Obscur projet d’un homme seul mais déterminé, Obturate sort de terre son death metal brutalement viscéral en début d’année, impressionnant, sans non plus en faire des (grosses) caisses. Plutôt sobre donc, et bénéficiant d’une production de haut niveau, The Bleeding Mask of Dread constitue l’unique album d’un one man band qui pourrait aisément se faire passer pour un quintet.
Phobos – c’est son petit nom – manie en effet chaque instrument (basse, batterie, guitares) en plus de martyriser joliment ses cordes vocales, se pliant en quatre pour nous balancer dix pavés salement frontaux sur le coin de la gueule, armé d’une technique assez dingue mais toutefois mesurée. Blue Marks on Her Neck amorce la guerre en marche par une avalanche de double-pédale, de riffs pétris de démence et soli tout à fait opportuns jaillissants des ténèbres, plutôt courts mais terriblement bien placés, donc efficaces. Ode au death metal vieille école façon Cannibal Corpse ou Immolation, Obturate y ajoute un feeling hardcore foutrement bien senti et une touche d’avant-gardisme délectable. Ainsi Under the Ninth Moon Rain administre de la taloche multiple et pétée de groove, On Your Corpse I Spit accélère le tempo pour dégueuler tout ce qu’il peut sur nos cadavres déjà en cours de putréfaction, Sarlett Stains Upon the Bodies nous emmène aux frontières du grindcore, où la densité rythmique maintient la violence au-dessus des cimes, tandis que Bloodbringers double les arguments vocaux de Phobos, en constante maîtrise. Les mouvements entre chaque titre sont d’une fluidité extrême et permettent de digérer sereinement les 36 minutes complètes de l'objet, clôturées par un Wear The Flesh un peu plus souple que le reste, habillé de riffs carnassiers, parfois légèrement alambiqués, augmentés d’un certain mysticisme qui titille le Gorguts au loin.
Premier (et peut-être dernier ?) album d’Obturate, The Bleeding Mask of Dread conditionne environ toute la crème du death metal « à papa » en le renforçant d’éléments hardcore et d’environnements souterrains capables de faire remuer la crinière des morts. Un bonbon idéalement équilibré à tout niveau, aussi brutal qu’étonnamment facile à avaler, d’autant plus en sachant qu’il est l’œuvre d’un unique cerveau malade.
A écouter : complètement.