Ragana

Black Metal / Doom

États-Unis

Desolation's Flower

2023
Type : Album (LP)
Labels : The Flenser
Tracklist
01. Desolation's Flower
02. Woe
03. Ruins
04. Dta
05. Winter's Light Pt. 2
06. Pain
07. In the Light of the Burning World

Chronique

par rwn

Cette chronique, écrite à peu de choses près un an après la sortie de Desolation’s Flower, s’est en quelque sorte mise au diapason de Ragana. Cinq années se sont en effet écoulées depuis la sortie de l’excellent You Take Nothing. Pendant cet intervalle, le groupe n’est pas resté inactif, sortant un EP avec Thou en 2018 puis un morceau en 2019 mais il faut bien dire que les signaux faibles renvoyaient plutôt à un hiatus sans fin qu’à un retour sur le devant de la scène. 

Il se dégage de Desolation’s Flower une beauté inappropriée car il y est essentiellement question de révolte et de déprime. Ces deux émotions négatives ne sont en réalité que les deux facettes du regard porté sur la société américaine actuelle, ses inégalités et son ostracisme vis-à-vis des minorités. Le militantisme de Ragana est subtil. Il faut généralement lire entre les lignes pour le détecter. Sauf avec le puissant DTA, sobre sigle pour « Death To America », paroles violentes, quand on considère le climat outre-Atlantique, que l’on ne lit que très rarement. Habité par l’enregistrement d’une manifestation de protestation contre la mort de George Floyd, le titre fait référence, de façon plus large, à la violence endémique de la société étasunienne. Le groupe s’est d’ailleurs ouvert sur les fusillades, estimant qu’il ne fallait pas aller chercher très loin leurs causes : manque d’histoire, manque de culture et isolement social, ajoutant craindre qu'à moins de détruire les USA et de reconstruire une société capable d’aimer ses membres, ils ne continent à s’autodétruire collectivement. En opposition à la révolte et la déprime, Ragana ne semble trouver de l’apaisement que dans la Nature (In the Light of the Burning World), à l’image de ce courant culturel inspiré par la wilderness, que l’on retrouve chez Panopticon ou encore Fauna.

Death to America and everything you've done 
I can't feel anything I am numb

La construction musicale de DTA, précédemment mentionné, illustre un des traits de caractère essentiels de la formation : la dualité. S’agissant d’un duo, vous allez me dire que c’est une évidence mais cela me semble ici plus profondément marqué. Pour en revenir au titre, les deux parties qui le composent, séparées par l’enregistrement sonore, sont en totale opposition : chant cristallin et guitare claire d’un côté contre hurlement et distorsion de l’autre. Un seul invariant : les paroles répétées en boucle, mais différemment donc, ce qui leur donne une portée toute autre. Cette dichotomie entre les passages envoutants et les répétitions hypnotiques de boucles saturées à la Vile Creature donne tout son relief à la musique de Ragana. Celle-ci se retrouve également dans les styles d’écriture : les paroles écrites par Maria sont plus simples et recourent souvent à la répétition (« I long for thee – Je te désire » sur Ruins) tandis que Nicole développe des compositions plus complexes (Winter’s Light Pt.2). 

Magnifique suite à You Take NothingDesolation’s Flower possède indéniablement une charge cathartique puissante. Tournant le dos à la tendance actuelle valorisant la complexité, l’album est une forme d’éloge de la simplicité. Il propose une collection de morceaux ultra efficaces, bien que construits sur la base d’une ou deux idées.

17

Desolation's Flower s'écoute ici.

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