Un album qui demandera sans doute à être d'avantage apprivoisé avec le temps - même si cela semble bien difficile tellement l'ensemble est de très haut vol -, mais en tout état de cause, c'est une révélation, un morceau de bravoure avec de multiples riffs uniques et poussés à l'aliénation. Un album qui met en transe et rase tout, sublime mélange de musique dévorante et de voix déchirées, avec de temps à autres, l'incursion du personnage central, japonais, au ton artificiel et lointain qui évoque tout son trouble. Inoubliable !
Verdun
Doom / Sludge / Psyché
The Eternal Drift's Canticles
01. Mankind Seppuku
02. Self Inflicted Mutalitation
03. Dark Matter Crisis
04. Glowing Shadows
05. Jupiter's Coven
Chronique
On était sans nouvelles concrètes de Verdun depuis 2012 et son premier EP post-apocalyptique The Cosmic Escape of Admiral Masuka, un obus doom/sludge hardcore psyché qui narrait les pérégrinations nébuleuses d’un amiral Japonais cherchant à s’extirper du marasme nucléaire qu’était devenue la Terre. Il aura fallu quatre longues années aux Montpelliérains pour donner suite à cette histoire (couchée par l’ex-chanteur, aussi responsable des artworks), dont la bande son du chapitre précédent nous avait déjà convenablement refait le portrait, sans parler des concerts épiques idoines. Mais ça y est, il est là, il est palpable The Eternal Drift’s Canticles, le premier album véritable, la continuité, et peut-être même la concrétisation de sirupeuses intentions.
La transition entre JAXA, dernier morceau du EP, et Mankind Seppuku inaugurant l’objet à base d’orgue malade, transpire d’ailleurs l’évidence. Notre amiral nippon est désormais une âme errante au milieu d’un univers moins radioactif mais d’autant plus hostile par son abstraction, par ses contours infinis. Masuka lâche ponctuellement quelques phrases dans sa langue natale, se parle à lui-même et sombre dans une folie introspective magistralement mise en musique par Verdun. Le contexte n’est plus terrien, il ne s’agit plus d’échapper à une mort certaine, mais plutôt d’accepter l’inéluctable, dans l’expression d’une dérive éternelle et solitaire.
Alors que l’aspect narratif occupait déjà une place prépondérante sur l'EP, il franchit ici un palier, accentue l’immersion de l’auditeur au cœur du néant, jusqu’à nous introduire dans l’esprit de son unique personnage, gangréné par le passé, le désespoir et quelques hallucinations sournoises (Self-Inflicted Mutalitation). L’atmosphère générale est sensiblement moins torturée, se fait d’une certaine manière plus sereine, à travers une voix alternant éructations douloureuses et clarté quasi-mystique, comme pour signifier les instants de contemplation et/ou l’absolue détresse d’un Masuka en lutte perpétuelle contre ses propres démons, en plus de l’immense inconnue qui l’entoure et le traque même au fond de ses entrailles (Dark Matter Crisis, Glowing Shadows). Bien sûr, la lourdeur abyssale de la section rythmique et les circonvolutions de guitares monstrueusement massives sachant néanmoins tailler de la mélodie moribonde dans cette épaisse couche de gras, accompagnent la progression de l’amiral jusqu’aux tréfonds du système solaire (Jupiter’s Coven), laissant l’horizon ouvert pour un Masuka qui – espérons-le – n’a pas fini d’en chier.
Verdun précise et optimise sa musique autant que son récit, intrinsèquement liés (sans omettre un visuel somptueux encore une fois), et nous implique de fait totalement au sein d’un voyage sans retour, imprégné de solitude et de violence spirituelle. The Eternal Drift’s Canticles apparaît comme le début de l’accomplissement d’une quête sans fin. Le genre d’album qui ne peut s’apprécier qu’entièrement, et pourquoi pas y ajouter l’EP au préalable. Ne reste plus qu’à rouvrir nos plaies béantes en direct.
A écouter : 1
Disponible à l'infini sur Bandcamp.
Les critiques des lecteurs
Un album qui demandera sans doute à être d'avantage apprivoisé avec le temps - même si cela semble bien difficile tellement l'ensemble est de très haut vol -, mais en tout état de cause, c'est une révélation, un morceau de bravoure avec de multiples riffs uniques et poussés à l'aliénation. Un album qui met en transe et rase tout, sublime mélange de musique dévorante et de voix déchirées, avec de temps à autres, l'incursion du personnage central, japonais, au ton artificiel et lointain qui évoque tout son trouble. Inoubliable !
Je suis en parfait accord avec la chronique! Cette album est la baffe de ce début d'année dans le domaine des musiques ralenties et psychédéliques! C'est long, douloureux et anxiogène! Avec ce premier album nous montons d'un cran par rapport à leur précédente production (qui était de très bonne qualité d'ailleurs). La plus grande avancée se situe au niveau de la voix qui est par moments plaintive et par d'autres dans une souffrance ultime!
Mention spéciale pour la dernier track et son éclair de "lumière". Cet ultime assaut vous fera partir très loin dans l'obscurité et le silence oppressant de l'espace! Bon voyage (sans retour)!
Après avoir découvert Verdun grâce à leur dernier album je me suis penché sur les précédents, que dire... C'est vachement bien construit, c'est noir, c'est oppressant... Rien que la première chanson (Mankind sepukku) c'est une tuerie... très bon album bien que découvert tardivement