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Biographie
Orange Goblin, groupe de stoner-metal britannique, voit le jour en 1995 dans le quartier de Soho à Londres sous le patronyme « Our Haunted Kingdom ». La formation s’articule alors autour de Ben Ward (chant), Joe Hoare (guitare), Pete O’Malley (guitare), Martin Millard (basse) et Chris Turner (batterie). Le groupe change rapidement de nom pour celui que nous connaissons actuellement et sort deux EPs avec l’autre fleuron du stoner d’outre-manche, Electric Wizard : Demon lung/Aquatic fanatic sorti en 1996 chez Rise Above Records et Chrono.Naut/Nuclear Guru en 1997 chez Man’s Ruin Records. Orange Goblin se forge dés lors une solide réputation live en écumant les pubs de la capitale avec son stoner-doom-metal mâtiné de psychédélisme 70’s inspiré de Black Sabbath, Hawkwind ou encore Pink Fairies. En 1997, le groupe entre en studio pour plancher sur son premier LP. Frequencies from planet ten sort alors, produit et enregistré par Dave Chang. On note également la présence de Duncan Gibbs, session musician employé par les gobelins pour souligner l’aspect « psyché » de leur musique à grand renfort de claviers. Celui-ci ne sera cependant pas rappelé pour l’enregistrement du second opus, time-travelling blues en 1998, toujours produit par Chang, mais qui affiche un côté plus brut et plus groovy. En 2000, les londoniens s’offrent un petit interlude le temps d’un split avec Alabama Thunderpussy, avant de retourner en studio aux côtés de Billy Anderson (Neurosis, Eyehategod, Om, Sleep, High On Fire, Cathedral, Bongzilla, Mr Bungle…rien que ça!) et de sortir The big black, album que le groupe qualifiera lui-même de cosmic doom. Suite à cela, l’excellente réputation scénique d’Orange Goblin ne cessera d’augmenter, ce qui vaudra au groupe de tourner avec, entre autres, Alice Cooper, Queens Of The Stone Age, Danzig, Monster Magnet, Nashville Pussy, Nebula, Unida, Dio, etc. 2002 marque un énorme tournant dans la carrière des anglais. En effet, suite à une évolution somme toute logique, le groupe prend ses fans à contre-pied en sortant Coup de grace. Produit par l’excellent bassiste-batteur-producteur Scott Reeder (Kyuss, Fu Manchu, The obsessed, Goatsnake…), le disque laisse tomber les artifices psychédéliques des débuts pour livrer un stoner-doom aux relents punks bruts de décoffrage. La production de Reeder et plus crue, plus crade, plus urgente, en conservant néanmoins un énorme son fuzzy. C’est probablement à ce jour le meilleur album du groupe, tant il lui confère une identité propre, une véritable « touche » Orange Goblin. En 2004, le guitariste Pete O’Malley quitte la formation, mais le groupe ne juge pas nécessaire de le remplacer, Ben Ward taquinant la 6-cordes à l’occasion pour les besoins de la scène. C’est d’ailleurs en tant que quatuor que les londoniens sortent la même année Thieving from the House of God avec comme producteur, Mark Daghorn (Mendeed, Cradle Of Filth, Marillion…).Si le disque conserve plus ou moins la qualité de son de son prédécesseur, il laisse de côté les fulgurances punks pour allonger un rock-metal abrasif et bien ficelé. Fidèle à Rise Above Records depuis ses débuts, Orange Goblin sort, en 2007, Healing Through Fire chez Mayan Records, en conservant toutefois Daghorn à la production. Un dernier effort qui continue la démarche entreprise par Coup De Grace, et qui semble depuis, faire ses preuves.
Chronique
Le Stoner. Souvent parodié, ce digne rejeton du rock « bruyant » aurait pu mourir mille fois. Depuis son apparition à l’orée des 70’s, bon nombre de formations(et je ne citerai personne) ayant mal digéré les riches enseignements du Sabbath early years, d’Hawkwind, Blue Cheer ou encore Pink Fairies, auraient pu le sacrifier sur l’autel du mauvais goût, à grands coups de riffs lourdingues, de chamanisme en kit et de psychédélisme pompier. Mais si cet anachronique courant musical n’est toujours pas enterré, c’est qu’il continue de nous livrer, çà et là, de véritables perles émergeant du bourbier gélatineux dans lequel s’enlisent les sombres disciples du mauvais rock « défoncé ». Coup De Grace en est une.
Car Orange Goblin, dont il s’agit ici du quatrième opus, n’en est plus aux balbutiements maladroits de Frequencies From Planet Ten. Les années passées à défendre son Stoner/Doom vénéneux dans la cour des grands, ont conféré au groupe une maturité de composition et d’exécution irréfutable. Et ce disque est bien celui du changement. Ce qui se ressent immédiatement au vu de l’artwork soigneusement confié au talentueux Frank Kozik, réputé outre-atlantique pour ses fameuses affiches de concerts. Terminé les pochettes de bikers cosmiques, place à l’horreur dans toute sa splendeur !
Et celle-ci ne tarde pas à pointer le bout de son nez nécrosé. Très vite, une guitare retentit, déluge électrique de fuzz assénant sans pitié un riff Boogie/Punk épileptique et virulent. Le reste de la machine se met en marche, un « Fuck ! » claque dans l’air vicié : c’est parti ! Your World Will Hate This entame les hostilités et fonce tel un dragster infernal piloté par le diable en personne. On sent que le son des anglais a changé. La production, confiée à Scott Reeder (Kyuss, Eyehategod, Fu Manchu…), est plus crue, plus sale, plus corrosive qu’auparavant. Ce qui colle à merveille avec la voix caverneuse travaillée au Jägermeister, de Ben Ward qui, tel un hominidé surgit des temps immémoriaux, éructe ses textes avec la rage d’un forcené. Les esgourdes rôdées, les titres peuvent alors s’enchaîner. Et les gobelins maléfiques y parviennent avec brio, alignant les pépites de façon quasi-industrielle : Monkey Panic, Rage Of Angels, Getting High On The Bad Times…autant de déluges soniques qui réservent leur lot de riffs saignants, de refrains fédérateurs et de soli décochés sur le fil du rasoir. Mais les lampes des amplis Orange n’ont pas fini de chauffer. A peine comprenez vous ce qu’il se passe, qu’arrive Made Of Rats. Hymne Stoner/Doom anthologique offrant la vedette à John Garcia (Kyuss, Slo Burn, Unida, Hermano) ! Le rat du désert donne la réplique à Ward avec la grâce d’un damné, sa célèbre voix nasillarde résonnant jusqu’au pont aérien où, avec une troublante sensualité, il hululera de façon envoûtante sans jamais sombrer dans le maniérisme. Pas radin pour deux sous, Garcia s’égosillera même le temps d’un Jesus Beater pas piqué des hannetons, qui ravira tous les aficionados du californien. La platine pourrait alors entrer en fusion si Graviton n’intervenait pas. La sainte électricité mise au placard pour trois minutes, le groupe allonge sur guitares sèches quelques notes énigmatiques à la douceur salvatrice. Ce qui n’est autre qu’une habile diversion ayant pour but de préparer l’inévitable retour du raz-de-marée sonore : Red Web, Born With Big Hands et l’héroïque Stinkin’ O Gin, ultime morceau de bravoure (8 minutes) à l’intro Southern Rock, au riff zeppelinien et au refrain jubilatoire prônant l’éthylisme de masse, qui clôture le disque avec panache.
Orange Goblin aura prouvé qu’il en avait sous le pied. Que les années passées à dégueuler son Rock crasseux à la face du monde n’auront eu raison de sa hargne. Avec Coup De Grace, les cinq londoniens signent de leur patte cadavérique un disque à l’identité forte. Et ce n’est pas la stupide reprise des Misfits (we bite), sprint Horror/Punk d’une minute, qui viendra ternir cette galette survitaminée. Car nous sommes ici bien loin des productions enfumées du Sorcier du Dorset ou du mysticisme religieux d’un Om. Coup De Grace est né de la rage, tel un cri primal libérant des frustrations d’une époque sclérosée. C’est avant tout un disque de Rock. Alors courrez ! Courrez aussi vite que vous pourrez vous procurer cet album avant l’interdiction ! Au train où vont les choses…
A écouter : en bagnole, entre potes, dans les bars�mais � plein volume�!
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