Un album de Young Gods est tout sauf anecdotique. Toute de même, il faut avouer que depuis Only Heaven, si l'on excepte son émanation ambient Heaven Deconstruction, les productions de nos suisses favoris ne cassaient pas trois pattes à un canard. Seules les prestations live et les innovations en la matière - battle avec Dalëk ou interprétations acoustiques - leur permettaient de se maintenir à la pointe.
Avec Everybody Knows, The Young Gods remettent un bon coup de collier. En bons pyromanes, les suisses réussissent à raviver la flamme là où pas mal de leurs contemporains (Treponem Pal ?) continuent encore à souffler en vain sur des braises à moitié éteintes. Auto bombardés défricheurs de sonorités depuis plus de vingt ans, nos jeunes dieux ne sont pas loins d'avoir pondu leur album le plus dance depuis des lustres et ce ne sont pas les quelques fulgurances à cordes - c'est le premier album enregistré avec un guitariste - qui surgissent ici et là qui vont infléchir la tendance. Une guitare qui, si l'on repart en arrière, n'est pas vraiment une nouveauté puisque présente depuis toujours dans les productions des Gods, dans les samples de Monod ou sur scène aussi avec Treichler ("Child in the Tree" en 2006). Si auparavant l'instrument était plus fréquemment utilisée pour nous fracasser la tête sur des compos plus primaires (cf. "Jimmy" ou "Longue route"), sa présence aujourd'hui donne une touche plus charnelle à des titres qui sans çà auraient pu paraître froids (l'excellent "Blooming"), presque formatés comme les très US "No Land's Man" ou "Introducing", de loin les moins intéressants de la cuvée 2010.
Mais les Gods sont surtout efficaces dans les phases électroniques, lorsque les nappes grasses de synthés envahissent les ondes. C'est tout d'abord le très groovy et très british "Mister Sunshine" qui donne le ton, suivi par son pendant belge "Miles Away", sur lequel les suisses donnent leur définition de l'EBM cher à 242. Onirique également quand s'apaise la pulsion au sortir de l'épilleptique "Tenter le grillage", bien dans la tradition des premières productions, avec une fugue au clavessin servie par la douce voix de Treichler, rêverie d'où surgissent notes et mots simples de manière sporadique ("Aux Anges").
Un album pas parfait mais comportant assez de lueurs de génie pour en faire une réussite. Everybody Knows montre surtout que les Young Gods sont en phase avec leur temps, refusant tout passéisme, ayant su évoluer avec lui sans que leurs productions paraissent parachutées ou anachroniques.
Tracklist : 01. Sirious Business, 02. Blooming, 03. No Land's Man, 04. Mister Sunshine, 05. Miles Away, 06. Two To Tango, 07. Introducing, 08. Tenter le grillage, 09. Aux Anges, 010. Once Again
A écouter : Miles Away, Mister Sunshine, Aux anges