Biographie

Spiritual Front

Autoproclamés comme étant des artistes de « pop nihiliste et suicidaire », les 4 membres officiels de Spiritual Front ne sont pas franchement joyeux. Héritiers de la scène progressive italienne des années 70 et 80, les romains produisent une musique très variée et populaire, affiliée à la scène Dark Folk. Souvent relié à des groupes comme Der Blutharsch, Dernière Volonté ou Of the Wand and the Moon, le quatuor à géométrie variable exerce pourtant une musique à part, plus large dans son spectre d’influence, qu’un « simple » groupe de Dark-Folk.

Chronique

17 / 20
1 commentaire (17/20).

Armageddon Gigolo' ( 2006 )

S’il est une scène qui mériterait une place plus importante sur metalorgie, c’est bien la scène gothique ; ce fameux milieu très restreint et fermé en France, et pourtant grouillant de groupes géniaux et de codes complexes, dans une espèce d’atmosphère cotonneuse et sensuelle, est un élément essentiel à considérer quant à la compréhension de tout ce qui nous entoure dans les musiques dites sombres. 2006, année exceptionnelle disait-on, n’aura décidemment épargné personne en musique, et ce troisième album de Spiritual Front en est une preuve incroyable. Armageddon Gigolo’ saura, j’en suis sur, vous interpeller si vous êtes avides de finesse, grâce à son côté très accrocheur et familier, et les perles qu’il renferme.

Avec Spiritual Front, vous entrez dans un univers à la fois très artificiel et effroyablement humain. Le son de la simplicité, de la délicatesse maladroite, se confronte à des arrangements complexes, des titres tourbillonnants et étincelants et une ambiance très décadente. A des bases très ordinaires, des rythmiques très populaires se greffent de nombreuses références, tenant tant du Dark Folk (le chant et la guitare de Simone Salvatori), des musiques de bal populaire, du classique ou de la musique pop moderne. Les très nombreux instruments, tous parfaitement à leur place, vivent des hymnes très chantants et sombres, formant comme une sorte de fête triste, où chacun d’entre eux, discret joyau, est à même d’occuper l’espace ou au contraire de tenir la vedette. Ce timbre chaud d’une guitare électrique, ce violon très instinctif dans l’approche, cette batterie très big band, et surtout…ce chant, non sans rappeler Nick Cave, bouleversant tant dans ses paroles que dans sa justesse de ton et son aspect typiquement confident...Armageddon Gigolo’ est beau, tout simplement, avec son ambiance de cabaret, ses mélodies inattendues qui retournent l’estomac.

Peu prétentieuse dans sa caractérisation, la musique de Spiritual Front, cru 2006, profite d’un côté extrêmement accessible (bien plus qu’auparavant, pour ceux que ça intéresse) pour que son univers si particulier se laisse dompter très facilement dès les premières seconde d’écoute. Finalement très pop, Armageddon Gigolo’ reste très grand public tout en offrant suffisamment de passerelles vers les mondes gothiques pour rester très intègre, et seuls les éléments participant à la mélancolie et la décadence, ainsi que les thèmes abordés rappelleront les univers noirs du dark folk le plus sombre, celui d’où vient Spiritual Front d’ailleurs.

Le troisième album des italiens de Spiritual Front est un bijou, un album affilié à une scène, mais finalement bien au-delà de clivages absurdes. Armageddon Gigolo est de ces disques universels, qui, dès lors que l’on aime la finesse, si triste soit-elle, peut toucher en plein cœur, même sans être approfondi de manière exagérée. Les paradoxes qui le composent, les mélanges sensuels qu’il contient, sont autant de plaisirs pour l’âme qui n’a plus qu’à se laisser glisser dans l’un des plus beaux albums de 2006. Magistral.
 

A écouter : Si vous aimez la belle musique.