Fleshdoll
par Shades of God (29/10/2015)
Hasard du calendrier, c’est en allant à la découverte du sud-ouest que j’apprends que les Fleshdoll joueront en compagnie de Temnein et Heboidophrénie dans l’un des bars-concert les plus fréquentés de Bordeaux durant mon séjour. Ni une, ni deux, je contacte Bastich (chant) pour lui annoncer ma venue et lui proposer une interview qu’il accepte avec toute la gentillesse qui le caractérise. Rendez-vous avec Bastich et Michaël (batterie) sur la terrasse des Runes pour une entrevue au coucher du soleil, autour d’un verre, évidemment.
Au programme de cette interview : le dernier album, les concerts, les tournées, le label et plus encore.
Bastich, Michaël, comment ça va ? La dernière fois que nous nous sommes vus s’était lors du Chaulnes Metal Fest, vous y aviez délivré une sacrée prestation d’ailleurs. Que s’est-il passé depuis ?
Bastich : Ça va bien ! Oui le Chaulnes Metal Fest, laisse moi réfléchir … c’était en avril, nous sommes en septembre … il y a eu la sortie de notre nouvel album, Blood Red District fin juin, puis dans la foulée nous sommes repartis en tournée en intégrant les nouvelles chansons à la set-list, on est passé par l’Espagne, la France et ce soir Bordeaux. Nous essayons de défendre au mieux ce nouvel album qui est paru une nouvelle fois chez Great Dane Records.
En parlant de ce nouvel album Blood Red District, j’ai lu pas mal de chroniques très positives, j’imagine que tout ces retours vous font énormément plaisir ?
Bastich : Oui bien sûr ! C’est rassurant de savoir que l’album plaît surtout que nous avons fait évoluer notre style, nous étions impatients de savoir si le public allait remarquer cette évolution et comment il allait y réagir. Dans l’ensemble les modifications que nous avons apporté à notre musique ont été bien reçues, par rapport à Feeding The Pigs sorti fin 2013, qui lui était très brutal plus axé sur la violence et la technique tout en conservant ce côté Old School, pour Blood Red District nous avons plus insisté sur le côté sombre et obscure tout en restant fidèle au style Fleshdoll.
En préparant cette interview je me suis aperçu que ce nouvel opus est tout de même le troisième en 5 ans, vous êtes très productifs. C’est un besoin pour vous de composer, de vous exprimer ou alors tout se fait au feeling ? Quand ça vient on enregistre ?
Bastich : Dans le groupe nous sommes 3 à composer : les deux guitaristes, Chili et Billy, et moi-même. Être plusieurs à composer est un gros avantage puisque il y en a toujours un pour proposer quelque chose que l’on retravaille après en groupe. Ensuite nous avons eu la chance d’avoir l’arrivée de sang neuf dans l’équipe juste après la sortie de Feeding The Pigs avec la venue dans les rangs de Fleshdoll de Michaël et Judas (basse) qui ont eu tout de suite envie de proposer des choses et de faire avancer la formation. On est super content d’avoir trouvé ce rythme. Puis avoir trouvé notre producteur, Mobo, est aussi très rassurant, on sait que le résultat obtenu sera celui qu’on souhaite. La phase de studio se passe en toute décontraction et confiance, c’est un mec formidable aussi bien musicalement que humainement. On est sur notre lancée et on est serein ! Ah ah !
Tout à l’heure en parlant de Blood Red District tu disais que celui-ci est plus sombre et lugubre. Chez Metalorgie nous l’avons également remarqué lors des écoutes pour la chronique, comment expliquez-vous cette orientation ? Votre Death Metal n’a jamais été super joyeux, mais là un réel côté oppressant, presque malsain se dégage.
Bastich : Cette évolution est probablement liée à l’histoire du groupe. Quand nous avons composé Feeding The Pigs nous avions la rage à cause de toutes les merdes qui nous étaient arrivées sur les des deux premiers albums (line-up, labels, etc …), on avait besoin d’évacuer ce trop plein de colère. Pour Blood Red District tout a été différent, même si nous étions plus sereins, nous avions besoin d’exprimer certaines choses peut-être plus personnelles qui se traduisent par ces ambiances. Après voilà, je ne suis surement pas le mieux placé pour en parler puisque je suis directement impliqué, mais c’est cool de savoir que les gens et notre public on remarqué tout ce travail et cette évolution. Nous n’avons pas hésité à ajouter des passages de guitares acoustiques sur certains titres, comme Blind Winter Light ou le morceau d’ouverture I.A.M (In Articulo Mortis). C’est quelque chose que nous voulions faire depuis longtemps et là nous avons vraiment eu le temps, mais aussi le line-up pour le réaliser. Nous n’avons jamais été aussi solide que maintenant.
Transition toute trouvée ! Michaël, tu as rejoins Fleshdoll il n’y a pas si longtemps, tu peux nous raconter comment s’est faite la rencontre et ton intégration ?
Michaël : La rencontre s’est faite grâce à l’autre groupe dans lequel je joue et que j’ai créé, Neperiah. Fin août 2013 pour notre premier concert à Toulouse nous avons fait la première partie des Fleshdoll et Lelahell (Death Metal - Algérie) à qui d’ailleurs je passe le bonjour. À cette époque Samuel Santiago (ex-Gorod) était encore présent, un super souvenir pour moi qui suis fan de Gorod et Samuel. Puis, en Mars 2014 je reçois un appel de Bastich qui m’annonce que Samuel part vivre au Canada et que du coup ils ont pensé à moi pour le remplacer. Il m’envoie donc 3 morceaux à travailler avant une répétition avec le groupe, tout s’est bien passé et j’ai intégré Fleshdoll. Au départ ce n’a pas été évident malgré tout, la formation existe depuis 2001, ils ont leurs habitudes, leur façon de bosser, j’ai dû trouver ma place et me fondre au collectif. Aujourd’hui tout va bien, je suis très content de ma prestation sur l’album et pendant les concerts.
Bastich : Le gros avantage c’est que l’avons tout de suite mis dans le bain avec une grosse série de concerts, dont le Chaulnes Metal Fest, il n’a pas eu trop le temps de se poser des questions ! Ah ah ! Le live reste la meilleure façon d’intégrer un nouveau membre et Michaël en a bouffé dès le début que ce soit en France ou lors de notre tournée espagnole.
Michaël : C’est clair que cela m’a rodé, mon expérience live était assez limité à mon arrivée, voire proche du zéro, et là en un peu plus d’un an j’ai enchainé un maximum de dates. Ensuite j’ai énormément travaillé mes parties sur Blood Red District, je n’ai pas compté les heures, je me suis donné à fond. Il n’y a pas de secret pour réussir il faut travailler sans cesse.
Cette question est pour toi Bastich. J’aimerais que nous parlions de ton growl, celui-ci est particulier, puissant et parait très naturel, je t’avoue sincèrement que pour moi tu fais parti des meilleurs vocalistes Death Metal de la scène française. Tu le travailles beaucoup ou tu le forges en concert ?
Bastich : (Gros éclats de rires) Wahou … écoute je ne sais pas trop, ado je m’amusais à imiter les chanteurs que j’adorais, Max Cavalera, Glen Benton (Deicide), David Vincent (ex Morbid Angel). Puis je me suis fait remarquer dans les fosses pendant les concerts auxquelles j’assistais en gueulant entre les morceaux, des mecs plus âgés m’ont dit « eh toi là, recommence ce que tu viens de faire » puis ils m’ont invité pendant leurs répétions, c’est comme ça que j’ai commencé avec des groupes locaux à Toulouse. Cela fait donc une quinzaine d’année que je chante et je ne me suis jamais trop posé de question, j’envoie et puis c’est tout. Mon growl est naturel, je ne me blesse pas, je ne me fais pas mal, rien de tout ça. À contrario pour les instruments c’est autre chose, j’ai besoin de jouer régulièrement de la basse et de la guitare si je veux continuer de composer. Je suis content que les gens apprécient mon growl qui sonne Old School, je ne cherche pas à faire de vocaux aspirés comme dans le Deathcore par exemple, je suis fier d’appartenir à cette grande tradition des chants de la vieille école comme le Death de Floride ou le Death anglais et je compte bien rester dans cette lignée.
Parlons de vos pochettes maintenant si vous le voulez bien. On remarque que vos artwork sont très travaillés, bourrés de détails et très violent, un peu à l’image de votre musique. Qui les réalise ?
Bastich : Nous avons eu plusieurs graphistes depuis le début. À chaque fois nous savions ce que nous voulions, des pochettes dessinées, Old School, qui reflètent bien notre musique. On part du principe qu’un inconnu qui tombe sur nos disques doit savoir immédiatement que Fleshdoll fait du Brutal Death. Des artwork trop modernes seraient induire en erreur cette même personne sur le contenu. Ensuite on laisse libre court à l’imagination de chacun pour interpréter et se faire une idée de ce qu’est notre musique.
Michaël : Comme le dit Bastich on essaye au maximum d’attirer l’œil avec ces artworks violents, c’est d’ailleurs le premier contact du potentiel auditeur avec la musique des Fleshdoll. Chacune d’entre elle reflète bien le contenu notamment au travers des personnages présents.
Tout comme Feedings The Pigs, Blood Red District est sortit chez Great Dane Records qui est un petit label du Nord de la France. Comment se passe le travail avec Great Dane ? Je connais un peu le boss, Raphaël, c’est un mec sympa qui connaît très bien le Metal.
Bastich : Avant, il faut savoir que Great Dane Records est un label de passionnés, ce n’est pas une entreprise mais une association. Raphaël fonctionne au coup de cœur et il nous soutient à 100% ! Les conditions qu’il nous propose sont très bonnes, il souhaite mettre en avant notre travail ne serait-ce qu’en sortant nos disques en digipack. Feeding The Pigs, notre première sortie chez lui était un digipack simple, et pour Blood Red District il n’a pas hésité à l’éditer dans un digipack 3 volets, à l’heure du numérique c’est hyper important de proposer aux fans des supports qui ont de la gueule, de nos jours ce sont essentiellement des collectionneurs qui achètent les disques et c’est primordial de leur offrir de beaux produits. Moi par exemple je suis collectionneur et quand j’achète un album j’aime que ce soit un bel objet, qui donne envie d’être ouvert, de contempler le livret. Ça rejoint un peu ta question précédente sur nos artworks, c’est assez typique du Metal de proposer des supports soignés avec des visuels qui en jettent.
Cette question ça fait un bail que je souhaite vous la poser. Vous tournez énormément, parfois je me demande même si ces tournées ne sont pas à perte malheureusement, tout le monde connaît le contexte actuel et les bars ou les salles ne se remplissent complètement que trop rarement.
Bastich : En toute franchise depuis la création du groupe notre but est de composer pour faire de la scène, nos compositions sont d’ailleurs taillées pour être jouées live. Il n’y a pas une seule date où nous allons être statiques, dès lors que nous sommes sur scène nous sommes là pour suer et envoyer un maximum ! Malgré tout beaucoup de dates sont à pertes, on ne dégage aucun revenu de notre activité musicale, à une époque on a bien essayé de réduire cette cadence pour se concentrer uniquement sur les dates « intéressantes » et puis très vite on s’est aperçu que ce n’était pas naturel pour nous, on souhaite jouer avant tout donc on prend tout ce qui passe sans jamais réellement savoir ce qu’il va se passer. Pour autant passer du temps sur les routes ensemble c’est génial, même quand on a eu des coups durs lorsque nous retournons au local de répétitions on en rigole, tout ça nous a soudé encore plus, on a un moral en béton.
Michaël : Pour moi qui suis dans le groupe depuis à peine un an et demi les tournées sont encore plus importantes ! Déjà pour forger mon expérience personnelle, et ensuite pour tisser encore plus de liens avec les autres membres, je ne m’imagine pas l’aventure Fleshdoll sans toutes ces dates.
Partir en tournée est donc un excellent moyen de souder les membres d’un groupe entre eux ?
Michaël : Alors là carrément !
Bastich : Quand tu pars à 7 ou 8 dans un van blindé avec du matos qui dégueule de partout, que tu n’as pas toujours les moyens de dormir correctement ou même de te laver sans compter les innombrables heures de routes c’est chaud. Mais ça permet de renforcer les liens et de savoir avec qui tu es prêt ou pas à partir au bout du monde, plus que la musique c’est le côté humain qui prime. Après y’a des moment sympas, durant la tournée en Espagne nous avons dormi sur la plage, au calme, ça fait des bons souvenirs.
Bah voilà on est au bout, je vais vous laisser vous préparer, j'espère d’ailleurs prendre une bonne claque pendant votre prestation ! Un dernier mot pour nos lecteurs ?
Michaël : On vous passe le bonjour et on vous invite à nous écouter et à venir nous voir en concert, c’est comme ça que vous nous permettez de continuer notre passion.
Bastich : Pas mieux ! Allez jeter une oreille sur ce que l’on fait que ce soit sur notre chaîne YouTube ou notre Bandcamp, écoutez donc deux ou trois titres pour vous faire une idée de Fleshdoll et n’hésitez pas à laisser des commentaires, on est prêt à tout lire et tout entendre ! Ah Ah !
Côté concert ce fut une fort belle soirée, les Runes était bondé. Heboidophrénie a mis le feu en ouverte avec son Death Metal / Deathcore de folie malgré le manque de place eu égard à la structure du bar, un (mini) wall of death de dingue a réjoui les plus téméraires et les décibels sont tombées par paquet de 100, grosse performance.
Temnein dans un autre style a également régalé, leur style plus mélodique impose énormément en live, c’est carré, joyeux et festif à la fois, les titres du prochain album sont déjà bien huilés, il est certain que celui-ci fera mal. Les gaillards ont pris un plaisir fou devant un public super actif et réactif, le bassiste ne tenait pas en place et dans le mosh-pit, c’était lui le plus remuant, je vous assure !
Les Fleshdoll ont conclu cette soirée super sympa qui résume bien ce qu’est un concert « underground », plus une place dans les Runes. Comme à son habitude Bastich a fait tombé le t-shirt (as-tu déjà joué habillé seulement ?) et lui non plus ne tenait pas en place, heureusement que le fil du micro est long ! Les titres de Blood Red District envoient sévèrement sur scène, tous les membres étaient à fond, comme toujours, ambiance de fou, personne n’est sorti déçu ce samedi 26 septembre.