C’est quand même une sacrée injustice, cette part
prépondérante occupée par les chanteurs. Combien de musiciens de talent ont dû
rester dans l’ombre de leurs gueulards de congénères, à rafistoler leurs
bécanes dopées au gain et à retendre leurs percus en peau de bison, attendant sagement
leur heure de gloire ? Sans doute bien plus qu’on ne l’imagine. Va d’ailleurs
savoir si certains ne rêvent pas secrètement d’un putsch salutaire, d’une
mutinerie où l’on arracherait les cordes vocales de l’indésirable avant de les
brûler et de monter le plus grand groupe instrumental de tous les temps…’Sont
tarés ces zicos.
Mais avec Punch, on tend à obtenir un relatif équilibre.
Relatif oui, dans la mesure où c’est bien encore une fois une voix qui te fout
la première grosse paire de taloches sur cet LP. Celle d’une nana qui au
premier regard ne paye pas de mine, mais qui te flanque une rouste de ses mots
écorchés, transpirant la rage du Punk-Hardcore et l’urgence du Grind par tous
les pores. Meghan O’ Neil n’a rien à envier à d’autres frontwomen au timbre
musclé (au hasard Angela Gossow (ex-Arch Enemy) ou Candace Kucsulain (Walls Of
Jericho)), sa performance sonne authentique et la harangue de forcenée fonctionne
sacrément bien en dépit d’une légère linéarité. Qu’importe, car les cris de
sauvage du youthcrew sont soutenus par quatre musiciens qui semblent avoir
gagné en assurance depuis le dernier EP du groupe. Au diable la technique pompeuse, ici
c’est la vitesse qui compte, surtout pour ce batteur dont on peut saluer le
travail tant il impose une rythmique écrasante. Et alors que Nothing Lasts
proposait des compos construites de manière plus directe et simpliste, They Don’t Have To Believe va discrètement piquer quelques structures au Chaotic Hardcore
(« Making Room »), ne se cache pas de son amour pour la batterie D-Beat
et blastée, et s’emporte parfois dans des tourbillons de violence sonore (« Personal
Space ») aux frontières du Grind. Tout ça en moins de vingt minutes.
De ces nombreux ascendants et parents plus ou moins
lointains, Punch sait en tirer parti habilement car frénétique et imprévisible ;
combo hyperactif ou débordant de créativité, pas le temps de t’interroger si tu
veux tenir le rythme. Nouveau coup de fouet à base de larsens et de rage non
canalisée toutes les minutes et demies environ, les Californiens ne laissent
pas de place à l’ennui et ne s’encombrent pas de mises en bouche. « Shame »
ou le titre éponyme te sont balancés dans les pattes sans vergogne, une intro c’est
gadget tout le monde le sait.
Malgré tout, Punch semble quelque peu s’assagir, constat valable pour l’ensemble
du groupe que l’on retrouvait un poil plus vindicatif sur le Push/Pull de 2010.
Légère baisse de régime introduisant une plus grande complexité et originalité
des morceaux, alors peut-on donc vraiment les blâmer ? A toi de juger.
Avec ce court effort, sans doute que l’on ne réinventera pas
le Hardcore, mais il est clair que cet opus sent bon la fraîcheur et n’est pas
une de ces sempiternelles resucées qui pullulent aux quatre coins du monde. They Don’t Have To Believe n’échappe pas à la patte de Punch, et par son énergie communicative
ainsi que ses morceaux variés, l’opus pourrait bien franchir quelques barrières
musicales et séduire un grand nombre d’adeptes de musiques extrêmes, quelles qu’elles
soient.
L'album s'écoute en intégralité sur bandcamp.
A écouter : oui, ainsi que leurs autres sorties