Pour beaucoup cette année restera salvatrice en symbolisant la fin du silence tant attendu de Radiohead. Depuis la parution de Hail To The Thief en 2003, la formation anglaise a pris l'habitude de ralonger le laps de temps entre deux sorties discographiques mais sans pour autant raréfier ses concerts. Malgré deux décennies entières à ne jamais passer une année sans se produire sur scène, le groupe choisit de laisser s'écouler une période bien plus longue et au combien inhabituelle avant d'annoncer un éventuel retour.
Suite à la sortie en 2011 de The King Of Limbs, disque controversé s'il en est, et après avoir passé toute une année sur les routes à le promouvoir, Radiohead s'accorde une pause méritée qui permit aux Anglais de s'atteler à d'autres projets. Amok, le premier album d'Atoms For Peace en profite ainsi pour voir le jour aux côtés de quelques travaux solitaires de certains membres. Jonny Greenwood choisissant de perdurer son étroite collaboration avec le cinéaste Paul Thomas Anderson tandis que Phil Selway et Thom Yorke sortent respectivement leurs deuxièmes efforts solo. C'est à l'automne 2014 que les musiciens choisissent de se retrouver au studio la Fabrique de notre douce Provence pour commencer le travail de ce fameux LP9, qui n'aura pas été une sinécure.
Par quatre fois il leur a fallu regagner le studio tandis qu'ils étalaient leurs sessions sur des mois entiers pour qu'enfin, début 2016, A Moon Shaped Pool soit finalisé. Radiohead en profita également pour enregistrer un morceau un peu à part. Spectre, titre qui devait initialement se retrouver au générique du James Bond du même nom mais qui devant le refus de l'équipe du film fut dévoilé en guise d'offrande de Noël la même année. On y découvre un Thom Yorke à la voix suave, rappelant certains passages d'Amnesiac, et dont les douces notes de piano font écho à l'orchestre philharmonique remarquablement mis en lumière au fil du morceau.
En parallèle à cela, Radiohead ne sera pas plus transparent qu'à son habitude sur son activité en studio mais pas de quoi décourager la horde de fans parée à la moindre fuite d'information. Un culte du néant entretenu avec ferveur par sa communauté tandis que le groupe n'a qu'à se frotter les mains entre quelques rares interventions rappelant celui qui gravite autour de Tool, dont la dernière sortie en date remonte à plus de dix ans à présent... C'est alors que sans crier gare, le groupe efface toute trace de sa présence sur internet. Une activité (ou absence d'activité) qui annonce la sortie imminente du neuvième album. Après avoir fait table rase de son passé, les informations sur LP9 vont rapidement tomber à commencer par Burn The Witch, le tout premier extrait dévoilé, suivi de près par Daydreaming pour que finalement A Moon Shaped Pool soit officialisé.
Les pincements de cordes et la ligne de basse de Burn The Witch nous placent rapidement en orbite en nous rappelant les plus importantes expérimentations des Anglais durant cette dernière décennie. L'atmosphère oppressante bien que fascinante que dégage le titre d'ouverture laisse place à Daydreaming et ses notes de piano éthérées. Jonny y démontre une nouvelle fois son talent de façonneur du son avec son acolyte Yorke qui prit le pari réussi de distordre sa voix à la manière de Sigur Rós afin de s'en servir comme d'un instrument supplémentaire. À côté de quoi il n'est guère déroutant d'entendre de multiples irruptions philharmoniques comme sur le reste d'A Moon Shaped Pool puisque Radiohead a souvent eu coutume d'enregistrer avec un orchestre par le passé. Ce morceau n'est pas seulement en tous points réussi, il est surtout l'élément qui déclencha l'inspiration pour cet album. Un noyau central brillamment illustré par Paul Thomas Anderson.
Decks Dark est donc chronologiquement le premier titre inédit pour ceux qui, comme moi, n'ont pas su résister à l'envie de découvrir le chemin parcouru par le groupe à travers les deux premiers extraits. Ce troisième est pour une majorité le meilleur de l'album puisque la bande d'Oxford y distille ce son chaud et classieux qui fit l'unanimité sur In Rainbows tout en y incorporant cette méticulosité propre à A Moon Shaped Pool. Un titre rassembleur, dont il serait dommage de seulement résumer l'album ainsi, avant de nous perdre dans l'inconnu le plus total, ou presque. Pour les inconditionnels du groupe, certains noms paraîtront plus familiers que d'autres. Il est pourtant intéressant de constater l'évolution de ces morceaux tels que Ful Stop et Identikit qui furent interprétés à l'occasion de la tournée précédant l'enregistrement et qui au fil de sessions répétées ont perdu nombre de leurs éléments au profit d'un arrangement nouveau. Quelques années ont suffi à les muter en une nouvelle entité mais pour ce qui est de Present Tense, dont la réelle composition remonte à 2008, ce processus aura été bien plus long.
À travers Desert Island Disk et Glass Eyes se dégage un côté organique et émouvant de sincérité qui transparaît tout particulièrement sur True Love Waits dont vous avez sans doute entendu "cette version live de merde" (dixit Nigel Godrich) de I Might Be Wrong: Live Recordings. Seul reste Thom Yorke se mettant à nu face à son piano pour un moment de pure intimité comme rarement Radiohead a su en offrir.
Sans réelle surprise, puisque cela fait plus de 20 ans qu'il jouit d'une confiance aveugle, c'est à Nigel Godrich que l'on doit cette production si minutieuse. Son travail joue ici un rôle-clé dans l'immersion de ce nouveau chapitre de la carrière des Anglais. Une politique conservatrice qui contraste avec l'évolution qu'ils ont su prendre par le passé. Pourtant, nul autre approche n'aurait davantage convenu après ces années qui nous auront paru bien longues avec l'arrière-goût synthétique laissé par The King Of Limbs.
Il est à présent difficile de se projeter dans l'avenir tant le groupe peine à nous rassurer sur le sujet. Nul ne sait si un LP10 verra le jour alors tachez d'apprécier cet album à sa juste valeur, si ce n'est pas déjà le cas. Une œuvre minimaliste, certes, mais qui n'en reste pas moins réussie de bout en bout, se voulant à l'image de Daydreaming : Juste.
A écouter : 1
Ça fait bientôt 25 ans que Radiohead a pris un virage électro qui a tué le groupe pour moi. J'ai toujours eu l'espoir qu'ils finissent par changer de direction d'une manière qui me plaise, mais ce n'est jamais arrivé jusqu'à maintenant. Ce "A Moon-Shaped Pool" est pour moi le pire album que le groupe ait jamais sorti. Malheureusement, quasiment tout l'album est composé de chansons lansinantes, au ton très calme, et triste. Si ce n'était le cas que sur 2 ou 3 chansons, ça irait, mais là, je pourrais juste écouter quelques secondes d'une chanson pour m'en faire un avis, car elles ne changent quasiment jamais de ton ou de mélodie. En plus la majorité des chansons dûrent 4 à 7 minutes, ce qui est beaucoup trop long pour ce qu'elles sont.
Je n'apprécie qu'une seule chanson, Burn the Witch, qui fait l'effort de proposer quelque chose de différent du reste de l'album, et qui est plus variée que le reste, tout en ayant des mélodies sympatoches. Le reste s'écoute sans enthousiasme...