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Biographie
Tout commence en 1981 à Bordeaux, Bertrand Cantat rencontre au lycée Serge Teyssot-Gay. Puis de fil en aiguille, ils rencontrent Denis Barthe avec qui ils montent une groupe qui changera sans cesse de nom, Psychoz, Station Désir, Noirs Désirs pour finalement opter officiellement pour Noir Désir. Frédéric Vidalenc (remplacé par Jean Paul Roy en 1996) les rejoint et en 1987 sort leur premier album Où veux tu qu’j’regarde? puis tout s’enchaîne: Veuillez rendre l’âme (à qui elle appartient), Du ciment sous les plaines, Tostaky, 666.667 club. A ce stade de sa carrière, Noir Désir est le fer de lance de toute la scène rock française, encensé, et presque vénéré, respecté pour son engagement , admiré pour ses prestations live. Il faudra pourtant cinq ans au quatuor pour revenir, années durant lesquelles les compilations One Trip One Noise et En Route pour la Joie. continuent d'entretenir la flamme auprès du public. Des Visages et des Figures parait finalement en 2001 et présente la formation bordelaise sous un jour inédit, sombre et apaisé faisant la part belle aux textes - élément pourtant toujours important de sa musique.Le succès est de nouveau au rendez vous, venant démontrer au moins autant les attentes immenses que peut soulever un nouvel album de Noir Désir que sa capacité à (re)conquérir un public fidèle et toujours plus large. ChroniquesDes visages, des figures 666.667 Club Dies Irae Tostaky Du ciment sous les plaines Veuillez Rendre l'âme (à qui elle Appartient) Veuillez Rendre l'âme (à qui elle Appartient)Des visages, des figures ( 2001 )Sortie plutôt incongrue pour un album, le 11 septembre 2001, le jour même de l’attentat des twins towers à New York. Et pour couronner le tout, la galette en question comporte ce morceau ‘le grand incendie’ dont les textes sont édifiants de réalisme : « Ca y est, le grand incendie, Y'a l'feu partout, emergency, Babylone, Paris s'écroulent, New York City, Iroquois qui déboulent, Maintenant... Allez, London, Delhi, Dallas dans l'show, Hommage à l'art pompier, T'entends les sirènes, elles..., Sortent la grande échelle, Vas-y... Go!, Hommage à l'art tectonique, Un techno-picnic sur la terre éventrée, Mais la faille est creusée, atomisée (…) » Drôle de clin œil du sort… Certains iront jusqu’à dire que c’est de la prophétie ! … En tous cas, c’est repartit pour un tour. Noir Désir, plus que jamais, intègre, fidèle à leurs convictions : quasi inexistant sur la promo, boycottant la télévision ; se retrouve avec un album qui explose, grâce au single "Le vent nous portera " où Manu Chao mets la pâte à la guitare. On se croirait pour le coup, il y a quelques années plus tôt quand « aux sombres héros de l’amer » était matraqué sur les ondes hertziennes. C’est vrai qu’il y a comme un goût d’antan dans cet album, retour aux sources, tout en n’accomplissant aucune redite, tout en étonnant encore une fois. Déjà, la pochette rouge, rappelle « du ciment sous les plaines ». Cette fois ci c’est Franyo Aatoth qui en est l’auteur. Il semblerait que cet artiste est été choisi, d’une part car il est un ami de Bertrand Cantat avec qui il a voyagé en Mongolie, mais aussi car c’est avant tout un artiste qui n’hésite pas à être engagé. Puisqu’il a travaillé, entre autre sur l’album ‘tibet libre’, avec plus d’une soixantaine d’artistes (Hervé di Rosa, Robert Combas, Moebius, Ben). Œuvre qui réunit des textes, des informations précises sur un génocide culturel et humain commis dans ce pays "libéré" par la Chine populaire en 1949. L’artwork de Des visages et des figures, devait être au début un visuel photographique, mais après une balade dans l’atelier de Franyo Aatoth, Nini Barthe (le batteur du groupe) découvrit une toile " Les nouveaux cow-boys", une peinture en monochrome rouge qui relate un conte de fées sur la brutalité, thème qui collait parfaitement au message de l’album. La peinture fit l’unanimité dans le groupe. « À l'époque de la conquête de l'Ouest, un mythe a été créé, celui des cow-boys. Le cow-boy avec son banjo exprime le romantisme d'un holocauste. Ces braves types qui n'avaient peur de rien, flinguaient les méchants Indiens sous prétexte de les "civiliser", alors qu'ils ne voulaient que voler leurs terres. Ces brutes sont devenues petit à petit plus fréquentables, mais les indigènes ont été exterminés ("Un bon indien est un indien mort") ou forcés à s'installer dans des réserves misérables. Ils servent aujourd'hui de figurants dans un décor à Disneyland. (…) Actuellement, on peut constater à quel point sont présents ces " nouveaux cow-boys". Ces possédés du pouvoir ont gardé l'esprit de conquête, bien qu'il ne reste plus de territoires à conquérir. Ils se justifient en ayant recours à des grands mots, tels que la Famille, Dieu, Patrie, etc...C'est le règne du double langage et du cynisme. Pour eux ; tous les coups sont permis. Tout ce qu'ils veulent, c'est l'installer tour à tour sur la "chaise du pouvoir", jamais vacante mais toujours à prendre. » Propos de Franyo Aatoth recueillis par Maïa de Martrin. Un clin d’œil graphique au passé, avec ce monochrome rouge, mais clin d’œil aussi dans les compositions. Il semblerait que les textes soient moins incisifs que dans 666,667 club, bien que Noir Désir ne retourne pas pour autant sa veste! … Preuve incontestable, le coup de théâtre de Bertrand Cantat aux victoires de la musique avec sa lettre ultra épicé lu en direct destiné Jean marie messier (ci jointe plus bas)! Mais ce n’est pas tout, la liste est bien plus longue, pas besoin de revenir sur les textes du morceau ‘le grand incendie’ qui en dit long (vu plus haut). On notera simplement que le groupe s’octroie le droit de nommer Vivendi dans le morceau "A l'envers, à l'endroit" alors que l’album sort chez Universal ! « On n'est pas encore revenu du pays des mystères, IL y a qu'on est entré là sans avoir vu de la lumière, Il y a l'eau, le feu, le computer, Vivendi et la terre, On doit pouvoir s'épanouir à tout envoyer enfin en l'air , On peut toujours saluer les petits rois de pacotille , On peut toujours espérer entrer un jour dans la famille , Sûr que tu pourras devenir un crack boursier a toi tout seul , On pourrait même envisager que tout nous explose à la gueule » Un combo alternatif revendicatif, certes mais aussi expérimentateur des mots, des sons, et des sens. Noir Désir, épouse aussi des textes plus introspectifs, un peu dans le même esprit que leur début. « L’appartement » en est une preuve talentueuse, les mélodies s’y apaisent, prodiguant des airs certes plus calmes mais tellement habités, qu’on ne peut que se sentir happé par tant de profondeurs. On remarquera aussi « Des armes », texte interprété par Betrand Cantat, écrit par Léo Ferré qui de son vivant, n'a pas eu le temps de mettre son texte en musique. Nous avons affaire ici à une interprétation admirablement céleste, où la voix de Bertrand Cantat se transforme, juste le temps d’une chanson. On se croirait dans une cérémonie, plantée au milieu d’une cathédrale dont les plafonds seraient béants vers des cieux fiévreux. L’interprétation de Bertrand Cantat est impressionnante, émouvante, bouleversante, et la nappe musicale à peine présente transporte les mots de ce texte ailleurs. C’est une perle rare, un morceau de toute beauté. Exquis. Dans Des visages et des figures, il y a donc les morceaux revendicatifs où le son rock reste un peu plus soutenu même si c’est vrai on est bien loin des décibels électrisées de Tostaky ; on retrouve aussi des morceaux plus introspectifs où les envolées lyriques nous emportent dans des figures de style ingénieuses, et généreuses, flirtant avec des nappes sonores aux atmosphères tantôt pesantes, tantôt bouleversantes, tantôt sensibles… Le style flirte avec une certaine chanson française. La qualité du son mûrit, et les détails dans l’architecture des morceaux deviennent de plus en plus fins. Autant dire que c’est un véritable régal pour nos tympans. Car rien n’est laissé au hasard, que ce soit dans les mots choisis, que dans les notes. Et puis il y a « L'Europe», morceau de 23mn43, interprété par Bertrand Cantat et Brigitte Fontaine. Un morceau absolument hors norme, de part sa construction textuelle, son armature, sa durée… Une ambiance oppressante, des textes lus, taillant dans le vif, comme s’ils étaient issus d’une écriture automatique d’un inconscient dément. Et pourtant, les mots ne sont pas là, choisis par hasard, car quand on creuse dans les paroles, on découvre vraiment des significations très intéressantes. On pourrait comparer ce titre à certain morceau contemporain de Einstürzende Neubauten. Ca dérange pas mal le public, beaucoup ne comprenne pas, ne saisisse ni pourquoi le groupe a choisit le personnage de Brigitte Fontaine, ni pourquoi autant de longueur. Pour ma part je trouve ça, culotté, ingénieux, superbement réalisé, et tellement pertinent. Voici quelques extraits du texte en question "On se relève de ça ? On se relève de tout même des chutes sans fond. Nous avons su monter nous avons su descendre, nous pouvons arrêter et nous pouvons reprendre... Europe des lumières ou alors des ténèbres ; à peine des lucioles dans les théâtres d'ombre. A peine une étincelle dans la nuit qui s'installe et puis se ressaisit, et puis l'aube nouvelle, après les crimes d'enfance, les erreurs de jeunesse on n'arrache plus les ailes des libellules d'or. (…) Amnistie, amnistie ou alors amnésie, qu'est-ce que vous volez que ça foute, de toutes façons il faut bien avancer, pressons le pas camarade et puis réalisons réalisons, il en restera toujours quelque chose allez ! Matérialiste alors ça fait qu'au moins on est sûr de n'pas de tromper, et du tangible alors jusqu'à l'indigestion, du rationnel alors et jusqu'à en crever, des logiques implacables mais toujours pas de sens... (…) . " Quand le groupe avait réussi à décrocher un contrat avec Barclay, il y a quelques années, les rumeurs allaient bon train, on imaginait nos quatre Bordelais happé dans le star System. Aujourd’hui après tant d’années, après tant de combats, après tant d’albums, et de concerts, on peut être certain d’une chose, c’est que Noir Désir a toujours fait ce qu’il désirait, a toujours su rester intègre, a toujours eu beaucoup de créativité, même si des enjeux importants pouvaient leur barrer la route, et même si cela n’a pas plus à tout le monde. Je trouve ça vraiment admirable. En espérant, qu’un de ces quatre matins, ils nous reviennent …
Lettre lue durant les Victoires de la Musique 2002 "Camarade PDG, 666.667 Club ( 1996 )D’abord pour tous les curieux qui se poseraient la question sur la signification du titre « 666, 667 Club » plutôt énigmatique, voici la réponse donnée lors d’une interview (Rock & Folk décembre 1996) «Il y a un logiciel sur l'ordinateur qui te permet de voir quel tempo est sur la maquette, tu tapotes sur le clavier et ça te sort un chiffre. Bien sur, comme des abrutis, on a fait celui qui allait le plus vite. Sergio a été le premier à tomber dessus. (…) Et le club, c'est qu'on a tous réussi à trouver ce chiffre ...Première explication. Ensuite c'est de la symbolique. 666, hein, c'est lourd, on n’aurait jamais pu appeler le disque 666, le chiffre de la Bête… C'est de l'ironie, parce que là, paf, ça décroche sur le sept, qui a une toute autre signification... »
L’Album fourmille d’un tas de significations, d’indications claires sur des faits réels, des références évidentes, des coups de gueule, des revendications, …. Etonnant cette nouvelle écriture à laquelle Noir Désir ne nous n’avait pas forcément habitué. Dans Tostaky, les revendications étaient plus poétisées, et de ce fait, moins certaines. Les textes ici, sont beaucoup plus directs, plus tranchés, et incontestablement beaucoup plus engagés. Attention, la poésie n’est pas pour autant occultée, bien au contraire, les jeux de mots virevoltent, ce sont d’incontestables prouesses littéraires qui en cascades nous étonnent toujours un peu plus, et tout ça, pour notre plus « noir » plaisir. Des paroles remarquables qui, ici prennent cet aspect plus protestataire.
On pourra s’étonner, malgré un pamphlet de récriminations qui laisse en bouche un constat rugueux, et âpre, qu’une nouvelle teinte sucrée colle au palais. Jusqu’ici Noir Désir n’avait pas forcément usé d’optimisme, dans leurs précédentes compositions. Et, ici, cela change assez radicalement (disons qu’ici, l’optimisme, l’espoir est vraiment mis à avant, alors que jusqu’ici on pouvait se poser la question de son existence). Nous voilà donc face à cette nouvelle couleur, un bleu, bleu azur, bleu de l’espoir. Bleu chargé de sens, puisqu’il est la couleur identitaire de la France. Mais il est aussi symbole du ciel, de la mer, de la liberté. Noir Désir, est certes usé, voire désabusé, mais rempli d’espoir, et cela semble assez inédit. Il suffit de voir cette pochette, un ciel où les nuages dégagent la lumière du soleil. A moins que ce ne soit l’inverse ? Les nuages qui attaquent le soleil ? La lecture peut être faite dans plusieurs sens, je pense. A vous de choisir. Ceci dit, il semblerait que la première lecture soit la plus probable puisque, Bertrand Cantat lui-même disait dans une interview réalisée par JC Panek.: « les paroles ne sont pas sombres. (…) Ca peut paraître long mais je peux avouer qu'il y a une première série de compositions qui n'a pas fait l'unanimité au sein du groupe. C'était trop noir, du genre descriptions de dépression... C'était chiant. Il y a eu une autocensure. Ce n'est qu'après que je suis parvenu à trouver un autre équilibre.(…) Parfois, la lumière brille mais loin, très loin et il y a du chemin à faire pouf voir les choses briller... »
Une once de lumière, un peu d’espoir car la cohésion sociale, l’ambiance politique n’est pas à son beau fixe en France et un peu partout ailleurs dans le monde. Oui Noir Désir devient de plus en plus engagé, et ne s’en cache pas. Si l’on s’approche des textes, c’est simple et direct. Prenons par exemple « un jour en France », morceau typique du revirement engagé du combo. « Un jour en France est très subjectif, c'est une impression. (…) Il faudrait réfléchir à la manière d'aborder la suite des événements. (…)Ce n'est pas un constat, c'est encore au-delà de la colère. C'est profondément ressentir cette lâcheté extraordinaire de la majorité de la population et des gens qui ne sont pas loin de toi. C'est chacun pour sa peau, sauver les meubles. Mais nous ne sommes ni des prophètes, ni des professeurs. Ce morceau est sans prétention. C'est l'affirmation de certaines valeurs qui sont galvaudées. Mais égalité n'est pas égalitarisme et fraternité ne veut pas dire tout le monde sur le dos de tout le monde. Et bien qu'ici, nous soyons en collectif, chacun est individualiste. Ces paradoxes jamais résolus sont incontournables. » Propos de Bertrand Cantat.
Noir désir revendicatif, mets le doigt là où ça fait mal, mais reste assez flou dans certaines de ces revendications. Lors d’une interview dans l'humanité, il en sera justement question. « Votre engagement a sans doute un sens. Lequel ? Betrand Cantat répondra : Que la parole ne soit plus confisquée par des professionnels, ceux qui s'en sortent; qu'elle puisse être redistribué à tous ceux qui ont des choses à dire; que les énergies circulent à nouveau: les énergies libertaires, de reconquête d'idées aussi simples que l'égalité des chances, aujourd'hui fondamentalement menacée. Cette reprise de la parole s'impose comme une évidence, tout comme la reprise d'initiative. Notre position découle de cela: on ne veut pas se contenter de jouer notre musique et d'avoir du succès. Cela ne nous paraît même pas envisageable. Le sens est là et repose également sur d'anciennes références: l'égalité des chances, ne pas accepter un certain type de mondialisation, le tout marché, le tout pognon, sans qu'aucune autre idée vienne contrecarrer ce système. Le monde ne peut être géré sans cette idée de partage des richesses, du savoir... Ce que je dis là est assez commun. Enfin, tant mieux si ça le devient... »
Jusqu’ici, j’ai évoqué cette fureur dans les textes, leurs messages et pas forcément la couleur musicale. Paradoxalement le groupe semble s’apaiser un peu, alors qui paraît être de plus en plus habité par des aspirations revendicatrices. Paradoxal… Les mélodies y sont plus travaillées, tout semble beaucoup moins brut que dans Tostaky. A Claude Faber, Bertand Cantat avoua « En fait dans notre création, les ambiances intimistes sont arrivées d'abord. Quand on s'est remis au travail, on est parti sur des trucs très doux. Mais chassez le naturel, il revient au galop. Et on est reparti sur des compositions plus dures, plus électriques. (…) Disons qu'avec Tostaky, on a tout fait à fond. Le son était très très fort. Là on essaie de plus vivre la musique. En fait le dernier est un disque beaucoup plus en nuances. Les accords, les mélodies, même les textes, il y a beaucoup de choses nouvelles. (…) Notre travail, c'est un mélange de tempête et de beau temps.(…). Un morceau comme Les persiennes par exemple, ne se décide pas à l'avance. Et presque tous sont comme ça. » Faut dire que la tournée Tostaky avait laissé le groupe exténué, et que Cantat avait payé cher les excès, en soins intensifs de ses cordes vocales, mises à rude épreuve. Donc, ceci peut expliquer peut être cette tendance à moins d’excès sonores ?
Assurément, cet album ne laisse pas de glace, les réactions de la presse et du public sont assez tranchées. On aime, ou on n’aime pas, mais on ne reste jamais vraiment insensible. Faut dire que l’environnement musical de l’époque battait de l’aile. Le rock n’avait pas du tout le vent en poupe ! Et c’est le moins que l’on puisse dire. Souvenez vous, c’était l’explosion des boys bands, et 2 BE 3 éclatait dans les charts avec leurs chorégraphies bodybuildées huilées. Noir Désir, s’en moquera d’ailleurs, très ironiquement en réalisant le clip d’un homme pressé totalement calqué sur les clips de cette nouvelle mouvance des boys band pré fabriqués.
En outre, 666,667 Club c’est avant tout 13 morceaux, qui nous plongent dans cette ahurissante disparité sonore, tout en restant limpide… C’est aussi ça la magie Noir Désir. Diversité, mais cohésion. On trouve donc, de tout dans cet album, un instrumental "666 667 Club", où les guitares aériennes, les percussions pulsatives, et autres instruments flirtent avec exotisme. On découvre aussi des morceaux apaisés, où le maître mot reste le travail du détail, exemple « Ernestine » avec ses violons du plus bel effet ou même « Septembre, En Attendant » où l’on s’arrête de respirer quelques secondes tellement les notes une à une dégoulinent sur notre échine gelée par tous ces frissons que nous procurent ces paroles sublimes. Idem pour « a la longue ». Dans un tout autre registre « Song for JPL », simple mélodie avec guitare sèche, et chant mi blues, mi survolté façon punk, qui est un hommage curieux et surprenant à ce grand Monsieur Jeffrey Lee Pierce, un songwritter très apprécié par Nick Cave, Henry Rollins, les Red Hot Chilli Peppers, Cocteau Twins, et bien sûr Noir Désir. Et pour les morceaux les plus rentre dedans, évidemment « L'Homme Pressé », « Comme Elle Vient » « Un Jour En France », …
Et voilà… Un album très riche encore une fois autant sur le fond que la forme, où l'aspect revendicatif est mis en avant, sans pour autant estropier la qualité des compositions. Le quatuor bordelais nous émerveille, nous interpelle… à suivre … Dies Irae ( 1994 )Nous sommes en 1994, la tournée Tostaky (qui avait lieu durant l’année 1993) s’est achevée, le groupe en sort totalement épuisé. C’est un peu le « vide » après s’être donné autant, besoin du repos du guerrier en quelque sorte. Cantat a les cordes vocales en vrac, et doit soigner très sérieusement sa gorge qui lui cause de plus en plus de soucis. De son côté Serge Teyssot-Gay vaque à son side project. La période n’est pas vraiment à la composition d’un nouvel album … Alors pourquoi ne pas ravir les fans avec un live ? D’autant plus que cette Idée de live trottait depuis un certain temps dans les pensées du groupe. C’était maintenant ou jamais... D’autant plus que la tournée fût vraiment fameuse ! Voilà qui en dit long sur ce que devait être la fougue de cette tournée… Dies Irae est donc un double live de 22 titres (+ 2 morceaux cachés) qui retrace l’énergie de Noir désir sur scène lors de cette fameuse tournée de Tostaky. De la folie, sans conteste, et on le croit volontiers, vu le contenu sonore de ce live. Même certains critiques compareront le jeu scénique de Cantat aux prestations mythiques de Jim Morisson (Doors) ! C’est pour dire ! Plus concrètement, ce live nous donne comme pourrait le faire une bonne compil, l’étendu des meilleurs morceaux des bordelais, dans une version plus énervée, plus électrique (suite logique à Tostaky). Vous l’aurez compris il s’agit ici des meilleurs morceaux des albums ‘veuillez rendre l’âme », « du ciment sous les plaines » et bien entendu « tostaky » dans une version beaucoup plus enragée, et brute. On y retrouve de l’ancien comme du plus récent , dans une sauce aliénée, et délirante « tostaky », « ici paris », « à l’arrière des taxis », « Marléne », j’en passe et des meilleurs. De plus, le groupe nous fait le plaisir de nous concocter quelques reprises jusque là inédites, qui ne dénotent aucunement avec le reste du répertoire. Ce live pour le coup s’écoute du début jusqu'à la fin, sans accrochage, sans fioriture, tout est limpide, tout est bon, puissant, électrique, fougueux, ardent, pulsatif… On y retrouve un Cantat complètement déchaîné, et on saisi mieux comment ses cordes vocales à la fin de la tournée ont eu du mal à tenir le choc ! Le groupe est immodéré, prodigue, … On regrette juste de ne pas avoir ni l’image, ni la chaleur du concert avec ce son qui laisse imaginer des ambiances surprenantes… On comprend mieux aussi pourquoi ils sont choisis ce nom « Dies irae » qui signifie Jour de Colère. Le combo était là, pour se rendre soir après soir sur scène pour délivrer à tripes ouvertes tout ce qu’ils avaient à donner. C’est encore une fois un Noir Désir franc, généreux, et remarquable que l’on retrouve. A noter aussi deux morceaux cachés « i want you » et « la chaleur » complètement ahurissant tellement ils sont chaotiques, et enragés.
Liste des chansons CD1 Tostaky ( 1992 )Pochette assez concise, avec une tonalité sépia très contrastée, c’est une photographie des quatre membres du groupe à peine reconnaissable, car ils sont de dos, le tout en plan rapproché. Assez étonnant, voire même surprenant à prime abord, il est rare de se montrer sous cet angle. Serait ce une façon de montrer combien il conteste les dictats établis par Madame Industrie du disque ? … allez savoir … En tous les cas, nous voilà bel et bien face au nouvel album de Noir désir, qui semble afficher dés le début le contre courant, et le paradoxe. Encore une fois Noir Désir surprend …. Cet album tout en restant dans une lignée logique d’un Noir Dez, donne au groupe une nouvelle apparence plus aboutie, plus déterminée même. On retrouve bien évidemment les ingrédients qui font la patte d’un Noir Désir, le chant en anglais, espagnol, et bien sur en français, chanté, braillé, murmuré. Cantat encore une fois nous prouve qu’il jongle avec les mots avec autant d’arrogance, et de contenance. Les vrombissements de ses cordes vocales balancent tantôt du froid, tantôt du sublime, tantôt de l’insupportable, tantôt du lourd de sens surtout quand il s’attaque sans relâche au politiquement tendancieux. C’est même déconcertant autant de proses sophistiquées, et subtiles sur des thèmes aussi difficiles. Le fond a autant d’impact que la forme. Des mots radicaux, pour des thèmes incroyables. Tostaky est indubitablement un joyau, sincère, franc, tout y est vrai, brut, et sans conteste. Les thèmes chiadés, la texture rugueuse électrique n’est pas pour me déplaire, la poésie, la fougue et la spiritualité. Tout est en paradoxe. Tendre et énervé. Un bouquet d’émotions impérissables. Du ciment sous les plaines ( 1991 )Voilà un album trop sous estimé, trop méconnu dans la carrière de Noir Désir, d’ailleurs à l’époque de sa sortie, la presse l’avait plutôt mal accueilli, pour certains c’était un album trop déraillé, trop brut, trop électrique, trop bruyant, voire trop brouillon. Ah ben oui, qu’est ce vous croyez messieurs dames, c’est que nous sommes loin de la mélodie de « aux sombres héros de l’amer… ». Ici pas de ‘tube’ à matraquer sur les ondes FM,… C’est la déception la plus totale pour nos pauvres amateurs de tubes sortis à la chaîne, puis matraqués, et remâchés. Noir Désir est malheureusement un vrai groupe de rock n’ roll, avec de vrais morceaux incisif à l’intérieur, qui décrasse à grands coups, les pauvres petits tympans effarouchés. Ah ! Ah ! Ah ! Je pense surtout que les critiques de l’époque n’avaient sûrement jamais du prendre le temps d’écouter en entier « veuillez rendre l’âme à qui elle appartient », et n’avaient écouté que le ‘tube’ sortant, sans vraiment chercher à comprendre plus loin, pour pouvoir être déçu à ce point. Enfin… On beau dire, nous avons affaire ici à un groupe vraiment hors norme, qui n’a pas envie de se mouler à quoi que ce soit. Et la cohérence entre « veuillez rendre l’âme à qui elle appartient » et « du ciment sous les plaines » n’est pourtant pas si lointaine bien au contraire… Dans ce nouvel album, Noir Désir reste toujours aussi majestueux, aussi prodigieux , catégoriquement plus fou, c’est vrai, beaucoup plus tarés, plus impulsif, plus enragé, plus expérimental. D’ailleurs il affiche simplement et clairement la couleur. Le rouge. Veuillez Rendre l'âme (à qui elle Appartient) ( 1989 )« Veuillez rendre l'âme à qui elle appartient », péripéties énigmatiques, histoires obscures, aventures célestes, infernales, acides, voire même corrosives, nous voilà immergé pour sûr dans du Noir Désir grand cru, qui fait mal, mais qui apaise un peu. L’écoute passe, minute après minute, heure après heure, mois après mois, année après année, ces litanies, ces maux, ces climats, ces pressions repassent et trépassent dans une mélodie écorchée vive, exutoire, à feu et à sang, sans s’essouffler. Soupirant des vagues abruptes d’un rock raillé emprunté à des post punks éreintés, flirtant avec un Boris Vian des temps moderne, ou mélange d’un Bashung métamorphosé en Arno, qui déferlerait de part et d’autres de ses tripes alors déraillées, des horreurs mais toujours si humaines. Sans doute l’un des premiers tournant dans le rock français « énervé » (dans tous les sens du terme). D’ailleurs l’album sera le premier grand moment de consécration pour le groupe grâce au titre "Aux sombres héros de l'amer". C’est simple… Nous sommes à peine en 1989, Noir désir passe en boucle dans les radios, et tout le monde connaît ce refrain ‘aux sombres héros de l’amer… » … Et même si certains ne saisissent sûrement pas toute la tragédie de ce morceau, Noir Désir pulvérise le TOP 50 de l’époque. Ce morceau, c’est vrai, reste très fort sur plusieurs plans, ceci dit, à mon humble avis il ne relate pas tout ce que cet album a de magique, de tragique, de poignant, et de sulfureux. (…) Puisqu'on se lasse de tout, Pourquoi nous entrelaçons-nous ? Pour les écorchés vifs, On en a des sévices, Allez enfouis-moi, Passe-moi par dessus tous les bords, Mais reste encore, Un peu après, Que même la fin soit terminée, Moi j'ai pas allumé la mèche. C'est Lautréamont, Qui me presse, Dans les déserts, Là ou il prêche, Ou devant rien, On donne la messe, Pour les écorchés. Serre-moi encore, Étouffe-moi si tu peux, Toi qui sais ou, Après une subtile esquisse, On a enfoncé les vis... Nous les écorchés vifs. On en a des sévices. Oh mais non rien de grave, Y'a nos hématomes crochus qui nous, Sauvent, Et tous nos points communs. Dans les dents, Et nos lambeaux de peau, Qu'on retrouve ça et là, Dans tous les coins, Ne cesse pas de trembler, C'est comme ça que je te reconnais, Même s'il vaut beaucoup mieux pour toi, Que tu trembles un peu moins que moi. Emmène-moi, emmène-moi. On doit pouvoir, Se rendre écarlates, Et même, Si on précipite, On devrait voir, White light white heat (…) Veuillez Rendre l'âme (à qui elle Appartient) ( 1989 )Veuillez Rendre l'Ame (à qui elle Appartient) : Second jet et premier coup de maître pour un groupe qui n'en avait que faire. Dix comme vingt ans plus tard, malgré les coups du sort et en dépit d'une séparation à présent actée, la flamme des bordelais brûle de la même énergie brute que celle qui les animait à l'origine. Cet album à la fois d'une importance capitale et à part dans la discographie d'une formation atypique et parmi les plus remarquables que le Rock et la Chanson française aient connu en est le principal combustible. |
Noir Desir
Style : Rock Tags : Rock Origine : France Site Officiel : noirdez.com Site Officiel : noirdesir.org Amateurs : 431 amateurs Facebook : |