de tout remettre en ordre, de prendre une pause, cet endroit qui est le lieu des contes de fées.
Oui, c'est très intéressant ! Je me suis posé la question, car en Europe, parfois on a l'impression, qu'en Israël, il n'y a que le chaos et de la violence, alors, ouais, je me suis demandée ce que c'est « the time of storm ».
Tomer : Mais ce n'est pas vrai, pour être vrai !
Oui, c'est ce que j'ai aussi pensé !
Tomer : Israël est beaucoup plus que ce que vous voyez à la télé. Tu vois, je vis au Nord du pays, très très haut dans le Nord, et je ne suis pas du tout concerné de ce que tu vois, je ne le ressens pas, je n'en entend jamais, je pense que si tu étais en voyage là-bas, les gens seraient gentils avec toi. C'est juste que … même à un endroit où tu te sens à la maison, avec tout … le travail, la famille, les amis et le groupe, et tout dans ta vie, peu importe, même si tu es au lieu le plus sympa sur la planète, parfois tu as besoin de te lever, de le quitter, et d'aller à un autre endroit afin de trouver une nouvelle détermination. C'est la même chose avec les tournées, de retrouver sa détermination et de créer ton identité et ta nostalgie.
Oui, j'ai pensé ça aussi et c'est aussi quelque chose que j'entends dans votre musique, quelque chose qui n'est pas dépressif au sombre, ce qui sont aussi des préjugés envers metal, mais au contraire, il y a des moments joyeux dans votre musique, des mélodies joyeuses en contraste avec la voix gutturale, ce qui est très intéressant. J'ai hâte de vous voir sur scène plus tard !
Vidi : On a hâte de jouer pour toi.
Je suis prête ! Et encore la chanson Nomad … où est cette ville de lumières brillantes (« city of burning lights ») et le pont qui relie les deux rives (« the immense bridge connects two parts »). Quelles rives ?
Tomer : Il s'agit en effet de Rishikesh, une ville en Inde. C'est une ville en Inde, très spirituelle, très religieuse et le lac c'est en réalité le Gange. Le Gange y coule et il y a un grand pont et il y a deux parties de la ville. Une rive t'amène vers le Nord, en sortant de la ville. Et à l'autre rive, il y a tous les temples. Quand je regarde cette scène, c'est vraiment comment on divise les choses, parce que si tu traverses le pont, tu peux aller comme tu veux, tu peux aller où tu veux et sur l'autre côté, c'est comment se présente la ville. Et c'est là, à Rishikesh, que les Beatles ont écrit leur album blanc, alors, c'est un endroit très intéressant et j'y étais pour longtemps. Et cette chanson parle des priéres du matin, ce que les résidents appellent les « pujas », et c'est très musicale, jolie, cette prière du matin quand ils amènent des fleurs et les mettent dans l'eau, ce genre d'actes … le sens, cela m'a touché et je voulais écrire une chanson sur cette scène. Comme je le dis dans Hymn of the Vagabond, je dis « I write for the see », dans le journal de voyage, parce que j'aime cette idée de décrire ce que je vois. C'est ce que j'ai vu tout le temps. Alors, dans cette ville, il y avaient des gens qui venaient d'une rive et sur l'autre, tu voit les businessmen qui vont à leur travail et les gens religieux venaient en même temps avec leurs fleurs et leurs bâtonnet d'encens, et ces mondes sont séparés si extrêmement, cette séparation de la vie quotidienne et comment l'homme peut être un être spirituel et parfois tu peux voir que les gens vont au travail dans leurs meilleures tenues, mais ils ne ressentent rien, il n'ont pas l'air heureux et parallèlement, il y a ce bossu, ou mendiant ou vagabond, et ils n'ont rien à part de leur liberté et ils font ce qu'ils font et ils sont heureux et satisfait et cela c'est la question, de quoi est-ce qu'on a besoin, comme êtres humains, combien de capital, combien d'objets, combien de belles robes, combien de nouvelles guitares, pour être heureux. Parfois, tu n'as besoin de rien …
Mais … guitares …
Tomer : Tu vois ce que je veux dire, c'est toujours la question s'il est nécessaire de porter sa charge avec soi ou d'être un nomade et avoir rien. J'ai rencontré des gens qui n'avaient rien, zéro. Mais ce qu'ils font, c'est d'aller d'un lieu à l'autre et cela les rend tellement heureux que cela remet moi-même en question, de quoi ai-je vraiment besoin pour être heureux. Et parfois, c'est n'est pas les objets qui comptent, mais les mélodies intérieures.
Oui, et la manière comment tu décrit cela, ça ressemble vraiment à des contes de fées. Il y a tant d'images dans tes paroles, beaucoup d'imaginaire, alors, tu dirais que votre musique, tes paroles, se trouvent un peu à la limite entre la réalité et la fiction ?
Tomer : Oui ! Toujours ! C'est toujours le cas ! Quand nous parlons de … cet album parle beaucoup du pic, symbole du nomade, et les gens se demandent toujours ce que c'est avec le pic. Alors, le pic, c'est la petite voix interne qui fait sans arrêt toc toc toc. Cette voix me dit, il est temps de me lever et de réaliser mes rêves, c'est le temps de changer sa vie, de devenir l'homme que je veux être. Mais, il y a toujours la vie quotidienne qui parfois n'est pas un conte de fées. Et tu dois partir. Les gens partent pour faire ce qu'ils doivent faire. Alors, c'est toujours le conflit entre la réalisation de tes rêves et être lié, ces contraintes, les chaînes qui te tiennent, de ce que tu dois faire.
Vidi : Les conflits.
Et toi, tu est n'est pas dans le groupe depuis longtemps, relativement nouveau, alors, comment as-tu trouvé ton rôle, est-ce que c'était ton rêve de devenir un membre de Subterranean Masquerade, ou comment cela c'est produit ?
Vidi : J'avais … je suis un musicien à temps plein, alors, j'ai des projets différents et des groupes différents et comme Tomer l'a dit, j'ai peur de posséder des choses, des objets et trucs, alors, pour les dernières cinq années, je n'étais pas chez moi. J'ai fait des voyages où il y avait un projet musical intéressant et ça fait deux ans que Tomer m'a appelé, et je connaissais Subterranean Masquerade, bien évidemment, et je connaissais leurs premiers albums très expérimentaux et quand il m'a appelé, j'ai remplacé le chanteur norvégien, leur chanteur original, Kjetil Nordhus, que je trouve un chanteur excellent. Je suis grandi avec Green Carnation et Tomer m'appelait, demandant si j'ai envie de venir pour une jam session et c'est comment cela commençait et à partir de ce moment, je me suis plongé plus dans leurs paroles et leurs significations et leur concept de ce sens spirituel et le rock'n'roll, et que le rock'n'roll est en effet spirituel soi.même et pour moi c'était une révélation ! C'est dont j'avais besoin. Nous avons commencé par là et maintenant, nous sommes en train d'enregistrer notre nouvel album, ce qu'on va appeler Mountain Fever, et cela s'enchaîne dans le concept de l'album précédent, mais le premier album, l'album Vagabond, parle de ce qu'on voit quand on est loin de chez sois, et le nouvel album parlera de chez soi, l'endroit que tu identifie comme cela, malgré le conflit de la nostalgie.
Okay, ce sont des nouvelles très excitantes que tu racontes ! C'est bien de savoir qu'il y aura quelque chose de nouveau !
Vidi : Après l'été !
Tomer : Très bientôt ! C'est un album génial. Je peux le dire sans que Vidi m'écoute, la plus grande différence entre les albums sera que le nouveau sera écrit par Vidi, les paroles et les mélodies vocales et il fait cela beaucoup mieux que moi. Alors, on peut dire que cela sera notre meilleur album et on a hâte que tout le monde peut l'écouter et l'apprécier comme nous aiment le faire.
Cela signifie que l'année prochaine, il y aura une tournée ?
Vidi : On travaille déjà là-dessus.
Génial ! C'est super !
Vidi : On travaille déjà là-dessus et on a déjà des bonnes réactions des audiences ici, aussi pendant la tournée précédente, mais il semble que … à condition que nous sommes authentiques sur scène le plus honnête possible et si nous ne faisons pas de show, mais si nous restons nous-mêmes, en donnant tout ce que nous pouvons donner, je pense que cette énergie commencera à refléter. J'espére que tu vas voir ce soir. Chaque soir, c'est une autre culture, n'est-ce pas ?
Ne vous stressez pas !
Vidi : Non, non, non, nous sommes nous-mêmes de toute manière. Nous allons toujours être nous-mêmes.
Okay, la dernière question, parce que nous n'avons plus de temps. Mes deux dernières questions seront, quels sont vos manières de voyager préférées et quel est l'endroit le plus exotique que vous avez visité ?
Vidi : Tu veux ?
Tomer : C'est moi ? Mon moyen de transport préféré serait probablement le train.
Okay ?
Tomer : Oui, je pense que je n'aime pas trop les avions, ce n'est pas parce que je m'en méfie, mais c'est juste les contrôles de sécurité, d'être assis tout le temps, cela me fait mal et en train, c'est probablement la manière de voyager la plus agréable pour moi. Et l'endroit le plus exotique ? J'ai été à des endroits très exotiques. Mais quel est le lieux le plus exotique où nous étions ?
Vidi : Ensemble ?
Tomer : Ben … j'étais dans un tout petit village à la frontière de Tibet, j'ai fait un parcours, un sentier très long, écoutant à U2, et je suis arrivé à un tout petit village, où il n'y a rien que cette vieille femme qui préparait du thé avec du beurre de yack, tu sais ce que c'est, un yack ? Alors, c'était le plus éloigné de la culture occidentale, il n'y avait rien qu'un petit temple pour Buddha et cette vieille femme sans dents qui faisait du thé avec du beurre de yack, c'est un parfum très fort, très salé, un thé très gras. Et oui, je pense que c'est cet endroit-là.
Et pour toi ?
Vidi : Tout moyen de transport avec des fenêtres est bien [il rit]. Je dors bien dans les avions. Je ne dors pas bien en général, mais dans un avion, ça va, bizarrement, mais je préférais aller dans un moyen de transport avec des fenêtres. Je pense que l'endroit le plus exotique où j'ai été … J'en ai deux dans ma tête. Un lieu, c'était là où j'ai fais un atelier de voix, au-dessus de la mer arctique au Nord de la Norvège, et j'ai du prendre trois avions et puis un bateau et il y a des brumes épaisses et quand tu les traverses, l'île a l'air de l'île de Kong, mais dans la mer arctique. Et puis, il y a un seul grand rocher au milieu et moi, j'ai habité chez un vieux marin pour cette période, et j'ai rencontré cet homme, qui était dans ses 80, un marin depuis l'âge de 15 ans, et il ne parlait pas l'anglais, mais il avait l'habitude de me dessiner chaque matin toute sorte de créature qu'il croyait que je vais voir sur l'île. Il y avaient des nymphes, selon lui.
Tomer :[il rit]
Vidi : C'est vrai ! Et il y avait … Je n'avais pas la permission d'aller à une certaine côte de l'île, à marée basse, parce qu'on croyait qu'il y a, et c'est déjà une société moderne, mais ils croient qu'un esprit méchant existe là-bas et je n'étais pas admis à cette côte. Alors, je restais là où je pouvais aller, en écoutant au vent et le vent hurlait. C'était cool, j'ai écrit beaucoup de musique à cet endroit. Et l'autre endroit auquel j'ai pensé est en Israël, une ville qui s'appelle Tzefat.
Tomer : Tzefat ?
Vidi : Tzefat. Que je trouve très exotique. C'est la ville de la Kabbala, le Judiasme mystique, et il y a beaucoup d'histoire bizarre et sur les cimetières, des rabbins étrange sont enterrés et tout est en couleur bleue comme défense contre le mauvais œil, tout à la majorité des Juifs orthodox et -
Tomer : Très étrange.
Vidi : Très étrange. Et beaucoup de gens là-bas croient en ce que le Judaïsme appelle l'intention. Que si tu fais quelque chose, si tu as l'intention de le faire, avec tout ton cœur, cela rend le monde un meilleur endroit. Et il y a des caves, où tu peux traverser la ville et tout d'un coup entendre de la musique et quand tu entre une de ces petites caves, datant de plusieurs siècles, tu trouves un homme, seul, qui joue de la musique afin d'apporter de la joie et de la spiritualité, venant du fond, et cet endroit n'est pas loin de chez moi, mais, j'y étais peut-être quatre fois dans ma vie, c'est à moi un endroit très exotique.
Tomer : Oui, avant tout, très étrange.
Vidi : J 'adore ça, « étrange ».
Tomer : Des gens étranges de tout genre.
Peut-être c'est ce que définit « exotique », d'être étrange, l'altérité, peut-être.
Vidi : Oui, peut-être.
C'était super intéressant de parler avec vous.
Vidi : C'était très sympa. Tu a posé des bonnes questions.
Tomer : Des questions géniales ! Très réfléchies. Wow. Merci pour le liqueur et tout.
Merci à vous pour votre temps et votre patience ! Et votre aide !
Vidi : C'était notre plaisir. Merci aussi à Felix.