No Spill Blood
Cyber / Synth Punk / Noise

Heavy Electricity
1) White Out
2) Back To The Earth
3) Now Ii
4) El Duurto
5) Harsh Route
6) Heavy Electricty
7) Thinner
8) Sweet Beans
9) Endless Drift
Chronique
A l'heure où les derniers méfaits de Carpenter Brut et Perturbator - les deux énormes sensations Horror Synth consacrées par moult tops en 2014 - n'en finissent plus de conquérir le monde à coup de sueurs froides nerveuses et bien senties au delà de leur sphère d'influence supposée, ceux-ci auront aussi eu pour conséquence indirecte de remettre du sel sur une plaie jamais tout à fait refermée pour quelques music-nerds ayant grandi musicalement dans les années 2000: Genghis Tron n'a plus émis un son depuis sept ans. Sept putain d'années durant lesquelles le vide laissé par les (derniers?) grands gourous de la cause du détournement de synthétiseurs n'a cessé de grandir, faute d'avoir vraiment pu retrouver le frisson originel ailleurs. Les Américains ne sont hélas pas de retour en 2015 mais le premier No Spill Blood, pourrait en revanche bien être ce que vous trouverez de plus convaincant dans ce genre (mal défini) depuis un bail, quelque part à la croisée des chemins des projets évoqués précédemment.
Sans atteindre les sommets de violence et de dinguerie des productions de ses aînés US, il faut dire que le trio irlandais ne laisse que très peu de place au doute: le temps de "White Out", bûcheronnage Synth/Noise-Rock du plus bel effet, l'affaire est entendue. L'incongruité sonore de Heavy Eletricity est dès lors avérée et fonctionne instantanément ou ne fonctionnera probablement jamais. Bien que l'alliance basse/synthé/batterie convoquée ici n'ait rien d'absolument révolutionnaire en soi, le vocabulaire musical de No Spill Blood reste aujourd'hui encore assez improbable, peu nombreux étant les groupes s'étant vraiment aventurés en terres Cyber depuis une petite éternité. Les ingrédients restent globalement les mêmes, partagés entre synthés (haut-)perchés, virulence sonore hypertrophiée et volonté d'appuyer avec insistance là où ça fait mal mais NSB choisit d'épurer un tantinet la recette pour l'adapter à sa main et force est de constater que la mixture prend plutôt très bien.
Peut être un peu empêtré dans l’auto-caricature foutraque à la limite du supportable que devient Abedisi Shank au fil des disques (This Is The Third Album Of A Band Called Adebisi Shank?... vraiment?!), Lar Kaye semble trouver ici en compagnie de ses deux acolytes un cadre d'expression à la mesure de la folie incontrôlée qui consume la créativité de son groupe principal. Déclamations viriles et accélérations Noise Punk ("Harsh Route"), Synthwave féroce et épique ("Back to the Earth"), passages à tabac Noise ("White Out", "El Duurto", Sweet Beans"), Heavy Electricity cogne large mais dur avec une constance, une tension et une consistance surprenantes. Solidement tenues par des atmosphères anxiogènes que n'aurait probablement pas renié le sieur Carpenter (l'original) à ses grandes heures ("Heavy Electricity") et l'énergie foutraque des antiques groupes Synth-Punk et Minimal-Synth de la première moitié des 80's, les compos de No Spill Blood s'en vont taquiner les 6 minutes à plusieurs reprises sans rien perdre en intensité. Bien au contraire, même, le groupe parvenant à force de revirements (gros travail de Lar Kaye) et d'empilements sonores à instiller une densité presque physique à ses morceaux tout à fait raccord avec des thématiques aussi réjouissantes que les troubles mentaux, le mal-être ou la mythologie Lovecraftienne.
Arrimé à ses ambiances comme à une ligne de vie et propulsé par une production en béton faisant autant la part belle aux vociférations et noiseries en tous genres qu'elle lui permet de développer ses compositions plus en subtilité ("Thinner") le power-trio parvient à présenter un premier disque aussi solide que singulier qui résiste étonnamment bien aux écoutes. A défaut de vraiment savoir sur quel genre de plateau faire jouer ses auteurs hors de leur Irlande natale, Heavy Electricity, pourrait lui rapidement se trouver une place au chaud au cœur de quelques discothèques pour s'y offrir de belles séances de rotation sur platine en attendant la suite. C'est en tout le cas tout le mal que l'on peut souhaiter à cette sympathique équipe de doux dingues.