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Biographie

PoiL

PoiL est un trio lyonnais tout à fait délirant, sévissant discographiquement depuis 2008 avec l'album L'Ire des Papes, au visuel tout à fait vomitif, suivi du EP+ Dins o Cuo en 2011, et enfin Brossaklitt, au visuel bien plus agréable à regarder (réalisé par Lilas Mala), paru chez Dur et Doux en 2014. Leur sorte de rock expérimental, alimenté au jazz, au bruit, à l'électronique ou même au metal, ne cache pas des accointances avec les Mr Bungle, Secret Chiefs 3 et autres Zeus!, Melt Banana, Merzbow, etc, mais tâchent d'en ressortir quelque chose d'inédit, sans jamais, ô grand jamais, se prendre au sérieux.

Chroniques

Sus Brossaklitt
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Sus ( 2019 )

Les freaks de Poil nous avaient proprement défrisé la toison avec la Brossaklitt de 2014 aussi désaxée que raffinée. Ces petits laborantins sorciers des sous-bois rhodaniens, manipulant les propriétés extraterrestres d’un Magma pour les greffer au delirium drôlatique d’un Mr Bungle réactualisé, mettent au point une nouvelle expérience cinq années plus tard, dont le but serait pourquoi pas de sauver les âmes mélomanes de leurs turpitudes ordinaires.

Entre temps le trio a pris soin de nous gratifier d’un flabistouflant album commun l’an dernier avec Ni, sous l’évident patronyme Piniol, puis d’une coopération gracieusement bruitiste en plus court format avec le collectif colombien Mula (Mula Poil, ben ouais). De la matière promptement agencée pour préparer Sus, quatrième ouvrage des choses velues, où la formule de base s’étoffe dans l’espoir d’atteindre sans doute plus aisément l’objectif précité. Et bien sûr Dur&Doux continue de veiller au bon déroulement des opérations.

Poil signe là cinq pièces chargées d’organismes sonores disposant du pouvoir de régénération, permettant d’ouvrir et de refermer les plaies de manière frénétique ou bien en douceur, ou les deux à la fois. Ainsi Sus la peìra ouvre la chose en nous positionnant au milieu d’une fausse cacophonie, où l’on découvre un clavier instable et plus téméraire qu’à l’accoutumée, entouré d’une basse lourde, granuleuse, et d’une batterie épileptique, éclatant les rythmes comme elle respire. Des chœurs – souvent chantés en espagnol – se hissent au-dessus de la mêlée, amenant une dimension « spirituelle », exprimant une certaine sagesse dans la déglingue, confirmée par Lo Potz et surtout Luses Fadas, porte-étendard surréaliste de ce Poil nouveau. La guitare se montre plus discrète mais n’en reste pas moins active, agissant sur l’aspect casse-nuques des intentions, s’accordant plus volontiers aux frappes déconstruites, alignant de la mélodie noise et/ou concassée. Les quatorze minutes et quelques de Chin fòu viennent synthétiser toutes ces incantations pseudo-scientifiques en un gargantuesque bordel organisé, hystérico-jubilatoire.

Telle une créature protéiforme en perpétuel mouvement Poil ne cherche pas à soigner sa présentation ni à vulgariser sa musique, au contraire le trio nous pousse à réduire notre zone de confort en miettes et se propose de recoller les morceaux à sa manière, avec les outils d’une dinguerie créatrice plus ordonnée qu’elle n'en a l’air. Moins facile à encaisser seul devant ses enceintes que le précédent long, nul doute que Sus va en laisser plus d’un.e sur le carreau du bonheur en direct.

A écouter : pas confortablement.

Brossaklitt ( 2014 )

Une nouvelle fois, avec PoiL, les sous-sols de nos villes telles que Lyon exposent une contenance créatrice foisonnante, une dinguerie musicale qui ne pourrait décemment pas se présenter sous des projos plus éclairants. Ce troisième objet du trio, poétiquement nommé, confirme son statut d’incontournable fêlé du cortex, au même titre qu’un Ultra Zook, ou Manhattan-DIY par exemple, pour rester dans nos plus ou moins vertes contrées.

Au-delà de ces considérations géographiques, lorsqu’on s’introduit Brossaklitt dans les oreilles, on pense avant tout aux formations réputées du genre : Secret Chiefs 3, Magma, Mr Bungle, John Zorn, Melt Banana, ou encore Zeus!. Maniement et gestion d’une multitude de sonorités, qu’elles soient organiques par un clavier hystérique, sauvage, à un level d’inspiration constant ; qu’elles soient électroniques, chiptune voire même parodiques (MAO en clin d’œil grinçant aux Daft Punk) ; ou bien fusionnelles, accouplant jazz, rock, grunge, surf, metal et noise. On pourrait craindre une cacophonie sans nom, mais non. Enfin si, c’est un peu le Bronx mais sachant que celui ou celle qui lira ce papier aura sans doute écouté à l’usure les artistes précités, ça ne devrait pas poser de problème.

Car Brossaklitt, à l’instar des objets qui le précèdent, est un bordel savamment organisé, parfois progressif, sachant parfaitement faire monter la sauce (le fantastique Patachou), jusqu’à nous faire péter une durite, atteints de spasmophilie, encouragés que nous sommes par des voix d’internés à vie de l’asile d’Arkham, dans une veine cartoonesque, avec du Patton et du Médéric Collignon dans un coin de tête, toutefois très personnelles, portées par des textes intelligents et inspirants. Introklitt qui vient juste après le grassouillet et fascinant Fionosphère en est l’une des plus brillantes illustrations. Que dire alors de Pikiwa, tout en contretemps, monument instable de plus de quatorze putain de minutes, teinté d’un mysticisme extra-dimensionnel, appuyé par une basse en acier trempé, une guitare crasseuse, volubile, et un frappeur explosif, très jazz ; qui se muera en twist binaire et bruitiste corroboré par de l’électro foutraque néanmoins justement agencée, pour finalement revenir au thème d’origine et nous achever dans une joyeuse déconstruction, afin que nous puissions nous balader sans crainte avec les gentils minouchoux.

Il n’est jamais simple de scribouiller sur un disque aussi multiple, aussi fourni en démence productive. Le fait est qu’on tient là le meilleur album de PoiL, une bestiole difforme, klittoridienne, garnie d’un paquet d’excroissances velues renfermant chacune son lot de surprises. Un temps sera nécessaire aux néophytes du genre pour l’apprivoiser, à condition qu’ils osent s’y attarder, le chemin sera tortueux, cabossé, mais l’arrivée promet d’être salvatrice. Les habitués quant à eux devraient naturellement être conquis dès les premières notes, aussi déglinguées soient-elles.

Épilation intégrale sur bandcamp.

A écouter : dans le bon sens.
PoiL

Style : Rock / Expérimental / Noise
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Origine : France
Site Officiel : duretdoux.com
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Amateurs : 3 amateurs Facebook :