Voilà quelques années déjà qu’Ufomammut traine ses basques poussiéreuses dans la sphère des musiques extrêmes, imperturbable malgré une reconnaissance grandissante… Aujourd’hui est venu le temps de faire définitivement éclater la vérité : ces trois énergumènes transalpins n’appartiennent tout simplement pas au même monde que nous autres, pauvres mortels.
Que l’Italie, croulante, nous pine à l’arrache au football, passe encore, surtout que la France ne vaut plus rien nous dit on, et que même si elle essaye sans y croire, ça peut toujours le faire sur un coup de dés. En revanche lorsque ces trois là entrent dans la danse autant déclarer immédiatement forfait à moins d’être solidement armé sous peine de correction douloureuse. Et encore… il y a de toute façon peu de chances pour qu’Ufomammut ne vous sèche pas rapidement d’un tacle sévère sur le pré…
La confrontation entamée, vous n’y aurez finalement cru que l’espace de 3 minutes et quelques, le temps que les azure et blanc répètent calmement leurs gammes en guise d’échauffement. Malheureusement, ici les matchs durent (6)66 minutes. Une éternité lorsque l’on se fait pilonner comme un damné des la première offensive (Stigma). Dès lors tout s’assombrit et s’appesantit. L’air devient suffoquant, une chaleur sèche s'élève irrémédiablement, vous peinez. En face Ufomammut ne fait que monter en puissance, lancé sur une dynamique lourde : incompréhensible. Irrésistible surtout (Stardog, Hellectric). Vous avez beau tout tenter, invoquer YOB, Electric Wizard et autres demi-dieux du fuzz tantôt psychédélique, tantôt furieux, vous n’y arrivez pas. Vous n’y arriverez jamais.
Autant se faire une raison : Ufomammut est beaucoup mais alors beaucoup trop fort pour votre petite personne. Toute gesticulation est inutile. Laissez parler la démesure de la formation latine et soumettez vous. Laissez les faire parler la poudre et soulever autant de poussière à trois qu’un régiment de doomeux sous psychotropes lancé dans une quête effrénée (mais à progression lente, bien évidemment) du saint Graal des musiques apesanties. Non ces types ne sont pas comme nous… quelque chose d’immense est à l’œuvre dans l'ombre et guide ces médiators-rouleaux compresseurs, dicte ce martèlement de futs possédé, chaleureux mais éreintant, leur murmure l'idée de l'utilisation de ce clavier (belle trouvaille), insuffle ces respirations salvatrices dans un chaos Stoner Doom qui, par la suite ne nous écrase que plus durement (Nero, la brutalité quasi primaire de Destroyer). Le souffle de l’occulte se fait clairement sentir (Ammonia et son chant féminin). Rien de palpable, rien de tangible et pourtant le constat est là, froid, sans concessions : Ufomammut vous ravage et vous assistez impuissants à votre propre déchéance, embarqués au milieu d’un torrent de décibels sur-gras, frappés d’hallucinations dures. Le chant, rare, se veut lointain, comme étouffé, noyé… halluciné et fatigué derrière tant de distorsion, écrasé par cette basse intenable qui n’en finit plus de rouler et, malgré tout, de vous faire vibrer.
Mais pourquoi bouder son plaisir alors? Plutôt que de résister en vain, vous aussi laissez vous aller… abandonnez vous à cette musique sulfureuse. Après tout, à notre époque le bûcher n’existe plus et vous ne risquez plus guère que de faire hurler Christine Boutin. Enfin, alors que vous vous abîmez pleinement au plus profond de cet Idolum et qu’Ufomammut commençait à vous dévoiler son art sombre, Void vous plante là, hagards, sur un final ambient trituré, lancinant et hypnotique, s’étirant sur une durée interminable. Encéphalogramme plat. Les italiens ont débranché la perfusion et le manque gagne. Subitement, un dernier assaut sonore (Elephantom) : le rush est puissant, la montée imposante, le riffing monstrueux. Les nuques surchauffées sautent… puis tout s’arrête. Définitivement. Le silence est intenable et, le doigt tremblant, vous faites « play ». Cette fois ça y est, vous aussi avez sombré. Bienvenue chez Ufomammut. Ici, accompagnés de quelques illustres compagnons de la musique pachydermique un brin allumée, les italiens siègent parmis les puissants.
A écouter : 1
La prod est un peu faiblarde. Ça manque vraiment de puissance pour soutenir les compos. J'en ai encore plus l'impression depuis que je les ai vu en concert (Stigme, aïe !).
Sinon l'album est carrément bien foutu, avec son lot de perles. Eve est plus réussi je trouve.