Sunn O)))

Drone / Doom

États-Unis

Life Metal

2019
Type : Album (LP)

Chronique

par Skaldmax

Chercher une vérité chez Sunn O))) est vain, car la démarche du groupe est aussi absurde qu’ouverte à l’interprétation. Leur musique est aussi libre et unilatérale qu’un monochrome. Comme devant une toile blanche, libre à chacun de s’y plonger des heures, d’en rire, d’y voir une production artistique mystique et primitive ou un joli pied de nez à qui prendrait ces deux sorciers un peu trop au sérieux. 

Mais que l’on ait affaire à une vaste blague ou à de grands prêtres du son, il y a une chose qui ne ment pas, le fondement même sur lequel repose cette musique Drone : la perception que chacun de nous a de ce magma de décibels informes. Ainsi, notez que cette chronique n’a d’avance aucune légitimité objective, qu’elle ne décrit que des sensations individuelles, des images personnelles. 

Sunn O))) prend tout de même la peine de nous mettre quelques cartes en main, un terrain commun pour entamer le voyage, à commencer par un titre et une pochette, tous deux plutôt évocateurs d’immensité, d’espace, de lumière. Et puis il y a cette introduction, Between Sleipnir’s Breaths, qui entame le disque en rappelant notre lien à la terre : on y entend des hennissements lointains, des sabots qui s’entrechoquent, et ces guitares annonçant un départ imminent. Pour renforcer le tout, Hildur Guðnadóttir murmure un poème aux allures d’oraison funèbre, annonçant un voyage vers l’au-delà à mesure que notre esprit est enivré de l’air entré en vibration. Le ton de la chanteuse et des guitares est chaud, presque chaleureux et enveloppant. 

Ce premier morceau est comme la piqûre de morphine avant le grand saut, comme un premier shoot trop dosé, comme un au-revoir silencieux avant de traverser le Styx. Et lorsque la litanie prend fin, c’est le gouffre, un Drone incessant pendant près d’une heure servi par le duo O’Malley/Anderson. Et si une telle immensité peut rebuter, on trouve quelques repères ici et là comme Troubled Air qui mêle les ambiances désertiques de Terrestrials et l’orgue solennel de Dømkirke. La conclusion Novæ apporte de son côté une sorte de répit avec sa longue tirade de crépitements Drone, à la fois apaisants mais maintenant une tension de basses hypnotiques dont on ne peut s’échapper. 
Plus globalement, les quatre pistes peuvent être rapprochées d’autres méfaits des Américains. On peut ranger ce Life Metal avec les pans les plus aériens de la discographie de Sunn O))) (les White, Dømkirke, Terrestrials). De par ses illustrations et leur capacité à déteindre sur la musique, ce disque évoque des couleurs chaudes et donne à entendre un son plein et profond, jamais hostile comme a pu l’être le groupe sur un Black One ou sur ses tous premiers rituels. 

Pour les plus rebutés par Sunn O))), il y a peu de chance que Life Metal vous fasse changer d’avis (reportez-vous plutôt à Monoliths And Dimensions). Pour les autres, Between Sleipnir’s Breaths entame une cérémonie intense, tout à fait délicieuse après un Kannon qui manquait de folie. La grand messe Drone vous attend.

16

Les critiques des lecteurs

Moyenne 16.17
Avis 3