Sordide

Black Metal/Punk

France

La France A Peur

2014
Type : Album (LP)
Labels : Avantgarde Music
Tracklist
1. La France A Peur
2. Blâme
3. Gloire
4. L'innocence
5. La France A Peur
6. Pauvre Histoire
7. Violence

Chronique

par Skaldmax

La France A Peur. Sentence télévisuelle lancée sur TF1 en 1976 au sujet du meurtre d'un enfant, cette allocution de Roger Gicquel ne sonne malheureusement pas faux, même trente ans après. Sorti fin 2014, ce premier album aura trouvé involontairement un écho fort funeste quelques semaines plus tard. Panique dans l’hexagone, état d'urgence, crise sociale, intellectuelle, perte de repères. Bordel, rien ne va mieux.

Un simple coup d’œil au coq menaçant de la cover suffit pour comprendre que Sordide ne joue pas un Black Metal qui va puiser son fiel dans les abysses infernales. Le trio est plutôt du genre à s'égratigner face au réel de notre douce France. Homo homini lupus est comme dirait l'autre. Défiant les hautes sphères de la crasse de son caniveau, le groupe sert un Black bâtard, violemment influencé par le Punk et ses gros sabots. Quoi de mieux pour peindre une réalité nauséabonde qu'un son brut et corrosif ? Live recording, no cut'n'paste, no editing nous dit-on, et ça se ressent méchamment entre la basse ultra-présente et le grain erraillé de la guitare, secondés par une batterie sonnant bien authentique. On pose là-dessus du riffing sans complications mais drôlement personnel qui va chercher les cordes fines pour les faire tourner en boucle (Pauvre Histoire). Pas question de faire dans le raffinement ou la virtuosité, ici on cause de la rue et on singe les puissants, on chérit le chaos et la dissonance des instrus pourvu que l'on tape plus fort que juste. 
 
En l'espace de sept morceaux, Sordide décline ses facettes Black/Punk partagées entre mid-tempos où la voix se fait une place de choix pour y cracher sa bile (Gloire, Violence) et les accélérations menées de front pas une basse en cavale et un tremolo-picking entraînant (L'Innocence). Mélange suffisamment efficace pour que chaque piste trouve sa place sans redite, équilibrant habilement l'opus. 
Mais là où les Rouennais se révèlent davantage encore c'est lorsqu'ils poussent l'auditeur à tendre l'oreille vers des textes définitivement cohérents avec la saleté de la musique. La chose est suffisamment rare pour être soulignée : Sordide, qu'on aime ou pas, nous parle sans détour, sans masque ou métaphores. Ni Nom Ni Drapeau rappelle les divisions du pays, Blâme la ségrégation sociale, ou Pauvre Histoire et notre passé sanglant.  Nehluj, Nekurat, Nemri nous poussent à remettre en question l'ordre social et sa hiérarchie, construction factice et désuète face à la condition humaine (A marcher sur les cadavres / De vos noms, vos gosses oublieront / Vos idées de grandeur / Vos visages, votre sang). Animée par une soif de justice, la formation va y chercher toute sa verve pour nous la balancer sans aucune forme de politesse. 

Par son verbe ou ses compos, Sordide clame haut et fort ses origines de la France d'en bas, crachant sur les privilèges et faisant fi de tout esthétisme superflu. La France A Peur marque un début de carrière singulier pour ces Normands, qui devraient dévoiler leur deuxième effort d'ici peu de temps. Espérons qu'ils ne décolèrent pas.

15

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