Biographie

Unconscious Collective

Unconscious Collective est un trio formé à Dallas. Le passif de ses membres (Greg Prickett et les frères Aaron et Stefan Gonzales), grands habitués de la scène alternative texane s'étant tous illustrés dans pléthore de formations allant du Jazz au Grind en passant par le Noise Rock, confère à leur Free-Jazz des teintes parfois inédites. Après un premier album éponyme sorti en 2012 sur la structure locale Tofu Carnage Records (Sans SoleilClericDead to A Dying World...), le groupe signe son retour avec Pleistocene Moon en Aout 2014.

Chronique

16.5 / 20
1 commentaire (18/20).

Pleistocene Moon ( 2014 )

Unconscious Collective, association de gens peu normaux. Né de la rencontre de deux jazzmen (les frères Aaron et Stefan Gonzales) oeuvrant en parallèle au sein de la formation Grind Akkolyte et de Gregg Prickett, guitariste émérite fantasque adepte des musiques immersives (Rabbid RabbitDead to a Dying WorldThe Black Dotz...), le collectif originaire de Dallas s'était fait remarquer pour la première fois en 2012 à l'occasion de la sortie de son album éponyme. Un premier jet bouillonnant mais austère et abrupt qui faisait la part belle à l'improvisation. Globalement resté dans l'ombre, moins féroce qu'un Shining qui récoltait dans le même temps des lauriers mérités au bout de dix ans de déconstruction et de réorganisation des frontières entre les genres (les succès de Blackjazz / Live Blackjazz) ou qu'un ZuUnconscious Collective levait néanmoins le voile sur univers touffu et torturé enrichi d'une approche venue d'autres horizons. L'analogie avec les norvégiens ou les italiens pouvait sembler à l'époque improbable à la comparaison du rendu sonore des différentes formations mais les racines, la volonté de recherche et d’affranchissement des limites étaient elles bien là. Ce n'est de toute façon pas la place qui manque dans la niche voyant se croiser de façon audible Jazz et musiques dites extrêmes.

Un constat un peu triste mais insuffisant pour décourager Tofu Carnage Records qui permet à ses poulains de remettre couvert et petits plats dans les grands deux ans plus tard avec Pleistocene Moon. D'apparence encore plus dépouillée que son aîné, cette seconde offrande planque en revanche derrière son visuel peu vendeur deux LPs visuellement sublimes et, surtout, près d'une heure vingt d'une musique transgressive assez unique.
Le but avoué d'Unconscious Collective n'est autre que la transe et force est de constater que la musique du trio n'a pas de rituel que le qualificatif qu'ils se plaisent à y accoler, pas plus qu'elle ne saurait se contenter de sonner bêtement "Jazz". Le cœur de Pleistocene Moon bat à son propre rythme et s'aligner sur celui-ci n'est pas toujours chose aisée. La dose d'étrange et de folie que distille ce nouveau méfait est bien réelle et ne trouve de véritable équivalence que dans l'opacité de ses ambiances et la virtuosité de ses interprètes. 

Aussi l'essence d'Unconscious Collective ne se dévoile-t-elle qu'à longueur de disque, de progressions habitées en divagations nerveuses et dissonantes mais fermement maîtrisées. Bien que découpé en huit longs titres, écouter Pleistocene Moon par tronçons n'a que peu de sens. Isolez "Methane Rising", digression free-jazz la plus marquée et vous obtiendrez, certes, un morceau puissant, enfiévré, mais incapable d'incarner pleinement l'esprit animant la sixième sortie du label de Sean Mehl (Dead to a Dying World). C'est sur la durée et dans sa globalité que l'expérience se révèle prenante quoique, convenons-en, assez peu accessible au saut du lit.
Le trio, bien d'avantage que sur sa première production, semble s'efforcer de suivre un fil ténu conférant à sa création une teinte sombre plus homogène, une certaine mélancolie transcendée en tension contenue, présente tout le long de Pleistocene Moon, qui l’empêche de sombrer dans des abîmes de noirceur bruitiste lorsqu'arrive l'emballage final. Unconscious Collective divague violemment, improvise librement mais reste à portée d'oreille pour peu que l'on ait la patience de la lui accorder, bien aidé par un mastering au petits oignons signé James Plotkin (Khanate, O.L.D... décidément dans tous les bon coups).

L'omniprésence de passages moins éclatés que par le passé (le très onirique "Kotsoteka") au sein de morceaux flirtant parfois franchement avec le Jazz-Fusion ("Is the Spine the Dividing Line?") ou le Noir-Jazz (la première partie de "Requiem for Biodiversity") joue indéniablement en faveur de sa création. Autant que ses envolées subites (l'épique "The Transformation of Matter" qui n'est pas sans évoquer par instants les Shamman-Punks hongrois de Vágtázó Halottkémek), ou que ses écarts les plus francs avec ce socle Jazz solidement maintenu par une basse virevoltante qui le rapprochent au final de terrains plus familiers. A ce petit jeu "Greedy Tongue", manifeste vociférant aux frontières de la Musique Industrielle échoué en bout de face D, se détache forcément. Et confirme si besoin était que la maîtrise de sa guitare par Gregg Prickett est tout aussi bluffante et élastique que sa capacité à nous le faire oublier. parler au corps avant la tête, toujours. Celui-ci ment rarement. Alors, cathartique Pleistocene Moon? Très certainement, à sa façon.

Ce second album qui aurait pu s'avérer être un vaste foutoir s'affirme rapidement comme une oeuvre étrangement classieuse et fascinante. Jazz et extrême, rituel, fuyant, tantôt enjôleur, parfois dramatique mais invariablement dense et dissonant, en expansion permanente vers une conclusion qui se construit au gré de ses ondulations et soubresauts, Pleistocene Moon parvient à enfanter dans sa recherche d'élévation des fulgurances qui lui sont propres. Free-Jazz en diable sans s'y laisser enfermer, la deuxième galette d'Unconscious Collective reste néanmoins avant tout un disque foutrement vivant et créatif trouvant un juste équilibre entre tumulte primaire, esthétisation et exécution de haute volée. Un must-listen en puissance que l'on ne saurait trop recommander aux plus aventureux.

Unconscious Collective

Style : Ritual Jazz
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Origine : USA
Site Officiel : unconsciouscollectiverising.com
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