Tim Hecker

Ambient

Canada

Love Streams

2016
Type : Album (LP)
Labels : 4AD
Tracklist
01. Obsidian Counterpoint
02. Music Of The Air
03. Bijie Dream
04. Live Leak Instrumental
05. Violet Monumental I
06. Violet Monumental II
07. Up Red Bull Creek
08. Castrati Stack
09. Voice Crack
10. Collapse Sonata
11. Black Phase

Chronique

par nonohate

L'acceptation de l'insaisissable mouvement de la musique est un perpétuel recommencement, exercice dans lequel Tim Hecker excelle. Il a su le démontrer à travers une discographie qui en impose le respect. Jusque-là, chacun de ses nouveaux albums évoluait dans un espace qui lui était propre bien qu'en s'inscrivant dans un contexte de cohésion reconnaissable à ses prédécesseurs. Après avoir traversé l'univers post-apocalyptique aussi magnifique qu'inquiétant de Ravedeath, 1972, il nous a fallu arpenter douloureusement l'abîme anarchique et incoercible de Virigins. Vient à présent Love Streams, nommé ainsi avec la sobriété dont il a toujours fait preuve dans son travail. Pourtant, Tim Hecker surprend, auditivement bien sur, mais pas seulement. Jamais un de ses albums n'a offert un ressenti de la retranscription sonore aussi net. Quoique "net" soit un bien grand mot quand il s'agit de l'associer au producteur canadien.

Tout ceci n'est pas anodin. Rarement un artiste que j'affectionne m'aura donné tant de mal à trouver des mots pour le décrire. Tel est l'effet qu'a sa musique sur ses auditeurs. Il faut dire qu'il prend un malin plaisir à nous malmener au gré de ses contrées irrégulières, où grâce et chaos se lient dans une explosion imprédictible. Tim se joue de nous, réussissant même à faire passer les notes d'Obsidian Counterpoint pour des sons régulés par une quelconque fréquence, comme si sa musique était soudainement devenue accessible. Mais ce n'est qu'un leurre. Ici, on est bien loin de la discipline du contrepoint.
Ces voix, rappelant certaines expérimentations de Björk, se superposant et dissimulant d'autres voix plus infimes ne font qu'accentuer la mise en orbite de notre esprit, se mêlant encore et encore jusqu'à ne devenir qu'une entité unisexe au discours imperceptible (Music Of The Air). On se met alors en quête de ce dialecte et des échos qu'il induit mais il est déjà trop tard. Il vous faudra attendre le terme de l'album pour tenter à nouveau de saisir cet instant. Ce qui compte c'est de parvenir à assimiler le maximum d'éléments dont il regorge tout en résistant à l'envie de décoller, ce qui n'est pas chose aisée. Car vous décollerez, soyez en certains.

Lorsque l'on parle d'Ambient, la pochette qui illustre l'album devient alors un élément important. Unique point de repère que Tim a bien voulu nous laisser avant de nous perdre dans son monde sans règle. On finit toujours par se rattacher à cette image, abstraite mais presque familière, jusqu'à en inventer une histoire. Elle prend alors le pouvoir sur votre subconscient puis finira par contrôler le décor de votre périple comme le fait Love Streams avec ces couleurs fluorescentes entrecoupées de silhouettes à peine visibles.
Ayant toujours possédé une façon bien à lui de concevoir l'enregistrement d'un long format, cet album ne déroge pas à la règle et a ainsi vu ses sessions de compositions étalées sur deux ans peu après la sortie de Virgins, pour finalement voir le jour au printemps 2016. Tim Hecker a constamment été à part et il continue de le prouver en évoluant dans son univers parallèle, sachant mieux que quiconque allier Drone, Ambient et classique moderne, chose qui facine toujours autant.

Aussi bien capable de composer la bande-son de la fin du monde que celle de vos rêves, Tim Hecker nous éblouit de son talent telle une lumière diffuse dont la source serait si vaste qu'on a peine à en discerner les limites. Ce qui fera grincer des dents une partie de ses adorateurs est sans doute ce qu'il y a de plus important à retenir de Love Streams. Sa véritable force réside dans cette chaleur et ce panaché de couleurs qui vient contraster avec ses anciens travaux façonnés, eux, ton sur ton. S'il excellait de bout en bout lors de cette phase monochromatique, il ne reste à présent plus qu'à voir ce dont il est capable à travers ce changement de ligne directrice qu'il débute de la meilleure des manières.

16

Les critiques des lecteurs

Moyenne 16.5
Avis 2
Unsocialeh July 1, 2020 13:08
Plongée stupéfiante et vertigineuse dans le cortex sensoriel. A la fois ultra complexe et super naturelle.
17 / 20