Planks
Sludge/Postcore/Punk Metal
Planks
Chronique
En optant pour une thématique romanesque, Planks se démarque entièrement du réel. Pour le trio de Bade, l'actuel est si terne, tellement formaté, tellement transparent qu'il est peut-être besoin de s'en inventer un nouveau. Peut-être reprendre l'aventure un peu plus avant, repartir presque de zéro aux abords du XIXe siècle, chercher des raisons d'espérer dans la littérature des Melville, Verne ou Poe chez qui Planks puise une grande partie de son inspiration. D'oû cette vision d'outre-tombe, puissante, massive, une optique obscure qui se dégage de cette première oeuvre à l'aura si dense qu'il est quasi impossible de ne pas s'y engloutir. Epuré, dénué de toute aspérité, l'univers de Planks est évocateur de toutes ces ambiances crépusculaires - "Avec résignation sous les cieux gisent les mélancoliques eaux. Tant se confondent ombres et tourelles, que tout semble suspendu dans l'air : tandis que d'une fière tour de la ville, la Mort plonge, gigantesque, le regard".
Le trio se repaît de tout ce qui passe à portée. Si "Deluge" dévoile une vision plutôt chaotique dans le genre de Damad, entrant dans le sujet de manière plutôt convenu, Planks frappe un grand coup l'instant d'après avec un "Forgiveness to Tyrants" pas piqué des vers, puissant, rustique, hérissé d'épines crust dont on ne ressort pas indemne. Mais dont on n'est pas dupe. Voile de fumée pour mieux nous noyer par la suite dans une déflagration sludgy/postcore ou, même si tournée vers la poésie de la mer, de l'océan, tels que le flamboyant "Mollusk King", la musique de Planks éclabousse d'embruns acides, offrant des reflets flirtant avec l'apocalyptique d'Old Man Gloom, le haineux d'Eyehategod ou de His Hero Is Gone ("Fist of the Ocean", "the Curse of all Things Drowned"). Huit titres bouillonnant d'inspiration, aux enchaînements réactifs, servis par une production de qualité et le mastering de James Plotkin (Khlyst, Khanate...) qui doit être pour quelque chose dans le résultat final, ce premier album brille par sa rythmique de feu, ses attaques percutantes - le chant de Ralph agresse littéralement - compensant avec certaines faiblesses de composition ("Narrows").
On sera pas mesquin pour autant. La perfection n'étant pas de ce monde, Planks a bien mérité d'intégrer le contingent des bonnes surprises de l'année 2008. D'autant plus que l'accent a été également mis sur un artwork idoine d'Oliver Hummel (Omega Massif, Gregor Samsa, Lvmen) composé de deux planches de Gustave Doré, "I had done a hellish thing" et "The Death-Fires Danced at Night", ayant servi à illustrer The Rime of the Ancient Mariner de Coleridge. Tellement de finesse dans une carure aussi brute, çà valait bien qu'on y accorde plus qu'une petite attention.
Tracklist : 1. Deluge; 2. Forgiveness to Tyrants; 3. Mollusk King; 4. Fist of the Ocean; 5. Totenschiff; 6. the Curse of all Things Drowned; 7. Narrows; 8. The Harpooner's Divide