Retour aux choses sérieuses chez Will Haven. Enfin. Grady Avenell, resté éloigné du studio depuis des années, vient de retrouver son chemin et son groupe de toujours l'énergie suffisante pour continuer. A moins que ce ne soit plus que cela. Ce qui serait une sacré bonne nouvelle, ne nous le cachons pas. Le petit peuple du royaume du metal lobotomisant et de la tatane à deux riffs, lui, n'en a jamais douté. Grand bien lui en a pris en fin de compte.
A peine le premier contact établi, il est déjà possible de l'affirmer: Voire Dire est bien plus qu'un simple effet d'annonce surfant sur l'éternelle vague des reformations trop longtemps espérées. Car Will Haven n'est jamais vraiment mort en fin de compte. Il était simplement un peu égaré, temporairement amputé du seul élément trop indispensable de son ossature sonore et humaine pour être remplacé. Cependant LA voix, de retour, se fait plus nuancée, moins invariablement écorchée au delà de l'humainement possible, plus crue. La musique aussi d'ailleurs même si tout est relatif. Première nouvelle.
Will Haven sonne moins primaire, moins massif, moins inébranlable. Plus aéré, plus Deftonesien ("The siege") mais plus lugubre également ("A beautiful death"). Et plus sournois, surtout. Le groove du démon qui parcoure ce cinquième album ("The walls close in", éreintant), couplé à un sens du rythme indécent, refuse tout répit à un auditeur qui se serait trop vite laisser tromper par un ton général moins ouvertement frontal. Will Haven se traine comme jamais, distillant des envies de baston au ralenti dans une atmosphère de mort à hérisser le poil - le jeu de batterie, de nouveau enrichi avec parcimonie fait de petites merveilles ("Object my affection"). Pour ce qui est du reste Voire Dire fait sobrement et obstinément le boulot, concasse de la nuque à grands renforts de monolithes guitaristiques envahissants outrageusement feedbackés, te fouille les intestins à grand coups de basse avec la délicatesse d'un Kraken dans le petit bain de la piscine municipale. Et pourtant tout est clair, tout est en place. Tout est logique et évident. On n'avait plus connu les américains à pareille fête depuis une éternité.
Forcément, passé le choc initial, viendra le moment où la comparaison avec les travaux passés va pointer le bout de sa truffe. C'est inévitable car malgré ses petites avancées Voire Dire reste un album (et non l’album avec un grand « A ») de Will Haven, un vrai. Et que Will Haven ne sonnera jamais que comme lui même, ressassant indéfiniment une poignée de riffs parpaing, créant ainsi sa différence dans le détail. La sauce ne prendra donc pas chez tout le monde ou tout du moins probablement pas d’avantage aujourd'hui chez les allergiques d’hier. Mais sait-on jamais? Au petit jeu des ressemblances, "Harvesting our burdens" risque de remporter aisément la palme du morceau aux airs les plus Carpe Diem-ien depuis le début du millénaire. S’il fallait retenir un titre pour juger de la pertinence du propos de Will Haven en 2011, ce serait indéniablement celui-ci. La recette est archi connue mais les retrouvailles sont joyeuses et cinglantes. Le plaisir, intact. Avec ce petit plus qui accompagne quasiment chaque sortie du groupe.
Dans son ensemble, ce cinquième opus déborde de clins d'œil à un passé déjà (presque) lointain mais, tout en continuant de creuser le sillon de ses prédécesseurs, se permet de voir plus loin, tend la main pour arracher au vol ici quelques notes perlées salvatrices, là un orgue ou encore des breaks que l'on ne leur connaissait pas pour, toujours, finir en apothéose. La demi-surprise est réelle mais, honnêtement, qui se serait attendu à un album aussi solide après tant d'années dans la pénombre?
S'entêter à courir après un spectre vieux de dix ans eut été vain. Bien des groupes sont depuis passé par les chemins débroussaillés par le désormais sextet: de Black Sheep Wall qui aura atomisé l'échelle de la lourdeur à Admiral Angry qui repousse les limites de la folie, la concurrence ne manquent pas. Après de tels raids punitifs, que pouvait-il bien rester aux vétérans de Sacramento? Le savoir faire, l'envie, l'intégrité et le réalisme. En deux mots: Voire Dire. Car lorsque Will Haven se met à nu, toujours aussi peu nombreuses sont les formations capables de suivre. Impressionnant, tout simplement.
Mouais... Le retour de Grady excellent, mais le tempo a pris une claque ! Certes c'est varié mais quelle lenteur dans l'ensemble.. Perso le pire album de W.H.
Will Haven, make 'Snapcase-style', no 'Neurosis-style' !