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Biographie

Wovenhand

Le hiatus, depuis 2001, de son précédent groupe, 16 Horsepower, a donné des ailes à David Eugene Edwards, qui sort son premier album, Woven Hand, l'année suivante. Edwards, guitariste mystique en quête du Sacré, s'entoure alors de Ordy Garrison (Batterie), Daniel McMahon (Multi-instruments) et Paul Fonfara (Violoncelle) pour sa première tournée sous le nom de son nouveau projet. Mélange de Folk hantée, Country alternative et gospel psychédélique, la musique de Wovenhand a pour thème récurrent la chrétienté, chantée dans une atmosphère théâtrale qui n'est pas sans rappeler, parfois, les premiers albums de Nick Drake. Après Consider The Birds en 2004, c'est Mosaic en 2006, qui consacre le groupe, grâce à un accueille critique et public très favorable.

Emmené jusque là par la personnalité charismatique de David Eugene Edwards, Wovenhand devient un groupe à part entière sur Ten Stones en 2008 avec notamment l'arrivée du bassiste Pascal Humbert (16 Horsepower), où chaque membre, et non plus seulement son frontman, contribue à l'écriture du disque. The Threshingfloor sorti en 2010, permet au combo de se produire sur la prestigieuse scène du Roadburn en 2011 et d'ouvrir pour Tool. En 2012, Pascal arrête le projet et Edwards s'entoure alors de Chuck French (Guitare, ex-Planes Mistaken For Stars) et Gregory Garcia (Basse) pour la sortie de The Laughing Stalk en 2012. En 2013, Neil Keener (Basse, ex-Planes Mistaken For Stars) remplace Gregory et Wovenhand enregistre Refractory Obdurate qui sort en 2014 chez Deathwish et Glitterhouse Records. Celui-ci confirme l'envie du groupe de pousser sa musique vers des sonorités plus électriques. Une tendance confirmée par la sortie, en 2016, de Star Treatment chez Sargent House.

Star Treatment ( 2016 )

Il y a quelques années de cela, David Eugene Edwards décidait de mettre définitivement du plomb dans la Country/Folk hallucinatoire de Wovenhand en conviant le guitariste et le bassiste de Planes Mistaken For Stars (qui, ô joie, reviennent très bientôt avec un nouvel album). Le résultat : un Refractory Obdurate aussi beau qu’intense qui parvenait à renouveler la musique du groupe en lui donnant une hargne inédite jusqu’ici, tout en continuant à fournir son lot de moments de grâce mystique. Deux ans après, c’est la même formation qui s’avance à l’heure de nous présenter Star Treatment, suite logique et prenante de ce petit miracle qui avait marqué le cru 2014.
 
DEE avait déjà eu recours, au fil des albums de 16 Horsepower et Wovenhand, à ce regain d’électricité qui avait alors pour but de souligner la force vitale de certains passages, laissant aux guitares acoustiques la tâche essentielle de créer l’ambiance de ses morceaux. Sans aller jusqu’à le comparer au Dylan révolutionnaire de 1965, on ne peut que constater qu’il considère désormais la saturation comme un élément crucial de sa musique. Les deux premiers morceaux de l’album nous rassurent tout de suite sur la capacité de Wovenhand à varier les tempos et les atmosphères, tout en extrayant à chaque fois l’essence de ce qui fait l’intérêt de sa discographie. Come Brave démarre pied au plancher, la rythmique martelant incessamment pour soutenir et élever le chant d’Edwards, aussi habité que de coutume. Swaying Breed nous emmène ensuite pour six minutes d’un voyage au fin fond de notre propre esprit. Ce psychédélisme s’accompagne d’une froideur qui nous permet de garder un contact ténu avec la réalité, suffisant toutefois pour avoir pleinement conscience de l’expérience que l’on est en train de vivre. Le reste du disque est une déclinaison, particulièrement inspirée, de cette faculté à trouver dans un riff de guitare, une ligne de basse ou quelques cloches sonnant au loin les éléments d’un mysticisme plus universel que prosélyte. Car en effet, si la religion semble tenir un rôle majeur dans sa musique, DEE tient régulièrement à préciser en interview que ses compositions n’ont pas valeur de propagande et ne sont que le résultat de la perception qu’il peut avoir du monde qui l’entoure.
 
Tour à tour contemplatif (The Quiver, All Your Waves et ses faux airs d’un morceau de Swans) et engagé (Crystal Palace, Go Ye Light), Wovenhand parvient à ne jamais connaître de baisse de tension. Le temps devient une notion relative, remplacée par la recherche d’une transe qui ne tardera pas à venir (Crook and Flail). Le travail sur les guitares est particulièrement intéressant et débouche davantage sur des textures que sur des riffs à proprement parler, enrichissant ainsi des compositions qui, malgré la répétition des motifs, ne donnent à aucun moment l’impression de tourner en rond (Five by Five). Star Treatment se démarque donc par une inspiration et une cohérence qui laissent admiratif. Une nouvelle pierre à l’édifice Wovenhand, dont l’importance ne fait maintenant plus aucun doute pour toute personne qui a un jour ou l’autre voulu s’approcher d’une spiritualité dépassant tout dogme.

16 / 20
2 commentaires (16.25/20).
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Refractory Obdurate ( 2014 )

Ce n'est pas la première fois que David Eugene Edwards s'essaie à des sonorités plus électriques, mais le résultat n'a jamais été complètement abouti. Avec ce Refractory Obdurate, c'est désormais chose faite. Wovenhand livre là un album sulfureux et bruyant, presque jusqu'au-boutiste dans son genre, mais surtout incroyablement prenant.

2010 et 2012, Wovenhand sort deux albums dans une fibre Country / Folk / Rock plus traditionnelle, mais néanmoins captivante dont seules ses créations sont capables d'atteindre des cimes. Difficile donc de prévoir le coup porté par Refractory Obdurate, même si un truc pas net se profilait à l'horizon avec cette signature chez Deathwish, le label Hardcore de Jabob Bannon de Converge. Bon, le groupe est encore très loin de faire dans la moshpart, et heureusement, mais on y trouve clairement cet objectif affiché d'en faire un disque Rock, électrisant, où les saturations se mêlent à cette base Folk chamanique. Et finalement, David Eugene Edwards, qu'on sent toujours aussi habité à travers ses accords comme dans les paroles (« If you pray, Salome, he shall not come, Salome, that's right, Salome, that's away, Salome… »), maîtrise aussi bien l'exercice en communiant à travers cette lourdeur bienfaitrice. On sentait poindre cette envie sur The Laughing Stalk, aux concerts où le musicien quittait sa posture assise pour jouer debout, mais c'est désormais chose faite : Wovenhand met les deux doigts dans la prise, assume pleinement son virage Rock et libère cette énergie contenue depuis plusieurs années.

Pourtant, Corsicana Clip en ouverture Country / Folk rappellerait presque la glorieuse période de Mosaic, jusqu'à ce que déboule la deuxième moitié du morceau psychédélique en diable aux bordures Noise. Mais Good Shepherd est là pour mettre le feu aux poudres, véritable déluge d'énergie brute aux pulsations enflammées. Rarement le groupe n'aura été aussi impétueux et ce n'est pas des titres comme Field Of Hedon (pratiquement Post-Punk par instants et aux riffs de folie) ou le turbulent Hiss qui renverseront la tendance. Wovenhand sort de ses gonds, se veut plus pesant, quitte à presque flirter avec le Doom mystique sur Salome, en durcissant ses compositions sur Masonic Youth avec ses cordes imposantes ou sur le final tribal de El-Bow dont le parallèle avec OM semble tout trouvé. Ce rendu sonore n'est évidemment pas un hasard puisque David Eugene Edwards s'est entouré de deux ex-Planes Mistaken For Stars et la production est signée Sanford Parker (Buried At Sea, Minsk, Nachtmystium), producteur de dizaines d'œuvres dans un domaine qui n'est pas particulièrement connu pour sa légèreté. Les arpèges lumineux du musicien font encore la part belle de pièces comme The Refactory, King David ou Obdurate Obscura, solennelles, délicieusement inspirées d'une mélancolie qui touche à l'âme.

Pour finir, impossible de ne pas faire le rapprochement entre Refractory Obdurate et Blues Funeral de Mark Lanegan. Certes il y a cette classe naturelle et cette envie de de mêler leur foi au travers de la musique. Mais ce sont surtout deux musiciens qui partagent indéniablement les mêmes angoisses, la même vision artistique, la même nécessité de créer des disques aux tonalités grave qui éveillent l'esprit et s'affranchissent des clichés. A partir de là, on peut l'affirmer sans trop se tromper, Refractory Obdurate est sans doute le meilleur album de Wovenhand avec Mosaic.