Will Haven

Noisecore

États-Unis

Carpe Diem

2001
Type : Album (LP)

Chronique

par Craipo

SHR: La vision périphérique se trouble, le discernement faiblit, les sens s'engourdissent. Saga: Carpe Diem l'obnubilé, Carpe Diem le malade, fruit du travail acharné de Will Haven, groupe monomaniaque à la production musicale entêtante, se rue dans le gouffre et nous avec. Le schéma est connu de tous et pourtant une fois encore le seul mot qui vient à la bouche au bout de deux minutes d'écoute est "monstrueux".

Monstrueux comme l'impact opéré par Carpe diem et ses 9 voisines hyper-plombées, claquées avec hargne, martelées jusqu'à plus soif, hurlées sans discontinuer à s'en faire sauter les cordes vocales. Carpe Diem est un trou noir. Tout ce qui passe à proximité s'y retrouve irrémédiablement malmené, broyé sans pouvoir en ressortir. Rien n'y échappe, rien ne subsiste. La pression est constante, les coups pleuvent avec une régularité aliénante. Le répit est ici un concept quasi inexistant et de toute façon réinterprété à la sauce Will Haven. Comprendre: l'indicateur stress bloqué au dessus de la limite critique et le trouillomètre plus bas que zéro (Finest our). En résumé, de l'acharnement pur et dur d'une densité terrible et d'une homogénéité revendiquée tant dans le fond que dans la forme. Comme précédemment on prend ou on jette car il faut vraiment avoir envie de se prendre trois quatrs d'heure de passage à tabac auditif dans la tronche. On comprendra que certains ne franchissent jamais le pas.

Pour les autres, Carpe Diem est un véritable festin de violence contenue et dirigée, incapable de cogner ailleurs que là où se dirigent les vagues de violence soulevées par une section instrumentale mastoc et habillées d'animosité par Grady Avenell. Pourtant en dépit des apparences Carpe Diem voit plus loin que le bout de son nez. Ne nous y trompons cependant pas: ce troisième uppercut long play n'est pas un disque subtil pour autant, non. C'est un disque intelligent. La nuance n'est pas des moindres. L'un n'empêche pas l'autre mais Will Haven est loin d'avoir la prétention de couvrir les deux notions. Les californiens préfèrent depuis toujours forcer la décision en larguant pavé sur pavé dans un but précis d'annihilation, usant de riffs sournois, d'un chant on ne peut plus sur la brèche et de rythmiques aliénantes pour déconstruire méthodiquement les codes du genre. Sans vous mentir le nombre de riffs utilisés au cours de ces trois quarts d'heure doit être comptabilisable par un élève de CP. Quand à la batterie, elle est tout juste bonne à faire pleurer tout amateur de gravity-blast, de plans mathy et autres démonstrations brutalo-techniques. Mais malgré cela Will Haven reste un groupe d'une virulence aussi rare que terrifiante.
L'application déployée à perfectionner et user jusqu'à la corde des gimmicks servis depuis le milieu des années 90 s'est petit à petit transformée en véritable science de la vindicte musicale ultra ciblée. Will Haven est maitre dans son créneau. Personne ne viendra leur contester cette place car personne ne le peut. La conséquence principale sera donc qu'en 2001, le groupe accouchera de Carpe Diem, une espèce de monstruosité faussement simpliste dissimulant une réelle profondeur d'ambiances et de son, faite de rythmique brute, de bile et de riffs coulés dans le plomb (Moving to montana, Dolph lundgren, Miguel). Même si le résultat paraitra toujours aussi peu élaboré et mal dégrossi au premier abord aux Shadocks des musiques extrêmes, il n'en fait pas moins mal quand on le reçoit en pleine face. Will Haven voyage léger mais fait autant de dégâts avec son arsenal technique d'apparence rustre qu'un Converge au meilleur de sa forme chaotique. Car Will Haven frappe juste et fort.

Toujours totalement anti-mélodique mais doté d'un groove souterrain irrésistible, le quintet commet un attentat sonore au premier degré dans une atmosphère malsaine à laquelle personne ne voudrait s'abandonner. Et pourtant les années défilent et la réponse physique à ces dix titres est toujours aussi invariablement la même, irréfrénable: le frisson et le dévissage de nuque comme jamais. De Jane Doe à Carpe Diem, l'année 2001 nous offre deux visions, deux leçons aussi opposées que complémentaires et absolues de l'extrême. Cohérent, habile, harassant... magistral.

17

Les critiques des lecteurs

Moyenne 17.9
Avis 10
one inch man December 4, 2013 12:37
-3 pour les intermèdes qui font diversion...
17 / 20
UmeaSound February 9, 2013 03:14
Une tuerie ! Ptain cette basse, ce groove, ce chant de ouf, ces riffs de HxC/Mozart ! Ca détruit tout ! ;)
17 / 20
nanosaure February 5, 2012 18:54
Un album crade, lourd et presque mystique par certains cotés.Une musique tellurique !
18 / 20
burning frost June 13, 2010 19:19
Au début, on douterait des dires abordés ici. Puis, on se prend au jeu. Finalement, il en ressort un album groovy à souhait avec une démarche sincère.

Cependant, les interludes bruitistes m'énervent toujours autant.
15 / 20
arnorock November 4, 2008 11:12
Comment font-ils pour ne rien lâcher? Deux premiers albums époustouflants et voilà qu'ils nous balancent ce ptit Carpe Diem. La claque, que dire de plus, à part que c'est un groupe intelligent dans sa démarche de nous mitrailler avec une noise core, lourde, aérienne, avec une émotion toujours de rigueur (un chant toujours extremement bien dosé, Grady aurait pu à cette époque de l'Emo en faire de trop, mais ce mec est transcendé dans ce qu'il fait...)



Bref, ils décident de splitter apres ce chef d'oeuvre, ils sortent donc par la GRANDE PORTE.
18 / 20
polak May 9, 2006 09:59
Meilleur album du groupe selon moi, car plus varié et donc moins lassant que les deux autres. La violence reste évidemment présente avec ce vomissement de lyrics inimitable de Grady Avenell, des riffs basiques mais bien réfléchis, la plupart des compos alternant rythmes binaires et ternaires. Une ambiance ultra travaillée et malsaine, pleine de rage.
16 / 20
sicken flesh April 18, 2006 17:27
Grady Avenell étouffé derrière des guitares rarement aussi crasseuses et aux rythmes ternaire bien plus techniques qu'avant (le batteur semble moins handicapé que les autres....), on a mal pour celui qui essaye de se faire entendre derrière tout se grabuge, .....les enfants n'essayez pas de chanter comme ça Sa fait mal !!!!
20 / 20
TonioPizza April 4, 2006 16:14
Lourd, très lourd, que du ternaire répétitif.



La pochette a achevé ma décision d'acheter cet album - un design épuré dira-t-on - et si toutes les pistes n'égalent pas 'Carpe Diem' (piste 3) je ne me lasse pas d'écouter cet album.

En effet c'est bien une apothéose, peut-être éloignée de la furie des débuts (I've Seen My Fate ou Rut sur leur EP qui sont à écouter absolument) mais d'une violence imparable. Une expérience qui en assommera plus d'un.
19 / 20
lnkjuice May 25, 2005 16:27
Un de mes 5 albums cultes, sans aucun doute... Will Haven termine en apothéose sa discographie. Des rythmes lourds, saccadés (tout en ternaires) en veux-tu, en voilà! Et la voix de Grady... Snif...

www.alphamale.fr.fm
19 / 20