Voilà maintenant sept ans que le dernier opus, Tourments et Perdition de Orakle est sorti, soit, en temps moderne et internet : une éternité. Si l’attente a été longue, elle en valait la peine. Éclats est un album inspiré, beau, aux multiples facettes, qui en surprendra plus d’un.
Situer les Français dans le paysage métallique est désormais un peu compliqué, Orakle est devenu un groupe qui sort de l’ordinaire et qui ne répond plus à des critères bien spécifiques. La ligne directrice est maintenant assez libre, les membres aimant brouiller les pistes, multiplier les influences, et se laisser aller à l’expérimentation. À titre de comparaison, il est possible de voir cette nouvelle œuvre proche de ce que fait Opeth. Le Black Metal joué autrefois est relégué au second plan, l’approche musicale étant nettement progressive, théâtrale même sur la durée de l’album. Les changements de rythmes sont légions, les contretemps également, la technique des musiciens est au service de l’élégance et non pour épater le public avec des soli interminables. Orakle régale avec grâce sur Solipse, Apophase et Le Sens de la Terre, par son talent et la mise en scène de sa musique, sublimée par un chant en français dont les paroles au langage soutenu ne pouvaient être transposées dans la langue de Shakespeare. Les mots sont choisis et récités à la manière d’une poésie, la retranscription des idées et des émotions passées obligatoirement par notre langue. Pour autant les Parisiens n’oublient pas leurs origines et de temps à autres les compositions se veulent plus « violentes » et « brutales » comme sur Incomplétude(s) et Bouffon Existentiel. Quelques growls font leurs apparitions et se fondent à merveille au contenu. Tous ces éléments font néanmoins de Éclats un album complexe et difficilement cernable, le mieux est de l’appréhender comme une expérience, où se mêlent curiosité et envie.
Il serait regrettable de ne pas parler de l’artwork, la couverture est une œuvre du regretté sculpteur Robert Le Lagadec. Apathia Records a fait un excellent travail et propose le disque dans un digipack somptueux, accompagné d’un livret de 16 pages.
Orakle n’était pas forcément attendu sur ce terrain pour son retour, mais force est de constater que le résultat est probant. Sans aucun doute c’est un nouveau départ pour le groupe, qui espérons, pourra exprimer tout son talent sur scène, et ne nous laissera pas de nouveau sept ans sans aucune nouvelle.
A écouter : Solipse, Bouffon Existentiel, Le Sens de la Terre