Laydown est un drôle de raté, l’histoire d’un malentendu. En 2005, The Ganjas commet (connaît ?) un accident de parcours. De ceux, irrécupérables, qui pourraient vous changer un destin.
Le groupe avait laissé son monde à peine un an plus tôt avec un croustillant album acoustique entre les feuilles qui faisait lui-même suite à un premier disque éponyme rondement mené où se mêlaient dans un écrin Rock psyché influences 70’s et ouvertures Reggae/Dub. Un drôle de mélange sorti de l’imagination d’une bande de types venus d’un pays pas forcément réputé pour avoir organisé Woodstock ou pour faire skanker la planète entière. C’était d’ailleurs peut être là qu’était l’intérêt.
Dieu seul sait alors ce qui a pu arriver aux quatre rockeurs durant ce laps de temps pour revenir dans un tel état de béatitude. Le résultat, lui, est bien là et s’intitule Laydown. Une espèce de révélation tant pour le groupe, qui part à la découverte d’un potentiel jusqu’alors lattant, que pour quiconque ayant prêté une oreille à leurs autres productions. En 2005 le groupe de rock The Ganjas s’efface derrière sa musique au point de disparaître au profit d’une formation quelque peu hors cadre et surtout d’une toute autre envergure.
Cet album revêt les couleurs de la volupté absolue et de l’apaisement. The Ganjas semble s’y diluer, abandonne le format "classique" de ses débuts pour estomper ses riffs et se noyer dans un océan sonore psyché d'un autre genre. Laydown devient dès lors un disque de l’abandon dont l’assise rythmique répétitive devient une force hypnotique sur laquelle viennent se greffer un fourmillement de guitares aériennes et de clavier tirant vers le Shoegaze. Le chant semble lui émaner de figurants effacés, totalement happés par l’univers sonore dans lequel ils évoluent. Il émerge à l’occasion du doux magma sonore mis en place par les chiliens pour mieux le survoler et lui donner une dimension supplémentaire avant de s’y fondre de nouveau dans une synergie hallucinée.
Toute la première moitié de Laydown semble suivre cette logique d’entrainement mutuel pour nous mener en douceur vers la clef de voute de l’album que représente Dance hall, montée envoutante, possédée et envahissante, invariablement martelée sur une même rythmique durant près de neuf minutes. L’orientation nouvelle pourtant tout juste maitrisée de The Ganjas atteint déjà ici des sommets: gavés de guitares shoegaze et de clavier jusqu’à plus soif les chiliens se tapent un trip monumental sur un titre plus enlevé que la moyenne de l'album. Il y aura de fait un avant et un après Dance hall dans ce disque, comme dans la carrière du groupe qui ne s’en est visiblement toujours pas remis et n’en finit plus depuis de traquer le fantôme de Loop et ses descendants.
C’est encore groggy que The Ganjas entame la descente sur Moonlight cat avant de reprendre le chemin de la lascivité avec Crazy horse, puis Laydown. La formation tentera bien de se rebiffer sans grand succès sur la reposante ballade Mind rain mais finira par lâcher de nouveau prise sur un dernier titre trituré entièrement instrumental. Lorsque s’achève Break up, le groupe lui-même semble ne pas en revenir et cette dernière piste reste de longs instants en suspens avant de totalement atterrir, en silence.
Laydown est un drôle de raté, l’histoire d’un malentendu. En 2005, The Ganjas ne s’attendait probablement pas à accoucher d’un tel ovni. Son public, peut être encore moins. Et pourtant le pari engagé par les chiliens fait plus que tenir la route. A l'époque, The Ganjas ne s’imposait pourtant pas comme une référence, statut auquel la formation pourrait pourtant assez aisément prétendre. L’histoire d’un malentendu vous dis-je…
A écouter : Au calme.