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Biographie
Un groupe à part. Voilà qui suffirait à cerner la personnalité de Zao. Cinq hommes (Scott Mellinger et Russ Cogdell (guitares), Dan Weyandt (chant), Sean Koschick (basse), Steven Peck (batterie)) défiant tous les acquis, remettant en question le bien-fondé de nos convictions immuables, avec un talent redoutable. Groupe composé de chrétiens, Zao se démarque à tous les niveaux, pour mieux parvenir à les unir en une unique entité cognitive. Etonnant.
Depuis plus de 20 ans maintenant, Zao est passé par de multiples phases et apparences. Sur The Well-Intentioned Virus, le combo a repris les éléments de The Fear Is What Keeps Us Here, sans doute son album le plus en décalage avec le reste de la discographie, tant en termes de sonorités que de production. Pour autant, ce nouvel opus s’inscrit dans une continuité qui balaie Awake? d’un coup de vent. Sauvage. Cacophonique.
Derrière ce titre, Zao pose un concept. Celui des gens qui pensaient faire le bien, pour au final être source de maux. Et lorsqu’on jette un oeil aux thèmes abordés, Dan Weyandt révèle une facette sombre de l’être humain : entre thèmes personnels liés à sa famille et paroles focalisant la mort ou le mensonge, le frontman colle à cette souffrance primaire illustrée sur l’artwork.
Sur l’aspect musical, les Américains passent outre leurs deux albums précédents (en terme de sonorités et de production) pour revenir à quelque chose de plus animal, à la limite de Where Blood And Fire Bring Rest ou Parade Of Chaos. Mais ce ressenti se retrouve pris en traître par l’écriture de The Well-Intentioned Virus, loin d’un Metalcore raide et nauséeux, faisant la part belle à la voix acide de Dan Weyandt (« Jinba Ittai »). Pour autant, en second plan, le jeu de guitare ne tourne pas en rond, imposant quelques changements de rythme ou riffs épileptiques (« Haunting Pools ») jusqu’aux derniers instants du magistral « I Leave You in Peace ».
Là ou Liberate Te Ex Inferis abordait un enfer dantesque, The Well-Intentioned Virus est la Peste qui s’abat en amont, amenant l’auditeur aux portes finales. Le lien entre les deux peut paraître évident, d’une part car il s’agit du premier travail de Weyandt et Mellinger, mais aussi parce que le travail sur les cordes est proche. L’un est funeste, brûlant. L’autre est viscéral, fiévreux. Et pourtant, les deux disques représentent ce qui se rapproche d’un Metalcore brut et travaillé.
Zao est revenu tel un messie apocalyptique, amorçant son nouvel album par l’EP Xenophobe qui laissait deviner un travail de fond du combo. Même si le pilier de la carrière reste à mon sens The Funeral Of God, il n’y a pas à le cacher : en dehors d’un léger passage à vide (Awake?), le quintet ne faillit pas. Zao is back.
A écouter : I Leave You in Peace - Jinba Ittai
Zao en arrive à son 9ème album après une discographie presque parfaite (certains tiqueront sur les 2 derniers disques) et nous revient donc avec Awake?. Bénéficiant de 6 artworks différents, Zao semble avoir mis les bouchées doubles et l'on espère que les 3 ans d'attente ne seront pas un pétard mouillé...
Autant ne pas garder le suspense plus longtemps, Awake? arrive comme un mix entre The Fear Is What Keeps Us Here et la période Parade Of Chaos / Liberate Te Ex Inferis. Tout d'abord car le chant de Weyandt se fait plus proche de l'opus précédent, à savoir gras et écorché, et ensuite car on se rapproche plus, musicalement, d'un metal hardcore pesant et lent (via une partie rythmique toujours au top) que du hardcore tirant vers le deathcore de The Fear Is What Keeps Us Here. Sur celui-ci, des vocaux chantés faisaient leur apparition. Ici, elles percent encore un peu plus, cassant l'uniformité du timbre du frontman (Awake?, The Eyes Behind the Throne, Entropica) malgré quelques passages un poil délicat au niveau justesse. En somme, pas d'énorme surprise pour les adeptes des opus précédents, juste un condensé efficace, de (très) bonne facture et qui ne dépareille pour ceux ayant déjà jeté une oreille sur le reste de la discographie. En quelques écoutes, quelques titres sautent déjà à la gorge, intenses, foudroyants mais aussi terriblement pesants : What Will You Find? et son solo improbable cassant la lourdeur de la compo, Human Cattle Masses Marching Forward ténébreux à souhait, rappelant les meilleurs moments de Liberate Te Ex Inferis ou encore Quiet Passenger Pt. 1 avec un break où la basse s’abat comme un tsunami.
Comme à son habitude, Zao offre un dernier morceau qui clôt Awake? de manière presque jouissive. Quiet Passenger Pt. 2 / The World Caved In possède un air de Deftones teinté d’emo sur sa grosse moitié, avec un chant clair planant, tandis que la dernière partie s'avère plus mélancolique, via une guitare acoustique douloureuse. Peut être pas aussi intense que A Last Time For Everything ni précieuse que Psalm Of The City Of The Dead, elle possède son charme.
Difficile de statuer sur Awake?. Zao offre un croisement de ses albums précédents, avec pourtant quelques cahots. Rien de bien grave, mais cela pourrait ternir le ressenti de ce nouveau brûlot. Awake? ne démérite pourtant pas face à The Fear Is What Keeps Us Here ou Parade Of Chaos, même s’il s’aborde différemment.
A écouter : What Will You Find? - Human Cattle Masses Marching Forward - Quiet Passenger Pt. 1
Un groupe à part. Zao est définitivement un groupe à part. Musicalement d'abord car difficile à cerner (hardcore ? metalcore ? deathcore ? etc. Un tout peu tout à la fois). Idéologiquement ensuite dans la mesure où le combo s'est, volontairement ou non, souvent retrouvé à la marge (Zao a par exemple longtemps été affilié à la branche " rock chrétien "). Ce nouvel album renforce encore un peu plus l'originalité de Zao, à commencer par l'artwork bizarroïde de l'objet, tout écrit à l'envers.
Pour situer ce The Fear Is What Keeps Us Here, disons que c'est comme si Bloodlet (pour la lourdeur) avait copulé avec Converge (pour l'aspect chaotique) et Dead To Fall (pour son mélange hardcore/metal extrême et ses vocaux tutoyant le black). Vous n'avez rien compris ? Ce n'est pas grave, la meilleure chose à faire reste de jeter une oreille sur cette galette. Une galette au son particulièrement étouffant. C'est d'ailleurs ce qui frappe le plus après la première écoute. Ce son si granuleux, qui prend aux tripes et ne vous lâche jamais. Résultat d'une production assurée par le groupe lui-même et d'un enregistrement signé Steve Albini (connu pour ses travaux avec Neurosis, Nirvana, les Pixies, Dragbody, ...), il est en tout cas l'un des atouts majeurs de ce disque. Pas que la musique soit mauvaise et que le son soit la seule chose à concerver de l'album. Loin s'en faut. On regrette juste que certains titres soient en deçà du niveau global de l'album. Les compositions, quant à elles, alternent des moments très lourds comme sur Everything You Love Will Soon Fly Away, Kingdom Of Thieves ou encore sur le très bon There Is No Such Thing As Paranoia et des passages plus rapides aux rythmes soutenus (Physician Heal Thyself). Le groupe s'essaye même à des vocaux chantés sur le refrain de It' Hard Not To Shake With A Gun In Your Mouth (et son énorme break). Daniel Weyandt, chanteur du combo, ne possède définitivement pas les capacités vocales d'un Maynard James Keenan de Tool par exemple mais cette coupure avec les vocaux habituels hurlés et éraillés apportent un certain relief aux morceaux du groupe.
Le CD se termine sur A Last Time For Everything, sur lequel Weyandt hurle inlassablement le titre de l'album ("The Fear Is What Keeps Us Here !!") pendant que le son augmente petit à petit, jusqu'à devenir gênant. On en vient même à souhaiter la fin du disque. Avant d'appuyer à nouveau sur la touche " Play " de son lecteur. Un groupe à part on vous dit.
A écouter : Pudgy Young Blondes With Lobotomy Eyes, It's Hard Not To Shake With A Gun In Your Mouth, Everything You Love Will Soon Fly Away, There Is No Such Thing As Paranoia
« N'entendons-nous encore rien du bruit que font les fossoyeurs qui enterrent Dieu ? Ne sentons-nous encore rien de la décomposition divine ? ... les dieux aussi se décomposent ! Dieu est mort ! Dieu reste mort ! Et c'est nous qui l'avons tué ! » écrivait un certain Friedrich Nietzsche dans Le gai savoir ; une réflexion qui n’a sûrement pas échappé aux membres de Zao, et qui constituera la trame de ce petit chef d’œuvre de 47 minutes. Particulier, déstabilisant, hétérogène, personnel et sombre, ce The Funeral Of God concentre et condense, transforme et innove.
Ce qu’il est utile de savoir avant de s’immerger dans le monde agonisant de Zao, est qu’il s’agit d’un groupe chrétien. Tendance peu coutumière à l’heure de l’hégémonie des hordes de Satan sur la musique extrême, pour le plus grand plaisir des medias impotents qui y trouvent sans cesse matière à amalgamer. Bref, ce qui n’aurait pu être qu’une remarque purement anecdotique devient tout à fait essentiel lorsque ces messieurs se décident à traiter d’un sujet aussi délicat que la chute de Dieu. Originale, la démarche a le mérite de plonger l’album entier dans une atmosphère chaotique, où l’humanité a elle-même mis fin à ses propres espoirs. Comme chez Meshuggah ou Fear Factory, l’ambiance joue grandement sur notre perception de la musique.
Venons-en à la musique justement. Là encore, Zao nous réserve quelques surprises de taille : jonglant habilement avec les principales tendances extrêmes (hardcore, death, thrash, black), le groupe délivre un post-hardcore totalement inédit, instable, si bien que chaque chanson possède sa propre identité, comme résultat d’une réaction irréversible et surtout inimitable. Voila à peu près de quoi il en retourne. Mais l’atypie fait aussi partie intégrante du phénomène Zao, alors ajoutez à ce mélange déjà effervescent un chant d’outre-tombe, décalé, qui évoque un Dez Fafara époque DevilDriver ou encore un Mark Hunter sensation Power Trip. Heureusement quelques passages mélodiques viennent faire leur apparition, proposant un peu d’air (The Last Song From Zion, Live … From The Funeral Of God) dans un album peut-être un peu trop dense, étouffé par ce chant ravageur. La phrase précédente n’a peut-être l’air de rien comme ça, mais ce sera bien le seul reproche que j’aurais à formuler envers The Funeral Of God.
Car au niveau des compositions, il n’y a rien à redire. Chaque morceau est scellé du sceau de la qualité, et vient en tête surtout un nom : Psalm Of The City Of The Dead. 8 minutes de jouissance musicale (chants féminins, violons, piano pour un avant-goût de fin du monde) pour clôturer un album dont nous ne sommes pas prêts d’oublier le nom. Alchimie parfaite, Zao nous gratifie d’un peu plus de pesanteur dans un monde condamné par sa rage intestine.
A écouter : The Last Song From Zion, Psalm Of The City Of The Dead, Breath Of The Black Muse
Laissez tomber vos illusions, et entrez dans le paradis chaotique de Zao. Avec un artwork très particulier, sorte de destruction de l’identité au profit du groupe (l’absence de visage pouvant sous entendre l’idée d’une absence de personnalité propre), les 5 américains nous offrent un cd aussi sombre et profond que le laisse présager la pochette.
Zao attaque directement, avec pour premier choc Dan Weyandt : une voix éraillée, charcutée agresse l’auditeur. On pourrait penser ce type de hurlement finirait par être lassant de par sa monotonie mais l'apport d'un chant clair et posé permet de mettre en valeur cette agressivité tout en offrant quelques moments de répis. Dan n’hésite pas scander ses paroles, forçant à les assimiler (“You lie us! You kill us!" sur Free The Three, “Free the wolf" sur How Are the Weak Free ou la fin de A Pirates Prayer).
Musicalement, Zao touche à tout : la batterie reste relativement lente, les guitares par moment aussi malsaines et dérangeantes que le chant mais, tout comme la ligne de chant, à d’autres plus posées. L’ensemble pouvant tendre à certains instants vers un post-hardcore teinté de black pour la voix, à d’autre vers un metalcore de qualité. Mais Zao ne donne pas que dans ces deux styles, comme le prouve les différentes introductions ou passages acoustiques, voire la courte interlude The Ballad of Buddy Bigsby. Ils peuvent aussi créer une ballade pouvant, à la première écoute, paraître mielleuse, mais montre que Dan Weyandt peut offrir un chant calme, profond et apaisant. Man In The Womb, établit une montée en puissance qu’on ne saurait soupçonner, le tout aidé par des guitares plaintives : sublime. Passage illuminé au milieu de la noirceur ambiente imprègnant l'album..
Cerise sur le gateau, un titre comme Killing Cupid où Zao se démarque des structures classiques grâce à un solo, une batterie se rapprochant du punk, deux voix complémentaires, une fin apocalyptique, … Le disque se clôture sur How Are the Weak Free, où Dan nous répète inlassablement, entre chaque passage hurlé, “Free the wolf, from this cage and watch him hunt, stuck his prey" telle une dernière recommandation essentielle avant la fin du cd.
Les américains montrent qu’ils ne se limitent pas qu’au métalcore mais sont capables d’offrir des ambiances particulières en piochant dans leurs influences respectives. Parade Of Chaos reste un des plus intéressants de la discographie de Zao, au même titre que Liberate Te Ex Inferis.
A écouter : Free The Three - Killing Cupid - How Are the Weak Free
I desire the end / The touch of armageddon
Zao a toujours été un groupe à part, capable de lancer une excursion en enfer sur Liberate Te Ex Inferis, de creuser jusqu'aux tréfonds du monde pour trouver le point le plus sombre possible. Plus expérimental, plus sombre, Liberate Te Ex Inferis (Free Yourself From Hell) n'est pas une partie de plaisir, plutôt le genre de disque dont on se délecte avec l'esprit clair, pour capter l'essence même de l'album. Rangez d'avance vos bougies, vos robes de sabbat et vos vierges éplorées, Zao ne chasse pas l'apprenti sataniste, mais rend plutôt hommage au désespoir, à l’Enfer.
This world encased in flames... / Bodies lie beneath fallen kingdoms...
Ce qui peut effrayer sur Liberate Te Ex Inferis est le sentiment d'objet massif qui s'en dégage. Car il faut bien l'avouer, les 40 minutes semblent indigestes, la voix éraillée semble trop forcée, animale et peut rebuter lors des premières écoutes. Divisé en 5 cercles (Limbo, The Lustful, The Gluttonous, The Hoarders And The Spendthrifts et The Wrathful), le quatrième album va plus loin que les 3 précédents réunis, arrivant à conclure Liberate Te Ex Inferis sur un Man In The Cage With Jack Wilson époustouflant, aux cris de souffrance résonnant lors d'une montée en puissance dantesque.
Liberate Te Ex Inferis s'ouvre sur une intro douce, languissante à la manière d'une délicieuse agonie, lorsque le corps quitte l'esprit et vogue vers les portes d'un autre monde, apporté par Savannah. Et Zao dévoile son vrai visage : une fureur bestiale, un métal hardcore de qualité, des paroles douloureuses sur Autopsy ou Desire The End. Ce qui fait de Zao un groupe d'excellence n'est pas seulement la fougue dont font preuve les américains, mais aussi le niveau des compositions : l'alternance acoustique / saturé sur If These Scars Could Speak se veut maniée de main de maître, le désespéré Desire The End flirte avec la mélancolie sans tomber dans la violence pure tandis que l'hommage sur Kathleen Barbra fait preuve de fragilité et d'une émotion intense. Tant de choses que Zao manie avec excellence, dosant ses notes avec justesse. La folie côtoie la douleur, la fureur, le désespoir. Ce qui démarque cet album de Zao du reste de la discographie est le côté plus fouillé qui s'en dégage, la mixité dans un ensemble uni. Zao n'est plus qu'une entité, le point central de ces cercles au sein desquels ils officient leur métal hardcore dont ils n'ont pas à rougir.
Là où Zao fait aussi preuve de talent, c’est pour agencer les morceaux. Pas de temps mort, le souffle ne se ralentit que lors le quintet le décide, même les transitions (à base de samples de Shining ou Event Horizon) plongent l’auditeur dans ce déluge, cette odyssée musicale. Le rythme n’est en rien monotone, les riffs ne se répètent pas à l’infini dans un non-sens profond, Zao fait ployer et se recroqueviller sur Dark Cold Sound et agresse avec des relents punks sur Autopsy. Zao ne se plie pas à une approche d’un style, mais l’explore, expérimente pour ne pas rester dans des carcans réducteurs et trop restrictifs à l’imagination du groupe.
...I walk on fallen kingdoms... / ...I desire the end...
Liberate Te Ex Inferis, ce sont les hordes du Malin qui déboulent sur terre, 5 sceaux brisés par autant de musiciens dans l'équivalent musical de l'Enfer de Dante. Liberate Te Ex Inferis préfigure déjà les côtés noirs que l'on retrouvera sur The Funeral Of God ou The Fear Is What Keeps Us Here, enfonce le clou de Where Blood And Fire Bring Rest et fait table rase de l'avenir. Un seul nom à retenir : Zao...
...I desire the new beginning.
Someone tell us we are loved / Someone take the pain away / Someone fill up the void / Someone fix my broken heart / Are you that someone?
A écouter : Tout
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