Biographie

O.L.D.

O.L.D. (pour Old Lady Drivers) voit le jour en 1988 à Bergenfield sur les cendres de Regurgitation, formation dans laquelle officiait James Plotkin. C'est sous la forme d'un quatuor que O.L.D. sort la même année son premier album éponyme Old Lady Drivers. Le public est réceptif au Grind parodique du combo du New Jersey qui commence rapidement à se faire une petite base de fans. On les retrouve d'ailleurs deux ans plus tard sur un split partagé avec les furieux Assück, qui n'allaient pas tarder à se révéler comme une des références du Death/Grind des early 90's. Quelques mois plus tard le groupe revient, recentré autour de deux membres, James Plotkin et Alan Dubin (futurs Khanate), qui s'entourent alors d'un bassiste (Jason Everman) et s’adjoignent en bonus les services de John Zorn pour sortir l'ambitieux Lo Flux Tube. Les deux têtes pensantes y dévoilent leurs penchants pour les expérimentations et la musique industrielle qui ne cesseront dès lors d'occuper une place grandissante dans leurs productions futures.
Désormais bien plus proches de Godflesh que de leurs origines, les deux américains vont poursuivre leur marche en avant et perdre un peu plus leur public au passage lors de la sortie de The Musical Dimension of Sleastak puis de Formula. Bien que toujours officiellement actif, O.L.D. cessera néanmoins de faire parler de lui à compter de cette époque. James Plotkin et Alan Dubin, pris par d'autres projets (KhanatePhantomsmasher...) finiront par officiellement saborder leur création en 2002.

Chronique

Lo Flux Tube ( 1991 )

James Plotkin (KhanateAtomsmasher/PhantomsmasherLotus Eaters...) et Alan Dubin (Khanate) respectivement à la guitare et au chant, arrivée de Jason Everman (des passages chez Nirvana puis Soundgarden et Mindfunk) pour tenir la basse, et John Zorn (saxophoniste hors norme à l'origine de Naked CityPainkiller, de mille projets tordus et accessoirement patron du label Tadzik) en guest: Voilà le lineup de O.L.D. pour ce Lo Flux Tube.

A une époque où il apparait de bon ton de se toucher la nouille à l'évocation du premier "supergroupe" venu, cette introduction pourrait semble-t-il à elle seule servir d'article. Inutile de se mouiller ou d'aller chercher plus loin, ça pue le all star game des musiques alternatives et les CV des musiciens y participant parlent d'eux-mêmes. Rien qu'avec ça, il y a largement matière à émoustiller l'amateur de bizarreries underground. Oui mais voilà Lo Flux Tube n'est pas la dernière fantaisie de tout ce beau monde, loin de là, pour la simple raison qu'il est paru en 1991. L'année de Psalm 69 (Ministry), au beau milieu de la période un peu folle qui voit les échappés du grind, et Peter Broadick et Mick Harris (Godflesh, Head of DavidIce, Techno Animal / ScornPainkiller...) partir à la conquête d'autres terrains, où Pitchshifter était encore féroce et où même Sick of it All et Napalm Death faisaient de l'indus (Lou Koller et Shane Embury pour être précis). L'époque où tout quasiment tout ce petit monde gambadait allègrement dans le terrain de jeu offert par Earache à la recherche de quelque chose de beau à détruire.
Eux aussi issus du sérail grind et des musiques extrêmes affiliées, les gars de O.L.D. virent de bord au tournant de la décennie pour s'orienter vers une approche indus de leur musique, faisant gicler au passage leur batteur pour le remplacer par une boite à rythme. Le résultat obtenu est un disque dévastateur mais beaucoup moins primaire que leurs débuts qui propulse, à l'époque, immédiatement le trio au niveau des cousins britanniques de Godflesh sans qu'ils n'en atteignent pour autant ni de près ni de loin la renommée.


Il faut bien avouer que Lo Flux Tube a surement du en dérouter plus d'un, autant par l'orientation inattendue qu'il présente que par le jusqu'au boutisme de la démarche exposée. Clairement d'obédience Streetcleaner, à l'époque ou le God s'orientait déjà vers des terrains au groove plus chaloupé (Slavestate/Pure), O.L.D. conserve l'essentiel de l'extrémisme sonore de ses débuts pour l'exprimer à travers un prisme musical totalement repensé.
Déshumanisé, hurlé, parcouru par un groove froid implacable, déchiré par une collection de riffs glaciaux, Lo Flux Tube est un disque Indus ultra véloce (Outlive), furieux (Citient null), destructeur et ambitieux qui s'il a indéniablement vieilli et au final fait oublier la présence du sieur Zorn, totalement écrasé dans le mix, reste probablement parmi les plus extrêmes de son genre pour l'époque. Aujourd'hui encore les assauts des Old Lady Drivers ont de quoi faire sauter plus d'un lobe frontal et hérisser quelques tignasses. L'apparente fureur foutraque émanant de Lo Flux Tube n'a d'égal que la minutie déployée par le groupe dans la construction de monstrueuses piles de dissonance. Le crédo de O.L.D. est le bruit et l'inconfort. Lo Flux Tube est une œuvre en déséquilibre permanant, remplie ras la gueule de percussions syncopées et de cordes malmenées en rythme (Lo flux tube). La transe industrielle monte jusqu'à effleurer point de rupture pour mieux laisser souffler sur de rares fenêtres d'accalmie (Citient null, Z.U.). Inutile d'aller chercher beaucoup plus loin les origines d'une bonne partie de l'identité développée par Fear Factory. Sauf qu'ici tout est plus brut, direct et extrême.

Lo Flux Tube est un disque charnière. Certainement pas le plus reconnu ni généralement le plus recommandé d'un courant de toute façon condamné depuis toujours aux circuits confidentiels, il n'en reste pas moins un album témoin chargé de toute l'effervescence créative caractéristique d'une époque aujourd'hui pleinement révolue. Défricheurs de l'extrême, dangereux malades, illuminés... les gars de O.L.D. étaient probablement un peu de tout ça à la fois. On ajouterait aussi très probablement curieux, passionnés et libres. C'est d'ailleurs cette sensation qui, au final, par delà des sentiments d'oppression, de solitude et d'écrasement que la musique du quatuor peut procurer, ressortira le plus de ce Lo Flux Tube remarquable et anecdotique. Celle d'avoir à faire à formation à la recherche des limites qui, une fois celles ci trouvées, prenait un plaisir à les faire sauter, toujours à la poursuite de l'étape suivante. De la création en mouvement, de la musique qui avance, à l'apport diffus mais déterminant. Quand bien même le résultat ne plait pas à tout le monde, on ne pourra jamais leur enlever cela.

A écouter : Outlive, Z.U., Lo flux tube, Citient null